jeudi 12 mai 2016

Ces exceptions françaises qui font un peu de bien

Ces exceptions françaises qui font un peu de bien




Ces mieux, qui ne doivent rien à Hollande

Bien sûr, les statistiques de suicide restent très préoccupantes puisque nous faisons partie des pays où le taux de suicide est élevé (plus de 15 pour 100 000), mais bien moins qu'au Japon ou en Corée mais au moins, il baisse fortement (il tournait entre 20 et 25 pour 100 000 jusqu'au milieu des années 1990). En revanche, le taux de suicide aux Etats-Unis, tombé autour de 11 pour 100 000 au tournant du siècle, n'est plus très loin du chiffre de 14 pour 100 000, une hausse de 24% en 15 ans. Les chiffres indiquent aussi une hausse outre-Manche et aux Pays Bas. Pour le journal, « la hausse depuis 2007, avec la crise financière, donne du poids à l'idée que les études sur les suicides sont une branche de la macro-économie ». Une nouvelle illustration du fait que l'ultralibéralisme tue ?



Dans un autre papier du même numéro, The Economist s'alarme de la chute significative de la fécondité dans les pays occidentaux depuis la crise, les Etats-Unis étant passé de 2,12 en 2007 à 1,86 en 2014, la Grande-Bretagne, passée de 1,92 à 1,81 de 2012 à 2014, comme en Norvège et en Australie. Et ce qui chagrine The Economist, c'est l'absence de rebond démographique dans ces pays, qui sont relativement sortis de la crise, comme si quelque chose avait été cassé. Il incrime l'incertitude économique, la difficulté d'acheter un logement, notant que le pessimisme sur le futur pourrait jouer un rôle. En revanche, la France n'a pas été affectée puisque le taux de fécondité reste stable, révélant des facteurs plus profonds que les migrants puisque nous en accueillons bien moins qu'outre-Manche…

Bien sûr, ce ne sont que des chiffres relatifs, mais il est positif de constater que dans le marasme que nous traversons, la France reste suffisamment forte pour nous donner toujours autant envie de faire des enfants, et de moins en moins se suicider. Malgré les attaques de toutes parts contre notre modèle, il semble qu'il résiste et nous protège sans doute sensiblement mieux qu'ailleurs.

Autisme gouvernemental (billet invité)

Autisme gouvernemental (billet invité)

Billet invité de l'œil de Brutus



Les récentes manifestations contre la loi El Khomri ont dégénéré, un peu partout, en violences qu'il ne s'agit ici nullement d'excuser, encore moins lorsqu'elles mettent en danger la vie d'agents de la force publique qui risquent quotidiennement leur vie pour nous protéger et qu'il y a peu étaient unanimement salués pour leur dévouement. Ces violences permettent cependant d'effectuer deux constats.

Le premier est, qu'à l'inverse de mes espoirs initiaux, une part importante du mouvement Nuit Debout s'est fait récupérer par quelques gauchistes, pseudo-révolutionnaires professionnels qui espèrent encore, à la mode d'un Lénine des journées d'octobre 1917, qu'une poignée d'entre eux pourra générer un fantasmagorique Grand Soir. La scandaleuse expulsion d'Alain Finkielkraut[i]de la Place de la République ne fut ainsi, en fait, qu'un prélude à ces violences. Outre leur comportement, diamétralement opposé aux valeurs dont ils se réclament – en particulier démocratie directe et citoyenneté –, la gauche libertaire fait là tout le jeu du système néolibéral qu'elle prétend combattre. Car la mise à bas de l'oligarchie qui mène la France au gouffre ne se fera certes pas sur les bases ultra-minoritaires qu'elle représente. Face à une oligarchie qui a méticuleusement verrouillé les institutions, en particulier politiques et médiatiques, ce nécessaire renouveau ne pourra se faire que sur la plus large base possible. Il nécessite un esprit de Résistance qui fasse taire les clivages sectaires. C'est tout le sens de l'appel à la constitution d'un Front de libération émis par Jacques Sapir et largement développé ici. Or, en excitant les divisions entre Français de bonne volonté, ces gauchistes sont, dans les faits et dans la pratique de la même manière que le Front national, les idiots utiles du système en place. Ajoutons qu'en utilisant une violence sectaire, physique comme verbale, à l'égard de personnes – autant Alain Finkielkraut que les policiers et tant d'autres jugés plus ou moins indésirables[ii]– qui ne sont pas nécessairement opposés à leurs revendications de fond, ils justifient au regard de la grande majorité l'utilisation d'une répression plus musclée et discréditent leur propre mouvement. Lorsque l'on invective, bouscule, crache puisse chasse d'un espace public quelqu'un pour le simple fait que ses idées sont jugées non convenables (c'est-à-dire incompatibles avec leur supposé camp du Bien), c'est que, dans l'esprit, les massacres de Septembre et les excitations d'un Hébert et autres Enragés ne sont plus loin.  Ainsi, entre le gauchisme et le social-libéralisme à la sauce Hollande-Valls-Macron, il y a un vide terrible. Un vide de gauche qu'il est plus qu'urgent de réinventer. On aurait pu croire que c'était l'objet de Nuit Debout. Ce ne semble, malheureusement, plus le cas : le gauchisme est factuellement le plus grand pourfendeur de la gauche.
Mais, et c'est l'objet du deuxième constat, cette violence n'est malheureusement pas une surprise et risque fort de se développer dans les mois qui viennent. En effet, dans un régime qui n'est plus que démocratie de façade – une démocrannie pour reprendre le néologisme de Jacques Sapir – et dans lequel par voie de conséquence l'avis du peuple est méprisé, le mécontentement finit par s'exprimer non plus dans les urnes mais dans la rue. Et lorsque la rue n'est elle-même plus écoutée, c'est la violence qui se fait entendre. C'est en effet désormais une évidence que le vote des citoyens ne compte plus. Il a été méprisé lorsque, en 2005, il s'est opposé à la construction européenne telle que vue, et désormais imposée, par l'oligarchie européiste. Il a été bafoué tant par Nicolas Sarkozy que par François Hollande lorsque, l'un comme une autre, une fois élus se sont appliqués, dans bien des domaines, à faire strictement l'inverse de ce qu'ils avaient annoncé. Enfin, et sans doute pire que tout, le peuple français n'est tout simplement même plus consulté lorsqu'il s'agit de modifier saconstitution et d'adopter, dans le dos des citoyens et souvent en complète opacité, des traités, tels que les TSCG[iii]et le TTIP[iv], qui les concernent pourtant au premier chef. Cet autisme des classes dirigeantes, totalement coupées des réalités – notamment de par la professionnalisation de la politique –, est en réalité la première des causes des radicalisations et du recours à la violence. Tant qu'elles resteront au pouvoir, radicalisations et violences ne feront que croître un peu partout. Ses représentants seraient un tant soit peu animés par l'esprit de responsabilité (l'on sait très bien qu'ils ont abandonné l'esprit de conviction depuis fort longtemps), qu'ils abandonneraient séance tenante toutes activités politiques avant que la France – et l'Europe – ne sombre dans l'anarchie. On peut, malheureusement, toujours rêver.
En tout état de cause, l'oligarchie a dépassé le dilemme du président Mac Mahon. Elle ne peut même plus se soumettre à la volonté souveraine du peuple français puisqu'elle a tout fait pour détruire cette souveraineté. Il ne lui reste plus qu'à se démettre.  
Précision suite au commentaire d'un lecteur : comme annoncé en introduction, il ne s'agit pas ici de légitimer la violence mais d'en expliquer l'origine et le fait que si ce qui en est la cause - l'autisme gouvernemental - ne change pas, elle ne pourra qu'aller croissant. Cela ne tient lieu ni de légitimation, ni même encore moins de vœux.



[i]  Lire :
Alain Finkielkraut, Nuit debout et le fascisme des antifascistes, Mathieu Bock-Côté, Figarovox, 18-avr.-16 ;
Nuit Debout laisse des plumes dans l'expulsion de Finkielkraut, Thomas Vampouille, Marianne, 18-avr.-16.
[ii] Lire :
Géant, Marc Rameaux, Le Troisième homme, 22-févr-16 ;
Alain Finkielkraut, Nuit debout et le fascisme des antifascistes, Mathieu Bock-Côté, Figarovox, 18-avr-16.

Loi travail : la motion de censure de la droite débattue dans une ambiance tendue à gauche

Loi travail : la motion de censure de la droite débattue dans une ambiance tendue à gauche

Le président François Hollande et Manuel Valls à l'Elysée le 11 mai 2016 - B. GUAY AFP 

L'Assemblée nationale débat jeudi après-midi d'une motion de censure de la droite contre le gouvernement, qui n'a quasi aucune chance d'être votée, mais dans un climat tendu sur la loi travail dans la rue comme au PS après le recours au 49.3 et la tentative d'une motion «de gauche».

Alors que des manifestations sont programmées un peu partout en France à l'appel des syndicats opposés au projet de loi, les présidents des groupes LR et UDI, Christian Jacob et Philippe Vigier, défendront à 16H une motion de censure, déposée dans la foulée de l'engagement mardi par Manuel Valls de la responsabilité du gouvernement pour faire passer son texte sans vote.

Le projet de loi sera de fait considéré comme adopté en première lecture et poursuivra son parcours législatif au Sénat sauf si la motion de censure est votée, synonyme de chute du gouvernement.

Un scénario fort improbable : même si le Front de gauche (dix députés) votera avec la droite, le cumul de ses voix avec celles de LR, de l'UDI et du FN est loin de la majorité absolue de l'Assemblée, actuellement à 288. Seuls les suffrages favorables sont pris en compte pour une motion de censure.

Notant que le gouvernement avait décidé de recourir à l'arme du 49.3, «pour la quatrième fois depuis le début du quinquennat, et à nouveau sur un texte qui a été présenté aux Français comme un grand texte réformateur», LR et UDI critiquent un projet de loi devenu «l'ombre de lui-même».

«Qu'il soit contraint d'engager sa responsabilité sur un projet de loi qui ne comporte plus aucune ambition de réforme témoigne de l'impasse dans laquelle François Hollande a mené notre pays», juge l'opposition.

Hostile au texte pour des raisons diamétralement opposées, le FG voit dans la motion de droite le «seul outil restant pour obtenir le retrait du texte».

Mercredi, il a échoué - à deux voix près ! - à bâtir une motion de censure «de gauche» contre le gouvernement, mais son chef de file André Chassaigne y voit «une victoire» dans la mesure où, pour la première fois depuis 2012, il a rallié dix écologistes et surtout une trentaine de socialistes à cette initiative.

D'après l'ancienne ministre écologiste Cécile Duflot, «tout le monde était surpris, nous les premiers, de l'ampleur de la vague qui dit + maintenant ça suffit +».

A un an de la présidentielle, des socialistes, dont les ex-ministres Benoît Hamon et Aurélie Filippetti, le chef de file des frondeurs Christian Paul ou des non alignés comme Yann Galut, se sont ainsi dits prêts à voter la censure du gouvernement.

- Futures sanctions contre les socialistes 'censeurs' ? -

De quoi raviver les tensions internes. «Rester au Parti socialiste : je ne comprends pas comment on peut être à ce point-là dans l'incohérence», avait lancé par avance Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'Etat aux Relations avec le Parlement.

Tout en jugeant qu'il s'est passé «quelque chose de grave», le patron des députés PS Bruno Le Roux a refusé à ce stade de se prononcer sur des sanctions à l'encontre de ces socialistes «censeurs».

En dépit du 49.3, le projet de loi a été modifié lors de son bref examen, le gouvernement retenant au final nombre d'amendements du rapporteur Christophe Sirugue (PS), par exemple pour renoncer à restreindre à la France le périmètre d'appréciation des difficultés d'un groupe pour les licenciements économiques.

Mais il reste, parmi les points les plus conflictuels, l'article donnant la primauté aux accords d'entreprise pour l'organisation du temps de travail.

Hors de l'Assemblée, la mobilisation continue, les sept syndicats opposés au projet de loi travail, dont la CGT et FO, ayant à nouveau appelé à une journée de grève et de manifestations.

Ces deux centrales ont aussi appelé «à construire deux nouvelles journées de grèves et manifestations» les 17 et 19 mai, en n'écartant «aucun type d'initiatives pour les semaines à venir, y compris une manifestation nationale».

L'Unef appelle également à manifester, mais «c'est compliqué en ce moment de mobiliser les étudiants, qui sont en examen». Côté lycéens, la Fidl appelle les jeunes à descendre dans la rue.

La dernière mobilisation nationale organisée par ces syndicats, le 3 mai, avait rassemblé plusieurs milliers de salariés, syndicats et jeunes, nettement moins que lors des précédentes.

La manifestation la plus importante, le 31 mars, avait réuni 390.000 personnes selon la police, 1,2 million selon les organisateurs.

 

Source : 20 Minutes.fr

Informations complémentaires :

 
 

LuxLeaks. Le procureur demande de la prison contre les lanceurs d’alerte

LuxLeaks. Le procureur demande de la prison contre les lanceurs d'alerte

Tout simplement SCANDALEUX, quelle insulte publique aux honnêtes contribuables que nous sommes ! Combien d'écoles, d'hôpitaux, de tribunaux fermés par manque d'argent. Combien de gens à la rue qui se sont fait saisir tout ce qu'ils possédaient, à cause de ces VOLEURS en costumes-cravates !

Cette évasion fiscale industrielle finance en dessous de tables les partis politiques français, ces mêmes partis politiques qui nous ont imposé la loi El-Khomri !

STOP ! HALTE AU MASSACRE DES HONNÊTES CITOYEN(NE)S !!!!

AFP 

Des peines de prison ferme de 18 mois ont été requises mardi au tribunal du Grand Duché à l'encontre des deux lanceurs d'alerte à l'origine de l'affaire LuxLeaks. Ils avaient permis de mettre en lumière les accords fiscaux scandaleux passés entre les multinationales et le fisc luxembourgeois, pour réduire leurs impôts au détriment des autres pays européens.

Le procureur David Lentz a demandé 18 mois d'incarcération et des amendes à l'encontre d'Antoine Deltour et de Raphaël Halet. Ils sont entre autres accusés de vol de données, d'accès frauduleux à un système informatique, de divulgation de secrets d'affaires et de violation du secret professionnel. Ces deux personnes, anciens salariés français du cabinet d'audit PricewaterhouseCoopers (PwC), ont copié 45.000 pages de documents auxquels ils avaient accès, en profitant d'une faille de sécurité, dans les serveurs de leur employeur.

Ces documents, transmis au Consortium international des journalistes d'investigation ont permis de mettre en lumière des pratiques fiscales scandaleuses.

Car 340 multinationales ont passé des accords avec le Luxembourg, sous le gouvernement Juncker, pour négocier leur taux d'imposition avec le Grand Duché en échange d'y domicilier leurs activités pour l'Europe. Ces firmes ont ainsi pu bénéficier de taux jusqu'à 20 fois inférieurs à la moyenne européenne. Un manque à gagner très dommageables pour les autres états du continent.

"Informer le public était supérieur à mon obligation de confidentialité" s'était défendu Antoine Deltour au cours du procès. Si le procureur reconnaît qu'il s'agissait bien de dénoncer des pratiques fiscales douteuses, il dénonce le fait qu'Antoine Deltour "a dérobé des documents au mépris et au détriment de son patron". S'ils ne sont pas condamnés, "les patrons seraient soumis aux pires chantages. On parle ici de trahison" poursuit le procureur. Quant à la protection des lanceurs d'alerte, le magistrat luxembourgeois est clair : "pas question d'ouvrir les portes aux délateurs de tout poil".

Le journaliste, Édouard Perrin, qui a révélé l'affaire dans Cash Investigation est lui aussi sur le banc des accusés. Pour le procureur, "La liberté d'expression journalistique ne prévaut pas sur la violation du secret professionnel."

 

Source : l'Humanité

Informations complémentaires :

Crashdebug.fr :

 

 

 

[28 pages] 7e vidéo : la version de Richard Clarke

[28 pages] 7e vidéo : la version de Richard Clarke

Suite de notre grande série sur les 28 pages – rappel :

I. La 7e Vidéo

Richard Clarke a été le coordinateur contre le terrorisme à la Maison Blanche à la afin du mandat de Clinton, et au début de Bush.

Grace à ses témoignages, on comprend beaucoup mieux comment a pu survenir le 11 Septembre, et ses hypothèses sur les zones d’ombre font vraiment sens à mon avis. Mais j’y reviendrai…

Même vidéo – version alternative si souci :

II. Le script de la vidéo

Voici le script de la vidéo :

« Le 24 mars 2004, Richard A. Clarke, Coordinateur National pour la lutte contre le terrorisme à la Maison-Blanche de 1998 à 2001, présenta ses excuses aux victimes » (source : YouTube)

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Richard A. Clarke

De 2'27 à 3'18

Richard A. Clarke : « Je suis également heureux de ces audiences, car elles sont enfin une tribune où je peux présenter des excuses aux proches des victimes du 11 Septembre.

À celles et ceux qui sont ici dans la salle, à celles et ceux qui nous regardent à la télévision : votre gouvernement a échoué, les personnes chargées de vous protéger ont échoué et j'ai échoué. Nous avons travaillé dur, mais cela a finalement peu d’importance, parce que nous avons échoué.

Et pour cet échec, je voudrais vous demander – une fois que tous les faits seront là – votre compréhension et votre pardon. »


9/11 : Press For Truth (source : YouTube)

De 24'31 à 24'46


Clarke dénonce les dissimulations de la CIA (source : Dailymotion)

Là les amis, j’aurais besoin d’un volontaire pour recopier les sous-titres, afin d’avoir un script… Merci d’avance (contactez-moi avant par mail)

Après le vote pour destituer la présidente du Brésil, les membres clés de l’opposition ont tenu une réunion à Washington, par Glenn Greenwald

Après le vote pour destituer la présidente du Brésil, les membres clés de l'opposition ont tenu une réunion à Washington, par Glenn Greenwald

Source : The Intercept_, le 18/04/2016

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Glenn Greenwald, Andrew Fishman, David Miranda

Le 18 avril 2016

La Chambre basse du Congrès brésilien a voté la destitution de la présidente du pays, Dilma Roussef, envoyant la procédure devant le Sénat. Dans un acte non intentionnel mais cependant riche de symbolisme, le membre de la Chambre qui a fait passer la destitution au-delà du seuil des 342 voix était le député Bruno Araujo, lui-même impliqué par un document indiquant qu’il aurait reçu des fonds du géant de la construction au cœur du scandale de corruption nationale. Encore plus significatif, Araujo appartient au parti de centre-droit, le PSDB, dont les candidats ont perdu quatre élections nationales d’affilée contre le parti de la gauche modérée de Rousseff, le PT, leur dernière défaite électorale étant survenue il y a juste 18 mois, lorsque 54 millions de Brésiliens ont voté pour réélire Dilma présidente.

Ces deux faits à propos d’Araujo soulignent la nature surréaliste et sans précédent des procédures d’hier à Brasilia, capitale du cinquième plus grand pays au monde. Les politiciens et les partis qui ont passé deux décennies à tenter en vain de battre le PT lors d’élections démocratiques se dirigent triomphalement vers le renversement du vote de 2014 en destituant Dilma sur des fondements, comme l’a clairement montré le reportage du New York Times d’aujourd’hui, qui sont, au mieux, douteux à l’extrême. Même The Economist, qui méprise de longue date le PT et ses programmes contre la pauvreté et veut la démission de Dilma, a argumenté “qu’en l’absence de preuve d’un crime, la destitution est injustifiée” et que cela “ressemble à un prétexte pour renverser une présidente impopulaire.”

Les procédures de dimanche, conduites au nom du combat contre la corruption, ont été présidées par l’un des politiciens les plus ouvertement corrompus du monde démocratique, le président de la Chambre Edouardo Cunha (au-dessus, au centre), dont on a récemment découvert qu’il avait planqué des millions de dollars sur des comptes à la Swiss Bank, qui ne peuvent avoir des sources autres que la corruption, et qui a menti sous serment en niant auprès des enquêteurs du Congrès avoir des comptes à l’étranger. Sur les 594 membres du Congrès, comme le Globe et le Mail l’ont rapporté hier, “318 font l’objet d’enquête ou encourent des poursuites” alors que leur cible, la présidente Rousseff, “ne fait face, elle, à aucune allégation d’irrégularité financière.”

Un par un, les députés corrompus se sont avancés jusqu’au micro s’adressant à Cunha pour voter “oui” à la destitution en proférant être horrifiés par la corruption. En préambule à leur vote, ils ont cité un vertigineux éventail de motifs bizarres, allant “des fondements du christianisme”, en passant par “ne pas être aussi rouge que le Venezuela ou la Corée du Nord”, à “la nation évangélique” et “la paix de Jérusalem”. Jonathan Watts du Guardian a retranscrit une partie de cette farce :

Oui, a voté Paulo Maluf, qui est sur la liste rouge d’Interpol pour conspiration. Oui, a voté Nilton Capixaba, qui est accusé de blanchiment d’argent. “Pour l’amour de dieu, oui !” a déclaré Silas Camara, qui est sous le coup d’une enquête pour avoir falsifié des documents et détourné des fonds publics.

Il est hautement probable que le Sénat acceptera d’entendre les charges, d’où il résultera la suspension de 180 jours de Dilma en tant que présidente et l’installation du vice-président Michel Temer, du parti PMDB, très favorable au monde des affaires. Le vice-président lui-même est, comme l’a dit le New York Times, “sous surveillance pour des allégations d’implication dans un montage d’achat illégal d’éthanol.” Temer a récemment fait savoir qu’un des candidats favoris pour diriger l’équipe économique serait le P-DG de Goldman Sachs au Brésil, Paulo Leme.

Si, après le procès, deux tiers des votes du Sénat sont en faveur de la condamnation, Dilma sera démise de ses fonctions de manière permanente. Beaucoup suspectent que l’objectif principal de la destitution de Dilma est de fournir au public un sentiment cathartique que la corruption a été vaincue, tout cela pour exploiter le contrôle retrouvé par Temer pour empêcher d’autres enquêtes sur les dizaines et dizaines de politiciens réellement corrompus qui peuplent les partis les plus importants.

Les États-Unis ont été remarquablement silencieux au sujet de cette tourmente dans le deuxième plus grand pays de l’hémisphère, et cette posture a à peine été discutée par les médias grand public. Il n’est pas difficile de voir pourquoi. Les États-Unis ont passé des années à démentir avec véhémence qu’ils avaient joué un quelconque rôle dans le coup d’État militaire de 1964 qui avait renversé le gouvernement de gauche élu, un coup dont il avait résulté 20 ans d’une dictature de droite, brutale et pro-américaine. Mais les documents secrets et les enregistrements qui ont émergé ont prouvé que les États-Unis avaient activement aidé à manigancer ce coup d’État, et le rapport de la Commission vérité de 2014 au Brésil a apporté la preuve que les États-Unis et le Royaume-Uni ont agressivement soutenu la dictature et même “entraîné des interrogateurs à des techniques de torture.”

Jair Bolsonaro, un politicien brésilien de droite pro-destitution qui devrait être candidat à la présidence. Photo: Fernando Bizerra/EPA/Newscom

Jair Bolsonaro, un politicien brésilien de droite pro-destitution qui devrait être candidat à la présidence. Photo: Fernando Bizerra/EPA/Newscom

Ce coup d’État soutenu par les États-Unis et la dictature militaire dépasse la simple controverse actuelle. La présidente Rousseff et ses partisans ont explicitement qualifié cette tentative pour la renverser de coup d’État. Un important député de droite pro-destitution qui attend pour mener campagne et devenir président, Jair Bolsonaro (dont The intercept a dressé le portrait l’année dernière), a explicitement loué hier la dictature militaire et précisément salué le colonel Carlos Alberto Brilhante Ustra, le tortionnaire en chef de la dictature (responsable notoire de la torture de Dilma). Le fils de Bolsonaro, Eduardo, aussi à la Chambre, affirmait qu’il votait la destitution “pour les militaires de 64” : ceux qui ont mené le coup d’État et imposé le régime militaire.

L’invocation sans fin de Dieu et de la famille par les pro-destitution hier rappelait le slogan du coup d’État de 1964 : “La marche de la famille avec Dieu pour la liberté.” Tout comme les médias détenus par les oligarques au pouvoir au Brésil ont soutenu le coup d’État de 1964 comme une attaque nécessaire contre la corruption de la gauche, ils se sont unis pour soutenir et impulser l’actuel mouvement de destitution contre le PT avec la même justification.

La relation de Dilma avec les États-Unis a été difficile pendant des années, significativement aggravée par ses dénonciations de l’espionnage de la NSA ciblant l’industrie brésilienne, sa population et la personnalité de la présidente, ainsi que la relation commerciale étroite du Brésil avec la Chine. Son prédécesseur, Luiz Inacio Lula da Silva, s’était aussi mis à dos beaucoup d’officiels américains, parmi d’autres choses, en se joignant à la Turquie pour négocier un accord indépendant avec l’Iran sur son programme nucléaire, alors que Washington tentait de former une pression mondiale sur Téhéran. Les initiés de Washington ont fait parfaitement comprendre qu’ils ne considéraient désormais plus le Brésil comme sûr pour le capital.

Les États-Unis, bien sûr, ont une longue – et récente – histoire d’orchestration d’instabilité et de coups d’État contre les gouvernements de gauche d’Amérique latine démocratiquement élus qui leurs déplaisent. Au-delà du coup d’État de 1964 au Brésil, les États-Unis étaient au moins un soutien à la tentative en 2002 de renversement du président vénézuélien Hugo Chavez, ont joué un rôle central dans l’éviction du président haïtien Jean-Bertrand Aristide en 2004, et Hillary Clinton, à cette époque secrétaire d’État, a apporté un soutien vital pour légitimer le coup d’État de 2009 au Honduras, simplement pour donner quelques exemples. Beaucoup au sein de la gauche brésilienne pensent que les États-Unis participent activement à l’actuelle instabilité dans leur pays dans le but de se débarrasser du parti de gauche qui a beaucoup compté sur le commerce avec la Chine, et à la place promouvoir un gouvernement plus favorable au monde des affaires et pro-américain qui ne pourrait jamais gagner une élection par lui-même.

Bien qu’aucune preuve n’ait émergée en soutien à cette théorie, un voyage aux États-Unis peu médiatisé cette semaine d’un membre clé de l’opposition brésilienne nourrira probablement ces inquiétudes. Aujourd’hui – le lendemain du vote de destitution – le sénateur Aloysio Nunes, du PSDB, sera à Washington pour trois jours de réunions avec des officiels américains mais aussi des lobbyistes et trafiquants d’influence de toutes sortes proches de Clinton et d’autres figures politiques de premier ordre.

Le sénateur Nunes rencontre le président et les membres haut placés du Comité pour les relations étrangères du Sénat, Bob Corker, sénateur républicain du Tennessee, et Ben Cardin, sénateur démocrate du Maryland ; le secrétaire d’État adjoint et ancien ambassadeur au Brésil Thomas Shannon ; et participe à un déjeuner mardi organisé par la société de lobbying de Washington, Albright Stonebridge Group, dirigée par l’ancienne secrétaire d’État de Clinton, Madeleine Albright, et l’ancien secrétaire au commerce de Bush et P-DG de la société Kellogg, Carlos Gutierrez.

L’ambassade du Brésil à Washington et le bureau du sénateur Nunes ont dit à The Intercept qu’ils n’avaient pas d’information supplémentaire sur le déjeuner de mardi. Dans un email, Albright Stonebridge Group a écrit qu’il n’y a pas “de volet média” dans cet évènement, qui est pour “la communauté des affaires et politique de Washington,” et une liste des participants et des sujets abordés ne devrait pas être rendue publique.

Le sénateur Aloysio Nunes (à gauche) avec le président de la Chambre des députés Eduardo Cunha (à droite) et le sénateur José Serra. Photo: Marcos Alves/Agencia O Globo/AP

Le sénateur Aloysio Nunes (à gauche) avec le président de la Chambre des députés Eduardo Cunha (à droite) et le sénateur José Serra. Photo: Marcos Alves/Agencia O Globo/AP

Nunes est une personnalité de l’opposition très importante – et révélatrice – à envoyer aux États-Unis pour ces réunions de haut niveau. Il a concouru à la vice-présidence en 2014 sur la liste du PSDB qui a perdu contre Dilma. Il sera, notamment, désormais une des principales figures de l’opposition menant le combat pour destituer Dilma au Sénat.

En tant que président du Comité pour les Affaires étrangères du sénat brésilien, Nunes a plaidé à de nombreuses reprises pour que le Brésil se rapproche à nouveau des États-Unis et du Royaume-Uni pour former une alliance. Et – cela va sans dire – Nunes est lourdement impliqué dans des accusations de corruption ; en septembre, un juge a ordonné une enquête criminelle après qu’un informateur, cadre dans une société de construction, a dit aux enquêteurs qu’il avait donné à Nunes 500 000 réaux (140 000 $) pour sa campagne – 300 000 réaux officiellement et 200 000 en pots de vin – afin de remporter des contrats Petrobras. Ce n’est pas la première accusation du genre contre lui.

Le voyage de Nunes à Washington était annoncé par Temer lui-même, qui agit déjà comme s’il faisait campagne au Brésil. Temer est furieux de ce qu’il perçoit comme un changement radical et hautement défavorable dans le discours international, qui a de plus en plus décrit la destitution comme une tentative antidémocratique et illégale de l’opposition, menée par Temer lui-même, pour remporter un pouvoir non mérité.

Selon Folha, celui qui se veut président a ordonné à Nunes de mener “une contre-offensive en relations publiques” pour combattre ce sentiment mondial grandissant contre la destitution, qui, selon Temer, “démoralise les institutions brésiliennes.” Montrant son inquiétude à propos des perceptions grandissantes sur la tentative de renversement de Dilma par l’opposition brésilienne, Nunes affirmait que, à Washington, “nous allons expliquer que nous ne sommes pas une république bananière.” Un représentant de Temer affirmait pour sa part que cette perception “souille l’image du Brésil sur la scène internationale.”

“C’est un voyage de relations publiques,” selon Mauricio Santoro, un professeur de sciences politiques à l’université d’État de Rio de Janeiro, dans une interview accordée à The Intercept. “Le défi le plus important auquel Aloysio doit faire face n’est pas le gouvernement américain, c’est l’opinion publique américaine. C’est là que l’opposition est en train de perdre la bataille.”

Il ne fait pas de doute que l’opinion internationale s’est retournée contre le mouvement de destitution des partis de l’opposition. Bien que seulement un mois encore les organes de presse occidentaux dépeignaient les manifestations de rue antigouvernementales en termes élogieux, ils mettent désormais systématiquement en lumière le fait que les fondements légaux pour la destitution sont, au mieux, douteux et que ses meneurs sont bien plus impliqués dans des cas de corruption que Dilma.

En particulier, Temer était dit inquiet et furieux, concernant la dénonciation de la destitution par l’Organisation des États d’Amérique, organisation soutenue par les États-Unis, dont le secrétaire général, Luis Almagro, a dit que le groupe était “inquiet de la procédure contre Dilma, qui n’avait été accusée de rien”, et parce que “parmi ceux qui poussent à la destitution se trouvent des membres du Congrès accusés et coupables de corruption.” La tête de l’Union des Nations d’Amérique du Sud, Ernesto Samper, a dit de façon similaire que la destitution “est raison sérieuse d’être inquiet au sujet de la sécurité du Brésil et de la région.”

Le voyage à Washington de cette importante figure de l’opposition impliquée dans des cas de corruption, au lendemain du vote par la Chambre de la destitution de Dilma, soulèvera, à tout le moins, des questions sur le positionnement des États-Unis face au renversement de la présidente. Cela nourrira au moins les inquiétudes de la gauche brésilienne sur le rôle des États-Unis dans l’instabilité de leur pays. Et cela met en lumière beaucoup des dynamiques non discutées et pourtant à l’œuvre dans cette destitution, y compris un désir de rapprocher le Brésil des États-Unis et de le rendre plus conciliant avec les intérêts du monde des affaires international et sur les mesures d’austérité aux dépens de l’agenda politique que les Brésiliens ont adopté durant quatre élections nationales d’affilée.

MISE À JOUR : Avant la publication, le bureau du sénateur Nunes a informé The Intercept qu’ils n’avaient pas d’information complémentaire au sujet du voyage au-delà de ce qui avait été écrit dans le communiqué de presse du 15 avril. A la suite de la publication, le bureau du sénateur Nunes a indiqué, dans un courrier du 17 avril à l’éditeur de Folha, que – contrairement à ce qui était rapporté – l’appel du vice-président Michel Temer n’était pas la raison de son voyage à Washington.

Photo ci-dessus : les députés progouvernementaux tiennent une bannière sur laquelle est écrit en portugais « Cunha ! » Derrière la table de président de la Chambre, Eduardo Cunha, assis au centre, pendant une session de vote sur la destitution de la présidente Dilma Rousseff, à Brasilia, au Brésil, le 17 avril 2016.

Source : The Intercept_, le 18/04/2016

Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.

[2002] La surdité avant la tempête [New York Times]

[2002] La surdité avant la tempête [New York Times]

Article du New York Times avec une information à mon sens fondamentale pour comprendre la non réaction du gouvernement aux alertes.

Pour ma part, je pense que c’est la principale…

Vous remplacez Irak par Russie, chez eux par chez nous, et vous voyez dans nos médias ces personnes aveugles aux vrais problèmes, obnubilées par leur délire…11

Source : The New York Times, le 10/09/2012

Par Kurt Eichenwald, le 10 septembre 2012

Cela a peut-être été le plus fameux briefing présidentiel de l’histoire.

Le 6 août 2001, le président George W. Bush a reçu un rapport secret sur des menaces d’Oussama ben Laden et de son réseau terroriste, al-Qaïda. “Le briefing présidentiel quotidien” de ce matin-là – le document top-secret préparé par les services de renseignement américains – faisait figurer le titre désormais tristement célèbre : « Ben Laden déterminé à frapper aux États-Unis”. Quelques semaines plus tard, le 11 septembre, al-Qaïda accomplissait cet objectif.

Le 10 avril 2004, la Maison-Blanche de Bush a déclassifié ce rapport quotidien – et seulement celui-là – en réponse aux pressions de la Commission sur le 11-Septembre, qui enquêtait sur les événements qui ont conduit à l’attaque. L’administration a minoré l’importance du document, en disant que, malgré le titre à couper le souffle, il n’était qu’une évaluation de l’histoire d’al-Qaïda, pas un avertissement d’une attaque imminente. Alors que certains critiques ont considéré cette affirmation absurde, une lecture attentive du mémo a montré que l’argument avait une certaine validité.

C’est-à-dire, à moins qu’il ne soit lu en parallèle avec les mémos quotidiens précédant le 6 août, ceux que l’administration Bush n’a pas voulu déclassifier. Bien que ces documents ne soient pas encore publics, j’ai lu des extraits de beaucoup d’entre eux, ainsi que d’autres dossiers récemment déclassifiés, et j’arrive à une inévitable conclusion : la réaction de l’administration à ce dont M. Bush a été informé dans les semaines précédant ce triste mémo reflète significativement une plus grande négligence que ce qui a été divulgué. En d’autres termes, le document du 6 août, considérant l’ensemble de la controverse qu’il a provoquée, est loin d’être aussi choquant que les mémos qui l’ont précédé.

Les avertissements directs à M. Bush de la possibilité d’une attaque d’al-Qaïda ont commencé au printemps 2001. Le 1er mai, la CIA a communiqué à la Maison-Blanche un rapport annonçant qu’« un groupe actuellement aux États-Unis » prévoyait une opération terroriste. Quelques semaines plus tard, le 22 juin, le briefing quotidien annonçait que les frappes d’al-Qaïda pourraient être « imminentes », bien que les renseignements aient suggéré que le délai était flexible.

Mais certains dans l’administration ont considéré la mise en garde comme exagérée. Un responsable du renseignement et un membre de l’administration Bush interviewés m’ont tous les deux dit que les dirigeants néoconservateurs qui avaient récemment pris le pouvoir au Pentagone ont averti la Maison-Blanche que la CIA avait été dupée ; selon cette théorie, Ben Laden faisait simplement semblant de planifier une attaque pour détourner l’attention de l’administration américaine de Saddam Hussein, que les néoconservateurs considéraient comme une plus grande menace. Les responsables du renseignement, c’est-à-dire ces sources, ont protesté en indiquant que l’idée de Ben Laden, un fondamentaliste islamique, conspirant avec M. Hussein, un laïc irakien, était ridicule, mais les soupçons des néoconservateurs ont néanmoins été retenus.

En réponse, la CIA a préparé une analyse montrant que tout plaidait en faveur de la reconnaissance par la Maison-Blanche de la réalité du danger présenté par Ben Laden.

Javier Jaén Benavides

Javier Jaén Benavides

« Les États-Unis ne sont pas la cible d’une campagne de désinformation par Oussama ben Laden, » ainsi était libellé le mémo quotidien du 29 juin, en utilisant la transcription gouvernementale du prénom de Ben Laden. S’étalant sur plus d’une page, le document cite une grande partie des preuves, y compris une interview de ce mois-là avec un journaliste du Moyen-Orient où les adjoints de Ben Laden ont averti d’une attaque à venir, ainsi que les pressions concurrentielles que le chef terroriste subissait, étant donné le nombre d’islamistes en cours de recrutement pour la région russe séparatiste de Tchétchénie.

Et la CIA a répété les avertissements dans les mémos qui ont suivi. Les agents secrets connectés à Ben Laden, dont un l’a rapporté le 29 juin, s’attendaient à ce que les attaques prévues à court terme aient des « conséquences dramatiques », dont de nombreuses victimes. Le 1er juillet, le mémo informait que l’opération avait été retardée, mais qu’elle “se produira bientôt.” Certains des mémos ont encore rappelé à M. Bush que le moment de l’attaque était incertain, et que, malgré tout retard perçu, l’agression planifiée était sur les rails.

Cependant, la Maison-Blanche n’a pris aucune mesure. Les responsables du Centre antiterroriste de la CIA en étaient fous de rage. Le 9 juillet, lors d’une réunion du groupe de lutte contre le terrorisme, un responsable a suggéré que le personnel soit transféré, de sorte que quelqu’un d’autre soit responsable quand l’attaque aurait lieu, m’ont déclaré deux personnes présentes ce jour-là. La suggestion a été rejetée, ont-ils ajouté, parce qu’il n’y aurait pas de temps pour former quelqu’un d’autre.

Ce même jour en Tchétchénie, selon les renseignements auxquels j’ai eu accès, Ibn al-Khattab, un extrémiste connu pour sa brutalité et ses liens avec al-Qaïda, a dit à ses disciples qu’il y aurait bientôt de très grandes nouvelles. Un responsable du renseignement m’a dit que cette information avait été relayée dans les 48 heures à la Maison-Blanche, fournissant plus de données à l’appui des avertissements de la CIA. Pourtant, l’alarme n’a toujours pas sonné.

Le 24 juillet, M. Bush a été informé que l’attaque était toujours en cours de préparation, mais qu’elle avait été reportée, peut-être de quelques mois. Mais un responsable du renseignement m’a dit que le président ne considérait pas les briefings sur d’éventuelles attaques comme suffisants, et avait demandé une analyse plus large sur al-Qaïda, ses aspirations et son histoire. En réponse, la CIA se mit au travail pour le briefing du 6 août.

Au lendemain du 11 Septembre, les responsables de l’administration Bush ont tenté de détourner les critiques du fait qu’ils avaient ignoré les avertissements de la CIA en disant qu’on ne leur avait pas dit quand et où l’attaque se produirait. C’est vrai, dans une certaine mesure, mais cela passe à côté de l’essentiel. Tout au long de cet été, des événements auraient pu révéler les plans, si le gouvernement avait été en état d’alerte. En effet, alors même que le mémo du 6 août était en cours de préparation, Mohamed al-Kahtani, un saoudien soupçonné de s’être vu confier un rôle dans les attaques du 11-Septembre, a été arrêté à l’aéroport d’Orlando, en Floride, par un agent des douanes suspicieux et renvoyé à l’étranger le 4 août. Deux semaines plus tard, un autre conspirateur, Zacarias Moussaoui, a été arrêté sur des accusations d’immigration dans le Minnesota, après avoir éveillé des soupçons dans une école de vol. Mais on n’a pas fait le lien, et Washington n’a pas réagi.

L’attaque du 11 Septembre aurait-elle pu être interrompue, l’équipe de Bush a-t-elle réagi avec l’urgence nécessaire aux avertissements contenus dans tous ces mémos quotidiens ? Nous ne le saurons jamais. Et c’est peut-être la réalité la plus insoutenable de toutes.

Source : The New York Times, le 10/09/2012

Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.

Krach systémique, ce n'est plus qu'une question de date

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