mardi 29 septembre 2020

SNCF : c’est le moment de changer de modèle. Qu’est-ce qui coince ?

Par Alain Mathieu. Jean-Pierre Farandou, le pdg de la SNCF a déclaré : « C’est le moment de réinventer le modèle TGV. » La situation de la SNCF n’est pas brillante : des grèves à répétition, 14 milliards d’euros par an de subventions payées par les contribuables, une dette gigantesque, dont 63 % repris par les contribuables (soit 2200 euros pour chaque contribuable à l’impôt sur le revenu), des retards fréquents, des TER remplis à 25 %, etc. Pourquoi Jean-Pierre Farandou ne réinventerait-il pas la SNCF, en s’inspirant de l’exemple du Japon, de l’Italie, du Royaume-Uni�? Partant d’une situation pire que celle de la SNCF, la privatisation des chemins de fer japonais en 1987 a été un succès. La vente à des sociétés privées a rapporté des milliards à l’État japonais. Ces sociétés ont une productivité (nombre de voyageurs-km par employé) double de celle de la SNCF. Leur trafic a augmenté. La seule ligne Tokyo-Osaka transporte cinq fois plus de voyageurs que tous les TGV français. La ponctualité et la sécurité sont exemplaires. Et il n’y a eu que 1050 licenciements dus à la privatisation. Le TGV privé en Italie L’Italie a autorisé en 2008 un TGV privé, l’Italo, concurrent de la société publique Trenitalia. L’Italo est en bénéfice, ses ventes par employé étant 4,3 fois celles de Voyages SNCF, gestionnaire des TGV français. Ses tarifs sur Rome-Milan sont inférieurs de 45 % à ceux de Paris-Lyon, et la fréquence y est plus du double. Cette concurrence a stimulé FS, la SNCF italienne, dont les effectifs ont baissé de 40 %, sans la moindre grève. Et à la sortie des gares, les Italiens trouvent des bus très modernes, remplaçant des petites lignes ferroviaires déficitaires. À l’opposé des affirmations des syndicats français, la privatisation des chemins de fer britanniques est un grand succès, après les changements décidés en 2002 par Tony Blair. La fréquentation a augmenté de 62 % alors que les effectifs baissaient de 60 %. Et les accidents mortels y sont inférieurs de 32 % à ceux de la SNCF. Alors que des sociétés françaises comme Transdev ou Kéolis (filiale de la SNCF) transportent des Anglais et des Allemands, la SNCF refuse d’ouvrir son marché à la concurrence. Des TGV étrangers devaient en principe rouler en 2021. Mais en avril 2020, la société allemande Flixtrain, qui avait prévu d’ouvrir six liaisons, y a renoncé, découragée par les péages annoncés. Ouverture à la concurrence en régions Les TER doivent être ouverts à la concurrence en 2023. Mais la région PACA, qui a lancé un appel d’offres qui intéressait dix concurrents (dont une filiale de la SNCF et une de la RATP !), ne peut pas leur fournir les informations nécessaires par ligne, la SNCF invoquant le secret commercial. La région Hauts-de-France est devant le même refus de la SNCF. Les petites lignes sont maintenues, car les cars Macron n’ont pas le droit de dépasser 100 km. Et les lignes de banlieue parisienne ne seront pas ouvertes à la concurrence avant 2039 ! Le service minimum promis en 2007 (trois heures le matin et trois heures le soir) n’a pas été réalisé. L’alignement du régime de retraite sur celui du privé est en suspens. Pourquoi ? Parce que le véritable pdg de la SNCF n’est pas monsieur Farandou, mais la CGT. À coups de grèves répétées, elle défend les privilèges des cheminots : retraites élevées prises à partir de 52 ou 57 ans pour les personnels roulants, avantages sociaux exorbitants, transports quasi-gratuits pour toute la famille, salaires élevés croissants de 3 % par an, garantie de l’emploi à vie, 100 000 logements, durée du travail réduite (par exemple 117 jours de repos par an pour les roulants), etc. Farandou devrait fixer à la SNCF deux objectifs : pas plus de grèves que les concurrents ; ne plus faire appel aux contribuables. Les pays voisins comme le Royaume-Uni et l’Allemagne ont réglementé leur droit de grève : motif professionnel, vote à bulletin secret, service minimum. Tant que monsieur Farandou n’aura pas demandé au gouvernement de réglementer ainsi le droit de grève, puis de privatiser la SNCF, celle-ci ne sera pas réinventée. Les contribuables continueront à payer pour le maintien des privilèges des cheminots. Ces articles pourraient vous intéresser: Coupures d’électricité : le sabotage qui profite du flou juridique autour de la grève SNCF : la CGT est la meilleure amie de la libéralisation La CGT : un État dans l’État ? Les erreurs stratégiques de Philippe Martinez
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