vendredi 17 août 2012

L’intervention en Syrie : un échec avant même d'avoir débuté




Des dizaines de milliers de soldats nécessaire !
L’évaluation que rapporte Reuters, ce 17 août 2012, porte d’une façon spécifique, non sur une intervention étrangère en Syrie de type “classique”, mais sur une intervention qu’on jugerait “partielle”, pour s’assurer des armes chimiques et biologique syriennes. Mais, compte tenu des circonstances actuelles, on doit considérer qu’il s’agit du cas typique d’une intervention “étrangère” (dito, du bloc BAO) en Syrie, selon un processus d’engrenage qui s’envisage presque automatiquement. Pour l’instant, toute possibilité d’“intervention humanitaire” (terme convenu) pour assurer une no-fly zone, avec ce que cela suppose d’ambiguïtés, est hors de question en raison de la situation opérationnelle et de l’incapacité des “rebelles” de préparer le terrain à une telle possibilité. Le cas envisagé est celui de l’urgence et porte sur la sureté des armes chimiques et biologiques, et il présuppose l’hypothèse agitée et chaleureusement souhaitée depuis longtemps par le bloc BAO de l’effondrement du régime Assad. C’est dire si nous sommes dans le champ théorique par rapport à la vérité de la situation. Cette option d’urgence implique effectivement une intervention d’abord pour s’assurer le contrôle des armements chimiques, ce qui suppose également un rétablissement de l’ordre et un contrôle de la situation, au moins d’une partie du pays (là aussi, il s’agit d’un aspect complètement hypothétique, quant à l’extension des zones devant être contrôlées).

Le scénario du pire
Reuters indique que des discussions secrètes ont lieu entre alliés (bloc BAO) et pays limitrophes de la Syrie pour ce cas d’une invasion, le “worst-case scenario”. Il n’y a aucune précision concernant les pays éventuellement impliqués dans une telle opération théorique.

«A U.S. official, speaking on condition of anonymity to explain the sensitive discussions, said the United States still had no plans to put boots on the ground in Syria. […] “There is not a imminent plan to deploy ground forces. This is, in fact, a worst-case scenario,” the official said, adding U.S. forces would likely play a role in such a mission.

»Two diplomatic sources, also speaking on condition of anonymity, said as many as 50,000 or 60,000 ground forces may be needed if officials' worst fears are realized, plus additional support forces. Even a force of 60,000 troops, however, would not be large enough for peacekeeping and would only be the amount required to secure the weapons sites – despite some of the appearances of a Iraq-style occupation force, the diplomatic sources cautioned… […]

»While there is no complete accounting of Syria's unconventional weapons, it is widely believed to have stockpiles of nerve agents such as VX, sarin and tabun. The U.S. official said there were potentially dozens of chemical and biological weapons sites scattered around the country. Securing them could not be left to an aerial bombing, which could lead to the dispersion of those agents, the official said. “There could be second-order effects that could be extremely problematic,” the official said of aerial bombing.»


Les armes de destruction massive (encore!)
Le scénario nous est présenté comme celui de la sûreté de ces armes dites de “destruction massive” (ADM), donc un scénario limité même si c’est le pire envisagé (“worst-case scenario”). Il est tout à fait raisonnable d’envisager qu’un tel scénario conduirait nécessairement à une extension graduelle de l’engagement, ne serait-ce que par la pression des circonstances puisqu’il s’agirait d’une Syrie plongée dans le chaos ; les pressions, humanitaires et autres, seraient très fortes pour approfondir l’engagement et étendre la mission à un rétablissement de l’ordre et à l’établissement d’une nouvelle structure d’État, selon illusions et les thèses inteerventionnistes en cours dans les pays di bloc BAO. Notre “worst-case scenario” à nous, ce serait donc le “worst-case scenario” concernant les ADM, étendu aux autres aspects du chaos dans le pays, et donc conduisant cahin-caha, mais plutôt vite, vers une intervention totale. C’est dire si l’hypothèse des 50.000-60.000 hommes est une hypothèse minimale pour un engagement conséquent, – ce que laissent d’ailleurs entendre les diplomates consultés.

On voit donc dans quelles limites les planificateurs raisonnent… Les 50.000-60.000 hommes de l’option minimale du “worst-case scenario” figurent les forces sur le terrain, chiffre qu’il faut donc au moins tripler pour y inclure toutes les structures de soutien logistique en tous genres. Un élargissement de la mission impliquerait un renforcement à mesure des forces impliquées, conduisant à un doublement, sinon plus, de ces forces qui seraient effectivement engagées. Cela signifie des engagements majeurs de pays limitrophes autant que de forces de pays BAO plus lointains, et, également, des USA, pour une mission qui ne serait plus très loin d’approcher les engagements en Irak et en Afghanistan. Le cœur de la mission restant la sûreté des ADM, il y aurait en effet une nécessité de participation de forces US (et israéliennes), par les exigences de ces pays pour le contrôle direct de ces armes. D’autre part, en fonction des chiffres avancés, il y aurait également une nécessité de participation importante des forces turques notamment, et il se existerait des problèmes potentiels entre les Turcs et les Israéliens dont les rapports restent très tendus. C’est une question qui est rarement évoquée, mais la concurrence entre Turcs et Israéliens, depuis la rupture de 2009, subsiste et porte, du côté israélien, sur tous les efforts possibles pour que les forces turques soient le moins possible équipées d’armes “spéciales”, dont les ADM syriennes font partie.

Ainsi commence-t-on à mesurer ce que serait une intervention en Syrie si elle avait jamais lieu… Pour cette raison, on mettra l’accent essentiellement sur ce “jamais”, dans un sens prévisionnel, tant les conditions envisagées vont conduire tous les participants éventuels et leurs chefs militaires à accentuer encore leurs efforts pour tenter par tous les moyens d’écarter la nécessité d’une intervention. Certaines déclarations commencent à montrer, involontairement, la considération secrète qui pourrait sans doute exister de plus en plus nettement, que l’insupportable gouvernement Assad, qui doit tomber tous les matins, qui aurait déjà du tomber depuis longtemps, serait finalement aussi bien là où il est pour assurer la sécurité de ces choses (les ADM notamment) qu’on ne voudrait pas voir se répandre dans la nature ou entre des mains finalement incertaines ; ainsi est-il finalement étrange, ou bien moins étrange qu’il n’y paraît, d’entendre le porte-parole de la Maison-Blanche (à propos de cette planification en cours) faire une déclaration où il admoneste le gouvernement Assad pour qu’il assume avec brio et sérieux ses responsabilités de gouvernement : «In addition to monitoring their stockpiles, we are actively consulting with Syria's neighbors – and our friends in the international community – to underscore our common concern about the security of these weapons, and the Syrian government's obligation to secure them…»
Dedefensa.org : Avant d’exister, l’intervention en Syrie est déjà un bourbier

Mis en ligne le 17 août 2012 à 12H18



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