François Hollande l'avait annoncé : il n'était pas question de faiblir sur la question du budget européen. Échaudé par les déclarations fracassantes de David Cameron, il entendait bien profiter de cette occasion pour réclamer une nouvelle fois "plus d'Europe" alors que les mouvements eurosceptiques gagnent du terrain partout sur le continent. Après d'âpres négociations, le résultat est sans appel : le budget européen est en baisse, la France est isolée et les fédéralistes ne cachent pas leur colère devant cet échec manifeste.
Un discours irréaliste et inquiétant
Le 5 Février dernier, peu avant le début de la négociation du budget européen, François Hollande avait pourtant livré devant le Parlement européen un discours particulièrement optimiste. L'Union Européenne, selon lui, serait ainsi "un modèle envié sur tous les continents" qui "a instauré la paix, les droits de l'Homme, la démocratie, ce que le prix Nobel, à juste raison, est venu consacrer".
Un véritable paradis, en somme ? Pas vraiment. Il reconnaît que quelques "légers" problèmes subsistent : l'Union souffre "face aux concurrences déloyales", elle ne maîtrise pas les "évolutions irrationnelles" de sa monnaie, la "croissance trop faible" est un mal récurrent et le "chômage de masse" frappe de nombreux États membres. Bref, l'UE est une passoire dont la croissance est en berne et dont les emplois fondent comme neige au soleil... heureusement que "la crise de la zone euro est désormais largement derrière nous" !
Des peuples réticents
Hélas, mille fois hélas, le problème de l'UE, c'est qu'elle n'est pas composée exclusivement d'eurobéats :
"Ce qui nous menace aujourd’hui n’est plus la défiance des marchés, c’est celle des peuples, et qui ne voit, à travers une suite de déclarations, que l’intérêt national est en train de prendre le pas sur l’intérêt européen."
Bien sûr, le président ne prend pas la peine de nous expliquer ce que serait ce prétendu intérêt européen : avouons qu'il aurait bien du mal à le faire ! En l'absence de peuple européen, trouver un intérêt général européen relève de la gageure. Pour faire de la politique, il faut s'appuyer sur des réalités : les nations, les intérêts nationaux ou les démocraties nationales, par exemple. S'accrocher à des mythes et croire aux comptes de fées n'est assurément pas le meilleur moyen d'obtenir des résultats probants.
Par ailleurs, François Hollande déplore la défiance des peuples, mais se rend-il compte qu'il est des artisans de ce désamour ? Il ne faut en effet jamais oublier que c'est l'aveuglement des européistes et leur fureur anti-démocratique - qui les conduit parfois à refuser des référendums ou à mépriser leurs résultats - qui exaspère les citoyens des nations européennes. Comment pourraient-ils aimer une entité dirigée par de prétendus "experts" non-élus, qui accroît son emprise chaque jour en dépit de résultats catastrophiques sans que les principaux intéressés ne puissent réagir ?
Rien de nouveau en Hollandie
Mais revenons au discours du président Français. Que propose-t-il de nouveau ? Pas grand chose, en vérité. Il rend hommage au Parlement européen pour le "six pack" et le "two pack" (deux camisoles budgétaires venant compléter le TSCG), il refuse explicitement de toucher aux statuts de la Banque Centrale Européenne, il demande plus de solidarité et une "union politique plus forte" mais aussi de "véritables ressources propres" (autrement dit : un impôt européen). Pour résumer : ilne fait que réciter le bréviaire du parfait européiste.
Une phrase, néanmoins, sonne comme un avertissement : celle où il affirme que l'Union Européenne est "un projet dont on ne peut pas discuter sans cesse des acquis et remettre tout en cause à chaque étape". Quelques mots qui laissent transparaître toute la méfiance envers la démocratie qui anime les partisans d'une construction européenne, qui serait, tout comme l'euro,nécessairement "irréversible". Et si un pays, comme le Royaume-Uni de David Cameron, décidait de s'en aller ? Faudrait-il l'en empêcher ? S'asseoir sur l'expression du peuple souverain ? On n'ose l'imaginer...
En dépit de ces tonalités inquiétantes, ce discours a reçu un bon accueil à Strasbourg et dans la presse. Qu'il est difficile de se défaire de ses mauvaises habitudes dans certains milieux !
Un réveil douloureux
Quelques jours plus tard, sans surprise, venait l'heure de la douche froide. Les arguments ridiculement irréalistes du président Français n'ont pas fait un pli face à la détermination d'Angela Merkel et de David Cameron venus, eux, défendre leurs intérêts nationaux. La négociation donnait raison aux partisans de la réduction du budget européen, dans un contexte d'austérité généralisée : il sera en 2014 inférieur de 13 milliards à celui de 2013, alors que l'Union comptera un pays de plus (la Croatie).
Les pays du Nord ont refusé de payer davantage pour ceux du Sud. Logique élémentaire : en l'absence de sentiment d'appartenance commun, difficile d'exiger une solidarité comparable à celle qui existe à l'intérieur des nations. De quoi sonner le glas des illusions des partisans du "saut fédéral" ? Pas vraiment : tout comme les dirigeants communistes d'URSS réclamaient "plus de communisme" pour corriger les défauts du communisme, les européistes en sont toujours à réclamer plus d'Europe...
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