vendredi 23 mars 2012
La révolution française 2.0 avec françois Hollande ?
La France connait une situation qui n'est pas sans rapeller ce qu’à connu Louis XVI quand il essayait désespérément de réformer le vieux royaume vermoulu. Louis "Capet" n’ignorait rien de l'ètat des finances royales mais sans pouvoir y changer quoi que ce soit, tellement les opositions étaient fortes.
Le blocage systématique des réformes est le problème politique majeur de son règne, le déficit croissant en est le problème économique principal. Le coût des travaux publics de modernisations (des routes par exemple) et l'endettement lié à la guerre (soutien aux États-Unis) rendent cruciale la question de la dette. Or, là aussi le roi pense qu'elle ne peut être résorbée que par de grandes réformes écornant certains privilèges.
Nicolas Sarkozy a décidé d’axer sa campagne de premier tour à droite pour dessouder les électeurs de Marine Le Pen. Face à la manœuvre du Président en exercice, François Hollande a opté pour une ligne très à gauche, plus axée sur le centre de gravité du parti socialiste, très proche de la ligne de Martine Aubry, destinée avant tout à renforcer sa gauche vers l’électorat de Jean-Luc Mélenchon.
La campagne du candidat socialiste laisse augurer une stratégie économique de début d’éventuel quinquennat, en rupture avec la politique actuelle calée sur la ligne générale européenne de sortie de crise par la réduction des déficits et le renforcement de la compétitivité des entreprises. Ce qui ne laisse pas au demeurant d’inquiéter les principaux partenaires de la France. Marquant une rupture avec les primaires, François Hollande manifeste ainsi la volonté de se soustraire au cadre général de la politique européenne ou du moins d’en desserrer la contrainte. D’abord en récusant les accords signés par le président de la République au titre de l’intégration progressive des politiques budgétaires de la zone euro. Ensuite en dissociant la politique budgétaire de sa composante compétitivité, par le choix de faire peser la résorption des déficits moins sur la réduction des dépenses – abolition de la TVA sociale, fin de la politique de réduction des effectifs de fonctionnaires, création de 60.000 postes d’enseignants – que sur le durcissement de la fiscalité de la partie de la population déjà la plus contributive au système. Ainsi les singularités de la politique française de prélèvements obligatoires – sur-taxation du capital et du travail qualifié, sous-taxation de la consommation – tels que la Cour des comptes les a mises en évidence, seraient encore accentuées par une administration socialiste.
L'impôt juste, c'est l'impôt payé par les autres
D’une manière générale, les dirigeants socialistes voient dans la réduction des déficits étalée sur un calendrier plus étiré que celui du gouvernement Fillon, et l’alourdissement des prélèvements sur les contributeurs nets au système qui se recrutent en dehors des électorats socialistes, le moyen d’éviter les réformes pouvant contrarier la fidélisation de leurs clientèles électorales. Les dirigeants socialistes sont parfaitement conscients que les titulaires des plus hauts revenus sont précisément ceux qui disposent des moyens d’« optimiser » la charge fiscale, c’est bien sur les classes moyennes supérieures que les hausses futures d’impôt pèseront.
Au-delà d’une conception en trompe l’œil de la doctrine fiscale socialiste, les dirigeants PS amplifient l’erreur foncière de stratégie économique poursuivie par la France. Les effets « keynésiens » supposés de stimulation de la croissance dus au gonflement continu des dépenses publiques devraient placer la France en tête des champions du monde de la croissance. On sait ce qu’il en est !
Les mêmes causes produiront les mêmes effets sur une France qui a déjà l’apparence d’une grande Grèce. Le risque existe alors par le jeu des anticipations des marchés qu’une administration socialiste se trouve exposée à une augmentation significative des primes de risques sur la dette française, se substituant ainsi aux mécanismes anciens d’écartement des taux de change.
Il importe de souligner qu’un gouvernement socialiste, n’ayant comme l’aurait dit Chateaubriand, ni rien appris ni rien oublié, aura tôt fait de se retrouver dans la situation de François Mitterrand sommé de choisir après trois dévaluations du franc entre 1981 et 1983, entre une sortie du système monétaire européen (SME) et la trahison des électeurs par la soumission aux règles européennes de politique économique.
Absolutisme politique impuissant à faire des réformes
Dans l’immédiat, cette stratégie ne défavorise pas François Hollande comme le montrent les sondages, jusqu’au jour où les électeurs centristes cesseront de se reconnaître dans une posture étrangère à leur culture politique.
C’est à nouveau au prix d’une trahison électorale que la mue réformiste sera possible si jamais elle est entreprise. Elle aura toujours le goût de la soumission aux réformes venues d’ailleurs, ce qui lui vaudra une impopularité immédiate.
La France d’aujourd’hui n’est pas sans rappeler celle de la fin d’Ancien régime. La situation financière de l’Etat est assez proche de celle de la France d’alors. La situation politique aussi : un absolutisme politique impuissant à faire des réformes car soumis aux titulaires de rentes. Et le risque d’aujourd’hui est bien de voir les Français opter pour un nouveau Louis XVI, certes conscient de voir la France courir financièrement à la banqueroute mais impuissant à venir à bout des privilèges. Un Louis XVI coiffé certes d’un bonnet phrygien, car croyant conjurer les périls par une phraséologie révolutionnaire, mais entraînant le pays malgré lui vers l’effondrement.
En 1900, le leader socialiste Jean Jaurès, jugeait Louis XVI « indécis et pesant, incertain et contradictoire » ; l' Histoire a retenu l'image d'un souverain faible et imprévoyant, prisonnier des intrigues de cour, naviguant au jugé, sans pouvoir jamais peser sur le cours des choses.
Mais à l’âge moderne, c’est vers la destinée de la Grèce que la France risque de se voir entrainée faute d’entreprendre les réformes qu’imposent les périls. Pas celle de Périclès, celle de Papandreou.
source : debateco