mercredi 12 avril 2017

Mélenchon et le trouillomètre des « marchés »

Mélenchon et le trouillomètre des « marchés »

Le chantage des banksters sur notre dette n'est pas une fatalité, la preuve ils ne font qu'appliquer la loi et se servir de ses failles, tout ce que les traders attendent c'est qu'on légifère....

En attendant....

L'apparition de Jean-Luc Mélenchon dans le trio de tête des sondages a réveillé les investisseurs. "Les Echos" titrent sur "le nouveau risque français". Mais si le programme de la France insoumise est bien un épouvantail pour les possédants, la peur qu'il suscite est un peu exagérée par les commentateurs. Démonstration avec BFM Business.

Il faut écouter Nicolas Doze. Depuis la retraite de Jean-Pierre Gaillard, il n’y a pas mieux que ses chroniques sur BFM Business (honorable chaîne d’info que Marianne ne refuse pas de fréquenter à l’occasion), pour prendre le « pouls des marché ». C’est toujours clair, percutant, même si ouvertement libéral, et caressant l’auditeur de la station dans le sens du portefeuille. Il y manque hélas la musique d’Offenbach dans la Belle Hélène, pour chanter comme le roi Menelas : « Je suis le pouls des marchés, pouls des marchés, des marchés financiers… » Hélas le chant des marchés, ce n’est pas du Homère.

Ce que dit Nicolas Doze le 10 avril est simple : un nouvel épouvantail est apparu sur les marchés financiers : « l’anticapitalisme ». Au détour du week-end et des derniers sondages, les « marchés » -mot qui désigne en fait les gestionnaires de comptes des institutions qui gèrent les placements et l’épargne, banques, fonds de pensions et autres - ont soudain réalisé que Jean-Luc Mélenchon existe. Jusqu’à présent il ne faisait que peupler un décor de théâtre où seuls les gens « sérieux » comptent. En clair : Fillon, Macron et Le Pen. La « percée » de la France insoumise est venue réveiller une peur qui semblait remisée au fin fond des inconscients de ces gens : celle du rouge.

Nicolas Doze a noté avec une petit effroi la formule de Méluche : « Je vais faire les poches des riches !». Comment, un partageux pourrait apparaître dans le paysage politique, contester la troisième place au chouchou des riches, Fillon ? Halte-là ! Doze nous sort donc la boîte à gifles, en fait un résumé du programme de la France insoumise, en mettant l’accent sur ce qui peut le plus impressionner son public : le salaire maximum, 4 à 5% d’inflation, la dette déclarée illégitime, un programme à 273 milliards, des dépenses publiques supplémentaires, des hausses d’impôts, une tranche à 100%, une renégociation des traités européens… voire la sortie de l’euro ! Conclusion : « L’idée qu’on peut faire de la croissance grâce à un Etat central et la dépense publique résiste ! » Incroyable, il y a encore des gens pour ne pas penser comme Nicolas ! Notons que l’argumentaire est très proche de celui de Dominique Seux sur France Inter ce même matin…

Enfer et damnation

Comme « les marchés » ne s’embarrassent pas de nuances, Mélenchon est mis sur un pied d’égalité avec Marine Le Pen. D’ailleurs l’effroi maximal est atteint à l’évocation d’une « hypothèse proprement incroyable, un duel Mélenchon Le Pen ». « Tous deux sont souverainistes, protectionnistes, anti-européens » Enfer et damnation sur la France dont « plus de la moitié de la population est séduite par une offre qui dit que la terre est plate ! » Pour le reste des programmes, circulez, cela n’intéresse pas l’investisseur qui ne pense que pour ses placements et n’aurait « plus de doute alors sur l’issue finale ». Et BFM Business d'apporter la preuve que ça chauffe : « Des entreprises sont en train de mettre en place des plans de déménagement de leurs sièges en une quinzaine de jours. Avant la mise en place d’un contrôle des changes ». Lesquelles? On ne saura pas.

Nicolas Doze ne trompe pas ses auditeurs, même s’il les caresse dans le sens du poil. Les investisseurs, qui ont beaucoup de dette française (215% du PIB français si l’on additionne la dette publique et la dette privée, soit environ 4700 milliards d’euros) dans leurs caisses, redoutent une victoire d’un candidat qui remettrait en cause le consensus politique qui veut que la France honore les intérêts de sa dette rubis sur l’ongle et dans une seule monnaie, l’euro. Dans le cas contraire, la valeur des créances sur la France serait dévaluée à la fois de la nouvelle parité du franc par rapport aux autres monnaies de référence, mais aussi par les suites qu’un « défaut » de la France entraînerait - soit le déclassement de ses emprunts - contraignant la plupart des institutions comme les fonds de pension, les assurances etc., à les revendre rapidement, puisque leur réglementation les oblige à ne pas garder ce genre de « papier pourris » dans leurs comptes. Dans ce cas, la dépréciation pourrait être considérable.

Du coup, au moindre signal politique laissant entrevoir une victoire d’un « souverainiste » ou d’un « populiste », les traders qui rachètent les emprunts en euros (c'est presque une monnaie d'échange internationale) demandent une « prime de risque » plus importante. Cela se traduit dans l’écart (spread) des taux d’intérêts entre l’emprunt allemand à 10 ans, le plus sûr (dit-on) et l’emprunt d’Etat français. Au dernier pointage, la fièvre mélenchonienne avait poussé l’écart jusqu'à 0,7 point. C’est-à-dire assez peu. Ce que Nicolas Doze reconnaît puisqu'il parle de « signaux faible ». Autrement dit, « les marchés » n’ont pas (encore ?) le trouillomètre au maximum. Mais comme « les marchés » sont moutonniers, ils ont d’autant plus la trouille qu’on leur fait peur…

 

Source : Marianne.net

Information complémentaire :

Crashdebug.fr : Je ne sais pas pour qui voter en 2017

URL: https://www.crashdebug.fr/actualites-france/13488-melenchon-et-le-trouillometre-des-marches

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