La bataille contre le TSCG
L'heure de vérité approche pour les partisans du dernier traité européen. Alors que le TSCG doit être soumis au Parlement en Octobre et que ses opposants sont fermement décidés à faire entendre leur voix, l'autoritarisme de ses défenseurs se manifeste avec une violence indéniable : le gouvernement socialiste fait bloc et refuse toute contestation, usant de menaces à peine voilées. La bataille est mal engagée, mais la guerre, elle, est loin d'être terminée.
Des socialistes divisés
Comme toujours lorsqu'il s'agit de parler d'Europe, la cacophonie règne au Parti Socialiste. Les université d'été de La Rochelle auront été l'occasion de percevoir l'étendue du malaise. Les plaies béantes causées par les affrontements du référendum de 2005 ne se sont pas refermées et les "ouistes", désavoués par les Français en 2005 mais toujours aussi fiers de leur foi en "l'Europe-qui-nous-protège" et convaincus de leur bon droit depuis la victoire du "président normal", veulent faire taire toute opposition. Pour cela, tous les moyens sont bons.
Maîtrisant l'art de l'euphémisme, Jean-Marc Ayraut a reconnu implicitement les terribles lacunes du traité et l'escroquerie de la prétendue "renégociation" en affirmant que "toutes les constructions européennes ont été affaire de compromis successifs" où il n’y avait "pas toujours tout ce que nous souhaitions", pour mieux appuyer le texte concocté par le duo Merkel-Sarkozy, au prétexte que "les lignes ont profondément bougé". L'eurobéat Pierre Moscovici a, lui aussi, tenté de se justifier : "Quand François Hollande va demander aux parlementaires de ratifier le traité, ce n’est ni une trahison, ni un abandon, c’est un choix". Pour les arguments ou les paroles convaincantes, on repassera...
Claude Bartolone ne s'est, de son côté, pas embarrassé de mots creux : voir des députés de la majorité voter contre ce texte inique le "dérangerait". Quant à Martine Aubry, elle a été fidèle à son autoritarisme, en envoyant un message clair aux ministres qui ne se tiendraient pas droits, le petit doigt sur la couture du pantalon : "Si j'étais au gouvernement et si je ne partageais pas une décision aussi importante, j'en tirerais moi-même les conséquences".
Le message a bien été reçu : Arnaud Montebourg, le "noniste" de 2005 qui ne ménageait pas ses critiques à l'encontre de la politique menée par les dirigeants européens lors de la primaire socialiste (en comparant notamment la politique d'Angela Merkel et celle du chancelier Bismarck), n'ose plus exprimer le moindre doute sur la direction que prend l'Union Européenne. Le voici donc devenu le fidèle défenseur d'intérêts qui ne sont manifestement pas les nôtres. Selon lui, il serait désormais "impossible de voter contre" le traité, car il s'agit d'un "progrès considérable". Pour les politiques de régression sociale, sans aucun doute...
Le référendum : une nécessité
Toutes ces manœuvres n'ont cependant pas permis au P.S. de maintenir son unité. Difficile, il est vrai, de faire avaler la couleuvre d'un traité d'austérité à perpétuité à une aile gauche qui entend défendre, autant que faire se peut, nos acquis sociaux. Fidèles à leurs convictions (à moins qu'il ne s'agisse que d'un calcul politique ?) Razzy Hammadi, Marie-Noëlle Lienemann et la plupart des députés proches de Benoit Hamon semblent fermement décidés à s'opposer jusqu'au bout à un texte mal pensé et inquiétant pour notre avenir.
Mais si, au lieu d'épiloguer sur les états d'âme de ceux-ci ou de celles-là, nous demandions à nos concitoyens de trancher, une fois pour toutes ?
"Je veux une Europe au grand jour. Une Europe sincère et populaire. Une Europe dont on soit fier. C’est à force de dissimuler l’Europe, de la rendre incompréhensible qu’on a fini par en détourner notre peuple. C’est en masquant la réalité de ses acquis et de ses insuffisances qu’on a construit la défiance envers elle."
Voilà ce que nous disait Jean-Marc Ayrault, en 2008, au moment de l'attentat contre la démocratie qu'a représenté la ratification du traité de Lisbonne, trois ans seulement après le rejet par l'ensemble des Français du projet de constitution européenne dont il était la copie conforme. Hélas, maintenant qu'il est aux affaires, le chef du gouvernement refuse cette "exigence démocratique", pour reprendre ses propres termes, au nom du "risque d'une crise européenne". Mais quel risque pourrait-il y avoir à respecter l'avis des citoyens ?
Qu'ils soient favorables ou non au "pacte budgétaire", une large majorité de Français (72%) souhaiterait l'organisation d'un référendum sur la question, d'après un sondage publié ce jour. Cette consultation, qui semble relever de l'évidence au regard du changements majeurs qu'imposerait la mise en pratique des dispositions du texte, est réclamée depuis fort longtemps par nombre d'entre nous. Comment refuser au peuple Français de pouvoir se prononcer directement sur un texte qui engage son avenir ?
Le gouvernement socialiste pouvant compter sur le soutien indéfectible de la droite sarkozyste - avec qui elle est d'accord sur l'essentiel - pour faire passer en catimini le texte, l'opposition de quelques courageux députés ne devrait malheureusement pas s'avérer suffisante. Dans ces conditions, que faire ?
La Résistance s'organise
Nous pouvons tenter de nous faire entendre : si les grands médias ne s'intéressent guère à ce sujet pourtant crucial, les blogs et les réseaux sociaux restent à notre disposition et peuvent être mis à contribution. Pour montrer qu'il existe encore des citoyens attachés à la démocratie et à la souveraineté nationale, Magali Pernin propose également d'écrire à nos élus pour leur rappeler quelques principes essentiels.
Le journal L'Humanité a quant à lui lancé une pétition en faveur de l'organisation de ce référendum, il y a peu. Une initiative intéressante, même si on peut légitimement douter de son efficacité. Jean-Luc Mélenchon a, de son côté, proposé une grande manifestation à Paris pour faire pression sur le gouvernement.
"Nous, Front de gauche nous adressons, non pas à ceux qui sont d'accord avec nous (...) mais à tous ceux qui veulent, personnes, organisations, associations, syndicats."
Celle-ci pourrait avoir lieu le 30 Septembre, à en juger certains échanges sur Twitter.
Et si nous le prenions au mot ? Bien sûr, nous n'oublierons pas nos différences, le soutien de Jean-Luc Mélenchon à Maastricht (qu'il a regretté depuis), sa défense jusqu'au-boutiste de l'euro ou son attitude détestable lorsqu'il avait avalisé le comportement scandaleux de certains de ses partisansà l'égard de Nicolas Dupont-Aignan lors d'une manifestation de soutien au peuple Grec. Mais pour cette fois, nous pourrions tenter de dépasser les clivages, de nous rassembler et d'y aller dans la joie et la bonne humeur.
À l'heure où Angela Merkel lance une campagne au slogan pour le moins inquiétant - "Ich will Europa", c'est à dire "Je veux l'Europe" - il devient difficile de faire la fine bouche. Nous n'avons que peu d'armes ; il serait regrettable de ne pas utiliser celles dont nous disposons.
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