Des ministres du gouvernement allemand reprochent au président français de ne pas avoir les moyens de sa politique.
François Hollande risque fort de rentrer bredouille de son voyage à Berlin... ou tout au plus avec une vague promesse d'étudier la question de la relance...mais avec la contrepartie de faire les réformes structurelles nécessaires en France.
L'Allemagne ne veut plus être le banquier de l'Europe en finançant les politiques budgétaires déficitaires des autres membres de la zone Euro.
Revenir au Mark serait d'ailleurs le meilleur moyen pour elle de sortir de la "classe de cancres" dont elle fait partie.
Angela Merkel n'a aucune intention de céder aux pressions du président français. Plusieurs ministres de son gouvernement sont montés au créneau pour rappeler la France à ses engagements et tacler le nouveau président socialiste, lui reprochant de ne pas avoir les moyens de sa politique.
La chancelière a laissé entrevoir clairement à Hollande quelles concessions il pourrait obtenir de Berlin: la formulation d'un nouveau pacte de croissance et l'augmentation des moyens de la Banque européenne d'investissement en font partie. Mais elle rejette catégoriquement tout programme de stimulation de la conjoncture qui creuserait la dette.
«L'Allemagne n'est pas là pour financer les promesses électorales des socialistes, a lancé plus brutalement son lieutenant, le ministre de l'Écologie et vice-président de la CDU, Norbert Röttgen.
"si la croissance est financée par de nouvelles dettes, ce sera à l'Allemagne de payer pour «la victoire des socialistes français», tranche-t-on à Berlin, où l'on rappelle qui tient les cordons de la bourse en Europe.
Sauver l' Euro un jeu de dupes ?
La question in fine entre les partenaires européens se résume très simplement par, quels sont ceux qui ont principalement intérêt à la survie de la zone Euro ?
Les Etats au bord de la faillite s'accrochent désespérément à la zone EURO , comme le naufragé à son radeau car c'est lâ leur seule et unique possibilité de survie à court terme.
La Grèce, l'Espagne , le Portugal, l'Italie, l'Irlande et dans une moindre mesure la France sont dans ce cas même si ils n'en sont pas vraiment conscient. Un peu comme en 1940 lors de la drôle de guerre où l'immense majorité des français pensaient que la guerre ne viendrait jamais à leurs frontières car parfaitement protégés par l'illusoire muraille et la propagande sur l'invincibilité de la ligne Maginot.
Les autres eux sont en train de peser les arguments pour ou contre d'une sortie unilatérale de la zone EUR pour entrer dans une zone plus souple et surtout ne pas accumuler les dettes des autres beaucoup moins vertueux. Pour les exportateurs comme l'Allemagne il y a un gros risque mais les exemples du Japon, du Canada ou en Europe de la Suisse, de la Suède, du Danemark ou de la Norvège qui eux s'en sortent nettement mieux que les autres pays membres de la zone EUR, les pousseraient plutôt à une sortie concertée, surtout que le Benelux, la Finlande et l'Autriche ne souhaite plus vraiment faire partie de cette zone vouée à l'effondrement total.
On devrait donc assister à une Europe à deux vitesses et plusieurs monnaies. Pour la France le choix n'est toujours pas vraiment tranché et c'est F.Hollande qui devra en porter seul l'entière responsabilité devant les citoyens et l'histoire quel qu'en soit le résultat final pour les français.
Réduction des déficits budgétaires
«L'économie de la France et les finances du pays demeurent dans un état précaire, décrypte Peter Altmaier, dirigeant du groupe parlementaire CDU au Bundestag et fidèle de la chancelière. Tout pays qui essaierait de mener une politique de l'offre en accroissant ses déficits se mettrait très vite les marchés à dos et verrait ses taux d'intérêt augmenter. La France n'a aucune marge de manœuvre.»
Berlin déplore qu'Hollande ait promis d'augmenter le salaire minimum, de créer des postes de fonctionnaires et de revenir sur le recul de l'âge de la retraite.
Berlin juge crucial pour Hollande de prendre à bras-le-corps les réformes nécessaires pour que la France retrouve sa compétitivité.
Entre Merkel et Hollande, des désaccords de fond
Angela Merkel n'a pas eu le moindre mot pour saluer le travail en commun avec son allié Nicolas Sarkozy, qui fut pourtant le pilier de sa stratégie européenne.
Cependant, le bras de fer paraît inévitable alors que les relations franco-allemandes entrent dans une phase d'incertitude complexe liée à des contraintes de politique intérieure difficiles à concilier entre les deux rives du Rhin.
«Pendant la campagne, j'ai toujours dit que je travaillerais étroitement avec le prochain président français», s'est-elle défendue lundi devant la presse allemande, qui a qualifié de défaite personnelle pour la chancelière l'élection présidentielle française.
Un confident d'Angela Merkel : «Nous espérons que François Hollande suivra l'exemple de Gerhard Schröder, qui a su se transformer pour mener des réformes qui ont contribué à la santé économique de l'Allemagne.
Un défi pour la relation franco-allemande
"Hollande est un président sans majorité, qui entre en campagne pour les législatives et qui cherchera à s'imposer coûte que coûte face à la chancelière pour marquer des points, poursuit ce proche de Merkel. Les prochaines semaines seront un défi pour la relation franco-allemande.» Cherchant à rassurer l'entourage de la chancelière sur ce point, les conseillers du candidat socialiste avaient laissé entendre qu'il s'agissait de «propos de campagne».
«Le pacte fiscal a été négocié et signé par vingt-cinq pays, il n'est pas renégociable. On ne peut pas revenir sur les textes ratifiés après chaque élection, sinon on n'avance plus en Europe», a prévenu Merkel.
Berlin est disposé à négocier un nouveau «pacte de croissance» séparé avec le président français élu, à condition de ne pas creuser les déficits. Cela implique que Hollande accepte dans un premier temps d'adopter le traité fiscal tel quel… Difficile à envisager alors qu'il a fait de l'austérité à l'allemande le symbole des maux actuels de la zone euro.
Des divergences solides
La CDU de Merkel est vent debout contre la création d'eurobonds réclamés par Hollande et les sociaux-démocrates allemands. Berlin s'impatiente aussi, reprochant à l'équipe d'Hollande de ne pas jouer cartes sur table en rallongeant sans cesse sa liste d'exigences.
La seule bonne surprise, lorsque la chancelière accueillera le nouveau président français à Berlin le 15 ou le 16 mai dans la foulée de son investiture, pourrait être celle d'une rencontre. Hollande le «président normal» et Merkel, la «chancelière de la simplicité», semblent faits pour s'entendre. Le cliché de François Hollande faisant des achats dans une supérette n'aura pas manqué de faire sourire Angela Merkel, qui continue de faire ses courses le week-end avant de passer aux fourneaux.
Angela Merkel et Nicolas Sarkozy étaient deux contraires, qui s'attiraient et avaient fini par s'apprivoiser… non sans traverser régulièrement des crises aiguës.
Et de dégager un consensus, qui entraîne l'Europe derrière l'attelage franco-allemand. Si Hollande et Merkel partent du bon pied, tout deviendra possible.
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