Que demande à la justice la famille de Rémi Fraisse ?
Tout d’abord l’audition de Thierry Gentilhomme, le préfet du Tarn, ainsi que la transmission de ses communications écrites avec les gendarmes et l’exécutif national la nuit du 25 au 26 octobre 2014. Les avocats ont visé large : Beauvau, Matignon et l’Élysée. Il s’agit de retracer heure par heure les ordres qui ont été donnés cette nuit-là, ainsi que les informations dont disposaient les autorités avant et après la mort de Rémi Fraisse.
Car il subsiste une contradiction majeure dans ce dossier. Alors que le préfet du Tarn, tout comme le ministre de l’intérieur et le directeur général de la gendarmerie nationale (DGGN), ont répété avoir donné des consignes d’apaisement, sur le terrain le lieutenant-colonel L. semble, pour sa part avoir, reçu des ordres contraires, comme l’avait révélé Mediapart.
Entendu comme témoin au petit matin du 26 octobre, cet officier de la gendarmerie mobile avait déclaré avoir régulièrement rendu compte au centre d'opérations et des renseignements de la gendarmerie (CORG) ainsi qu'au lieutenant-colonel Andréani, numéro deux du groupement de gendarmerie du Tarn « qui me confirme ma mission à savoir tenir le site ». « Le préfet du Tarn, par l'intermédiaire du commandant de groupement, nous avait demandé de faire preuve d'une extrême fermeté vis-à-vis des opposants par rapport à toutes formes de violences envers les forces de l'ordre ». Et ce malgré une situation de plus en plus tendue : « Les jets de pierres deviennent de plus en plus virulents, nous recevons des fusées de détresse et des cocktails Molotov », relate le lieutenant-colonel L. lors de son audition (lire notre enquête ici).
Malgré cela, Michel Regaldo-Saint-Blancard, le président de la chambre de l’instruction de Toulouse, a confirmé le refus des juges d’instruction de faire droit à cette demande de la partie civile, estimant – le plus sérieusement du monde – que « le contexte dans lequel les forces chargées du maintien de l’ordre ont agi n’est (…) qu’indirectement lié aux faits objets de l’information ». Il avance également que les juges d’instruction sont là pour « investiguer sur des faits susceptibles de recevoir une qualification pénale », et non pas pour « apprécier de l’opportunité des décisions prises par l’autorité administrative ». Doit-on en conclure qu’il revient donc à l’inspection administrative d’apprécier l’opportunité de ce genre de décision ? Pas de chance, l’IGGN, dans son rapport administratif rendu le 2 décembre 2014, faisait l’impasse sur cette contradiction, et ne parlait que de consignes d’« apaisement »...
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