Quand Bill Gates propose une taxe sur les robots
C'est un paradoxe qui a été trop peu noté dans les média : Bill Gates, le milliardaire fondateur de Microsoft a déclaré être favorable à une taxe sur les robots, une des idées phares de Benoît Hamon. Naturellement, les ultra-libéraux se sont insurgés de cette idée, qui, pourtant, pose de très bonnes questions sur l'avenir de l'emploi et le financement des dépenses publiques.
Automatisation et intérêt général
Bien sûr, les ayatollahs du laisser-faire ne manquent pas d'évoquer les calèches pour caricaturer ceux qui refusent le laisser-faire. C'est pour cela qu'il est intéressant d'écouter Bill Gates, que l'on ne peut pas vraiment soupçonner d'un quelconque passéisme. Pour le fondateur de Microsoft, « un robot qui détruit un emploi doit être taxé », de manière à protéger les recettes fiscales qui permettent d'aider les personnes âgées, les malades ou les handicapés. Une idée d'autant plus actuelle que de nombreuses études disent que 10 à 15% des emplois pourraient être menacés par l'automatisation, alors même que subsiste un fort chômage ou sous-emploi dans tellement de pays.
Bien sûr, il ne s'agit pas de refuser le progrès technologique, qui peut nous épargner des tâches dures, nous permettre de prendre soin de nous, mais aussi créer de la richesse. Il peut servir la condition humaine. Mais, aujourd'hui, ce progrès n'est pas guidé par la recherche d'une meilleure condition humaine pour tous, il l'est uniquement par la quête du profit, quel qu'en soient les conséquences sociales. Après tout, dans un contexte de chômage élevé, pourquoi faudrait-il laisser faire certaines destructions d'emplois. C'est pour cela que je suis favorable à l'interdiction temporaire des caisses automatiques, qui pullulent aux péages ou dans les magasins, sujet qui avait interpellé Joseph Stiglitz.
Bien sûr, certains pointeront la robotisation du Japon, la Corée du Sud et l'Allemagne. Mais cela doit être mis en perspective : ces trois pays ont un fort excédent commercial industriel, et pour les deux premiers, cela repose sur du protectionnisme. Le cas de l'Allemagne est complexe. D'abord, l'euro est sous-évalué pour le pays (de 21% par rapport à la France selon le FMI), ce qui a soutenu l'envolée de son excédent commercial depuis la fusion monétaire européenne. Ensuite, si le chômage est bas en Allemagne, c'est par la combinaison d'une faible natalité et de salaires si bas qu'il y a proportionnellement plus de pauvres outre-Rhin qu'en France. A quoi bon avoir tant de robots s'il y a tant de pauvres ?
Et c'est pour cela que se pose la question de la fiscalité. Bien sûr, une taxe spécifique sur les robots, serait typique de nos politiques, qui produiset un labyrinthe légal favorisant les plus forts, seuls à même d'exploiter toutes les opportunités offertes par cette jungle. Mais cela pose la question du financement de la protection sociale, qui, en reposant sur les salaires, pénalise les emplois humains par rapport aux machines. Ici encore, une forme de Cotisation Sociale sur la Valeur Ajoutée, jumelée à la TVA, ferait sans doute du sens. Plus globalement, un meilleur équilibre entre la fiscalité du travail et du capital sera critique, alors même que le second ne cesse d'être favorisé, pour l'IS ou les particuliers.
L'automatisation, comme la globalisation anarchique posent de vraies questions sur notre système fiscal, qui ne cesse d'être adapté aux désirs des grandes multinationales, sans que nos dirigeants ne semblent saisir l'énorme injustice de leurs choix, et leur contribution à l'explosion des inégalités. Plus qu'une taxe sur les robots, je crois à une révolution fiscale, permise avec une reprise de contrôle de nos frontières.
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