dimanche 9 octobre 2016

Ce que Washington, Tokyo et Londres disent de la zone euro

Ce que Washington, Tokyo et Londres disent de la zone euro




A chaque pays, sa monnaie

Bien sûr, les fédéralistes ne manqueront pas de sauter sur l'occasion pour dire que si la monnaie unique ne fonctionne pas, c'est parce que nous ne serions pas allés assez loin dans l'intégration. Mais cet argument tombe un peu à plat après les refus fermes de l'Allemagne d'aller plus loin dans bien des domaines, comme les euro-obligations (qui ne se feront pas du vivant d'Angela Merkel, selon ses propres termes) ou le départ à venir de la Grande-Bretagne qui montre que l'évolution que va suivre l'UE n'est pas forcément vers plus d'intégration, mais potentiellement la désintégration. D'ailleurs, Joseph Stiglitz dresse une liste si longue de conditions pour faire fonctionner la monnaie unique qu'il finit par reconnaître que l'improbabilité d'une telle évolution et finit par préconiser le démontage de l'euro.

D'ailleurs, le FMI a récemment publié une étude sur la valeur que devrait avoir l'euro, en concluant que cela varie, fortement, par pays. L'euro est sous-évalué de 15% pour l'Allemagne, et surévalué de 6% pour notre pays. Il faudrait rééquilibrer la parité France-Allemagne de la bagatelle de 20% ! Rien d'illogique au regard des balances commerciales, qui suggèrent cette conclusion. Mais, ce faisant, on peut voir dans la cherté de l'euro pour notre pays une des raisons qui pénalise notre économie. Une seule parité monétaire ne convient pas à des pays aussi différents que ceux qui forment la zone euro. En clair, la France devrait dévaluer, de même que la Grèce, l'Espagne ou l'Italie, une façon de faire monétaire qui, après tout, fonctionnait bien mieux que cette monnaie taille unique aujourd'hui.

En outre, qui dit monnaie nationale, dit possibilité de mener une politique monétaire indépendante, dans le sens des intérêts du pays. La Grande-Bretagne en a donné un exemple éclatant il y a deux mois, quand la Banque d'Angleterre n'a pas hésité à venir au secours de l'économie britannique, comme elle le fait depuis des années, apportant un petit stimulant monétaire pour effacer les conséquences des craintes des marchés du fait du Brexit. Malheureusement, ce que Londres peut faire, Athènes ne peut plus le faire, après avoir lié son sort monétaire à celui de la zone euro. En fait, avoir sa propre monnaie permet de réagir en temps réel, quand on voit bien que cela est totalement impossible à l'échelle d'une zone euro paralysée par ses différences et ses intérêts contradictoires, qui sont là pour durer.

Le Japon donne également un bon exemple de ce qu'un pays peut faire monétairement, notamment depuis l'élection de Shinzo Abe, qui démontre l'intérêt de garder le contrôle sur la banque centrale. Même si son bilan est souvent contesté, par des jugements à courte vue (sur une statistique trimestrielle, ou en oubliant qu'il faut mettre en rapport l'évolution du PIB du pays à celle de sa population), en fait, même The Economist reconnaît que son bilan est bon. Et le Japon relativise le discours austéritaire prédominant en Europe car le pays, malgré une dette publique à 250% du PIB et un déficit à 5% du PIB, mène plan de relance sur plan de relance car sa banque centrale rachète à rythme accéléré la dette publique, au point d'un détenir pas moins d'un tiers aujourd'hui, chiffre qui devrait atteindre 55% fin 2018 !


La monnaie unique européenne, c'est non seulement une taille unique imposée à des pays beaucoup trop différents pour cela. Mais c'est aussi une construction baroque qui met les pays en conflit, freinant donc les décisions et ne permettant pas aux pays européens d'utiliser pleinement l'arme monétaire, si ce n'est trop tardivement et de manière trop mesurée. Voilà pourquoi il faut la démonter.

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