mercredi 20 avril 2016

Le discours totalitaire des bureaucrates qui nous dirigent

Le discours totalitaire des bureaucrates qui nous dirigent




Le Fonds monétaire international a publié le 12 avril un rapport semestriel expliquant qu'une sortie de l'UE du Royaume-Uni après le 23 juin prochain provoquerait « des dommages sévères au niveau régional comme au niveau mondial », et que le référendum en lui-même « est déjà source d'incertitude pour les investisseurs. » Les prévisions du FMI sont-elles fiables ou faut-il y voir une opposition idéologique ?

LH : avant même de rentrer sur le fond, le rapport du FMI pose de nombreux problèmes. Il est tout de même délicat que des bureaucrates prennent une telle position, éminemment politique, et soutiennent de facto un camp contre l'autre. Au moins, les britanniques savent comment voter pour déplaire à ces bureaucrates qui nous gouvernent… Ensuite, faire du premier argument « l'incertitude pour les investisseurs » montre bien le centre de gravité du monde que contribue à construire le FMI depuis des décennies. Pour que cela tourne rond, il faut faire ce que les investisseurs souhaitent. Quel terrible aveu !

Ensuite il est tout de même culotté de faire du Brexit une des raisons de la mollesse de la croissance, alors même que ce constat est fait depuis la sortie de la grande crise financière de 2008-2009. Ce n'est pas le Brexit qui a fait que la croissance a été décevante de 2010 à 2015 ! Cet argument est d'autant plus absurde que justement, en 2016, les perspectives de croissance dans l'UE sont les meilleures depuis 2010. Et puis, il faut aller page 27 du rapport du FMI pour avoir un peu plus d'explication, un petit paragraphe dérisoire guère argumenté, et sans la moindre justification factuelle.

Bien sûr, les négociations seraient délicates, mais l'UE a des relations économiques avec des pays non membres depuis longtemps. Si l'entrée dans l'UE est complexe, la sortie n'est-elle pas simple ? Après tout, la déconstruction des contraintes européennes a toutes les chances d'être progressives et assez lente car Londres a vécu, et accepté, la plupart des contraintes avec lesquelles elle vit aujourd'hui. Bien sûr, il y aurait des incertitudes, mais le FMI n'apporte pas la moindre preuve selon laquelle la sortie d'une telle alliance aurait des conséquences néfastes. Bref, il faut surtout y voir une opposition idéologique.

Le 12 avril, le président du Parlement européen, Martin Schulz, s'est exprimé sur LCI au sujet du référendum aux Pays-Bas, estimant que « les gens votent sur n'importe quoi, mais très rarement sur le sujet du référendum ». Cette analyse reprend-t-elle celles qui avaient cours en 2005 au sujet du Traité constitutionnel européen ? Est-ce à dire qu'en 1992, lors du référendum sur le traité de Maastricht, les électeurs ont voté oui sans comprendre qu'ils acceptaient l'euro et un certain nombre de transferts de compétence vers l'UE ?

Les eurocrates expriment trop souvent un snobisme aux relents totalitaires contre la démocratie. Si les électeurs ne suivent pas leurs souhaits, ce serait toujours pour de mauvaises raisons. D'abord, je suis convaincu que le vote des citoyens lors des référendums est au contraire plein de bon sens. En 1992, ce sont les Français se déclarant de droite qui ont voté « non » à Maastricht, dans un débat dominé par la question de la souveraineté nationale, leg du gaullisme. En 2005, c'est plutôt la gauche qui a voté « non » dans un débat dominé par le caractère antisocial de cette Europe.

En Hollande, les électeurs ont sanctionné un accord, qui, s'il n'était qu'un petit pas vers l'intégration de l'Ukraine, n'en était pas moins un petit pas. Et quand on connaît cette Europe qui fonctionne justement par petit pas, il n'était pas surprenant que les néerlandais refusent le tout premier. Les Européens veulent arrêter l'élargissement. En fait, les eurocrates ont un comportement et un discours très totalitaires puisqu'ils refusent d'écouter les opinions différentes des leurs, puisque tout vote qui va à l'encontre de leurs idées est forcément un vote pour de mauvaises raisons.

Aux Pays-Bas, 64% des votants ont rejeté l'accord d'association entre l'UE et l'Ukraine. Au Royaume-Uni, malgré une importante campagne gouvernementale à l'encontre du Brexit, 46% des Britanniques y seraient favorables (contre 43% qui y sont opposés). Comment analyser le décalage qui existe entre les élites au pouvoir et la volonté des peuples ?

On peut voir trois raisons principales au décalage grandissant entre les élites et le peuple. D'abord, le manque de considréation, pour ne pas dire le mépris, d'une partie des élites vis-à-vis du peuple. Ses déclarations ne font qu'entretenir cela d'ailleurs. Le mépris maintes fois exprimé par les eurocrates contre les référendums ne fait sans doute que renforcer l'hostilité des peuples contre le machin européen.

Et cela s'explique également par le bilan de cette tour de Babel européenne. Tout nouvel accord est l'occasion de nouvelles promesses de lendemains qui chantent suivies d'une déception. Avec le bilan qui est le sien depuis trois décennies, comment s'étonner que l'UE suscite le rejet des électeurs ? Elle n'a rien apporté de positif à l'immense majorité des peuples européens. En revanche, elle leur impose de très nombreuses contraintes, l'austérité, des contributions à des plans qui ne marchent pas, l'imposition de quotas de migrants, sans prendre en compte les spécificités nationales, et aucune protection contre les dommages de la globalisation, des délocalisations à la désertion fiscale des multinationales.


Dernière raison : le décalage grandissant entre les élites et les classes populaires, la montée des inégalités et le fait qu'élites et classes populaires vivent des vies de plus en plus séparées : le divorce politique est en partie la conséquence d'un divorce social et d'un divorce dans la vie de tous les jours.

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