De l’Egypte à l’Iran, en passant par la Russie, l’Amérique latine, les anti-guerre haussent le ton
L’Egypte contre toute intervention militaire en Syrie
Le ministre égyptien des Affaires étrangères, Nabil Fahmy, sans doute sur instruction du général Al-Sissi, a haussé le ton jeudi 29 août en affirmant que son pays s'opposait avec force à toute intervention militaire contre la Syrie. La différence de ton avec l’ère Moubarak est radicale. Et surtout avec l’ère Morsi qui avait déclaré, deux semaines avant sa déposition, le « djihad contre la Syrie ».
« L'Egypte ne participera à aucune frappe militaire contre la Syrie et s'y oppose avec force, conformément à sa position de principe contre toute intervention militaire étrangère dans ce pays », a souligné M. Fahmy dans un communiqué.
Il a appelé le Conseil de sécurité des Nations unies à « tout faire pour vérifier les faits (d'une utilisation présumée d'armes chimiques) et de prendre les mesures adéquates face à ce crime horrible ».
Le 20 juillet M. Fahmy avait promis de "réexaminer" les relations diplomatiques avec la Syrie, rompues en juin sous la présidence du président déchu Mohamed Morsi.
Le nassérien Sabbahi : « Une agression contre l’Egypte débute par une frappe contre la Syrie »
De son côté, le chef du courant populaire égyptien, Hamdeen Sabbahi, s’est dit opposé à toute agression contre la Syrie. « L’histoire prouve que toute agression contre l’Egypte débute par une frappe contre la Syrie », a-t-il écrit mardi sur son compte Twitter. Sabbahi a qualifié de « barbare toute agression contre le peuple syrien ». Et d’ajouter : « L’agression occidentale contre la Syrie détruit et ne libère pas.
Pour Sabbahi, « il est nécessaire qu’il y ait une position gouvernementale et populaire arabe unie en défense à notre sécurité régionale ».
Tamarrod réclame la fermeture du canal de Suez
Pour sa part, le mouvement Tamarrod, à la base de la chute du régime des Frères musulmans, a appelé l’Egypte à prendre une position ferme face à une éventuelle frappe américaine contre la Syrie.
Le porte-parole de Tamarrod, Hassan Chahine, a réclamé la fermeture du canal de Suez face aux destroyers et navires de guerre destinés à frapper la Syrie.
« Le soutien de l’armée syrienne arabe est un devoir national », a-t-il souligné. Et de poursuivre : « Il est temps que les peuples arabes se révoltent après le dévoilement des plans de l’ASL et de ses alliés terroristes visant à déstabiliser la patrie arabe toute entière ».
Tamarrod a en outre annoncé vouloir très prochainement lancer une campagne appelant les peuples arabes à boycotter les marchandises US et de tout pays qui participe à une frappe contre la Syrie.
Diplomate russe : pas de guerre contre la Syrie, ni aujourd’hui ni demain
Selon un diplomate russe, cité par le quotidien libanais alAkhbar « il n’y a pas de guerre ni aujourd'hui ni demain », indiquant que « l'administration d'Obama a décidé d'épuiser toutes les voies de la légitimité internationale avant de prendre une décision unilatérale d'agir contre la Syrie » .
Le diplomate russe, qui a souhaité garder l’anonymat, a expliqué que « la prochaine étape consiste à réunir le Conseil de sécurité. Une réunion qui promet d’être houleuse entre les différents cinq membres permanents du Conseil, et dont l’issue est connue d’avance : trois votes contre deux. Washington, Londres, Paris, contre nous et Pékin ».« Cette phase à elle seule risque de s’étendre pour une semaine.
L'administration d’Obama cherche en fait à gagner du temps, il veut que le Congrès lui accorde une autorisation lui permettant d’entreprendre une action militaire unilatérale. Pourquoi ? Peut-être pour des calculs politiques américains internes. A savoir un échange de transactions entre l'administration d’Obama et ses adversaires. A vrai dire, il n’a pas de politique étrangère américaine. Tout ce qui se passe dans le monde est une affaire intérieure américaine pour les Etats-Unis ».
Et de poursuivre : « Selon nos informations, le Congrès américain ne compte pas trancher la question cette semaine ou la semaine prochaine. Il y a donc plusieurs jours d’attente. Et cette attente ne sera pas stérile. Nous avons ouvert depuis Moscou nos lignes avec les Américains. Notre ministre des Affaires étrangères Lavrov est en communication permanente avec son homologue américain Kerry soit par téléphone soit par message..
Et ce dans le but d’éviter tout malentendu ou manque de communication. Il en va de même avec les Européens mais à un rythme plus faible. D’où une baisse de la tonalité dans les déclarations politiques cette fin de semaine. Cela ne signifie pas pour autant qu’une frappe militaire contre la Syrie n’est plus inscrite sur l’agenda américain. Mais, nous assistons au cours de ces dernières heures à une tendance à la baisse dans le ton. Et nous parions sur la continuité de cette tendance et nous comptons l'investir sérieusement ».
Le diplomate russe a précisé que « l’annulation de la réunion de La Haye, qui était prévue le mercredi 28 août ne nous a guère affectés. Cette réunion était consacrée à des experts qui travaillent sur l’organisation de Genève 2 . Son annulation est une réponse naturelle de la part de Washington à nos positions concernant les armes chimiques et notre détermination à rejeter leurs accusations que nous avons dirigés contre leurs alliés à Ghouta-Damas. Il faut savoir que ce genre de messages diplomatiques est tout à fait naturel dans nos relations ».
Et de souligner : « Nous ne sommes pas pressés à organiser la deuxième Conférence de Genève. Ce sont eux qui sont pressés. Depuis longtemps, ils essaient par tous les moyens de faire avancer les choses et de gagner du temps. Nous pensons donc qu'une autre date sera déterminée prochainement. En fait, ce sont les médias occidentaux qui ont versé de l’ancre sur un imminent raid américain dont le but serait d’accélérer Genève 2 . Quoiqu’il en soit, nous sommes persuadés à Moscou que la deuxième phase du dialogue syrien est possible cet automne voire entre Octobre et Novembre ».
Interrogé sur la position russe en cas d’une attaque américaine contre la Syrie, le diplomate russe a répondu : « les paroles de M. Lavrov concernant le refus de la Russie de participer dans une guerre contre qui que ce soit sont des déclarations purement diplomatiques. Elles s’inscrivent dans le cadre d’une réponse directe à une question posée lors d'une conférence de presse. Dans la réalité, les faits sont tout autres. Ainsi, il y a environ 17 mille citoyens russes en Syrie actuellement. Ce sont des experts qui travaillent dans toutes les institutions étatiques de la Syrie. Nous disons à tout le monde et à nos citoyens que Moscou s'est engagée à garantir leur protection et leur sécurité physique. Point à la ligne.
Il n’y aura pas de grandes opérations d'évacuation dans les prochaines heures. La dernière évacuation en date a concerné une centaine de familles qui ont préférées quitter Damas. Ces familles ont été rapatriées depuis Beyrouth. Les 17 000 russes qui sont restés à Damas sont des experts et nous comptons les défendre par tous les moyens possibles ».
Cette réponse de la part du diplomate russe pose une autre question de nature militaire à savoir quel est l’équilibre des forces militaires en Méditerranée, au large de la Syrie ?
Et de répondre : « la mobilisation américaine n’est pas le résultat de l’agression chimique de Ghouta. Selon nos informations sûres et certaines, la mobilisation militaire américaine a commencé depuis un mois. En revanche, notre présence militaire en Méditerranée est connue de tous et s’est renforcée depuis près de deux ans. Depuis que vous avez écrit le 29 Novembre 2011, que la bataille pour la Syrie est devenue une bataille de la Russie ».
Et de conclure : « En fait, toutes les options sont ouvertes. Ce qui se passe aujourd’hui est comparable à la crise des missiles de Cuba . Le président Obama admire John F. Kennedy, et Poutine semble l’hériter du dirigeant soviétique Khrouchtchev. Et donc tout est possible. Ce qui est important de savoir c’est que nous estimons que cette semaine rien ne se passera » ...
L’Amérique latine contre une intervention militaire en Syrie
La majorité des pays d'Amérique latine se sont prononcés mercredi contre une intervention militaire en Syrie, au moment où les Etats-Unis et certains de leurs alliés européens envisagent de mener des frappes contre la Syrie.
"Une agression contre la Syrie aurait des conséquences extrêmement graves pour le Moyen-Orient, une région qui est déjà en proie à des troubles", a déclaré dans un communiqué le ministère cubain des Affaires étrangères.
"Elle constituerait une violation flagrante des principes de la Charte des Nations unies et du droit international et accroîtrait les dangers pour la paix et la sécurité internationales", a estimé le ministère cubain.
Le président de l'Equateur, Rafael Correa, a exprimé "le rejet de toute ingérence, à plus forte raison militaire, dans le problème syrien".
Son homologue bolivien, Evo Morales, a lui aussi condamné les menaces de frappes. "Nous rejetons, nous condamnons" toute intervention militaire étrangère en Syrie, a-t-il déclaré au palais présidentiel à la Paz.
M. Morales a mentionné des informations de presse selon lesquelles des armes chimiques auraient été utilisées près de Damas non par le pouvoir mais par la rébellion, afin de susciter une intervention internationale.
"Nous n'acceptons pas l'utilisation d'agents chimiques qui, selon ces informations, sont utilisés par des groupes qui déstabilisent la démocratie et le gouvernement" syrien, a déclaré le président bolivien.
Le Brésil ne soutiendra pas une intervention militaire en Syrie sans l'aval du Conseil de sécurité de l'ONU, a déclaré mercredi le nouveau ministre des Affaires étrangères Luiz Alberto Figueiredo. Selon lui, il s'agirait d'une violation du droit international et de la charte de l'ONU.
Maduro évoque un lien entre les complots d'assassinat contre lui et l'intervention en Syrie
De même le président du Venezuela, Nicolas Maduro, a condamné les menaces occidentales de frappes contre la Syrie, au cours d'une visite à Tachira, dans l'ouest du pays.
Et il a affirmé que les autorités vénézuéliennes avaient déjoué un complot qui visait à l'assassiner au moment où auraient lieu d'éventuelles frappes occidentales contre la Syrie.
M. Maduro a rappelé l'arrestation au Venezuela, annoncée lundi par les autorités, de deux Colombiens qui seraient impliqués dans ce projet d'assassinat. "Le plan était de m'éliminer au moment de l'attaque contre la Syrie", a-t-il affirmé.
« Le projet des Occidentaux était de les faire coïncider (dans le temps), tout comme ils avaient tenté de le faire en 2002, lorsqu'une tentative de coup d'Etat contre Chavez avait précédé l'agression de l'Irak par les Etats-Unis », ont rapporté les médias vénézuéliens.
Le secrétaire général de l'OEA "opposé" à une intervention en Syrie
Dans ce contexte, le secrétaire général de l'Organisation des Etats américains (OEA), le Chilien José Miguel Insulza, s'est déclaré mercredi "profondément opposé" à une éventuelle intervention militaire en Syrie.
"Je suis profondément opposé aux interventions militaires. Il n'y a pas beaucoup d'exemples dans le monde d'interventions de ce type qui ont été positives", a indiqué M. Insulza à la presse.
Attaque contre la Syrie : Triple messages iraniens aux Occidentaux
Les messages iraniens aux Occidentaux ne connaissent pas de répit. Presque toutes les instances politiques et militaires en République islamique d’Iran sont montées au créneau pour se solidariser avec la Syrie, menacée d’une attaque occidentale.
En résumé, l’essentiel de leurs messages atteste que l’intervention occidentale ne sera pas sans riposte, et laissant présager la possibilité d’une intervention iranienne pour assister le pouvoir en Syrie.
Une triple équation est privilégiée par Téhéran
Elle prédit entre autre qu’Israël ne sera pas l’abri de la riposte à l’éventuelle attaque. Dans la nuit de mercredi à mardi, la Commission de la Sécurité nationale au parlement iranien a assuré que « chaque missile américain abattu sur la Syrie sera répliqué par un missile syrien sur Tel Aviv ».
Même son de cloche de la part du chef d’Etat-major des forces armées iraniennes le général Hassan Fîrûzâbâdî qui avait assuré que les flammes de l’éventuelle agression militaire contre la Syrie brulera l’entité sioniste. Et de la part du commandant des gardiens de la révolution le général Mohammad Ali Jaafari, selon lequel « les Israéliens devraient savoir que le déclenchement d’une guerre dans la région par les Américains va aboutir à l’éradication d’Israël prochainement ».
Un deuxième Vietnam
La deuxième équation propagée les Iraniens est que la guerre contre la Syrie sera un deuxième Vietnam pour les Américains.
« Les Américains et malgré le feuilleton des défaites qu’ils ont essuyées en Irak et en Afghanistan poursuivent obstinément sur cette voie et auront à gouter encore plus l’amertume de leurs prochaines défaites, car la Syrie sera le cimetière des conquérants, sa bataille est plus dangereuse que celle du Vietnam, elle sera un nouveau Vietnam », a poursuivi Jaafari.
Une déclaration similaire et aussi sulfureuse a été lancée par le commandant de l’Unité AlQuds chez les gardiens de la révolution, le général Kassem Souleïmani.
« Le pays du Levant est le site de notre ascension vers le Ciel, et sera le cimetière des Américains », avait-il tenus en huis clos, avant d’être relayé par les medias iraniens.
Et d’assurer que « chaque soldat américain qui débarquerait de son avion ou de son navire devrait porter son cercueil avec lui ».
L’Iran s'impliquera
Ces positions sont venues compléter celle du guide suprême l’Imam Ali Khamenei, lequel a assuré qu’une frappe contre la Syrie provoquera un embrasement dans toute la région, laissant entendre que son pays ne restera pas à l’écart de ce qui se passe en Syrie. Et qu’il a entre les mains tous les plans et les choix à adopter en cas d’attaque.
Ces propos d’une grande importance, surtout lorsqu’on sait à quel point Washington s’emploie pour écarter Téhéran.
En plus de son influent politicien aux Nations Unies Jeffrey Feltmann, elle a dépêché vers la capitale iranienne l’un de ses alliés dans la région, le monarque de l’émirat d’Oman, Sultane Kabouss. Selon des sources iraniennes ayant côtoyé la visite de trois jours ayant eu lieu la semaine passée, ce dernier a demandé aux Iraniens de lever la main de la Syrie, en échange d’une reconnaissance américaine des droits nucléaires iraniens et d’une suspension des sanctions imposées contre la RII.
Parallèlement, Feltmann s’efforçait de faire croire aux Iraniens que l’attaque occidentale dont il leur a révélé la date pour dimanche prochain serait limitée, mettant l’accent qu’elle n’a pas pour but d’éliminer le régime, mais de l’affaiblir pour aller à Genève 2 avec une vision qui garantisse son succès.
Ces propos arabes et américains ne semblent pas avoir persuadé les Iraniens. Sans tarder, Téhéran a répondu à l’hôte onusien que la Syrie est une ligne rouge, ne peut être substituée à aucun autre dossier.
Selon AlAkhbar, elle lui a même signifié que quand bien même l’offensive serait limitée, rien n’empêchera la riposte de ne pas l’être.
Justement, Téhéran évoque beaucoup un embrasement de toute la région. C’est surtout l’avis du commandant des Gardiens de la révolution selon lequel la guerre ne se limitera pas à la Syrie mais atteindra tous les instigateurs à la guerre et leurs protecteurs.
29 août 2013
Afrique Asie et agences
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