dimanche 15 avril 2012

Le candidat François Hollande vu par le New York Times

Même après un régime alimentaire de pré-campagne depuis 2010 - moins de vin, moins de fromage et surtout moins de chocolat  - François Hollande , le socialiste pressenti pour devenir le prochain président de la république Française, a toujours un visage inexpressif et apparait comme géné aux entournures dans son costume cravate . Il est surnommé «Flanby»,  un exemple parmis une longue liste de surnoms insultants pour un homme qui a toujours été considéré comme convivial mais ayant toujours été au second plan de la vie politique en France. Il est également appelé "le chamallow vivant» et  "Monsieur Petites blagues". 
Lors des primaires socialiste en 2011, Martine Aubry, la chef du Parti socialiste, l' a décrit comme étant le partisan d'une "gauche molle" (couille molle en français dans l' article original du New York Times) , une autre façon désagréable pour dire qu'il n'a pas de cran. 
Récemment, frustré par les sondages , Nicolas Sarkozy , luttant désespérément pour ètre réélu, fulminait: "Hollande est nul ! Il ne sert à rien, vous me comprennez ? "




Le surnom qui lui à collé à la peau pendant une longue période était "Monsieur Royal", rapport à son ex, ancienne candidate malheureuse à la présidence en 2007 et mère de ses quatre enfants, Ségolène Royal l'a écarté lors des primaires de 2006 pour devenir la candidate socialiste en 2007. 
Pour 2012, Dominique Strauss-Kahn devait incarner le recours incontournable du parti socialiste, jusqu'à la fameuse affaire tragi-comique du Sofitel. C'est seulement après la chute ultra médiatisée de Dominique Strauss-Kahn ,  que François Hollande - qui à 57 ans n'a jamais été ministre et qui, de 1997 à 2008, a présidé un parti socialiste en reconstruction - a commencé à ressembler à un candidat fiable pour gagner en mai 2012.


En cette période de crise économique, d' anxiété concernant l'islam et l' immigration, et de confusion sur la place de plus en plus réduite de la France dans le monde, une des raisons de son succès, sans doute, c'est que les Français en ont assez de Sarkozy, de ses amis vulgaires et de son comportement d'adolescent attardé. François Hollande représente une image plus consensuelle de ce que devrait être un chef de l' état français .


Contrastant avec un Sarkozy ultra citadin, lançant un "casse toi pôv con" a un opposant au salon de l' agriculture, François Hollande a peaufiné sa relation avec les agriculteurs. "C'est le premier qui m'ait écouté», a déclaré Simon Ouin, qui enseigne l'agriculture. "Les autres, ils s'enfuient"


Hollande revendique une image d' homme normal, une posture décriée par Sarkozy, le fils d'immigré hongrois en constant décalage avec les normes françaises. Sarkozy parle sans détours, il a milité pour des réductions d'impôts pour les riches et les entreprises, il est considéré comme étant américanophile et très atlantiste.
Hollande, porte en lui les coups de ses adversaires avec fierté, comme une marque de légitimité gagnée de haute lutte. 
"Pour être élu, il est nécessaire d'avoir été attaqué, il est indispensable d'avoir souffert" affirme t il. 
"Les cicatrices, les coups, le fait que rien ne vous fait dévier de votre but : l'électorat apprécie ça."


La promotion Voltaire
Avec son dégoût pour les riches et son look "anti-bling bling", Hollande symbolise le retour à la politique traditionnelle française. Il s'est préparé pour incarner le pouvoir de la manière la plus typiquement française possible, diplômé des meilleures écoles du pays, il représente l'élite classique. L'élite française est formée par des institutions (ENA, science po etc...) de façon plus étroite que la classe dirigeante américaine. Les ancien élèves des écoles de la République restent proches les uns des autres, qu'ils soient de gauche ou de droite. François Hollande à l'ÉNA était dans la promotion Voltaire.
Aujourd'hui, la génération Voltaire s'épanouit dans la quarantaine. Ses stars sont ou furent ministres, députés, hommes ou femmes politiques, très hauts fonctionnaires ou golden boys. On les retrouve au gouvernement (Ségolène Royal), au cabinet du Premier ministre (Jean-Pierre Jouyet, Jean-Maurice Ripert, Pierre Duquesne, Brigitte Joseph-Jeanneney, Patrick Delage), à la tête du Parti socialiste (François Hollande, premier secrétaire, Frédérique Bredin et Michel Sapin, secrétaires nationaux), sur les bancs de l'Assemblée nationale (Renaud Donnedieu de Vabres, Bredin, Hollande), à des postes clefs dans la communication (Nicolas Duhamel chez Havas, Bernard Cottin à Canal +), patrons d'une grande entreprise (Henri de Castries chez Axa), sans compter les postes importants dans l'administration (Jean Gaeremynck, directeur de la population et des migrations au ministère de l'Emploi et de la Solidarité, Pierre-René Lemas, directeur de l'habitat et de la construction à l'Equipement) ou encore à Bruxelles. 


Tuer le père
François Hollande s'est construit politiquement sur le rejet de l'extrême-droite incarné par son père Georges Hollande, directeur d'une clinique ORL, candidat malheureux en 1959 et en 1965 aux élections municipales de Rouen, sur une liste d’extrême droite, a soutenu l’avocat Jean-Louis Tixier-Vignancour, ancien camelot du roi, croix-de-feu. 
Malgrès cela, François Hollande ne s'est jamais considéré comme un rebelle. Il a rompu avec les valeurs paternelles en douceur.


Sa grande aventure de jeunesse a consisté à voyager à travers l' Europe avec ses amis dans un J7 Peugeot, tout en écoutant les Beatles et Jimi Hendrix. En 1974, il obtint une bourse de l'école de commerce pour aller aux États-Unis pendant l'été, en profitant pour étudier la restauration rapide américaine - en particulier McDonald et Kentucky Fried Chicken, qui n'existaient pas encore en France. Il a voyagé de New York à San Francisco, et se souvient de cette époque comme d' "une période très difficile pour les États-Unis." 
"Nixon était poursuivi en justice, le dollar était dévalué, le retrait du Vietnam était à la une ; mais j'ai pu à cette occasion constater la force du potentiel américain." s'est-il souvenu, nostalgique.


Mc Do ou l' Elysée ?
Il a écrit un rapport sur le futur de la restauration rapide en France. "J'aurais pu faire une fortune dans les cheeseburgers, mais j'ai finalement préféré une carrière politique,". 
Sa petite amie, Valérie Trierweiler, journaliste sur Direct 8 du groupe Bolloré, ajoute, en soupirant, "Depuis cette époque, il a gardé un certain goût pour les hamburgers."


La gauche représente aujourd'hui pas plus de 45 % du vote en France. Hollande a besoin des voix du centre et même  de l'extrême gauche pour gagner. Un temps inquiété dans les sondages, François Hollande semble à l' heure actuelle assuré de figurer au second tour au soir du 21 avril.


Pour le second tour décisif du 6 mai, où Hollande et Sarkozy débatront en tête à tête, Hollande est crédité depuis fin 2011 d'une avance confortable d' au moins 4 points, mais cette marge, pourrait, dès le 21 avril commencer à fondre.


La peur comme adversaire
La stratégie de Sarkozy ressemble à celle de George W. Bush en 2004. Il essaie d'éviter que le scutin devienne un référendum pour ou contre sa personne.
L' Elysée essaye de présenter Nicolas sarkozy comme étant un chef de file dynamique, expérimenté capable et compétent donc capable de conduire la France à travers la crise, sans boulversement majeur. 
François Hollande est présenté par les communiquants de l' UMP comme étant dénué d' autorité et d' expérience. Argument ultime : il n'est même pas respecté par son propre camp qui a inventé la quasi totalité des sobriquets qui lui collent à la peau depuis deux ans.
 Sarkozy essaye d'amener le débat loin des questions économiques, qui sont généralement favorables au candidat Hollande. C'est donc le grand retour de la criminalité, du terrorisme islamiste, sujets brûlants qui ressoudent la droite et créent de l'anxiété au sein de la classe moyenne (en particulier après la tuerie de Toulouse).


Lors de notre entretien, François Hollande a du prendre des pastilles pour la gorge à cause de sa voix mise à rude épreuve lors des meeting, puis il a critiqué l'approche de Nicolas Sarkozy. "La peur est son alliée", at-il déploré. "Parce que les gens qui ont peur n'aiment pas le changement."
Saura t il les rassurer ?


Un ami intime et conseiller de Sarkozy croit toujours que son candidat va perdre. Mais il note que Hollande, comme Mitt Romney, inspire peu de passion. Les deux tiers des électeurs disent qu'ils vont voter Hollande par rejet de Nicolas Sarkozy. François Hollande, qui a mené une campagne très timide, suscite encore le doute, les Français se demandent encore s'il est assez solide pour la fonction, s'il est présidentiable.


Cela n'inquiète pas Hollande. Il décrit souvent la métamorphose de François Mitterrand dans l' opinion dès 1981. 
"Les gens disait, 'Oh, la, la, François Mitterrand, n'a aucun charisme, il n'a pas la stature d'un président!
Mais dès son élection, il a été transformé."


"En un instant, dès que vous êtes investi, vous incarnez la France aux yeux du peuple, ce qui change tout."


Steven Erlanger est le chef du bureau parisien du NY Times.


Rédacteur en chef: Greg Veis

1 commentaire:

Dites ce qui vous chante...
Mais dites-le !