dimanche 5 mai 2013

Pourquoi Le discours du Bourget de François Hollande fut une immense tromperie


Par Raoul Marc Jennar

Il faut absolument lire et faire lire « L’étrange capitulation » de Laurent Mauduit (Éditions Jean-Claude Gawsewitch). 
Voici un livre qui décrit et explique comment le changement promis n’a pas eu lieu et n’aura pas lieu. Parce qu’au-delà des discours de campagne électorale, il n’y a jamais eu de volonté de changer. Une affirmation qui peut paraître surprenante. Même pour quelqu’un qui observe attentivement la politique française. Et pourtant, une analyse méticuleuse de ceux dont s’entoure le candidat Hollande et qui, sans se soucier du programme préparé par le PS, façonnent ses choix, un examen attentif des choix effectués par le président Hollande au cours de sa première année d’exercice du pouvoir, confirment cette affirmation.

Dans le même temps où il prononçait son chaleureux discours du Bourget qui créait l’espoir à gauche, Hollande décidait qu’une fois élu, il ferait le contraire. Car, à côté de la campagne publique qui exprime une rupture avec l’ère Sarkozy, il y en une autre qui s’inscrit dans la continuité et dont on n’a guère rendu compte. Et pour cause. Elle aurait conduit à l’échec. Petit rappel. En septembre 2010, dans son livre numérique «Parlons de la France», Hollande reprend à son compte le discours de Jospin sur « l’État qui ne peut pas tout », en particulier sur l’impuissance affichée alors par un premier ministre socialiste face aux licenciements boursiers. Ce livre est en fait le véritable programme néo-libéral du candidat qui souligne notamment la nécessité d’augmenter la durée des cotisations au fur et à mesure qu’augmente l’espérance de vie.


Par la suite, il ne cessera de tenir des propos sur la fiscalité, sur la nécessité de remettre les finances publiques à flot et de ramener le déficit public à 3 % du PIB dès 2013. Lorsqu’il réunit des économistes en août puis en novembre 2011, l’assemblée est dominée par des gens qui ont servi Nicolas Sarkozy, par des gens qu’on retrouve tantôt à droite, tantôt dans l’entourage de personnalités du PS, mais qui servent toujours la même idéologie et les mêmes intérêts. Bon nombre ont participé aux travaux de la Commission Attali créée par Sarkozy, dont les conclusions recommandaient des mesures de déréglementation économique et sociale. Celui qui s’affiche comme un ennemi de la finance prépare sa présidence avec les pires agents de la finance. On oublie aussi qu’Hollande, avant les élections de 2012, a fait en sorte que soit ratifié le Mécanisme Européen de Stabilité, ce FMI européen qui transfère de nouveaux pouvoirs importants à des organes européens échappant à tout contrôle démocratique.

Le discours du Bourget fut une immense tromperie


Mais, on entend souvent de braves socialistes dire qu’il faut laisser du temps au temps et qu’un an c’est trop court pour apprécier la présidence « de gauche ». C’est ne pas voir les choix décisifs de Hollande qui, contrairement à ce qu’on fait croire, a fait, dès son arrivée à l’Élysée, des choix clairs qui vont tous dans le même sens : celui d’un authentique libéralisme économique, d’une adhésion pleine et entière aux contraintes du marché. Dès son élection, Hollande met en œuvre la politique de son prédécesseur : ratification du pacte budgétaire négocié et signé par Merkel et Sarkozy, rapport commandé à Gallois sur la compétitivité des entreprises et le coût du travail pour faire accepter le pacte de compétitivité qui va suivre (20 milliards d’allégement d’impôt par an pour les entreprises et ensuite les 50 agressions contre le Droit du travail), austérité salariale avec une « revalorisation » du smic qui correspond à 20 centimes d’euro par jour. Tout cela décidé, à peine élu sur les promesses du Bourget.

Et puis, il y aura l’abandon de Florange « sans que le gouvernement ait un seul instant cherché à utiliser les armes législatives qui étaient à sa disposition », comme l’explique Mauduit. En 1984, Delors, ministre des finances, avait abrogé la loi de 1945 qui séparait banque d’investissement et banque de détail. Avec l’engagement n° 7, Hollande promet de rétablir cette séparation. Il n’en est rien et la loi, préparée par un Moscovici au service du Medef, ne concerne que 2 % des activités bancaires. Quant à la banque publique d’investissement, elle fut, selon la volonté de Moscovici, préparée par un homme de la banque Lazard, concepteur de la calamiteuse banque Natixis. Elle est dirigée par un adepte des privatisations. C’est un gigantesque flop.

L’inventaire que fait Laurent Mauduit, le « procès-verbal » comme il l’intitule, n’est pas terminé. Il aborde ensuite l’abandon de la grande réforme fiscale promise par le PS et son corolaire la poursuite de l’inégalité devant l’impôt, l’abandon du Droit de vote des étrangers aux municipales (engagement n° 50), la chasse aux Roms, la république des copains où les oligarques (Jouyet, Pigasse, and Co) qui ont servi hier Sarkozy servent aujourd’hui Hollande pour garantir la permanence de la même politique dans le plus total mépris pour la question sociale. Comme le Mitterrand d’après 1983, comme le Jospin d’après 1999, Hollande donne à voir, mais lui sans attendre, dès son entrée en fonction, « le visage du manquement à la parole donnée et même du mensonge, celui du cynisme et du calcul. » Certes, pour l’observateur attentif, ce ne fut pas une surprise. Le livre de Jean-Luc Mélenchon écrit en 2007 alors qu’il était encore membre du PS, « En quête de gauche », analysait parfaitement, de l’intérieur, la dérive droitière du PS et de la social-démocratie européenne. Et le rôle décisif de Hollande dans ce processus. Aujourd’hui, le livre de Mauduit rapporte des faits qui ne sont pas contestables. Il s’agit d’un constat honnête, sans animosité, sans le désir de polémiquer. Un état des lieux qui doit provoquer le débat.

Voici un livre qu’il faut recommander à chaque électeur de Hollande. Un livre que tout citoyen qui partage les valeurs de gauche doit offrir à l’ami socialiste qu’il ne manque pas d’avoir dans ses relations. Parce qu’il ne faut pas se voiler la face. L’échec du PS, ce sera la souffrance de tout le peuple de gauche. Et ce que Hollande prépare, et avec lui le PS, c’est un nouveau 1993, pire, un nouvel avril 2002. Et l’arrivée de politiques d’une droite extrême qui fera presque regretter Sarkozy.


 http://www.altermonde-sans-frontiere.com/spip.php?article22920

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Comment oser qualifier la politique de François Hollande de libérale ?
Toujours plus de règlements, de lois, d'interdictions, d'obligations, de prélèvements, de taxes !
Cette politique est belle et bien une politique de gauche qui, comme toute politique de gauche, mène le peuple à la pauvreté et à l'asservissement.
Certes, Hollande laisse une part réduite au mercantilisme de copinage, ce qui apparait pour les esprits tordus être du libéralisme.
Pauvres esprits tordus !