mardi 17 novembre 2020

Le confinement de la France est-il trop sévère ?

Même si nous sommes au pic hospitalier de cette seconde vague et que le gouvernement vient de prolonger le second confinement, un tel questionnement est utile. Dans une démocratie mature et fonctionnelle, un tel débat devrait avoir lieu sereinement. Un reportage très intéressant d’Arte sur les Français, Allemands et Suédois face à la crise pose beaucoup de très bonnes questions. � Débat oublié et oubli des sacrifiés   Bien sûr, dans nos sociétés largement à l’abri des catastrophes mortelles de masse, cette pandémie est un choc violent. Comme au printemps, le nombre de morts en fait, pour quelques semaines, la première cause de mortalité dans notre pays, alimentant une psychose, renforcée par une présentation très discutable et infantilisante des chiffres. Cette année, notre pays comptera plus de 50 000 décès liés au coronavirus, sans compter tous ceux qui auront été hospitalisés ou qui en garderont des séquelles. Malheureusement, ce bilan est aussi celui de la faillite complète de notre gouvernement. Si on glose beaucoup sur la gestion effarante de Donald Trump, à l’heure du compte, le nombre de victimes se rapproche de part et d’autre de l’Atlantique, une fois les statistiques ramenées à la taille de la population.   Il y a des raisons structurelles : des années de sous-investissement et de réductions des capacités d’accueil à l’hôpital, qui ne nous donnent pas les moyens d’accueillir un afflux soudain de patients. Le gouvernement y a ajouté un manque criant d’anticipation, pour les masques, les tests, les équipements, et même les médicaments. Avec l’envolée des cas et des morts, le gouvernement français a pris le parti, en mars comme cet automne, d’imposer à notre pays un des confinements les plus stricts, autoritaires et infantilisants du monde, fermant une grande partie des commerces et imposant une attestation pour sortir de chez soi, à rebours de l’approche d’autres pays. Pour Die Zeit, qui parle d’« Absurdistan autoritaire Â», il est paradoxal d’avoir un tel bilan sanitaire et un dispositif aussi contraignant.   Bien sûr, les partisans d’un confinement dur peuvent dire que, sans ces mesures, le bilan serait plus élevé. Mais ce raisonnement est un peu court. D’abord, les comparaisons internationales ne le confirment pas : trop de contraintes infantilisantes peuvent avoir des effets pervers. Ensuite, il y a aussi, et heureusement, des exceptions : écoles, travail, transports, supermarchés… Jamais à une fausse-vérité près, les ministres tentent de minorer leur importance, affirmant que seulement 1% des contaminations auraient lieu au travail et 1% seulement aussi dans les transports… Plus globalement, se pose la question de l’usage abusif de l’état d’urgence, qui permet de se passer de l’avis du parlement. Pourtant, de tels arbitrages entre santé, économie et liberté devraient au contraire imposer un véritable débat, d’autant plus que les conséquences très dures des confinements sont tous les jours plus évidentes…   Cela est d’autant plus nécessaire que derrière la présentation partielle et partiale des chiffres de l’épidémie, il faut aussi prendre du recul sur la dangerosité de ce virus. The Economist a publié un bilan mondialqui montre bien qu’il est quasiment sans danger pour les moins de 25 ans (taux de mortalité inférieur ou égal à 0,02%), assez peu pour les moins de 50 ans, et que le taux de létalité serait de 2,5% pour les 65-79 ans et 10,9% pour les 80 ans et plus. Et encore, il s’agit de chiffres globaux, qui ne distinguent pas ceux qui présentent des facteurs de comorbidité des autres. En effet, le risque est nettement moins important pour les personnes en bonne santé. Il n’est pas inutile de rappeler qu’en France, 50% des décès concernent des personnes de plus de 84 ans et 80% des personnes de plus de 75 ans. Et 80% des patients de plus de 90 ans s’en tirent selon les chiffres de Santé Publique France.   Mais face à un virus qui frappe durement surtout des personnes âgées et en mauvaise santé, doit se poser la question de la mesure des restrictions imposées pour limiter la circulation du virus. D’abord, outre le caractère extraordinairement arbitraire des mesures prises en France, quel est l’apport du confinement par rapport à l’addition d’un couvre-feu, de protocoles sanitaires stricts dans les commerces, et d’un appel au civisme ? Les dégâts du confinement sont clairs, mais ce qu’il apporte ne l’est pas autant, au regard du bilan de notre pays par rapport aux autres. Ne faudrait-il pas également cibler les personnes à risque de manière plus différenciée pour limiter l’impact pour tous les autres ? Il est tout de même malheureux que dans le pays des Lumières, ce débat n’ait pas davantage lieu. Plutôt que d’agir comme s’ils étaient sûrs d’eux, les dirigeants actuels gagneraient à permettre un vrai dialogue.   Bien sûr, le gouvernement ajuste ses mesures pour réagir aux protestations des uns et des autres, comme la fermeture des rayons dits non essentiels des supermarchés. Le soutien accordé aux annulations de loyer a été amélioré (passant de 30 à 50% du loyer de novembre pour les indépendants, et à un tiers pour les chaines), mais ce dispositif, certes mieux conçu et plus important, vient bien tardivement et reste toujours optionnel et à la main des bailleurs. En outre, il semble acquis que rien ne restera fait pour la première vague... En somme, le coût de la fermeture d’une si grande partie des commerces apparaît gigantesqueau regard d’un bénéfice pas si clair. Combien de vies ruinées ? Combien d’emplois détruits, dans un pays comme le nôtre, qui n’en avait vraiment pas besoin ?   Plus globalement, cette crise sanitaire montre que la recherche de l’intérêt général n’est pas évidente face à une telle menace. Et il est malheureux que ce gouvernement et trop de média aient choisi de faire peur plutôt que de favoriser un débat non seulement légitime en démocratie, mais nécessaire pour adopter la bonne réaction face à cette crise. Aujourd’hui, la France et les Français semblent perdants à tous les niveaux : mauvais bilan sanitaire, mauvais bilan économique et mauvais bilan pour nos libertés.
http://dlvr.it/Rlrq3S

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