Face au vertige d'une science conquérante. Que devient l'humanité?
«Les formes primitives d'intelligence artificielle que nous avons déjà se sont montrées très utiles. Mais je pense que le développement d'une intelligence artificielle complète pourrait mettre fin à l'humanité. (…) Une fois que les hommes auraient développé l'intelligence artificielle, celle-ci décollerait seule, et se redéfinirait de plus en plus vite. (…) Les humains, limités par une lente évolution biologique, ne pourraient pas rivaliser et seraient dépassés.» Professeur Stephen Hawking (1)
Depuis son avènement à la vie et ce que l'on appelle la civilisation dans son sens le plus large et pas dans le sens restrictif que lui assigne la doxa occidentale se voulant seule dépositaire du sens, l'homme n'a cessé d'évoluer, de muer, d'apprendre et de tenter de comprendre le monde aidé en cela par une science conquérante qui lui donne la fausse certitude prométhéenne que l'éternité était à sa portée. Dans cette réflexion je veux faire partager aux lectrices et lecteurs ma vision inquiète d'une façon de vivre qui va trop vite- en tout cas pour moi- et qui dans le même temps, démolit par pans entiers mes certitudes, voire ma culture et ma vision du monde. Est-ce que nous sommes sortis de l'histoire nous qui sommes taxés de vouloir arrêter la machine du «progrès» et dans ces conditions au nom d'un eugénisme non écrit? C'est ça la vie: circulez y a rien à voir! Ou bien, tous ensemble, jeunes et vieux, habitants du Nord ou du Sud, les pauvres comme les riches nous sommes à un tournant de la condition humaine. Certes, les conquêtes de la science sont à saluer – on vient par exemple, d'annoncer la découverte des ondes gravitationnelles, ce qui nous donne une perspective sur ce qu'a dû être la première onde gravitationnelle générée par le big bang- mais ne devons-nous plus que jamais ériger des garde-fous éthiques pour protéger la condition humaine? Quelques exemples édifiants qui peuvent être regardés comme des prouesses scientifiques, posent, dans le même temps des défis éthiques. L'intelligence artificielle incontrôlée: la disparition de notre espèce ? Ce nouveau siècle a vu une accélération des sciences Nbic (Nanotechnologie, Biotechnologie, Informatique, Sciences cognitives), notamment celle de l'intelligence artificielle où le mot vivant est de plus en plus galvaudé du fait de son attribution aux machines. Le terme s'oppose alors à «vivant»: les objets ne sont pas animés, ils ne sont pas en vie. Ils ne méritent pas le traitement particulier qu'on réserve aux vivants et en particulier celui qu'on réserve aux personnes humaines. A côté de ces avancées somme toute utiles pour l'humanité et pour le bien-vivre. Après le coeur artificiel, il se murmure que c'est au tour du cerveau de quitter le monde organique pour rejoindre celui de l'artifice. Le cerveau pourrait être composé de neurones en nanotubes de carbone, selon des chercheurs américains. Toute médaille a son revers. Un site intéressant liste les technologies dangereuses pour l'humanité. Nous les résumons ici sans oublier naturellement l'intelligence artificielle Il est de ce fait évident, malgré les assurances des apprentis sorciers, il nous faut faire très attention. Les conséquences de certaines avancées peuvent constituer un danger pour la condition humaine. Pour Ray Kurzveil de Google en charge des Nbic et du transhumanisme chez Google lors d'une annonce en juin 2013 lors du Global Furures 2045 International Congress à New York qui avait pour but de présenter le monde de 2045, il a été indiqué que l'humanité connaîtrait dans les années à venir, une croissance technologique totalement nouvelle et largement supérieure à celle que l'on connaît aujourd'hui plus connue sous le nom de «Singularité technologique». Ce concept tend à l'immortalité digitale, en conservant l'intelligence et le cerveau de l'homme pour l'éternité. (2) Imaginons que des robots développent une super intelligence. Un peu comme l'ordinateur de la société IBM qui Deep Blue qui a battu pour la première fois un homme au échecs et non des moindres, il s'agit du champion du monde des échecs. En effet perdant un match en 1996 (2-4) contre le champion du monde d'échecs de l'époque Garry Kasparov, Deep Blue (bat le champion du monde (3,5–2,5) lors du match revanche en 1997. Ce sera un tournant. Ce fut ensuite une autre performance. Un ordinateur a réussi à passer le test de Turing et donner le change à un collège d'expert en se faisant passer pour un enfant…
Le génie génétique face au risque eugéniste Une autre inquiétude est la percée spectaculaire du génie génétique et de ses dérives probables. Au-delà de l'aspect scientifique et de ses retombées pour l'humanité, il ne faut pas exclure à la fois la dimension mercantile, mais aussi l'ivresse prométhéenne qui veut qu'on peut donner la vie et la trafiquer comme on veut à l'instar des dernières expériences en Chine où les dimensions éthiques dit-on ne sont pas du même ordre que celles qui prévalent en Occident. Florence Pinaud nous décrit la nouvelle humanité qui se profile à un horizon proche. Manipulations génétiques en Chine, thérapies géniques en Europe et aux Etats-Unis… Malgré le risque de dérives éthiques, la recherche fait des pas de géant dans l'amélioration du génome humain. Les technologies génétiques, qui posent de nombreuses questions éthiques, sont en train de révolutionner les pratiques médicales.
L'enzyme CRISPR-Cas9 pat qui la fin de l'humanité pourrait arriver Il y a trois ans, les scientifiques Emmanuelle Charpentier (France) et Jennifer Doudna (USA) ont découvert une molécule capable de remplacer facilement des séquences d'ADN, y compris sur les cellules reproductrices. Avec l'enzyme CRISPR-Cas9, modifier l'ADN de n'importe quel être vivant devient presque aussi simple qu'un copier-coller. En avril 2015, un groupe de chercheurs chinois annonce avoir réalisé des essais sur des embryons humains, dans le but de réparer le gène responsable d'une maladie sanguine héréditaire. Jennifer Doudna a commencé à s'inquiéter des usages possibles de cette enzyme en 2014, Elle a déclaré à la revue scientifique Nature: «Il m'a semblé incroyablement effrayant qu'il puisse y avoir des étudiants qui travaillent sur une telle chose. Il est important que les gens commencent à comprendre ce que cette technologie peut faire.» (4) Dans une lettre ouverte Emmanuelle Charpentier la co-découvreuse de la technique avec Jennifer Doudna de la méthode CRISPR-Cas 9 -que l'on peut résumer comme une paire de ciseaux qui façonne les gènes, les déplace, les change à la demande, Bertrand Louart, menuisier-ébéniste écrit:
Une création de peau avec une imprimante 3D Rien n'arrête encore une fois le progrès. On apprend qu'il est possible de créer un tissu humain .Poietis, une jeune société française développe une technique d'impression 3D de tissus humains grâce au laser. « Il s'agit de marier les technologies d'impression 3D et la biologie cellulaire afin de fabriquer, couche par couche, des tissus biologiques », résume Fabien Guillemot, ancien chercheur à l'Inserm et fondateur de la start-up en 2014. Car l'impression tridimensionnelle, qui permet la création d'un volume par l'empilement de couches, a ouvert de très nombreux champs d'expérimentation, notamment pour les chercheurs travaillant sur le vivant. « C'est pour cela que nous avons d'abord travaillé sur la peau, c'est une vraie opportunité de développement », Dans cette perspective, la reproduction d'organes dans le cadre d'une médecine toujours plus personnalisée ne semble plus une chimère. Derrière la révolution technologique se profile un vertigineux questionnement éthique. « Nous nous sommes posés une limite », précise sans détour Fabien Guillemot : «Nous nous bornons à la réparation des tissus et non leur augmentation ou leur amélioration ». (5) espérons qu'ils tiendront parole ! Une greffe de tête réalisée chez le singe Dans le même ordre de l'hybris de la «démesure». Inspiré par l'orgueil du mythe prométhéen, la greffe d'une tête de singe sur le corps d'un autre a été réalisée en Chine, après quantité de greffes réussies de têtes de souris.
A priori on peut regarder cela comme une prouesse une de plus dira-t-on d'une science de plus en plus performante qui nous promet de produire ce que l'on veut. On à peine à imaginer le comportement de quelqu'un qui décide de changer de corps en gardant toute sa tête. Une tête d'un jeune sur le corps d'un vieux. C'est à coup sûr une seconde jeunesse qui s'offre. Ce vertige peut aussi concerner celui qui veut transférer son cerveau dans un nouveau corps complet et là les transhumanistes nous disent que d'ici 30 ans on pourra télécharger le contenu du cerveau. Que deviennent alors les notions éthiques de corps de personnalités de parenté ? Les questions seront sans réponses en absence d'éthique que d'aucun voit comme un frein à la science. Moratoire et garde-fous éthiques : Faut-il moraliser ces recherches ? Apparemment les gardes fous sautent un à un imitant les Chinois qui prennent de l'avance On apprend ainsi, que le Royaume-Uni brise le tabou de la recherche génétique sur l'embryon humain en annonçant lundi 1er février avoir autorisé des scientifiques à manipuler génétiquement des embryons humains dans le cadre de recherche médicale. On le voit, rien n'arrête le progrès, mais peut-on parler de progrès quand l'humanité telle que nous la connaissons risque de disparaitre sous les coups de boutoir d'une science sans éthique et qui a réduit les religions à leurs derniers retranchements n'ayant pas de réponse à opposer. On sait que les appels à la raison éthique partent d'un bon sentiment, mais on ne peut écarter l'intérêt.
Le Désenchantement du Monde En son temps Max Weber avait parlé de désenchantement du monde (Entzauberung der Welt) c'est-à-dire : « le recul des croyances religieuses et du monde concept est étroitement lié aux idées de sécularisation et de modernité. Une perte de sens, voire d'un déclin des valeurs censées participer à l'unité harmonique des sociétés humaines (religion, idéaux politiques et moraux, etc.). Ce désenchantement peut être connoté positivement en tant que sortie du monde de la superstition, ou bien négativement comme constituant une rupture avec un passé harmonieux. (8) Cette expression du récit mythique de l'âge d'or, du paradis perdu tient d'une certaine façon de la nostalgie (c'était mieux avant dirions nous, au risque d'être traités de has been) Le désenchantement a repris de plus en plus du service avec souvenons nous la fin du XXe siècle qui a vu ce que Jean François Léotard avait appelé la fin des grands récits de légitimité. (communisme, socialisme, ) et dans le même ordre les récits religieux (christianisme judaïsme et islam ) Nous rentrons plus que jamais dans une ère de désenchantement durable qui annoncerait la fin de la civilisation formatée par les récits religieux qui nous a fait quitté le monde merveilleux de l'inconnu voire l'inconnaissable ce que l'on appelle en arabe al ghaïb du domaine du divin. L'une des prouesses qui m'a le plus impressionné est la réussite consistant grâce à un exosquelette tenté de faire marché un paraplégique. Les progrès sont de plus en plus palpables ces dernières années sur les interfaces neuronales. La dernière en date : « Un groupe de personnes paralysées vont recevoir un implant cérébral de la taille d'une allumette. Baptisé « stentrode », il doit leur permettre de manœuvrer un exosquelette grâce aux ondes cérébrales. Fait d'un alliage de nickel et de titane, ce dispositif peu invasif sera implanté dans un vaisseau sanguin à proximité du cortex moteur. Testé avec succès sur des moutons, il va faire l'objet d'un essai clinique dès l'année prochaine » (9). Maintenant que les supposés miracles sortent à la chaine des laboratoires, quand Jésus dit à Lazare le paraplégique : « lève toi et marche ! » la dimension mystique qui est derrière cette phrase ne résiste pas à une science qui nous dit que tout est possible et qu'il n'y a pas de limite. Où va l'humanité? Devant un consumérisme sauvage, une course au profit, l'éthique sera de plus en plus «oubliée». Nul doute que l'humanité s'enfonce en aveugle sans évaluer les conséquences qui problématisent la condition humaine. Nous faisons des expériences nous qui sommes dans l'éprouvette. Il n'est pas interdit de penser à une sélection qui ne sera pas naturelle. L'eugénisme c'est-à-dire la façon d'éliminer les faibles physiquement ou ayant une tare physique ou psychique a de tout temps existé. Il y eut même en août 1912 un Congrès international sur l'eugénisme, à Londres C'était 30 ans avant les massacres de masse du IIIe Reich. Déjà pour l'histoire il faut savoir qu'à la fin du XIXe siècle, les États-Unis avaient déjà interdit le mariage pour les arriérés mentaux, les alcooliques et les personnes atteintes de maladies vénériennes. En 1907, l'Indiana est le premier État à adopter des lois sur la stérilisation des «inaptes» et des «indésirables». Suivront en 1909, Washington, le Connecticut et la Californie, puis en 1911, le Nevada et l'Iowa. S'agissant de l'immortalité promise dans trente ans, elle n'aura pas les aspects actuels. Les trans-humanistes nous promettent le téléchargement d'un disque dur de tout ce qui existe dans le cerveau. Bienvenue dans le monde d'Orwell où les bien-nés, les riches et les puissants resteront immortels. Les autres resteront esclaves et serviront continuellement de variable d'ajustement. A trop jouer avec le feu, on risque de perdre ce qui est notre patrimoine le plus précieux: notre humanité. Chems Eddine Chitour 2.Chems Eddine Chitour http://www.alterinfo.net/L-intelligence-artificielle-incontrolee-Une-arme-qui-pourrait-detruire-l-humanite_a112134.html#6PulsqSk 8AFuuIpp.99 4. https://sniadecki.wordpress.com/2015/10/15/louart-crispr-cas9/ 7.http://www.lemonde.fr/sciences/article/2015/11/30/le-genie-genetique-face-au-risque-eugeniste_4820662_1650684.html# 3TpZLWhjQWxzKDvg.99 8.Le Désenchantement du Monde : Encyclopédie Wikipédia 9.Marc Zaffagni : Cet implant bionique pourrait faire remarcher des personnes paralysées Futura-Sciences 12/02/2016 2 commentaires RÉAGIR
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