mardi 4 décembre 2012

Mediapart et l' appartement parisien de Cahuzac : quatre millions dont l’origine reste douteuse

source : article complet de Médiapart
Le compte suisse du ministre du budget Jérôme Cahuzac Mediapart

Ça me fait chier d’avoir un compte ouvert là-bas !


« Je n’ai pas de compte en Suisse et n’en ai jamais eu. Il est clair que si vous publiez ça, j’attaquerai », a réagi M. Cahuzac, rencontré mardi 4 décembre à son bureau du ministère du budget. « Je suis un personnage public. Je crois avoir montré que je n’ai pas été en arrière de la main quand j’étais président de la commission des finances. C’est peu dire que j’ai mis l’épée dans les reins de l’administration fiscale pour qu’un certain nombre de dossiers sortent », a-t-il ajouté.



Jérôme Cahuzac

Jérôme Cahuzac est hanté depuis de nombreuses années par la révélation de ce compte et des avoirs occultes qu’il a pu abriter. Politiquement, l’affaire est explosive.
À la fin de l’année 2000, alors qu’il s’engageait dans la bataille municipale pour conquérir la commune de Villeneuve-sur-Lot, le député Cahuzac s’est ainsi inquiété de l’existence de ce compte lors d'une conversation – dont il existe une trace – avec un chargé d’affaires, affirmant notamment, d’après les éléments recueillis par Mediapart : « Ce qui m'embête, c'est que j'ai toujours un compte ouvert à l'UBS. Ça me fait chier d’avoir un compte ouvert là-bas, UBS, c’est quand même pas forcément la plus planquée des banques. » L’élu se disait à cette époque embarrassé à l’idée de devoir se rendre personnellement à Genève pour faire les diligences nécessaires afin de le fermer.
Jérôme Cahuzac© Reuters
Le compte à l’UBS sera formellement clos début 2010, à l’occasion d’un discret déplacement à Genève, quelques jours avant qu’il ne soit élu, le 24 février 2010, président de la commission des finances de l’Assemblée nationale. En privé, Jérôme Cahuzac affirme alors avoir « fait ce qu’il fallait » pour nettoyer ses secrets helvètes. À la question que nous lui avons posée, de savoir s'il était bien allé à Genève début 2010, le ministre a éludé, affirmant : « Pas davantage qu'à Turin, Milan ou New York. » Sans en dire plus.
Les avoirs cachés auraient été alors transférés à l’UBS de Singapour par le truchement d’un complexe montage financieroffshore, selon des sources informées du dossier. 
Quelle était l’origine des fonds du compte suisse et à quoi ont-ils pu servir ? Dans son mémoire de 2008, l’inspecteur Garnier affirmait tenir peut-être une piste. Selon lui, Jérôme Cahuzac avait « acquis son appartement parisien situé avenue de Breteuil pour le prix de six millions et demi de francs, financé comptant, en début de carrière, à hauteur de quatre millions dont l’origine reste douteuse ». M. Cahuzac a toujours affirmé, y compris dans la presse locale (La Gazette de la Vallée du Lot, par exemple), avoir financé cet appartement aux deux tiers grâce à un prêt bancaire. Ce qui est faux.
Une fois encore, l’agent du fisc disait juste. D’après l’acte notarié d’achat de l’appartement (deux salons, une salle à manger, quatre chambres…), daté du 28 octobre 1994, Jérôme Cahuzac a bien versé quatre millions de francs – 600 000 euros – « de ses deniers personnels », un tiers seulement du financement étant assuré par un prêt bancaire. Rien ne permet aujourd’hui de dire si l’argent provient du compte suisse, mais la question semble avoir effleuré l’esprit de l'inspecteur du fisc à qui il n’a pas été possible de vérifier ses soupçons en 2008.
« Éric Woerth, que j’ai interrogé (après les questions de Mediapart - ndlr), m’a dit, lui, les yeux dans les yeux n’avoir jamais eu le moindre document me concernant et qu’à défaut il aurait évidemment laissé se dérouler la procédure », affirme aujourd’hui Jérôme Cahuzac.
Ironie de l’histoire, le ministre socialiste annonçait début novembre dans les colonnes du quotidien Libération vouloir renforcer l’arsenal français de lutte contre la fraude fiscale. « Ces mesures, expliquait-il, n'ont rien à voir avec une quelconque inquisition fiscale, il s'agit seulement d'un minimum de transparence de bon aloi. » Double ironie de l’histoire, le ministère du budget est actuellement partie civile dans l’instruction d’un juge parisien, Guillaume Daieff, qui enquête depuis le mois d’avril dernier sur les pratiques d’évasion fiscale de contribuables français, clients de… l’UBS.

Jérôme Cahuzac dément les propos diffamatoires de Mediapart portant atteinte à son honneur ! "Je réitère le démenti formel que j'ai apporté directement auprès de Mediapart : je n'ai jamais disposé d'un compte en Suisse ou ailleurs à l'étranger. Jamais".

ERIC WOERTH NIE AVOIR ÉTÉ ALERTÉ


Mediapart affirme aussi que "l'existence du compte secret de M. Cahuzac avait été évoquée dès le mois de juin 2008 par un agent du fisc du Sud-Ouest, Rémy Garnier, dans un mémoire adressé à sa hiérarchie, à l'époque où le ministre du budget était Éric Woerth (UMP)".

Joint par Le Monde, Eric Woerth nie avoir été informé d'un tel document. Et affirme, comme le relate Mediapart, qu'il a fait la même réponse à Jérôme Cahuzac lundi, quand ce dernier l'a contacté.

Jérôme Cahuzac, 60 ans, élu socialiste du Lot-et-Garonne, est ministre du budget depuis l'arrivée au pouvoir de François Hollande en mai.

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