mardi 3 mai 2016

Vers un effondrement complet du Vénézuela ?

Vers un effondrement complet du Vénézuela ?




La crise terminale du chavisme ?

Bien sûr, la crise actuelle a aussi quelque chose à voir avec l'effondrement du prix du pétrole, dans une bien curieuse ironie, où ce sont les marchés occidentaux dénoncés par les chavistes, qui provoquent la chute du chavisme, parce que ce dernier a profité de leurs excès sans prévoir que cela ne durerait pas et qu'il fallait protéger le peuple des hoquets du marché. Aujourd'hui, le président juge la situation « catastrophique » et certains estiment que le pouvoir d'achat a reculé de 35%, poussant 76% de la population dans la pauvreté. Pour compenser l'effondrement du pétrole, le Vénézuela a compensé en créant de la monnaie, mais cela a abouti à une hyperinflation, qui devrait atteindre 720% cette année, appauvrissant la population, malgré une hausse des salaires de 98% en 2015 et déjà 56% cette année.



A cela, s'ajoute une crise politique depuis la victoire de l'opposition aux législatives, à laquelle le président et l'ancienne majorité ont répondu par des manoeuvres autocratiques, entre remise en question de certains élus pour priver la nouvelle majorité de sa majorité qualifiée, ou remplissage du conseil constitutionnel par des affidés. Mais il semblerait que ce ne soit pas suffisant puisque l'opposition a pu déposer aux autorités électorales plus de deux millions de signatures en faveur d'un référendum pour révoquer Nicolas Maduro, ce qui démontre également que le chavisme n'a pas étouffé la démocratie (comme l'ont montré les législatives), malgré des pratiques autocratiques. Cette procédure, complexe, longue, et nécessitant une forte majorité, utilisée une fois, en 2004, contre Hugo Chavez, avait échoué.


Loi Travail : le texte arrive à l'Assemblée nationale, sous haute pression

Loi Travail : le texte arrive à l'Assemblée nationale, sous haute pression

Le très contesté projet de loi Travail arrive mardi dans l'hémicycle de l'Assemblée pour deux semaines d'un examen sous pression de la rue et d'une partie de la majorité, alors que plane la menace du 49.3 pour imposer son vote.

La ministre du Travail Myriam El Khomri lors des questions au gouvernement le 5 avril 2016 à l'Assemblée
nationale à Paris - BERTRAND GUAY AFP 

Le très contesté projet de loi Travail arrive mardi dans l'hémicycle de l'Assemblée pour deux semaines d'un examen sous pression de la rue et d'une partie de la majorité, alors que plane la menace du 49.3 pour imposer son vote.

Les débats parlementaires seront ouverts en milieu d'après-midi par la ministre du Travail Myriam El Khomri, pour qui «l'heure du Parlement est venue», après quatre journées nationales de mobilisation et un 1er mai contre le texte, sans compter le mouvement «Nuit debout» dans plusieurs villes depuis un mois.

Mais dès la fin de matinée, la centrale réformiste CFE-CGC, d'un côté, et les syndicats contestataires (CGT, FO, FSU et Solidaires), accompagnés de représentants des étudiants et lycéens, de l'autre, ont prévu des rassemblements près du Palais Bourbon.

Hasard du calendrier, ce 3 mai marque les 80 ans du Front populaire. Le leader de FO, Jean-Claude Mailly, a appelé François Hollande et Manuel Valls à ne pas «trahir» un de ses héritages en «flinguant la négociation de branche».

Le patronat pèse aussi sur les discussions parlementaires: le numéro un du Medef Pierre Gattaz a menacé dernièrement de se retirer de la négociation sur l'assurance chômage si «rien ne bouge» concernant le projet de loi.

Ce texte «visant à instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections pour les entreprises et les actif-ve-s» a déjà été remanié avant même sa présentation en Conseil des ministres en mars, puis amendé en commission par les députés. Le chef de l'Etat estime qu'il «a été corrigé» et que «son équilibre a été trouvé».

Primauté de l'accord d'entreprise en matière de temps de travail, nouvelles modalités pour les licenciements économiques ou les référendums d'entreprises, et encore création du Compte personnel d'activité et réforme de la médecine du travail : les 54 articles font cependant l'objet de près de 5000 amendements, soit quasiment autant que pour l'épique bataille sur la loi sur le mariage pour tous au début de la législature.

Concernant la question du licenciement : «je ne ferme pas la porte à des évolutions. Il faut lever une incompréhension. Beaucoup ont dit qu'il s'agissait de faciliter le licenciement, ce n'est absolument pas le cas. Nous allons l'encadrer», assure la Ministre dans un entretien mardi au Parisien/Aujourd'hui en France.

Près de la moitié des amendements ont pour auteurs les députés du Front de gauche, qui entendent mettre à profit tous les moyens autorisés par l'Assemblée pour s'exprimer dans l'hémicycle.

Les parlementaires LR défendent - ironie du sort - un retour à la version initiale du projet de loi, devenu «du perdant-perdant qui ne satisfait ni la gauche conservatrice ni la droite réformatrice», selon Guillaume Larrivé. Et les députés UDI ont élaboré un contre-projet, avec à la clé un passage progressif aux 39 heures et le retour du plafonnement des indemnités prud'homales.

- '40 voix' manquantes -

Les débats, qui seront interrompus pour le pont de l'Ascension, doivent se poursuivre jusqu'au 12 mai, avant un vote solennel le 17.

A ce stade, «il manque près de 40 voix pour obtenir une majorité et voter la loi», a comptabilisé le rapporteur Christophe Sirugue (PS), pointant parmi les socialistes «la vingtaine de frondeurs» mais aussi «les opposants +de bonne foi+», qui «ont des interrogations».

Pour rallier au moins ces derniers, le rapporteur a déposé des amendements sur le périmètre d'appréciation des difficultés économiques d'une multinationale, qui doit être international et non national selon lui, ainsi que sur les accords d'entreprise, qui pourraient être soumis à un contrôle de la branche professionnelle.

Le groupe socialiste, qui ne dispose pas à lui seul de la majorité absolue, pourra s'appuyer sur des voix chez les radicaux de gauche et les écologistes pro-gouvernement. Mais les écologistes contestataires, les élus FG, et surtout une majorité des LR et UDI ont de fortes chances de voter contre, ce qui pourrait mettre en péril l'une des dernières grandes réformes du quinquennat.

L'exécutif, qui vise une adoption définitive à l'été, pourrait donc recourir aux armes de la Constitution. Le 49.3, déjà brandi en 2015 pour la loi Macron et évoqué à demi-mot dès février, «a été utilisé par tous les gouvernements», a banalisé lundi le premier secrétaire du PS, Jean-Christophe Cambadélis, qui pense cependant «convaincre» les récalcitrants.

«Je ne suis pas dans cette perspective» d'avoir recours à l'article en question, indique au Parisien, Mme El Khomri, qui attend de voir «comment les choses se déroulent» au Parlement.

Premier test mardi en fin de journée avec le vote sur les motions de rejet et de renvoi en commission des députés LR.

 

Source : 20Minutes.fr

Informations complémentaires :

 

 

 

[Comparatif] La présentation du scandale des 28 pages par nos médias

[Comparatif] La présentation du scandale des 28 pages par nos médias

Analyse (un peu longue) aujourd’hui de la façon dont les médias ont rapporté le scandale entourent l’histoire des 28 pages classifiées sur le financement 11 Septembre.

Bien entendu, comme il n’y a aucun “complot médiatique”, l’information n’est jamais totalement cachée. Vous trouverez ainsi le terme “vingt-huit pages” au moins une fois sur chaque site des médias maintream – ce qui leur permet d’ailleurs de dire – où est le problème, si, si, on en a parlé !!!

  • Le problème est assez simple :
  • primo, le rendu des faits a-t-il été de qualité ? Car le dossier est assez simple : 1/ George Bush a interdit la diffusion de 28 pages d’un rapport parlementaire de 2002 sur le financement et les aides étrangères apportées aux pirates du 11 Septembre 2/ Depuis lors, de nombreux parlementaires de premier plan dénoncent ce secret 3/ Et certains ont indiqué que le document accuse sévèrement l’Arabie saoudite, ce qui les a obligé à revoir entièrement leur version du 11 Septembre
  • secundo, le rendu des réactions aux États-Unis a-t-il été de qualité ?
  • tertio, l’information a-t-elle eu la place qu’elle méritait ? A comparer aux Panama Papers ou à la mort de Prince par exemple.

Mais, encore plus simple, il y a un moyen des très simple de juger de la qualité de couverture médiatique d’un sujet important. Non pas de savoir si un journal “en a parlé” en 3 lignes page 12. C’est de savoir si, si vous demandez à vos proches, à vos collègues de travail  demain : “Au fait, tu penses quoi de ce scandale des 28 pages ?”, il vous répond “C’est incroyable, il faut en savoir plus, et si c’est vrai, sanctionner durement l’Arabie saoudite ?” ou “Heiiiinnnnnn, de mais de quoi tu parles ?”.

Sur ce genre de sujet, le degré minimal d’exigence en Démocratie est bien d’avoir une obligation de résultat, pas une obligation de moyen…

Vous noterez aussi à quel point les résultats du classement est… étonnant.

Médiapart : 16/20

Je n’ai pas les articles complets, mais il y en a au moins deux, et ça se présente très bien…

28-mediapart

Attentats du 11 septembre 2001 : le chantage de l'Arabie saoudite sur le gouvernement américain

L'Arabie saoudite menace de vendre tous ses actifs américains, si le Congrès adopte la mesure permettant de poursuivre le royaume saoudien devant les tribunaux américains, pour son rôle dans les attentats du 11 septembre 2001.

puis 5 jours après :

mediapart

Les 28 pages secrètes qui impliqueraient l’Arabie saoudite dans les attentats du 11-Septembre

Alors que le président Obama entame une visite très attendue en Arabie saoudite ce mercredi, un débat fait rage aux États-Unis autour d'un rapport secret qui mettrait en évidence un rôle du royaume dans les attentats du 11-Septembre.
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Direct matin : 15/20

Je suis gentil, car le suivi médiatique n’a pas été bien long, mais cet article est assez satisfaisant. Dommage que ce travail n’ai pas été poursuivi.

28-directmatin

11 septembre : un rapport pointe le rôle de l'Arabie Saoudite

Source : Direct Matin, 12-04-2016

Bob Graham, ancien président du Comité du renseignement du Sénat au moment de l'enquête gouvernementale sur les attentats du 11 septembre 2001 se bat pour faire déclassifier un rapport qui prouverait le rôle financier des Saoudiens.

A quelques jours du voyage de Barack Obama en Arabie Saoudite, la volonté de Bob Graham de voir déclassifier ce rapport de 28 pages semble enfin rallier des suffrages importants. Et pour cause. Bob Graham et les rares personnes ayant eu l’autorisation de le lire assurent que ce texte, supprimé du rapport complet sur le 11 septembre publié en 2002 par l'administration Bush, établit le rôle financier de l'Arabie Saoudite dans ces attaques.

Depuis cette époque, Bob Graham se bat pour que ce texte soit déclassifié afin que le public américain ait connaissance des réelles implications Saoudiennes dans ces attaques. Aujourd'hui, il n'est plus seul. En effet parmi les quelques privilégiés ayant eu le rapport entre les mains, de nombreuses voix s'élèvent pour demander la déclassification.

Ainsi Porter Goss, ancien député à la Chambre des représentants des Etats-Unis et directeur de la CIA entre 2004 et 2006 a notamment estimé pour CBS News qu'il était important qu'une version non censurée du rapport soit disponible.

Un rôle de financement

Pourtant, et malgré les promesses de l'administration Obama de rendre un jour public ce rapport, il apparaît aujourd'hui peu probable que ces informations soient divulguées. En effet, selon Tim Roemer ancien membre du Congrès et ancien ambassadeur américain en Inde ayant eu à de nombreuses reprises accès au texte, les réponses qu'il contient ont de quoi surprendre l'opinion publique américaine, et dresse le bilan de «l’implication saoudienne». Une implication financière au moins, selon lui.

Les familles des victimes en première ligne

Bob Kerrey, ancien sénateur et membre de la commission du 11 septembre s'exprime en ce sens :  «Vous ne pouvez pas fournir l’argent pour les terroristes, puis dire: “Je n’ai rien à voir avec ce qu’ils font”». En ce sens, il a déposé une déclaration écrite sous serment visant à appuyer la plainte des familles de victimes des attentats.

Ces mêmes familles qui se battent depuis des années pour pouvoir accès à toutes les informations collectées par les différentes commissions d'enquêtes. Une preuve du rôle joué par l'Arabie Saoudite leur permettrait ainsi de recevoir des compensations de Riyad.

Une décision politique

L'Arabie Saoudite, de son coté, nie toute implication et plaide pour que le document soit déclassifié afin de laver sa réputation. Pourtant, aux yeux de Bob Graham, il ne s'agit que d'une posture officielle, pendant qu'en sous-main le royaume ferait pression sur Washington pour que le rapport ne refasse jamais surface.

Un cas de figure qui apparaît aujourd'hui comme le plus probable tant la situation au Moyen-Orient est déjà instable. Il n'y a aujourd'hui que très peu de chance pour que l'administration Obama fasse le choix de fragiliser encore plus ses relations avec son allié Saoudien.

Source : Direct Matin, 12-04-2016

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I24 : 15/20

Idem Direct Matin.

28-i24

Riyad vendra ses actifs US en cas de vote d’un projet de loi sur le 11/09

Source : I 24 News, 16-04-2016

Le texte pourrait permettre de reconnaître une responsabilité des Saoudiens dans les attaques

L’Arabie saoudite a averti l’administration Obama qu’elle serait contrainte de vendre des centaines de milliards de dollars d’actifs si le Congrès américain adoptait un projet de loi donnant la possibilité aux tribunaux américains de reconnaître une responsabilité quelconque du gouvernement saoudien dans les attentats du 11 septembre 2001, rapporte samedi le New York Times.

Si l’administration Obama a tenté de bloquer le passage du projet de loi devant le Congrès, le Times révèle que des responsables du Département d’Etat et du Pentagone ont récemment évoqué les possibles retombées diplomatiques et économiques de cette loi sur les relations avec Riyad.

Le projet de loi en question pourrait permettre aux tribunaux américains de geler les actifs américains détenus par les Saoudiens, ce qui impliquerait une éventuelle liquidation avant que le texte ne soit adopté.

L’administration Obama a exercé d’intenses pressions contre le projet de loi, suscitant la colère des législateurs et des associations de victimes qui accusent les administrations Obama et Bush de couvrir l’implication de l’Arabie Saoudite dans les attentats du 11 septembre pour protéger les relations américano-saoudiennes.

Andrew Burton (Pool/AFP)

Andrew Burton (Pool/AFP)
“Eileen Esquilin pleure la perte de son frère pendant les cérémonies commémoratives organisées sur le site du World Trade Center à New York le 11 septembre 2014”

Les législateurs républicains ont exigé que l’administration Obama rende public un rapport secret de 28 pages qui prouverait que l’Arabie Saoudite a aidé à financer les attaques qui ont frappé les Etats-Unis en 2001. Les pages concernées du rapport ont été classées sous la présidence de George W. Bush, suscitant des spéculations sur une éventuelle implication de Riyad.

“Il est étonnant de penser que notre gouvernement pourrait soutenir les Saoudiens au dépend de ses propres citoyens”, a déclaré au New York Times Mindy Kleinberg, dont le mari a été tué dans les attentats du 11 septembre contre le World Trade Center, et qui fait partie d’une association de victimes faisant pression pour que le projet de loi soit adopté.

Lors d’un voyage à Washington le mois dernier, le ministre saoudien des Affaires étrangères Adel al-Jubeir a affirmé que le royaume serait contraint de vendre jusqu’à 750 milliards de dollars (665 milliards d’euros) de bons du Trésor et autres actifs américains si la loi était votée.

Mais selon des économistes cités par le Times, la menace saoudienne semble compliquée à mettre en œuvre, dans la mesure où la vente des actifs américains par Riyad paralyserait l’économie du royaume.

Une telle initiative pourrait perturber les marchés internationaux, les Saoudiens seraient pointés du doigt par tous, et le dollar, sur lequel la devise du royaume est indexée, serait déstabilisé, a expliqué Edwin M. Truman, chercheur à l’Institut d’économie internationale Peterson.

“Pour eux, la seule façon de nous punir est de se punir eux-mêmes”, a ajouté Truman.

Le président américain Barack Obama rencontrera le roi Salmane à Riyad mercredi afin de consolider les liens entre les deux pays alliés. Il s’agira de la quatrième visite du président américain à Riyad, depuis le début de son mandat.

Les relations entre les Etats-Unis et l’Arabie Saoudite ont été mises à mal ces dernières années avec le soutien d’Obama à l’accord sur le nucléaire iranien, et le soutien du dirigeant américain à certaines révoltes du printemps arabe.

Obama quittera Riyad jeudi soir, pour se rendre en Grande-Bretagne et en l’Allemagne.

Source : I 24 News, 16-04-2016

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Les Échos : 12/20

Vous notez que le titre ne parle que de “Polémique” (sic.) et que le sous-titre n’indique pas que la loi porte sur le 11 Septembre, l’incroyable chantage n’est pas abordé dans les titres

28-lesechos

11 Septembre : 4 questions pour comprendre la polémique entre États-Unis et Arabie saoudite

Source : Les Echos,AFP, 19-04-2016

L'Arabie saoudite a menacé les Etats-Unis de représailles économiques si une loi était votée par le Congrès américain.

Depuis quelques jours, les relations diplomatiques se sont tendues entre les Etats-Unis et l'Arabie saoudite. A la veille du déplacement de Barack Obama dans le royaume, partenaire privilégié des Américains au Moyen-Orient, une loi permettant aux citoyens américains d'attaquer en justice des Etats étrangers en cas d'attaque terroriste sur le sol américain a semé le trouble.

En quoi consiste cette loi ?

Comme le précise le New York Times, d'où est parti la polémique, le texte vise à permettre aux familles de victimes de terrorisme sur le sol américain de poursuivre en justice des Etats étrangers, pour des dédommagements. Depuis 1976, la législation américaine donne une immunité juridique aux Etats étrangers à l'intérieur du système judiciaire américain. Comme le 11 Septembre est le seul attentat terroriste à avoir été commis sur le sol américain, cette loi ne concernerait que cette attaque, de manière rétro-active.

Cette loi n'a pas encore été soumise à un vote au Congrès. Elle est soutenue par deux sénateurs : John Cornyn, un élu républicain du Texas, et Chuck Schumer, élu démocrate de l'état de New York. Cette alliance bipartisane, qui arrive rarement dans la politique américaine, est soutenue plus largement par une coalition d'autres sénateurs des deux camps. Le texte a passé le comité judiciaire du Sénat en janvier sans amendement.

Comment ont réagi Barack Obama et l'Arabie saoudite ?

Barack Obama s'est dit lundi 18 avril opposé à ce projet de loi. Si cette loi était votée au Congrès, Barack Obama a d'ores et déjà annoncé qu'il y apposera son veto.

« Notre inquiétude par rapport à cette loi n'est pas liée à son impact sur nos relations avec un pays en particulier, elle est liée à un principe important du droit international: l'immunité des Etats », a souligné Josh Earnest, porte-parole de l'exécutif américain. Remettre en cause ce principe pourrait, « si d'autres pays adoptaient une loi similaire, représenter un risque significatif pour les Etats-Unis, nos contribuables, nos militaires et nos diplomates » a-t-il souligné. Ce principe « permet aux pays de résoudre leurs différends grâce à la diplomatie et non pas à travers les tribunaux », a-t-il encore insisté.

Mais c'est du côté saoudien qu'est venu la réponse la plus directe. Selon le New York Times, le ministre saoudien des Affaires étrangères Adel al-Jubeir a averti des élus, lors d'une visite à Washington le mois dernier, qu'il pourrait vendre quelque 750 milliards de dollars en bons du Trésor américain et autres biens détenus aux Etats-Unis. De quoi causer des dégâts importants.

Pourquoi l'Arabie saoudite se sent-elle concernée ?

La loi vise implicitement l'Arabie saoudite. De fait, si aucune implication officielle n'a jamais été démontrée, 15 des 19 pirates de l'air étaient Saoudiens.

De plus, Zacarias Moussaoui, le Français condamné en liaison avec les attentats du 11 Septembre et surnommé le « 20e pirate de l'air », avait assuré à des avocats américains en février que des membres de la famille royale saoudienne avaient versé des millions de dollars à Al-Qaïda dans les années 1990.

Une affirmation immédiatement rejetée par l'ambassade d'Arabie saoudite mais qui avait rouvert le débat à Washington sur la nécessité de publier une partie encore classée du rapport de la commission d'enquête américaine sur le 11-Septembre. Vingt-huit pages qui évoqueraient, selon certains, le rôle possible de gouvernements étrangers.

La menace saoudienne est-elle à prendre au sérieux ?

Alors que le régime saoudien est aujourd'hui  en difficulté économique avec les cours très bas du pétrole, menacer de liquider des milliards de dollars paraît peu probable. Selon Edwin M. Truman,  cité par le New York Times , les Saoudiens ne font qu'exercer une « menace en l'air ». Selon ce chercheur à l'Institut Peterson pour l'économie internationale, vendre des centaines de milliards de dollars serait très délicat à faire techniquement et pourrait aussi entraîner des troubles économiques où les Saoudiens seront pointés du doigt.

Dans les couloirs du Capitole, le sénateur John Cornyn, un des auteurs du projet de loi, a exprimé ses « doutes » sur le fait que les Saoudiens « puissent mettre (leurs menaces) à exécution ». « Je ne comprends pas pourquoi ils sont sur la défensive. Ce n'est pas (un projet de loi) qui cible le gouvernement saoudien », a-t-il expliqué. « A moins qu'il y ait quelque chose dans ces 28 pages classifiées qu'ils redoutent et dont nous n'avons pas connaissance ».

Source AFP

Source : Les Echos,AFP, 19-04-2016

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France 24 : 11/20

On a de l’information, mais c’est mal mis en valeur…

28-france24

11-Septembre : ces 28 pages secrètes qui menacent les relations entre Washington et Riyad

Source : France 24, 21-04-2016

Alors que le président Obama entame une visite très attendue en Arabie saoudite ce mercredi, un débat fait rage aux États-Unis autour d'un rapport secret qui mettrait en évidence un rôle du royaume dans les attentats du 11-Septembre.

Vingt-huit pages qui sentent le soufre. Une partie encore classée du rapport de la commission d'enquête américaine sur le 11-Septembre, publié en 2003 et uniquement consultable par les membres du Congrès américain, continue d'entretenir les suspicions et les rumeurs les plus folles sur les attentats qui ont changé la face du monde, et surtout celle du Moyen-Orient.

Vingt-huit pages qui évoqueraient, selon certains responsables américains, le rôle joué par des parties étrangères dans les attaques, notamment par l'Arabie saoudite, pays d'origine de 15 des 19 pirates de l'air impliqués en 2001.

Quand l'ombre des pétrodollars saoudiens plane sur le 11-Septembre

Un reportage traitant de ces fameuses pages, récemment diffusé par la chaîne américaine CBS dans le cadre de l'émission “60 minutes”, a provoqué une onde de choc aux États-Unis. L'ancien sénateur Bob Graham, qui a contribué à la rédaction du rapport en question, y fait des déclarations extrêmement embarrassantes pour Riyad. Selon lui, une partie de ces 28 pages pourrait mettre en lumière un possible soutien saoudien aux pirates du 11-Septembre.

Lorsque le journaliste Steve Kroft lui demande de préciser ce qu'il veut dire par “un soutien saoudien”, “vous voulez dire le gouvernement… des personnes riches dans le pays … des associations de charité ?”, sa réponse est sans appel : “Une combinaison de tout cela”, réplique Bob Graham.

Si officiellement, côté américain, aucune implication directe des autorités saoudiennes n’a jamais été démontrée dans les attentats revendiqués par Al-Qaïda, Riyad est fréquemment accusé, en Occident, de financer des mouvements extrémistes et d'avoir favorisé la propagation du salafisme dans le monde arabe.

Les déclarations de l'ancien sénateur ont renforcé les suspicions des familles des victimes du 11-Septembre. Elles sont de plus en plus persuadées que l'administration américaine leur cache des informations cruciales au nom de la realpolitik. Les parties secrètes du rapport auraient été publiées depuis longtemps si elles n'étaient pas compromettantes, plaident-elles dans les médias américains.

Sous pression depuis la diffusion de cette émission et par les demandes répétées des familles et de certains élus, dont Nancy Pelosi, la chef de la minorité démocrate au Congrès, de déclassifier ces pages secrètes, Barack Obama est sorti de son silence, lundi 18 avril. Interrogé sur l'antenne de CBS, le président américain, qui a entamé,  mercredi 20 avril, une visite en Arabie saoudite, a révélé que de haut-responsables américains étaient en train d'étudier les documents classés sur le 11-Septembre.

Il a cependant précisé que James Clapper, le coordonnateur du renseignement américain, était en train de s'assurer que les documents qui seront susceptibles d'être déclassifiés ne porteront pas atteinte aux intérêts de sécurité nationale des États-Unis.

Un projet de loi qui fait enrager Riyad

Et pour cause, l'affaire des pages secrètes est revenue sur le devant de la scène à la faveur d'un projet de loi proposé par John Cornyn, sénateur républicain du Texas, et Chuck Schumer, élu démocrate de l’État de New York, qui irrite au plus haut point le royaume wahhabite, et met dans l'embarras l'administration Obama.

Le texte, qui a reçu le soutien d'élus démocrates et républicains, permettrait à des citoyens américains victimes du terrorisme de poursuivre des gouvernements étrangers afin d'obtenir des dédommagements. Jusqu'à présent, la loi américaine garantit une immunité juridique aux États étrangers à l'intérieur du système judiciaire des États-Unis. Concrètement, si le texte est adopté – il a passé le comité judiciaire du Sénat en janvier sans amendement – , des dirigeants saoudiens pourraient être traduits devant des tribunaux américains. D'où l'importance capitale, aux yeux des familles, du contenu secret du rapport de 2003.

Sans surprise, le projet de loi, (“The Justice Against Sponsors of Terrorism Act” en anglais), qui s'est invité dans le débat de la campagne présidentielle et qui a reçu l'appui de la démocrate Hillary Clinton, suscite déjà des frictions entre Washington et Riyad. Et les Saoudiens, qui se sentent implicitement visés par le texte, sont déterminés à faire échouer l'adoption d'une telle loi, à laquelle même Barack Obama est opposé.

Selon le New York Times, le ministre saoudien des Affaires étrangères, Adel al-Jubeir, aurait menacé, lors d’une visite à Washington effectuée le mois dernier, de vendre quelque 750 milliards de dollars en bons du Trésor américain et autres actifs et biens détenus aux États-Unis.

Realpolitk contre vérité

OB : ça alors, je n’avais encore jamais vu opposer RealPolitik et Vérité… !!!

Selon des médias américains, le secrétaire d'État, John Kerry, avait prévenu des élus que la loi, par ricochet, “pourrait exposer les États-Unis à des poursuites en justice” et “créer un terrible précédent”.

“Notre inquiétude par rapport à cette loi n'est pas liée à son impact sur nos relations avec un pays en particulier, elle est liée à un principe important du droit international : l'immunité des États”, a précisé de son côté, Josh Earnest, porte-parole de la Maison Blanche. Il a précisé que Barack Obama ne promulguera pas une telle loi.

Mais visiblement, il n'est pas uniquement question de principes de droit international pour la Maison Blanche. Josh Earnest a en effet rappelé l'attachement des États-Unis “à la préservation de la stabilité du système financier mondial”, alors qu'il était interrogé au sujet des menaces de rétorsion saoudiennes.

L'un des auteurs du texte de loi controversé, le sénateur John Cornyn, a exprimé ses “doutes” sur le fait que les Saoudiens “puissent mettre ces menaces à exécution”, tout en affirmant qu'il ne fallait pas “laisser des pays étrangers dicter la politique interne des États-Unis”. Il a dit ne pas comprendre pourquoi Riyad est sur la défensive. “À moins qu’il y ait quelque chose dans ces 28 pages classifiées qu’ils redoutent et dont nous n’avons pas connaissance”.

Realpolitik contre soif de vérité, le débat va devoir être tranché par Washington, même si nul n'imagine, vu les intérêts financiers et géostratégiques en jeu, une remise en question brutale d'une alliance historique entre Washington et Riyad. Et ce, même si leurs relations ne sont plus aussi harmonieuses que par le passé, et que les États-Unis ont donné leur feu vert à un retour sur le devant de la scène internationale du rival iranien, honni par la monarchie wahhabite.

Source : France 24, 21-04-2016

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RFI : 10/20

On a de l’information, mais ça reste télégraphique…

28-rfi

Arabie saoudite: l’ombre du 11 septembre 2001 plane sur la visite d’Obama

Source : RFI, Grégoire Pourtier, 19-04-2016

Le président américain Barack Obama est en visite officielle en Arabie saoudite ce mercredi 20 avril. A Riyad, il doit s’entretenir avec le roi Salman, alors que ces derniers jours, à Washington, un débat fait rage autour d’un projet de loi relatif aux attentats contre les tours du World Trade Center et le Pentagone le 11 septembre 2001. Le texte pourrait en effet établir une responsabilité de l’Arabie saoudite dans cet événement, et ainsi permettre aux familles de victimes de poursuivre le royaume pour réclamer des dédommagements considérables. Ce dernier a déjà prévenu que si cette loi était votée, il prendrait des mesures de représailles économiques.

Avec notre correspondant à New York,  Grégoire Pourtier

Depuis 15 ans, le rôle de l’Arabie saoudite dans les attentats du 11 septembre 2001 n’a jamais été démontré. Mais on sait qu’Oussama Ben Laden, le chef d’al-Qaïda, était d’origine saoudienne, tout comme 15 des 19 pirates de l’air. Quant au Français Zacarias Moussaoui, qui aurait lui aussi dû faire partie des kamikazes, il avait assuré que la famille royale saoudienne avait largement financé al-Qaïda dans les années 1990.

Si la Maison Blanche a manœuvré ces dernières semaines pour que la loi mettant en cause l’Arabie saoudite ne passe pas devant le Congrès, la polémique n’est cependant pas prête de s’éteindre.

Dans le rapport de la Commission d’enquête américaine, 28 pages sont restée confidentielles. Contiennent-elles des éléments à charge ? La Maison Blanche dit vouloir privilégier la diplomatie plutôt que de passer devant des tribunaux. Car remettre en cause le principe de l’immunité des Etats créerait un précédent dangereux, et les Etats-Unis pourraient à leur tour être attaqués en justice sur d’autres dossiers.

Barack Obama a ainsi dit qu’il apposerait son veto si la loi devait être votée. Cela pourrait calmer les dirigeants saoudiens, qui menacent déjà de représailles économiques, par exemple en vendant les bons du trésor américain et les avoirs qu’il possède aux Etats-Unis à hauteur de 750 milliards de dollars.

Source : RFI, Grégoire Pourtier, 19-04-2016

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Libération : 9/20

Euh un allié qui finance le 11 Septembre, c’est donc juste un “sujet épineux ???”

28-libe

Arabie saoudite: un projet de loi lié au 11-Septembre, autre sujet épineux pour Obama

Source : Libération, AFP, 18-04-2016

Déjà annoncée comme délicate, la visite de Barack Obama cette semaine à Ryad sera rendue encore plus épineuse par un projet de loi qui permettrait de mener les dirigeants saoudiens devant des tribunaux américains pour les attentats du 11-Septembre.

Ce texte, soutenu par des démocrates et des républicains, n'a pas encore été soumis à un vote au Congrès mais suscite déjà des tensions.

Selon le New York Times, le ministre saoudien des Affaires étrangères Adel al-Jubeir a averti des élus, lors d'une visite à Washington le mois dernier, de possibles conséquences coûteuses s'il était adopté. Le quotidien affirme qu'il a notamment menacé de vendre quelque 750 milliards de dollars en bons du Trésor américain et autres biens détenus aux Etats-Unis.

Si elle était adoptée, cette loi permettrait aux familles des victimes du 11 septembre 2001 de poursuivre, notamment, le gouvernement saoudien pour obtenir des dédommagements. Aucune implication de l'Arabie saoudite n'a jamais été démontrée mais 15 des 19 pirates de l'air étaient Saoudiens.

La Maison Blanche est opposée à cette loi («Justice Against Sponsors of Terrorism Act») et a averti que M. Obama opposerait son veto à ce texte s'il était voté par le Congrès.

«Note inquiétude par rapport à cette loi n'est pas liée à son impact sur nos relations avec un pays en particulier, elle est liée à un principe important du droit international: l'immunité des Etats», a souligné lundi Josh Earnest, porte-parole de l'exécutif américain.

Remettre en cause ce principe pourrait, «si d'autres pays adoptaient une loi similaire, représenter un risque significatif pour les Etats-Unis, nos contribuables, nos militaires et nos diplomates» a-t-il souligné.

Ce principe «permet aux pays de résoudre leurs différends grâce à la diplomatie et non pas à travers les tribunaux», a-t-il insisté.

Barack Obama rencontrera mercredi le roi Salmane à Ryad avant de participer jeudi à un sommet avec les pays du Conseil de coopération du Golfe (Arabie saoudite, Bahreïn, Emirats arabes unis, Koweït, Qatar, Oman).

En réintégrant l'Iran, grand rival chiite de l'Arabie saoudite, dans le jeu diplomatique et en renonçant à intervenir en Syrie contre le régime de Bachar al-Assad, le président des Etats-Unis a ulcéré les monarchies sunnites, partenaires de longue date des Etats-Unis.

Zacarias Moussaoui, le Français condamné en liaison avec les attentats du 11-Septembre et surnommé le «20e pirate de l'air», avait assuré à des avocats américains en février que des membres de la famille royale saoudienne avaient versé des millions de dollars à Al-Qaïda dans les années 1990.

Une affirmation immédiatement rejetée par l'ambassade d'Arabie saoudite mais qui avait rouvert le débat à Washington sur la nécessité de publier une partie encore classée du rapport de la commission d'enquête américaine sur le 11-Septembre. Vingt-huit pages qui évoqueraient, selon certains, le rôle possible de gouvernements étrangers.

AFP

Source : Libération, AFP, 18-04-2016

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La Croix : 9/20

Comme on est toujours dans la copier-coller AFP (sic.), la note reste la même.

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Arabie saoudite: un projet de loi lié au 11-Septembre, autre sujet épineux pour Obama

Source : La Croix, AFP, 18-04-2016

Déjà annoncée comme délicate, la visite de Barack Obama cette semaine à Ryad sera rendue encore plus épineuse par un projet de loi qui permettrait de mener les dirigeants saoudiens devant des tribunaux américains pour les attentats du 11-Septembre.

Ce texte, soutenu par des démocrates et des républicains, n’a pas encore été soumis à un vote au Congrès mais suscite déjà des tensions.

Selon le New York Times, le ministre saoudien des Affaires étrangères Adel al-Jubeir a averti des élus, lors d’une visite à Washington le mois dernier, de possibles conséquences coûteuses s’il était adopté. Le quotidien affirme qu’il a notamment menacé de vendre quelque 750 milliards de dollars en bons du Trésor américain et autres biens détenus aux Etats-Unis.

Si elle était adoptée, cette loi permettrait aux familles des victimes du 11 septembre 2001 de poursuivre, notamment, le gouvernement saoudien pour obtenir des dédommagements. Aucune implication de l’Arabie saoudite n’a jamais été démontrée mais 15 des 19 pirates de l’air étaient Saoudiens.

La Maison Blanche est opposée à cette loi (“Justice Against Sponsors of Terrorism Act”) et a averti que M. Obama opposerait son veto à ce texte s’il était voté par le Congrès.

“Note inquiétude par rapport à cette loi n’est pas liée à son impact sur nos relations avec un pays en particulier, elle est liée à un principe important du droit international: l’immunité des Etats”, a souligné lundi Josh Earnest, porte-parole de l’exécutif américain.

Remettre en cause ce principe pourrait, “si d’autres pays adoptaient une loi similaire, représenter un risque significatif pour les Etats-Unis, nos contribuables, nos militaires et nos diplomates” a-t-il souligné.

Ce principe “permet aux pays de résoudre leurs différends grâce à la diplomatie et non pas à travers les tribunaux”, a-t-il insisté.

Barack Obama rencontrera mercredi le roi Salmane à Ryad avant de participer jeudi à un sommet avec les pays du Conseil de coopération du Golfe (Arabie saoudite, Bahreïn, Emirats arabes unis, Koweït, Qatar, Oman).

En réintégrant l’Iran, grand rival chiite de l’Arabie saoudite, dans le jeu diplomatique et en renonçant à intervenir en Syrie contre le régime de Bachar al-Assad, le président des Etats-Unis a ulcéré les monarchies sunnites, partenaires de longue date des Etats-Unis.

Zacarias Moussaoui, le Français condamné en liaison avec les attentats du 11-Septembre et surnommé le “20e pirate de l’air”, avait assuré à des avocats américains en février que des membres de la famille royale saoudienne avaient versé des millions de dollars à Al-Qaïda dans les années 1990.

Une affirmation immédiatement rejetée par l’ambassade d’Arabie saoudite mais qui avait rouvert le débat à Washington sur la nécessité de publier une partie encore classée du rapport de la commission d’enquête américaine sur le 11-Septembre. Vingt-huit pages qui évoqueraient, selon certains, le rôle possible de gouvernements étrangers.

AFP

Source : La Croix, AFP, 18-04-2016

 

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FranceTV : 9/20

Titres pas trop mal, fond limité

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Obama en Arabie Saoudite : le projet de loi sur le 11-Septembre fâche Ryad

Source : Géopolis, Eléonore Abou Ez, 20/04/2016

Un nouveau texte de loi américain, à l'étude au Congrès, permettrait aux familles de victimes de terrorisme de poursuivre en justice des Etats étrangers. L'Arabie Saoudite est en ligne de mire et l'affaire empoisonne les relations entre les deux pays.

L'heure du vote n'a pas sonné mais Barack Obama a déjà annoncé son veto.
Interrogé le 18 avril 2016 par la chaîne américaine CBS News, le président américain a clairement exprimé son opposition au nouveau projet de loi. Une manière sans doute de calmer la tension à la veille de sa visite en Arabie Saoudite.

Les menaces de Riyad
Riyad n'apprécie pas du tout le projet de loi américain et le fait savoir. Selon le New York Times,le ministre des Affaires étrangères saoudien, Adel Al-Jubeir, avait mis en garde des élus américains contre les conséquences de l'adoption d'un tel texte. Il a notamment menacé de vendre quelques 750 milliards de dollars d'actifs américains.

Pourquoi l'Arabie Saoudite est concernée ?
Si le texte est voté, la nouvelle loi permettra aux familles des victimes de terrorisme sur le sol américain de poursuivre en justice des Etats étrangers, pour des dédommagements. Or, les attentats du 11-Septembre sont les seuls à avoir été commis aux Etats-Unis et la plupart des auteurs étaient des Saoudiens.

Aucune implication de Ryad n'a jamais été démontrée et l’attentat a été revendiqué par al-Qaïda. Mais de nombreuses questions sur le rôle de l’Arabie dans le financement de cette organisation terroriste restent sans réponse.

Le financement d'al-Qaïda en question
Le Français Zacarias Moussaoui, condamné pour ces liens avec les attentats du 11-Septembre, avait récemment assuré à des avocats américains que des membres de la famille royale saoudienne avaient versé des millions de dollars à al-Qaïda dans les années 90. Cette affirmation, démentie par Ryad, avait rouvert le débat à Washington sur la nécessité de déclassifier une partie du rapport de la commission d'enquête américaine sur le 11- Septembre.

28 pages qui portent peut-être sur le rôle de l’Arabie Saoudite et qui n'ont jamais été rendues publiques.

Par Eléonore Abou Ez avec agences

Source : Géopolis, Eléonore Abou Ez, 20/04/2016

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Le Monde : 9/20

Toujours de l’AFP mal digéré..

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Le projet de loi sur le 11-Septembre qui empoisonne Barack Obama avant sa visite en Arabie saoudite

Source : Le Monde, AFP, 19-04-2016

Interrogé par la chaîne CBS, lundi 18 avril, Barack Obama s'est dit opposé à un projet de loi qui permettrait de traduire les dirigeants saoudiens devant des tribunaux américains pour les attentats du 11 septembre 2001. Des déclarations qui interviennent à l'avant-veille de sa visite dans le royaume wahhabite.

Le texte, soutenu par des démocrates et des républicains, n'a pas encore été soumis à un vote au Congrès, mais il suscite déjà de vives tensions. M. Obama a d'ores et déjà annoncé qu'il y mettrait son veto. Ce sujet épineux risque de compliquer encore un peu plus la venue du président à Riyad.

Selon le New York Times, le ministre des affaires étrangères saoudien, Adel Al-Joubeir, a averti des élus, lors d'une visite à Washington le mois dernier, de possibles conséquences coûteuses si ce projet de loi était adopté. Le quotidien affirme qu'il a notamment menacé de vendre quelque 750 milliards de dollars en bons du Trésor américain et autres biens détenus aux Etats-Unis.

Principe de « l'immunité des États »

Le texte permettrait aux familles des victimes du 11-Septembre de poursuivre, notamment, Riyad pour obtenir des dédommagements. Aucune implication de l'Arabie saoudite n'a jamais été démontrée, mais 15 des 19 pirates de l'air étaient des ressortissants du pays.

« Notre inquiétude par rapport à cette loi n'est pas liée à son impact sur nos relations avec un pays en particulier, elle est liée à un principe important du droit international : l'immunité des Etats », a souligné un peu plus tôt dans la journée Josh Earnest, porte-parole de l'exécutif américain.

Remettre en cause celui-ci pourrait, en cas d'adoption de textes similaires par d'autres Etats, « représente un risque significatif pour les Etats-Unis, nos contribuables, nos militaires et nos diplomates ». Ce principe de l'immunité « permet aux pays de résoudre leurs différends grâce à la diplomatie et non pas à travers les tribunaux ».

Rôle possible de gouvernements étrangers

Barack Obama rencontrera mercredi le roi, Salman Al-Saoud, à Riyad avant de participer le lendemain à un sommet avec les pays du Conseil de coopération du Golfe − dont sont aussi membres Bahreïn, les Emirats arabes unis, le Koweït, le Qatar et Oman.

Zacarias Moussaoui, le Français condamné en lien avec les attentats du 11-Septembre et surnommé le « 20e pirate de l'air », avait assuré à des avocats américains en février que des membres de la famille royale saoudienne avaient versé des millions de dollars à Al-Qaida dans les années 1990.

Une affirmation immédiatement rejetée par l'ambassade d'Arabie saoudite, mais qui avait rouvert le débat à Washington sur la nécessité de publier une partie encore classée du rapport de la commission d'enquête américaine sur le 11-Septembre. Vingt-huit pages qui évoqueraient, selon certains, le rôle possible de gouvernements étrangers.

Source : Le Monde, AFP, 19-04-2016

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Donc comme on l’a vu, l’information n’a pas été totalement absente.

À vous de juger si elle a été traité dans les normes de ce qu’on doit attendre de journaux en Démocratie.

En tous cas, il n’y a eu généralement aucune suite à ces articles

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On comparera à la fin avec la couverture des journaux américains :

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Pourtant quand Le Monde veut bien, comme ici avec les Panama Papers… :

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[2004] La piste pakistanaise, par Michael Meacher

[2004] La piste pakistanaise, par Michael Meacher

Article de 2004 d’un ancien ministre dans le très respectable Guardian…

Un parmi tant d’autres sur l’implication de l’ISI – sponsor des talibans…

Source : The Guardian, le 22/07/2004

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Il existe des preuves d’un soutien par un service de renseignement étranger des pirates du 11 septembre. Pourquoi le gouvernement des États-Unis s’applique-t-il à le cacher ?

Le jeudi 22 Juillet 2004

Au Pakistan, Omar Cheikh, un militant islamiste né en Grande-Bretagne, attend son exécution par pendaison pour un meurtre qu’il n’a sans doute pas commis : celui du journaliste du Wall Street Journal Daniel Pearl en 2002. Le gouvernement des États-Unis ainsi que la femme de Pearl ont depuis reconnu que Cheikh n’était pas responsable. Pourtant, le gouvernement pakistanais se refuse à entendre d’autres personnes récemment suspectées d’être impliquées dans le kidnapping et le meurtre de Pearl, de crainte que les preuves produites au tribunal ne mènent à un acquittement de Cheikh et n’en révèlent trop.

Cheikh est aussi l’homme qui, avant les attentats du 11 septembre, a viré 100 000 $ au coordinateur des détournements Mohamed Atta, sur un ordre du général Mahmoud Ahmed, alors directeur du Service du Renseignement pakistanais (Inter-Services Intelligence – ISI). Il est quand même surprenant que ni Ahmed, ni Cheikh n’ont été ni poursuivis ni jugés pour ces faits. Pourquoi ?

Ahmed, le trésorier des pirates, était en fait à Washington le 11 septembre. Il a participé avant le 11 septembre à une série de réunions au sommet à la Maison-Blanche, au Pentagone, au Conseil national de sécurité, avec Georges Tenet, alors chef de la CIA, et avec Marc Grossman, le sous-secrétaire d’État aux affaires politiques. Quand le Wall Street Journal a révélé qu’Ahmed avait envoyé de l’argent aux pirates de l’air, le président Pervez Mucharraf l’a obligé à « prendre sa retraite. » Pourquoi est-ce que les États-Unis n’ont pas alors demandé à ce qu’il soit interrogé et poursuivi en justice ?

Une autre personne qui en connaît sûrement beaucoup sur ce qui a conduit au 11 septembre, c’est Khaled Cheikh Mohamed (KCM). On prétend qu’il a été arrêté à Rawalpindi le 1er mars 2003. Une enquête conjointe du Sénat et du House Permanent Select Committee on Intelligence en juillet 2003 indiquait : « KCM semble être un des lieutenants en lesquels Ben Laden a le plus confiance, et il a été actif dans le recrutement de personnes susceptibles de voyager hors d’Afghanistan, et notamment aux États-Unis, en tant que représentant de Ben Laden. » Selon ce rapport, cela impliquait clairement qu’ils avaient pris part à la planification d’actions en lien avec des terroristes.

La CIA a envoyé le rapport au FBI, mais apparemment aucune agence n’a trouvé important qu’un lieutenant de Ben Laden envoie des terroristes aux É-U en leur demandant d’établir des contacts avec des collègues déjà sur place. Depuis, le New York Times a pourtant écrit : « Les autorités américaines ont dit que KCM, une fois commandant opérationnel en chef d’al-Qaïda, avait personnellement exécuté Daniel Pearl… mais qu’il était peu probable qu’il soit accusé du crime dans un tribunal américain, à cause du risque de divulguer des informations classifiées. » En effet, il ne sera peut-être jamais poursuivi en justice.

Un quatrième témoin est Sibel Edmonds. À 33 ans, cette Turco-Américaine est une ancienne traductrice des renseignements du FBI, parlant couramment le farsi, la langue majoritaire en Iran et en Afghanistan, et habilitée au plus haut niveau. Elle a tenté de dénoncer la dissimulation de renseignements nommant une partie des responsables de l’orchestration des attentats du 11 septembre ; ces renseignements sont maintenant protégés par deux ordonnances de non-publication, ce qui lui interdit de témoigner au tribunal et de mentionner le nom de ces personnes ou les pays impliqués. Elle a dit : « Mes traductions des écoutes relatives au 11 septembre traitaient de blanchiment d’argent [des terroristes], des informations détaillées avec des dates précises… s’il y avait une véritable enquête, nous aurions de nombreux procès criminels dans ce pays [les É-U]… et croyez-moi, ils feront tout pour cacher cela. »

De plus, le procès aux É-U de Zacharias Moussaoui (le 20e pirate présumé) risque de s’effondrer, apparemment à cause de « la réticence de la CIA à autoriser des proches lieutenants d’Oussama ben Laden à témoigner au procès. » Deux des conspirateurs présumés ont déjà été relâchés pour cette même raison en Allemagne.

En toute illégalité, le FBI continue de refuser la publication de Fatal Betrayals of the Intelligence Mission [fatale trahison des missions de renseignement], un manuscrit de 500 pages écrit par leur agent Robert Wright. Le FBI a même refusé de remettre le manuscrit au sénateur Shelby, vice-président de la commission d’enquête sur le renseignement chargée des investigations sur les failles du renseignement américain relatives au 11 septembre. Par ailleurs, le gouvernement des États-Unis refuse toujours de déclassifier 28 pages secrètes d’un rapport récent sur le 11 septembre.

La rumeur a couru disant que Pearl s’intéressait particulièrement à tout rôle joué par les É-U dans l’entraînement ou le soutien de l’ISI. Daniel Ellsberg, l’ancien lanceur d’alerte du ministère de la Défense des États-Unis qui a accompagné Edmonds au tribunal, a déclaré : « Il me paraît tout à fait plausible que le Pakistan ait été très impliqué dans ceci… Parler du Pakistan, pour moi, est comme parler de la CIA car… il est difficile de dire si l’ISI savait quelque chose dont la CIA n’avait pas connaissance. » Les relations étroites entre Ahmed et la CIA sembleraient le confirmer. Pendant des années, la CIA a utilisé l’ISI comme canal pour injecter des milliards de dollars destinés aux groupes militants islamistes en Afghanistan, que ce soit avant ou après l’invasion soviétique de 1979.

Depuis le début des années 80, avec le soutien de la CIA, l’ISI s’est développé en structure parallèle, un État dans l’État, avec des employés et des informateurs que certains estiment à 150 000. Il détient un énorme pouvoir sur tous les aspects du gouvernement. Le cas Ahmed confirme que des membres de l’ISI ont directement soutenu et financé Al-Qaïda, et il est établi depuis longtemps que l’ISI a agi comme intermédiaire au nom de la CIA dans des opérations de renseignement.

Le sénateur Bob Graham, président de la commission permanente du Sénat sur le renseignement, a dit : « Je pense qu’il existe de nombreuses preuves probantes qu’au moins quelques terroristes étaient assistés et non uniquement financés… par un gouvernement étranger souverain. » Dans ce contexte, Horst Ehmke, ancien coordinateur des services secrets d’Allemagne de l’Ouest, a observé : « Les terroristes n’ont pas pu mener à bien une telle opération avec quatre avions détournés sans le soutien d’un service secret. »

Cela pourrait donner un sens à la réaction au sujet du 11 septembre de Richard Clarke, le chef du contre-terrorisme à la Maison-Blanche, quand il a vu la liste des passagers le jour même : « J’étais sidéré… qu’il y ait sur ce vol des agents d’al-Qaïda enregistrés avec des noms connus par le FBI pour être des membres d’al-Qaïda. » Comme lui a dit le directeur du contre-terrorisme au FBI, Dale Watson, c’était simplement que « la CIA avait oublié de nous en parler. »

Michael Meacher est Membre du Parlement, parti Travailliste, circonscription de Oldham West and Royton. Il a été ministre de l’Environnement de 1997 à 2003.

Source : The Guardian, le 22/07/2004

Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.

Interview exclusive de l’ancien président du Brésil Lula da Silva, par Glenn Greenwald

Interview exclusive de l'ancien président du Brésil Lula da Silva, par Glenn Greenwald

Source : The Intercept_, le 11/04/2016

Photo: Erick Dau for The Intercept

Photo: Erick Dau for The Intercept

Glenn Greenwald

Le 11 avril 2016

La vie de l’ancien président du Brésil, Luiz Inacio Lula da Silva (“Lula”) a suivi une trajectoire peu commune. Né dans une extrême pauvreté, Lula a quitté la présidence en 2010 après deux mandats, avec une cote de popularité jamais atteinte de 86%. Il était semble-t-il destiné à profiter du respect de tous dans le monde et à rester l’un des plus grands hommes d’État de l’histoire contemporaine. Tout comme Tony Blair et Bill et Hillary Clinton après l’exercice de leur fonction, Lula a engrangé une fortune personnelle depuis la fin de son mandat en donnant des conférences et en fournissant des services de conseil à des centres de pouvoir global. Le parti de la gauche modérée qu’il a cofondé, le Parti des Travailleurs (PT) assure la présidence depuis maintenant quatorze ans sans interruption.

Des manifestants montrent une énorme poupée gonflable à l'effigie de l'ancien président du Brésil Luiz Inacio Lula da Silva en tenue de prisonnier et l'actuelle présidente Dilma Rousseff habillée en voleuse, avec une écharpe où on peut lire

Des manifestants montrent une énorme poupée gonflable à l’effigie de l’ancien président du Brésil Luiz Inacio Lula da Silva en tenue de prisonnier et l’actuelle présidente Dilma Rousseff habillée en voleuse, avec une écharpe où on peut lire “Impeachment” [“destitution”] à Sao Paulo, Brésil, dimanche 13 mars 2016. Photo Andre Penner/AP

Mais tout cela, la totalité de l’héritage de Lula, est désormais sérieusement menacé. Un grave scandale de corruption très étendu et qui concerne la compagnie pétrolière nationale Petrobras engloutit l’élite économique et politique, avec le PT en son centre. Sa protégée et successeur choisie, ancienne militante marxiste anti-dictature et actuelle présidente, Dilma Rousseff, fait face à une menace crédible d'”Impeachment” (soutenue à présent par une majorité de brésiliens) et à une très large impopularité en raison d’une sévère et insurmontable récession. D’importants membres du PT ont été arrêtés et mis en prison. D’importantes manifestations de rue aussi bien en faveur que contre “l’impeachment” ont récemment mal tourné, avec des confrontations physiques de plus en plus fréquentes.

Lula lui-même a récemment été impliqué dans l’enquête criminelle (connue sous le nom d'”Opération lavage auto”), brièvement détenu par la police fédérale pour interrogatoire, accusé par l’ancien dirigeant de son parti au Sénat (devenu informateur) d’avoir dirigé un énorme dispositif de pots de vin et de rétro commissions. Il a été mis sur écoute par la justice – des enquêteurs ont rendu publics des enregistrements de ses appels téléphoniques –, il est formellement inculpé d’avoir reçu et caché des cadeaux suspects (y compris une maison et une ferme). En conséquence, sa cote de popularité au Brésil s’est effondrée.

Néanmoins, grâce au support ancré dans une large partie de la population pauvre du Brésil, sa cote de popularité est toujours plus élevée que la plupart des autres politiciens nationaux majeurs (qui doivent eux-mêmes combattre des accusations de corruption), et il est largement admis que Lula se représentera à la présidentielle au terme du mandat de Dilma – que ce soit en 2018 comme prévu ou plutôt si elle est destituée ou si elle démissionne. Personne qui a regardé la carrière de Lula – incluant ceux qui veulent le voir emprisonné – ne peut négliger l’hypothèse qu’il sera à nouveau président du Brésil (un nouveau sondage publié aujourd’hui montre Lula remportant la course présidentielle avec l’évangéliste/environnementaliste Marina Silva).

Lula a violement démentit les accusations portées contre lui et se présente lui-même comme une “victime” de la toujours-puissante classe ploutocratique du Brésil et de ses organes de presse qui forgent l’opinion publique. Il ajoute que le ciblage du PT est dû à l’incapacité de ces élites de battre le parti lors de quatre élections directes, et la crainte que Lula, une fois de plus, se lance et gagne. Il y a deux semaines, The Intercept publia un long article sur le scandale et sur les dangers qu’il pose pour la démocratie brésilienne, que j’ai écrit avec Andrew Fishman et David Miranda ; la semaine dernière, nous avons publié une version condensée dans les pages “lettre ouverte” du plus grand journal du Brésil, Folha de Sao Paulo. La prise de conscience que la destitution est dirigée à leur profit par des politiciens et des partis qui font face à des accusations de corruption beaucoup plus sérieuses que celles qui se répandent et visent Dilma a bloqué l’élan de la campagne pro-destitution qui, il y a seulement quelques semaines, semblait inévitable.

Vendredi, à l’institut Lula de Sao Paulo, j’ai mené la première interview face à face que Lula a donné depuis l’émergence de ces récentes controverses. Nous avons discuté des différents aspects du scandale de la corruption, la campagne de destitution, les accusations contre lui, son avenir politique ainsi que celui du PT, et le rôle du plus important média brésilien de droite dans l’incitation au changement de gouvernement. Nous avons aussi discuté de sa vision sur d’autres sujets brûlant d’actualité, comme les nouvelles lois antiterrorisme et d’espionnage, la guerre contre la drogue, les atroces conditions dans les prisons du pays, les droits LGBT, l’avortement, et le rôle des dons des entreprises dans les élections brésiliennes.

 

GLENN GREENWALD : Bonjour M. le président. Merci pour l’interview.

LUIZ INACIO LULA DA SILVA : Bonjour.

GREENWALD : Commençons par l’enquête dans l’opération “Lava Jato” (Lavage Auto). En 2008, la fraude et la corruption de Wall Street créa une terrible crise financière. Cela conduisit à un terrible calvaire économique pour beaucoup de pays, dont le Brésil, qui se poursuit aujourd’hui.

Plus incroyable, pas un seul homme d’affaires n’est allé en prison ou n’a été inquiété pour ces crimes. Cela donna à penser que les riches et puissants sont au-dessus des lois. Seuls les pauvres et les démunis sont punis pour leurs crimes.

Cependant ici au Brésil, avec l’opération Lava Jato, on voit le contraire : les riches et puissants du pays vont en prison. Milliardaires, magnats, des membres de presque tous les partis politiques.

Je sais que vous avez de nombreuses objections à propos de cette méthode. J’ai moi aussi signalé que le comportement du juge Sergio Moro (chef de l’opération Lava Jato) est devenu politique.

Cependant, êtes-vous d’accord qu’il y a un aspect positif pour le moment ? Cela lance un puissant message, disant que tous – qu’importe leur pouvoir, connections ou richesse – sont concernés par cette loi ?

DA SILVA : D’abord, notre parti, le PT (Parti des Travailleurs), le gouvernement et moi-même n’avons aucune raison d’être inquiétés par les enquêtes en ce que le gouvernement est à l’origine de ce qu’il est en train de se passer. Ce fut durant le gouvernement du PT que nous avons créé les conditions pour que nos institutions fonctionnent correctement.

Notre gouvernement a renforcé l’autonomie du bureau du procureur en nommant toujours un procureur choisi par ses pairs. Nous sommes ceux qui ont fait de la Police fédérale une institution qui fonctionne. Nous avons investi dans l’embauche de nouveaux professionnels, l’échange d’informations et l’autonomie de la Police fédérale.

Nous sommes ceux qui ont créé les sites internet sur la transparence du gouvernement. Nous avons mis en place une loi qui autorise tout journaliste à obtenir toute information du gouvernement à n’importe quel moment.

Nous sommes ceux qui ont renforcé les pouvoirs du Contrôleur des biens publics, qui est en charge de surveiller n’importe quel ministre et d’envoyer ses découvertes à la Cour des comptes. Nous sommes ceux qui ont développé – avec la Cour des comptes – une méthode qui lui a donné plus de latitude dans cette surveillance.

Donc, avant toute chose, le gouvernement a des responsabilités dans tout ce qui est en train de se passer.

Deuxièmement, je crois qu’il est important que pour la première fois les riches soient arrêtés. Au Brésil, nous arrêtions les pauvres pour avoir volé du pain, mais pas les riches pour avoir volé un milliard. Nous arrêtions des pauvres pour avoir volé des médicaments, mais pas un seul riche pour évasion fiscale.

Photo: Laura Colucci/Fireworx Media

Photo: Laura Colucci/Fireworx Media

GREENWALD : Est-ce le côté positif des choses ?

DA SILVA : Oui, c’est le côté positif – qui, je crois, est très important en ce qu’il nous permet de rêver que le Brésil sera un pays sérieux un jour.

Qu’est-ce que je vois comme négatif ? C’est une question que je me pose chaque jour de cette enquête. Pour que cette enquête avance, est-il vraiment nécessaire de transformer cela en “téléréalité”, de faire exploser un feu d’artifices chaque jour ? Et ne jamais tenir compte du fait que, avec un gros titre ou un passage à la télévision, vous pourriez condamné quelqu’un qui va plus tard se révéler innocent ?

Est-il possible de conduire la même enquête, d’arrêter les mêmes gens sans la pyrotechnie ? Je le crois.

Est-il possible d’analyser combien coûte cette opération, combien d’argent retournera à nos comptes publics et combien cela coûte au pays ? Combien cette opération coûte à notre PIB, notre taux de chômage, quels sont les investissements qui quittent le pays.

GREENWALD : Mais pensez-vous que cette procédure a pour objet de détruire le PT ? Parce que 60% des politiciens accusés appartiennent au PP, un parti de l’aile droite, pas au PT.

DA SILVA : Je m’attarderai sur cette question du PT parce que j’espère qu’il y aura une question spécifique à venir. Avant toute chose, lorsque vous créez une loi, établissez les conditions pour que les institutions fonctionnent bien, il n’y a pas de protection – la seule protection est celle qui suit la loi. C’est faire les choses bien, ne pas faire d’erreurs. Et si le PT fait des erreurs, le PT doit payer pour cela comme tous les autres partis politiques ou toute autre personne qui n’appartient pas à un parti, parce qu’après tout la loi s’applique à tous. C’est la façon de consolider la démocratie au Brésil et partout ailleurs sur terre.

Deuxièmement, ce que je trouve bizarre avec la transaction pénale, et je le dénonce depuis décembre 2014, ce n’est pas quelque chose de nouveau, ce que je trouve bizarre c’est comment l’information fuite de manière sélective. Et c’est généralement conte le PT. Lorsqu’il y a une accusation contre un autre parti politique, la presse en parle en petits caractères. C’est à la télévision pendant 5 secondes. Lorsqu’il s’agit du PT, vous avez 20 minutes à la télévision, la première page des journaux, ce qui rend clair comme de l’eau de roche que ces deux dernières années il y a une tentative de criminaliser le PT.

GREENWALD : Oui, nous parlerons de cela dans quelques minutes. Mais avant cela, je veux vous demander : à plusieurs occasions vous avez utilisé le terme “coup d’État” pour décrire la procédure de destitution contre la présidente Dilma. La Constitution brésilienne établit explicitement la possibilité de la destitution. Et cette procédure est menée sous l’autorité de la Cour suprême, avec onze membres : huit choisis par le PT, trois par vous-même et cinq autres par la présidente Dilma. Et cette cour a rendu plusieurs décisions en votre faveur. Comment cette procédure peut-elle être appelée coup d’état ?

Une manifestante tenant un drapeau avec écrit en portugais sur un autocollant « A bas le coup d'État, non à la destitution » lors d'une manifestation de soutien à la présidente du Brésil Dilma Rousseff et de l'ancien président Luiz Inacio Lula da Silva à Sao Paulo, au Brésil, 31 mars 2016. Photo: Andre Penner/AP

Une manifestante tenant un drapeau avec écrit en portugais sur un autocollant « A bas le coup d’État, non à la destitution » lors d’une manifestation de soutien à la présidente du Brésil Dilma Rousseff et de l’ancien président Luiz Inacio Lula da Silva à Sao Paulo, au Brésil, 31 mars 2016. Photo: Andre Penner/AP

DA SILVA : Elle a aussi rendu des décisions contre nous à plusieurs reprises. Laissez-moi vous dire…

GREENWALD : Tous les tribunaux font cela. Mais comment peut-il y avoir un coup d’État lorsque cela se produit sous l’autorité d’une cour de justice ?

DA SILVA : Je vais vous dire pourquoi c’est un coup d’État. C’est un coup d’État parce que quoique la Constitution brésilienne permette la destitution, il est nécessaire pour la personne d’avoir commis ce qui est appelé un crime ou un délit. Et la présidente Dilma n’a commis ni crime ni délit. Par conséquent, ce qui se passe actuellement est une tentative par certains de prendre le pouvoir  au mépris du vote populaire.

Chacun a le droit de vouloir devenir président, tout le monde. Ils n’ont qu’à se présenter. J’ai perdu trois élections, trois ! Je n’ai pris aucun raccourci. J’ai attendu 12 ans pour devenir président. Toute personne qui veut devenir président, au lieu d’essayer de faire tomber le président, peut se présenter à une élection. J’en ai fait trois et je ne me suis pas mis en colère.

Voilà pourquoi je pense que la destitution est illégale. Il n’y a eu ni crime ni délit. En effet, je pense que ces gens veulent renverser Dilma de ses fonctions au mépris de la loi. La réalisation, la façon dont je le vois, un coup d’État. Voilà ce qu’il est : un coup d’État.

GREENWALD : Ils ne peuvent gagner les élections. Je veux vous demander : le PT a demandé la destitution de trois présidents avant vous. Croyez-vous que ces trois présidents aient été impliqués dans des crimes ou délits qui justifiaient leur destitution ?

DA SILVA : Non. Le PT a demandé la destitution de Collor et cela parce qu’il avait commis des crimes et délits. Avec Fernando Henrique Cardoso, la Chambre des députés n’a pas accepté la requête. Donc elle est morte d’elle-même. Peut-être parce qu’il n’y avait pas de crimes ou de délits. Maintenant, cette demande de destitution ne pouvait pas non plus être niée.

Pourquoi a-t-elle été demandée? Pourquoi ont-ils ouvert une procédure et l’ont-ils envoyée à la commission? Parce que le président de la chambre était en colère parce que le PT n’a pas voté avec lui au comité éthique et il a alors décidé de s’en prendre en retour au PT en essayant de fabriquer cette destitution de la présidente Dilma, ce qui est selon moi un gigantesque abus dans ce scénario politique.

Réunion pour les élections présidentielles à Sao Bernardo Do Campo en 1989. Photo: Gamma-Rapho/Getty Images

Réunion pour les élections présidentielles à Sao Bernardo Do Campo en 1989. Photo: Gamma-Rapho/Getty Images

GREENWALD : Je voudrai parler d’Edouardo Cunha, le président de la Chambre des députés. La preuve qu’il est impliqué dans des faits de corruption est incontestable. Ils ont découvert ses comptes en Suisse remplis de millions de dollars qu’il ne peut expliquer. Il a clairement menti au Congrès lorsqu’il a nié avoir des comptes bancaires à l’étranger. Comment peut-on expliquer aux étrangers – et aux Brésiliens – comment un homme si corrompu peut, pas seulement rester chef du Congrès national, mais également mener une procédure de destitution contre la présidente ?

DA SILVA : Ce qui est encore plus grave c’est la façon dont la presse le traite de manière tout à fait normale, contrairement à Dilma. En vérité, Dilma est jugée par des gens qui ont été accusés de crimes. Et elle n’a pas une seule accusation contre elle. L’accusation contre elle est celle d’irrégularités budgétaires. Et cette accusation n’est pas un crime et son budget n’a même pas été revu par le Congrès national.

GREENWALD : Expliquez-moi cela, parce que je pense qu’il y a beaucoup d’étrangers qui ne peuvent le comprendre.

DA SILVA : Il n’y a pas d’explication, à part que certaines personnes dans ce pays perdent la raison. Le Congrès national pourrait montrer un peu de dignité en tenant compte du fait qu’ils ne sont pas dans les conditions politiques pour mener un procès contre Dilma comme ils le font. Edouardo Cunha n’a pas la respectabilité nécessaire, au Congrès, ou dans la société, pour le mener. Mais cela continue, parfois même sous la protection de certains secteurs des médias, ce qui je pense est très grave.

Ce qui m’inquiète le plus dans tout cela c’est que le Brésil ne connaît la démocratie que depuis 31 ans. Cela a été notre plus longue période de démocratie ininterrompue. Et ce que nous sommes en train de faire actuellement, c’est tenter de jouer avec la démocratie. Et nous ne devrions pas jouer avec la démocratie, parce que chaque fois que nous le faisons, chaque fois que nous nions la politique, ce qui vient après est pire.

GREENWALD : Il existe de solides preuves de corruption au sein des partis d’opposition au gouvernement du PT – c’est clair – mais êtes-vous d’accord qu’il existe également un sérieux problème de corruption au sein du PT ?

DA SILVA : Laissez-moi vous dire quelque chose : jusqu’à présent, il y a une négociation de peine dans une affaire contre le trésorier du PT. Il était impliqué pendant une négociation de peine et le cas est toujours en attente de procès. Il dit qu’il ne l’a pas fait. Dans cette procédure vous avez une négociation. Un homme d’affaires peut sans sortir en essayant de rejeter la faute sur quelqu’un d’autre. N’importe quand, quelqu’un peut vous accuser d’avoir reçu de l’argent d’une société.

Ce que je trouve fantastique et ironique c’est que c’est comme si les sociétés avaient deux types de comptes : un avec de l’argent propre et un avec de l’argent de sale. Celui contenant l’argent propre est pour le PWDB, le PMDB et les autres partis. Alors que celui avec l’argent sale est pour le PT. Croire cela c’est de la démence, c’est le moins que l’on puisse dire. C’est, au mieux, un échec quant à la compréhension de ce moment historique… et je ne dis pas que le PT est exempt de tout reproche, et si le PT est coupable il devra payer comme n’importe quel autre parti. Le PT n’est pas à l’abri – ce que je dis c’est qu’en cette période…

GREENWALD : Mais il y a un sérieux problème.

DA SILVA : En cette période historique, ce qui est réel, c’est une tentative de criminaliser le PT, de renverser Dilma et d’empêcher toute possibilité à Lula de revenir un jour comme candidat aux présidentielles dans ce pays.

GREENWALD : Je comprends votre raisonnement et tout ce que vous venez de dire, mais je veux être très clair concernant ma question. Croyez-vous… qu’il y ait de sérieux problèmes, je pense à des cas de corruption encore pire dans d’autres partis, y compris au sein de ceux qui mènent actuellement la procédure de destitution contre Dilma. Mais vous, en tant que l’un des membres fondateurs du PT, la personne la plus importante du PT avec la présidente Dilma, admettez-vous qu’il y a un sérieux problème de corruption dans votre parti ?

DA SILVA : Je pense qu’il y a un problème dans mon parti. Je ne crois pas… laissez-moi vous dire une chose, lorsque le scandale “mensalão” a commencé, certains secteurs des médias ont dit que c’était la plus grande affaire de corruption dans l’histoire de la planète. Puis la procédure a débuté et c’est devenu de plus en plus difficile d’apporter des preuves.

Puis, pour consolider leur affaire, ils ont sorti la notion de “prévalence des faits”, la théorie de la “prévalence des faits”. Ce qui signifie qu’ils n’avaient pas à apporter une quelconque preuve. Vous dirigez l’organisation? Alors vous êtes responsable. C’est ainsi que ça s’est passé durant le scandale “mensalão”. Maintenant ils construisent une nouvelle théorie. Nous menons notre campagne en octobre 2014 et un magazine publie en couverture : “Lula et Dilma étaient au courant de tout.” Vous vous souvenez de cela ?

GREENWALD : Oui, bien sûr.

DA SILVA : Laissez-moi vous dire une chose. Ça fait deux ans. Chaque jour il y a un article, chaque jour il y a un tweet, chaque jour je reçois l’information : “Regardez, ils ont arrêté untel et untel qui sont sur le point de tout révéler sur l’implication de Lula.”

GREENWALD : Juste pour clarifier un point : l’ancien dirigeant du PT au Sénat a dit que vous saviez à propos du système de pots de vin et que vous les commandiez.

DA SILVA : Laissez-moi vous dire, Delcidio voulait sortir de prison. Delcidio avait de forts liens avec Petrobras, même avant le PT. Il était fortement lié à Petrobras pendant la présidence de Fernando Henrique Cardoso. Il avait une forte connexion avec Petrobras parce qu’il était sur le terrain depuis longtemps. Pour résumer : Delcidio a menti sans vergogne.

GREENWALD : Pourquoi?

DA SILVA : Pour sortir de prison. Selon toute évidence, pour sortir de prison.

Photo: Laura Colucci/Fireworx Media

Photo: Laura Colucci/Fireworx Media

GREENWALD : De nombreuses recherches ont révélé un fort sentiment généralisé d’indignation vis-à-vis du gouvernement et du PT, y compris venant de personnes qui les soutenaient depuis longtemps. Croyez-vous que toute cette colère envers le PT est illégitime ou acceptez-vous que dans certains cas elle soit justifiée ?

DA SILVA : Je ne crois pas que la haine qui a été encouragée contre le PT l’emportera. Aujourd’hui nous vivons une période où la haine contre le PT est alimentée 24 heures sur 24 C’est le parti qui a le plus fait progresser les politiques sociales dans le pays. Le parti qui, en seulement douze ans, a changé l’histoire de ce pays. Nous avons donné aux travailleurs un visage ; nous avons donné un visage et une citoyenneté aux démunis. Tout ce qu’ils n’ont jamais eu. C’est pourquoi la haine est encouragée par des gens qui ne savent pas comment partager l’espace public avec des gens qui viennent d’en bas.

Je me sens en paix et c’est pourquoi je peux débattre de cela en toute tranquillité. Parce que je peux dire : je doute qu’il y ait un homme d’affaires, ami ou adversaire, qui puisse dire qu’il a un jour négocié un quelconque deal malhonnête avec moi. Je vois les choses arriver, j’assiste aux mensonges, je vois les inventions contre Lula. Ils ont fabriqué un appartement qui était censé m’appartenir. Quelqu’un va devoir me donner cet appartement.

GREENWALD : Mais êtes-vous conscient qu’il y a beaucoup de gens, y compris des partisans du PT, qui souffrent dans cette économie ? Bien sûr, vous en avez conscience.

DA SILVA : Oui.

GREENWALD : Et le gouvernement du PT – et je sais qu’il y a beaucoup de causes qui n’ont rien à voir avec le gouvernement et concernent l’économie globale et la Chine– mais y a-t-il une certaine responsabilité qui peut être attribuée à la présidente Dilma quant à cette souffrance ?

DA SILVA : Commençons par la partie économique, d’accord ? Parlons d’économie. Le Brésil souffre des conséquences les plus perverses d’une crise économique mondiale causée par le système mondial lui-même. La première qui a commencé aux États-Unis, qui est devenue encore pire après la banqueroute de Lehman Brothers et qui n’a toujours pas été résolue malgré les 13 trillions de dollars dépensés.

Durant le premier sommet du G20 en 2009, je proposais que si nous souhaitions résoudre la crise, au lieu de couper dans les dépenses, nous avions besoin d’investir davantage dans les pays les plus pauvres afin de les aider à obtenir de l’argent bon marché, pour qu’ils puissent se développer. Nous sommes tous d’accord sur le fait que le protectionnisme devait être évité et que le commerce international était nécessaire, spécialement en Amérique latine et en Afrique.

Ils étaient tous d’accord sur ce point et cela apparaît dans la première déclaration des dirigeants du G20 du sommet de Londres. En attendant, chaque pays est allé de l’avant avec ses propres mesures protectionnistes. En 2009, je critiquais cela, disant que le problème des crises économiques était le manque de leadership politique. Les politiques mondiales ont été sous-traitées et d’importantes décisions sont maintenant prises par des bureaucrates pendant que les dirigeants se cachent.

GREENWALD : Mais le gouvernement brésilien est-il totalement exempt de tout reproche sur cette question ?

DA SILVA : Je vais maintenant parler du Brésil ; je voulais juste replacer la crise dans son contexte en premier lieu. Il est impossible d’imaginer que la crise est toujours en cours en Europe ou que les États-Unis ne l’ont pas encore réduite. Mais tout cela est dû au fait qu’ils ont choisi de réduire les dépenses alors que c’est précisément la force qui est capable d’augmenter la production et l’industrie dans un pays.

De 2011 à 2014, le gouvernement brésilien a poursuivi une politique d’allègements et d’abattements fiscaux et a donné jusqu’à 500 milliards de réaux dans le but de booster la croissance. Cela a conduit à un très faible taux de chômage en décembre 2014 de seulement 4,3%. Vous pouvez comparer le Brésil à la Finlande ou même à la Suède avec un tel taux de chômage.

Toutefois, le gouvernement n’a pas vu à quel point ces allègements fiscaux ont diminué ses revenus issus des impôts et ont vidé les caisses de l’État. Dilma, selon toute évidence, ne voulait pas changer cela durant les élections. Après qu’elle a été réélue et officiellement engagée auprès du peuple, elle a offert un réajustement et a commencé à changer quelques petites choses concernant les droits des travailleurs. Et cela a retourné contre nous une grande partie de notre électorat, ce que nous n’avons toujours pas réussi à arranger pour l’instant.

C’est exactement ce dont j’ai discuté avec la présidente Dilma, lui disant que la seule façon de faire face à cela est de promouvoir de nouvelles politiques qui amènent de nouveaux espoirs et opportunités dans la société brésilienne. Ceux qui ont aujourd’hui grimpé un échelon social supplémentaire ne peuvent retomber. Ils doivent se maintenir à leur niveau. Voilà pourquoi nous avons besoin d’une politique économique qui encourage les financements, les prêts, les dépenses, la micro-industrie, les petites et moyennes entreprises, quelque chose qui va nous remettre en piste.

GREENWALD : Est-il possible de justifier les programmes d’austérité proposés par le gouvernement ? Pensez-vous que cela serait pire avec un autre parti politique ?

DA SILVA : Laissez-moi vous dire une chose, il n’y a pas d’austérité.

GREENWALD : Rien de ce genre au Brésil ?

DA SILVA : Ce que nous avons c’est un manque de revenus provenant des impôts et, sans revenus, vous ne pouvez dépenser – la même chose se produit pour ma maison et la vôtre et pour le gouvernement et une société. En d’autres termes, le gouvernement a baissé les impôts croyant que l’économie mondiale se remettrait rapidement, mais elle ne le fit pas, ni le Brésil.

Donc qu’est-ce qui doit être fait aujourd’hui ? Le gouvernement ne peut continuer une année de plus avec des coupes budgétaires, ce dont nous devons discuter c’est de la croissance. Parlons de l’investissement. Si aucun budget public n’est disponible, nous devons créer du financement.

Nous devons rechercher des partenaires. Nous devons développer des projets stratégiques avec d’autres pays. Au milieu d’une crise, nous devons faire ce que nous n’étions pas capables de faire en période normale. Nous devons être plus courageux et plus innovants.

GREENWALD : Il y a une croyance commune en Occident que le PT a beaucoup en commun avec les partis de gauche en Bolivie, au Venezuela, à Cuba ou en Équateur et que vous et Dilma aimeriez mettre le Brésil sur la même voie. J’ai aussi entendu ça souvent parmi des brésiliens. Est-ce vrai ? Quelles sont les principales différences entre le PT et ces partis politiques ?

DA SILVA : Ne soyez pas injuste avec le PT, pour l’amour de dieu, parce que le PT a davantage en commun avec le SPD allemand et le Parti travailliste britannique. Aussi avec le Parti socialiste français et le Parti socialiste espagnol. Le PT a beaucoup en commun avec eux.

Laissez-moi vous dire une chose, le PT est le plus grand parti de gauche d’Amérique latine, il n’a même pas défini quel genre de socialisme il suit puisque le PT dit qu’il sera défini et construit par le peuple lui-même et non par le PT avec sa douzaine d’intellectuels lui disant quel genre de socialisme nous voulons. Le PT est plus ouvert que les autres partis de gauche d’Amérique latine. Nous sommes meilleurs, plus diversifiés. Aucun autre parti politique au monde n’est plus démocratique ou ouvert que le PT. A l’intérieur du PT il y a tout ce que vous pouvez imaginer – c’est comme l’Arche de Noé, ce qui signifie que n’importe qui ou n’importe quelle croyance politique est bienvenu au PT. Toutefois, il faut comprendre que lorsqu’une chose est décidée par le PT, cela devient une obligation pour tous ses membres.

Les supporters du Parti des travailleurs (PT) manifestent en soutien à la présidente Dilma Roussef et à l'ancien président Luiz Inacio Lula da Silva à Rio de Janeiro, Brésil, le 18 mars 2016. Photo: Yasuyoshi Chiba/AFP/Getty Images

Les supporters du Parti des travailleurs (PT) manifestent en soutien à la présidente Dilma Roussef et à l’ancien président Luiz Inacio Lula da Silva à Rio de Janeiro, Brésil, le 18 mars 2016. Photo: Yasuyoshi Chiba/AFP/Getty Images

GREENWALD : Vous avez tenu une conférence de presse avec des correspondants étrangers il y a deux semaines et avez dit quelque chose de très intéressant au sujet du juge Sérgio Moro. Vous avez dit qu’il est un individu intelligent et compétent, mais, pour reprendre vos mots, “c’est humain”, les gens avec un grand pouvoir et objets de beaucoup d’adoration sont susceptibles d’être tentés d’abuser de ce pouvoir. Cela s’applique-t-il à vous aussi ?

DA SILVA : Le truc, c’est que je n’ai aucun pouvoir.

GREENWALD : Aucun pouvoir ?

DA SILVA : Je n’ai pas de pouvoir. Lorsque j’ai eu du pouvoir, lorsque j’étais président, la chose dont j’étais le plus fier c’était que la société était plus impliquée dans la prise de décision sous mon gouvernement qu’à aucun autre moment.

GREENWALD : Lorsque vous avez eu du pouvoir et si vous en avez à nouveau un jour, est-ce que cela s’appliquera également à vous ? L’idée que les gens qui ont beaucoup de pouvoir peuvent être tentés d’en abuser ?

Un travailleur colle une affiche de campagne pour le candidat brésilien à la présidence Luiz Inacio Lula da Silva, du Parti des Travailleurs(PT), le 24 octobre 2002, à Sao Paulo, au Brésil. Photo: Marucio Lima/AFP/Getty Images

Un travailleur colle une affiche de campagne pour le candidat brésilien à la présidence Luiz Inacio Lula da Silva, du Parti des Travailleurs(PT), le 24 octobre 2002, à Sao Paulo, au Brésil. Photo: Marucio Lima/AFP/Getty Images

DA SILVA : Je pense que toute personne qui a trop de pouvoir est vulnérable. Toutefois, tout être humain n’est pas forcément capable de gérer sa popularité. Les médias, les photographes, peuvent causer beaucoup de dommages. J’ai vu beaucoup de gens, des joueurs de baseball, de football, de billard aux juges, aux sénateurs, aux représentants de l’État et même aux présidents y succomber.

GREENWALD : Devez-vous aussi combattre ce danger ?

DA SILVA : Bien sûr ! Depuis que j’ai été un dirigeant de syndicat, j’ai été conscient que je devais être très prudent pour ne pas me laisser influencer par l’adoration des médias. Je sais combien cela peut être agréable d’être en couverture d’un journal, d’être à la télévision tous les jours. Mais si vous n’êtes pas attentif et responsable, vous pouvez emprunter un mauvais chemin. De plus, celui qui pense qu’il est indispensable, qui commence à penser qu’il est irremplaçable, commence à devenir un dictateur, ce qui est très mauvais.

GREENWALD : Je voudrais parler des médias brésiliens et de leur rôle dans l’incitation aux manifestations contre la présidente Dilma et les pressions pour son départ. En tant que journaliste qui n’est pas brésilien mais qui a vécu ici longtemps, je suis choqué par les médias locaux. Globo, Veja, Estadao sont impliqués dans un mouvement contre le gouvernement et pour l’opposition. Ils prétendent être impartiaux lorsqu’ils servent en réalité de principal outil de propagande. La plupart d’entre eux sont détenus par de très riches et puissantes familles, est-ce un danger pour la démocratie ?

DA SILVA : Oui, ça l’est.

GREENWALD : Pourquoi cela ?

Après la nomination de l'ex-président Luiz Inacio Lula da Silva comme chef de cabinet de ministre, des centaines de gens sont descendus avenue Paulista, dans le centre de Sao Paulo, au Brésil, pour protester contre lui et le gouvernement de la présidente Dilma Roussef, le 17 mars 2016. Photo: Gustavo Basso/NurPhoto/Sipa USA/AP

Après la nomination de l’ex-président Luiz Inacio Lula da Silva comme chef de cabinet de ministre, des centaines de gens sont descendus avenue Paulista, dans le centre de Sao Paulo, au Brésil, pour protester contre lui et le gouvernement de la présidente Dilma Roussef, le 17 mars 2016. Photo: Gustavo Basso/NurPhoto/Sipa USA/AP

DA SILVA : Laissez-moi vous dire ce qui, je pense, serait la meilleure situation pour le monde : ce serait des médias extrêmement démocratiques qui ont une opinion politique et l’expriment dans leurs éditoriaux, mais restent très fidèles aux faits. Pas de versions ou de points de vue – des faits. De nos jours au Brésil, nous n’avons pas de partis d’opposition, en réalité, l’opposition ce sont les médias eux-mêmes.

GREENWALD : Globo, Veja…

DA SILVA : Nous avons trois journaux, magazines et chaînes de télévisions qui s’opposent ouvertement au gouvernement. Ils appellent à des marches et manifestations. Ils incitent à la haine. Vous voyez, j’ai perdu trois élections. J’ai perdu une fois, deux fois et une troisième fois, et chaque fois, je rentrais à la maison, râler et chercher le soutien de ma femme et de mes compagnons du PT. Puis un jour j’ai gagné, et contrairement à moi, ils ne savent pas perdre et ils ont perdu encore contre Dilma. Ils en sont encore au même point aujourd’hui. Depuis que le parti est fragile, les médias ont assuré le rôle du parti. C’est sérieux. C’est un risque pour la démocratie.

Lorsque j’ai fini mon mandat en 2010, nous avons tenu une conférence de communication nationale. Nous avons construit un modèle réglementaire qui pourrait être le modèle américain, britannique ou français – pas le modèle chinois ou cubain. Malheureusement, il n’a jamais atteint le Congrès étant donné que notre réglementation remontait à 1962, lorsque nous n’avions pas de satellites, d’internet, de télévision digitale ou même de fax. Nous n’avions rien de tout cela. Nos réglementations dataient de 1962 ! Et ils ne veulent pas les changer ! Je pense que nous reparlerons de ça bientôt.

GREENWALD : Mais les médias ont au moins accepté ou même soutenu votre candidature en 2002 et 2006, n’est-ce pas ?

DA SILVA : Non, ils ne l’ont pas fait. En 2002, il était certain que j’allais gagner. En 2002, je n’étais pas inquiet parce que quelque chose me disait qu’avec cette élection ce serait mon tour de devenir président.

Donc les médias n’étaient bien sûr pas hostiles. Toutefois en 2006, j’étais déjà président mais ils ont soutenu le candidat en quatrième position plus qu’ils ne m’ont soutenu moi, le candidat en première position et président. Ils ont fait tout ce qu’ils ont pu pour que je perde. Lorsqu’Alckmin est passé au second tour, ils ont célébré ma défaite imminente. Qu’est-ce qui s’est passé ensuite? Alckmin a eu moins de votes au second tour qu’au premier, alors que j’ai eu 62 pour cent des votes.

Puis ils ont tous pensé que je n’aurais aucun successeur, ils ont tous pensé que Serre deviendrait président en 2010 et nous avons présenté une femme de gauche, avec peu d’expérience politique, qui a passé trois ans et demi en prison, qui a été torturée et sans expérience politique.

OB : tiens, nos médias ont oublié de le dire… Source : Wikipedia

Pendant la dictature militaire, Dilma Rousseff intègre le commando de libération nationale, mouvement de résistance, devenu plus tard leVAR Palmares. Arrêtée en 1970 (à 23 ans), elle est torturée pendant vingt-deux jours, puis condamnée par un tribunal militaire et détenue trois ans jusqu’en 19733.

À l’époque de sa détention, elle est surnommée la « Jeanne d’Arc de la guérilla », en raison de son implication dans le mouvement3.

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Sinon, au moment du vote de destitution : “Le vote se fait dans un climat de haine politique, l’un des députés saluant la mémoire du colonel Ustra, qui avait torturé en personne Dilma Roussef sous la junte militaire”. (pas entendu non plus…)

Donc cette femme a été élue président et, n’oublions pas, elle a eu un bon premier mandat. Les gens se plaignaient qu’elle n’aimait pas discuter des problèmes ; qu’elle n’aimait pas faire de la politique. Détails. Le fait est que, lorsque les nouvelles élections sont arrivées, ils ont tous parié sur sa défaite, “Dilma va perdre ! Dilma va perdre !” Mais elle n’a pas perdu. Ils sont tous devenus fous.

GREENWALD : Ils n’acceptent toujours pas les résultats aujourd’hui ?

DA SILVA : Non, toujours pas.

GREENWALD : J’aimerais maintenant changer un peu de sujet. Lorsque le rapport montrant que la NSA effectuait une surveillance électronique du Brésil a émergé, vous, ainsi que la présidente Dilma, l’avez fortement dénoncée, la qualifiant d’atteinte grave à la vie privée. Vous avez dit la même chose lorsque vos propres conversations privées avec Dilma ont été révélées par le juge Moro.

Récemment, le gouvernement a adopté une nouvelle loi antiterroriste, fermement soutenue par Dilma elle-même, qui donne à son gouvernement des pouvoirs d’espionnage très étendus. N’est-ce pas contradictoire ? Que pensez-vous de cette nouvelle loi ?

DA SILVA : J’étais contre cette loi parce que je ne pense pas que ce modèle puisse s’appliquer au Brésil autant qu’aux autres pays qui sont directement affectés par le terrorisme. Le Brésil, Dieu merci, n’a pas ce genre de problèmes, même si certaines personnes pensent que nous devrions nous en inquiéter.

GREENWALD : Le gouvernement a-t-il exploité les peurs ?

DA SILVA : Non, je ne le pense pas. Ils étaient juste inquiets à propos des jeux Olympiques et ont sur-réagi. Ce n’est pas un pays où les gens commettent traditionnellement des actes terroristes.

GREENWALD : Mais ces pouvoirs d’espionnage que le gouvernement brésilien a désormais sont très dangereux.

DA SILVA : Je ne les aime pas non plus. Laissez-moi vous dire quelque chose. Je suis très inquiet de la transformation de l’appareil d’État, et par-dessus tout de l’appareil policier, qui est très puissant. Parce que cela va à l’encontre de la démocratie, à l’encontre des institutions démocratiques. Je pense que nous avons besoin de trouver un équilibre. Nous n’avons pas besoin de créer un monstre pour nous défendre nous-mêmes contre un monstre.

GREENWALD : Plusieurs organisations de défense des droits de l’homme se plaignent que le Brésil viole les droits de ses prisonniers étant donné les conditions inacceptables qui existent dans les prisons. Beaucoup de gens sont retenus prisonniers sans même un procès.

Une grande partie de ce problème vient de la lutte contre la drogue, que le PT a toujours soutenue, mais qui conduit trop de brésiliens – la plupart pauvres, noirs et jeunes – a être mis en prison. Par le passé, vous avez soutenu cette lutte. Maintenant, l’ancien président Henrique Cardoso, aux côtés de beaucoup d’autres dirigeants, dit que cette lutte a échoué et est inhumaine.

Etes-vous d’accord avec eux, ou voulez-vous continuer cette lutte ?

DA SILVA : Cette lutte a échoué car le système judiciaire est trop lent. Il y a des gens qui ont été en prison durant deux ou trois ans sans procès. C’est la même chose avec l’enquête de l’opération “Lava Jato”. Le problème vient du système judiciaire.

GREENWALD : Personne ne se soucie d’une personne jeune, pauvre et noire qui reste deux ou trois ans en prison sans procès.

DA SILVA : Mais c’est un choix délibéré ici, vous savez. Et nous l’avons dénoncé. J’ai eu beaucoup de réunions avec des groupes de jeunes venant de communautés pauvres, il y a un choix délibéré, en fait, à arrêter les gens noirs et pauvres, à tuer les gens noirs et pauvres. Cela signifie qu’il y a un problème que nous essayons de résoudre – pas seulement en tant que parti, mais aussi au niveau judiciaire, des organisations de juges – sur la façon dont nous allons accélérer, vous savez, la libération et le procès de ces gens.

GREENWALD : Mais avec les conditions de détention dans les prisons brésiliennes, est-il juste de mettre quelqu’un en prison pour une année, deux années, trois années, six mois, ou une quelconque durée pour possession de drogue avec ce niveau de pauvreté ?

DA SILVA : Je suis pour la dépénalisation (des drogues) ; par conséquent je ne pense pas qu’un citoyen qui commet un ancien délit devrait être en prison. Je ne pense pas qu’un citoyen qui est pris, un consommateur de drogue, devrait être arrêté. Dans beaucoup de cas cette personne a besoin de consultations psychologiques plus que d’aller en prison. C’est une chose d’arrêter un trafiquant de drogue et c’en est une autre d’arrêter un consommateur. Je suis contre cela. Vous savez, nous nous sommes battus contre cela. Maintenant, nous avons un problème au Brésil : nous avons toujours un système judiciaire très conservateur.

GREENWALD : Ma dernière question : durant longtemps, le Brésil était un des leaders en Amérique latine, sur la thématique de l’égalité des gays. En fait, le Brésil a été plus progressiste que les États-Unis et beaucoup de pays d’Europe sur cette question. Mais maintenant il y a ce mouvement évangélique très fort au Brésil qui veut retourner en arrière, et je sais que vous avez soutenu la défense des droits LGBT dans le passé, mais je veux vous demander : soutenez-vous une égalité absolue pour les LGBT en droit ?

DA SILVA : J’approuve !

GREENWALD : Y compris le droit de se marier ?

DA SILVA : Laissez-moi vous dire quelque chose, mon ami, au Brésil beaucoup de choses importantes se sont produites. J’ai été le seul président qui a pris part à une conférence nationale avec la communauté LGBT. Lorsque beaucoup de gens pensaient que c’était dangereux pour moi d’aller à la conférence, j’y suis allé, avec deux mille personnes. Ce fut une extraordinaire leçon pour le gouvernement. Deuxièmement, nous nous sommes débrouillés pour faire approuver les unions civiles par la Cour suprême, ce qui fut un progrès extraordinaire, vous savez ?

GREENWALD : Mais ce n’est pas l’égalité.

DA SILVA : Avec le Plan pour l’éducation nationale nous…

GREENWALD : Mais ils n’ont pas les mêmes droits que pour les mariages hétérosexuels. C’est moins…

DA SILVA : Mais quoi qu’il en soit, faire en sorte que la Cour suprême prenne une telle décision fut un progrès extraordinaire. Je soutiens le droit des gens à décider de ce qui est le mieux pour eux.

Le président Luiz Inacio Lula da Silva tient un drapeau du mouvement gay lors de la cérémonie d'ouverture de la première conférence nationale pour les gays, les lesbiennes et les transsexuels, le 5 juin 2008, au Brésil. Photo: Joedson Alves/AFP/Getty Images

Le président Luiz Inacio Lula da Silva tient un drapeau du mouvement gay lors de la cérémonie d’ouverture de la première conférence nationale pour les gays, les lesbiennes et les transsexuels, le 5 juin 2008, au Brésil. Photo: Joedson Alves/AFP/Getty Images

GREENWALD : Y compris le droit de se marier ?

DA SILVA : Y compris le droit de se marier. Lorsque je parle des unions civiles je veux aussi dire le mariage, ok ? Je crois sincèrement que les gens devraient vivre comme ils le choisissent. Dès lors que chacun d’entre nous respecte les droits des autres, vous voyez ?

Ici au Brésil, lorsqu’il était question de l’avortement, et il a été dit que c’était un crime de le faire, j’avais l’habitude de dire “Regardez, moi, en tant que citoyen, père de cinq enfants, je suis contre l’avortement. Mais moi, en tant que président du Brésil, j’ai affaire avec la question de l’avortement en tant que problème de santé publique.”

GREENWALD : Parce qu’une femme a le droit de choisir et vous non ?

DA SILVA : Bien sûr ! Bien sûr ! Vous savez, je pense que le Brésil a beaucoup progressé, mais dans certains domaines nous sommes toujours très en retard.

[Diaphonie]

DA SILVA : Je voulais juste vous dire quelques choses de plus concernant l’opération “Lava Jato”, vous qui êtes étranger. Laissez-moi vous dire ce qui m’inquiète avec cette histoire de “Lava Jato”, à savoir qu’il y a une autre thèse en jeu, une thèse de contrôle sur les faits. Il y a l’idée que premièrement vous détectez un criminel, vous l’étiquetez en tant que criminel, et ensuite vous cherchez un crime à lui coller. Je dis cela car chaque jour quelqu’un le dit, “Ils veulent attraper Lula ! Ils veulent attraper Lula ! C’est Lula qu’ils veulent attraper !” Et on me dit cela tous les jours.

GREENWALD : Parce qu’ils pensent que vous vous présentez à nouveau comme président. Est-ce vrai ?

DA SILVA : Je ne sais pas. Si c’est la raison, c’est stupide. Écoutez, je doute qu’il y ait un seul homme d’affaires dans ce pays qui pourrait dire qu’ils ont négocié un quelconque deal malhonnête avec moi.

GREENWALD : Dans le temps, ils vous ont donné un important montant d’argent pour soutenir votre campagne ; vous avez reçu beaucoup de soutien d’hommes d’affaires, de grandes entreprises…

DA SILVA : Au Brésil, seuls les gens riches ont de l’argent à donner pour les campagnes. Soyons honnêtes ! Il n’existe pas de pays dans lequel un candidat vend sa maison pour financer sa candidature.

GREENWALD : Ils doivent avoir le soutien des gens riches.

DA SILVA : Bien sûr ! Aux États-Unis c’est même charmant, il y a des récompenses pour celui qui a collecté le plus.

GREENWALD : Obama et Clinton, ils ont tous deux eu le soutien de Wall Street et d’hommes d’affaires.

DA SILVA : C’était la règle du jeu : vous demandiez de l’argent, l’homme d’affaires vous donnait de l’argent, vous comptabilisez l’argent et les représentants de la Justice approuvaient vos comptes et c’était tout.

GREENWALD : Et c’est ainsi que les riches obtiennent des faveurs.

DA SILVA : Maintenant il y a cette idée qui y est associée, et le PT avait l’habitude de défendre cette idée de “Arrêtons les donations privées et rendons le financement entièrement public, ce qui est le moyen le plus digne de faire campagne.”

GREENWALD : Le PT ne va plus recevoir d’argent de sociétés pour ses campagnes ?

DA SILVA : Le PT a décidé de ne plus accepter les contributions des sociétés pour les campagnes électorales, et je pense que c’est une chose extraordinaire, une chose courageuse et qui pourrait faire renaître le PT encore plus fort.

GREENWALD : Et si vous vous présentez comme président une nouvelle fois, maintiendrez-vous cette promesse ?

DA SILVA : Bien sûr ! Je suis déjà bien connu.

GREENWALD : Il y a beaucoup de critiques de la gauche brésilienne affirmant que le PT perpétue le modèle néo-libéral, qu’il protège l’intérêt des riches et non des pauvres. Est-ce exact ?

DA SILVA : Non, nous allons utiliser les travailleurs et les plus humbles du pays pour faire repartir l’économie du Brésil. Pour cela, nous avons besoin de fonds, de crédits et de partenariats. Et ça, avec l’aide de Dieu, je veux aider Dilma à l’accomplir.

GREENWALD : Eh bien, merci beaucoup pour cette interview, Monsieur le Président.

DA SILVA : Merci.

Source : The Intercept_, le 11/04/2016

Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.