Le temps qui s'est écoulé depuis le 11 septembre 2001 n'a pas diminué la méfiance que beaucoup d'entre nous ressentent à l'égard de la version officielle concernant l'organisation des attentats, et surtout, la question de qui les a financés et soutenus. Onze ans plus tard, le temps est venu pour les familles des victimes, les survivants et tous les Américains de savoir ce qu'il y a vraiment derrière le 11-Septembre.
Pour commencer, la question au sujet de qui a pu aider les 19 pirates de l'air et faciliter les infrastructures ayant permis les attaques - un élément fondamental - reste ouverte. Les fragments que nous possédons soulignent tout ce qui reste encore inconnu.
Les pirates de l'air ont-ils agi seuls ou ont-ils bénéficié du soutien d'autres puissances que celles connues des leaders d'Al-Qaïda - un réseau équivalent qui leur aurait fourni fonds, assistance et couverture ?
Il ne s'agit pas de faire la chronologie des attentats. C'est aujourd'hui une question de sécurité nationale.
Si les terroristes disposaient alors d'un réseau de soutien, pourquoi devrions-nous penser qu'il a été démantelé ? Il est peut-être toujours actif, capable de soutenir Al-Qaïda ou l'un des nombreux groupes extrémistes haïssant les Etats-Unis.
C'est aussi une question de justice. Des milliers d'Américains, qui ont souffert d'intolérables pertes, se sont vu refuser leur droit à recourir à un tribunal, soit parce que les autorités n'ont pas rassemblé les preuves, soit parce qu'elles les ont classifiées "secret d'Etat".
Dés le début de la Congressional Joint Inquiry, l'enquête parlementaire sur le 11-Septembre, il a paru peu plausible que les pirates de l'air - dont la plupart ne parlaient pas anglais et ne s'étaient jamais rendus aux Etats-Unis - aient pu réaliser seuls ce complot abominable. Les investigations ont montré la justesse de ces soupçons, et un chapitre de 28 pages dans le rapport est consacré aux sources de soutien étranger pour certains de ces terroristes quand ils étaient aux Etats-Unis. Mais ce chapitre reste censuré, son accès refusé aux Américains.
Hélas, ces 28 pages ne représentent qu'une fraction des preuves de la complicité saoudienne que notre gouvernement continue de cacher au public, sous forme d'un programme de classification tronquée, qui semble surtout faire partie d'un effort systématique pour protéger l'Arabie saoudite de la responsabilité de ses actions. Ainsi, avec presque huit ans de retard, la CIA a enfin répondu aux demandes du Freedom of Information Act (FOIA) au nom des familles du 11-Septembre, faites en 2004, concernant des rapports et documents cités dans les notes du rapport final de la Commission sur le 11-Septembre. Malheureusement, quand cela concerne des documents tels les 16 pages d'un rapport de la CIA intitulé "Soutien financier saoudien pour les organismes terroristes", c'est le gouvernement, et non la commission, qui a rédigé le texte.
Malgré une campagne orchestrée avec soin visant à protéger nos "amis" saoudiens, des preuves importantes de liens intimes entre l'Arabie saoudite, Al-Qaïda et le 11-Septembre, ont été mises en lumière. Le directeur exécutif de la Commission sur les attentats, Dr. Philip Zelikow, a ainsi déclaré en 2007, que, bien qu'à cette époque l'implication "d'agents du gouvernement saoudien" n'ait pas encore été établie : "Il y a des éléments probants quant à l'existence d'un possible réseau de soutien."
Les renseignements selon lesquels existaient à l'époque des réseaux étrangers de soutien, autres qu'Al-Qaïda, au sein même des Etats-Unis, et que ces réseaux étaient reliés à l'Arabie Saoudite, restent plus que jamais d'actualité.
Voici quelques pièces du puzzle.
Beaucoup de ce que nous savons, nous l'avons appris grâce à l'énergie et la compétence d'enquêteurs externes, d'officiers de police locaux et d'Etat, de journalistes et d'auteurs, et d'avocats de plaignants. En résumé :
Agissant souvent contre l'avis du FBI, la Congressional Joint Inquiry a permis d'en savoir beaucoup sur un réseau de soutien basé à San Diego, en Californie. Là-bas, un homme nommé Omar Al-Bayoumi, que le FBI avait identifié comme un agent saoudien avant même le 11 septembre, a aidé directement les deux futurs pirates de l'air Nawaf Al-Hazmi et Khalid Al Mihdhar. Ces deux citoyens saoudiens, qui arrivèrent aux Etats-Unis à peine dix jours après avoir participé à une réunion de terroristes, furent en première ligne de l'opération sur le territoire américain. Bayoumi, un "employé fantôme", était soi-disant payé par une entreprise saoudienne. Son salaire fictif fut multiplié par huit une fois que les deux terroristes arrivèrent à San Diego. Bayoumi et sa famille quittèrent le pays sept semaines avant le 11 septembre.
Le FBI cacha à la Congressional Inquiry, ainsi qu'à la Commission sur le 11-Septembre qui lui succéda, le fait qu'il avait enquêté sur une autre cellule de soutien pour les pirates de l'air à Sarasota, en Floride. Cette information devint publique lors du dixième anniversaire des évènements l'an dernier, faisant suite au travail obstiné de Anthony Summers, co-auteur du livre The Eleventh day, finaliste du Prix Pulitzer en histoire cette année, et de son collaborateur Dan Christensen, un journaliste d'investigation en Floride du Sud avec BrowardBulldog.org.
Dans le cas de Sarasota, les enquêteurs de police soupçonnèrent plusieurs des terroristes, y compris leur chef Mohamed Atta, d'avoir régulièrement rendu visite à un couple saoudien, dans un quartier protégé de la banlieue. Selon des témoins de l'époque, leurs visites étaient consignées, les plaques des véhicules qu'ils utilisaient pour entrer dans la communauté étant automatiquement photographiées. Le couple saoudien quitta brutalement sa demeure cossue pour l'Arabie saoudite deux semaines avant le 11-Septembre. Le mari et le beau-père étaient en effet apparemment sur une liste de surveillance du FBI, tandis qu'une autre agence américaine chargée de pister les fonds terroristes s'intéressait également aux deux hommes.
Quand l'affaire de Sarasota éclata en septembre 2011, le FBI produisit deux communiqués : une enquête avait bien eu lieu suite aux allégations de relation entre des pirates de l'air et des habitants de Saratosa mais il en était ressorti que ce n'était pas le cas ; la Congressional Joint Inquiry et la Commission sur le 11-Septembre en avaient été informées.
Or, mes propres connaissances en tant que co-président de la Congressionnal Joint Inquiry, ainsi que des entretiens et des dossiers, ont prouvé depuis que ces affirmations étaient fausses.
En juillet dernier, le sous-comité permanent aux investigations du Sénat, le Comité de la sécurité intérieure, a publié un rapport reprochant au géant de la banque HSBC d'avoir ignoré les liens de financement avec le terrorisme de Al Rahji Bank, la banque privée la plus importante d'Arabie Saoudite.
D'autres informations sont venues des procès obstinés engagés par les survivants aux attaques, les familles des victimes et des assureurs. Un rapport fait ainsi allusion à des liens plus profonds entre l'Arabie Saoudite et Al-Qaïda, indiquant que l'organisation caritative International Islamic Relief Organization (IIRO) "apporta son soutien à des organisations terroristes dés le début des années 1990 et qu'elle continua jusqu'au moins la première moitié de 2006", liant d'ailleurs un responsable de l'IIRO à Khalid Sheik Mohammed.
Cependant, les efforts légaux visant l'Arabie Saoudite sont pour l'heure restés lettre morte. Les Saoudiens ont pu esquiver les procès, grâce à l'"immunité de pays souverain", qui permet à la plupart des pays étrangers d'échapper aux poursuites.
Que devraient faire les Etats-Unis maintenant ?
L'enquête pour déterminer si les terroristes du 11-Septembre ont pu bénéficier d'aide étrangère devrait être rouverte par le Président, qui a l'autorité de l'ordonner au FBI, ou sinon de désigner une autre entité pour le faire, en reprenant sérieusement les pistes actuelles.
Le Président devrait également ordonner de déclassifier les documents pertinents en la matière, qui sont restés trop longtemps cachés aux Américains.
Enfin, le Congrès devrait proposer un amendement à l'immunité des Etats souverains. Ceux qui l'ont instaurée ne pensaient évidemment pas qu'elle protégerait des terroristes responsables de l'assassinat d'Américains sur leur propre sol. Une loi intitulée Justice Against Sponsors of Terrorism Act, actuellement en attente au Sénat et à la Chambre, et qui recueille un large soutien des deux partis, permettrait de réaliser ce but avec un modeste amendement en ce sens, et devrait passer immédiatement.
Avec ce que la Joint Inquiry a appris, et ce qui est sorti depuis, les soupçons se dirigent vers l'Arabie Saoudite : il est temps que nous sachions la vérité tout entière.
Bob Graham est un ancien sénateur d'Etat pour la Floride, président de la Commission du renseignement et co-président de la Congressionnal Joint Inquiry sur le 11 septembre. Il est l'auteur de deux livres sur les attentats. Sharon Premoli, un survivant de l'attaque contre la Tour Nord du World Trade Center, anime désormais le site Justiceagainstterrorism.net.
http://www.huffingtonpost.fr/bob-graham/enquete-attentats-11-septembre_b_1872744.html
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