mardi 2 décembre 2014

Plan De Relance De l'UE : Juncker Ment Juncker Est Allemand!

Juncker : porter le nom d’un bombardier allemand ne rend pas très populaire…



Comment l’Allemagne retient Juncker par les bretelles


Pauvre Jean-Claude Juncker! Carbonisé dès sa prise de fonction par les révélations de la presse américaine sur les pratiques tout à fait légales mais si peu coopératives du gouvernement luxembourgeois dont il fut un acteur éminent pendant dix-huit ans (ce qui lui a déjà valu le dépôt d’une motion de censure), voici ce bon Jean-Claude retenu par les bretelles au moment où il s’apprêtait à rebondir avec son plan de relance à 300 milliards.
On se disait bien que maman Angela pouvait difficilement se déjuger en autorisant de la part de son affranchi Juncker un tel pavé dans la mare rigide de la Prusse triomphante! 300 milliards de relance, c’était aussi provocateur pour l’Allemagne que de commander un verre de Bordeaux à l’Oktoberfest de München.
Du coup, le président de la Commission a dû réaliser une petite opération de passe-passe en espérant que les journalistes et l’opinion publique n’y voient que du feu. Il a en réalité mis sur la table non pas 300 milliards mais… 8! Et encore, sur trois ans. On est donc passé de 1,5% du PIB européen à 0,03%. Ce petit détail devrait quand même un peu ramollir les effets escomptés.
Conscient sans doute du ridicule de la situation, Jean-Claude y a ajouté 8 milliards de garanties sur les investissements, et 5 milliards de réserves de la Banque Européenne d’Investissement (BEI). Soit 21 milliards au total. Grotesque!
Alors pourquoi la presse parle-t-elle de 300 milliards, et même de 315 milliards? Parce que Jean-Claude Juncker a comptabilisé dans ses annonces les apports d’investisseurs privés dans les projets qui pourraient être financés avec le premier apport de l’Union. C’est ce qu’on appelle couramment l’effet levier du crédit.

Qui a compris qu’il était devenu un Junk President?


Il faut reconnaître à Juncker un certain talent dans le domaine de la communication, puisque pas mal de journalistes se sont laissés prendre à ses effets d’annonce.
Si Romaric Godin, de la Tribune, a dévoilé le pot-aux-roses dès le début dans un excellent papier consacré au sujet, certains se sont offerts le luxe du ridicule en chantant les louanges du volontarisme junckerien. Même l’excellent Quatremer s’est fendu d’un article un peu troublant sur les bienfaits du plan Juncker, où il écrit:
En cette époque de budgets nationaux contraints et de budget européen à la baisse, impossible de mobiliser 300 milliards d’argent public, sauf à permettre à l’UE d’emprunter directement sur les marchés, ce que l’Allemagne refuse d’envisager pour l’instant. Juncker, pour contourner ces difficultés, a imaginé un dispositif malin. Comme l’Union est au début de son «cadre financier pluriannuel 2014-2020», il propose de prélever entre 20 et 30 milliards d’euros sur les 960 milliards de dépenses programmées (notamment dans les fonds régionaux), afin de les mettre dans un «Fonds européen d’investissement stratégique» qui serait codirigé par la Commission et la Banque européenne d’investissement (laquelle verrait au passage son capital augmenter de 6 milliards d’euros directement versés par les Etats membres). Ce fonds irait ensuite sur les marchés pour lever de l’argent privé (celui qui a fui l’Europe en 2008) afin de financer une série de grands travaux dans les domaines de l’énergie, de l’Internet à haut débit ou des transports.
C’est la force de Juncker: convaincre des journalistes aguerris qu’en prélevant 20 milliards sur 960 programmés, on crée de la dépense nouvelle capable de relancer l’économie.
Il a tout de même fallu attendre vendredi (c’est-à-dire trois jours) pour que le Mondecomprenne la farce.

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