dimanche 20 novembre 2022

Taxe foncière : puisez, puisez… jusqu’au tarissement !

Pour des raisons évidemment électorales, le président Macron a supprimé la taxe d’habitation, ainsi que la taxe audiovisuelle qui y était attachée. Mais comme les collectivités qui en bénéficiaient sont obligées d’équilibrer leurs budgets, il faut bien se rattraper sur quelques-uns. C’est ainsi que la taxe foncière est appelée à prendre le relais de leur financement et que les propriétaires et les bailleurs vont financer ce que les locataires n’ont plus à payer ! Il n’y avait aucun risque à prendre cette décision, l’immobilier étant par définition non délocalisable, puisque les propriétaires ne peuvent emmener hors de France leur capital immobilier. Les propriétaires bailleurs ont été rodés à la pratique, la Taxe d’Enlèvement des Ordures Ménagères (TEOM) a été incluse dans l’appel des taxes foncières, à charge pour eux de la répartir et de la récupérer auprès de leurs locataires, avec toutes les complications et les risques de litiges et d’impayés. Le bailleur est devenu malgré lui collecteur d’impôt sans rémunération. Les taxes foncières sont calculées à partir de taux déterminés chaque année par les municipalités applicables à la valeur locative, elle-même déterminée par l’administration.   Valeur locative : définition « La valeur locative représente le niveau de loyer annuel théorique que la propriété concernée pourrait produire si elle était louée. C’est l’une des bases servant au calcul de la taxe foncière. Elle est calculée forfaitairement à partir des conditions du marché locatif de 1970 (1975 pour les DOM) pour les propriétés bâties et de 1961 pour les propriétés non bâties. Cette valeur locative 70 est modifiée par des coefficients forfaitaires d’actualisation et de revalorisation. Elle peut également évoluer au fil des années en fonction des changements, constatés par l’administration, comme l’agrandissement de la surface habitable, l’accomplissement de gros travaux ou l’achat ou construction d’équipement(s) supplémentaire(s) (garage, piscine, véranda,….). Toute modification d’une construction doit faire l’objet de déclaration aux fins d’actualisation. »   Réactualisation facile Malgré les réajustements forfaitaires, le montant constaté des taxes foncières ne correspond pas à la définition de base. Mais l’État a tous les éléments pour l’appliquer à la lettre. Tout propriétaire privé bailleur a l’obligation de remplir le formulaire Cerfa 2044 dans lequel sont listés tous les locaux loués, leurs loyers bruts, les charges inhérentes et le revenu net. Avec ces éléments, l’État peut à tout moment réactualiser les valeurs locatives avec un suivi possible, facile et annuel. Ainsi, une petite extrapolation a permis de constater sur un exemple issu de comptabilité fiscale : Propriétés Bâties Taux d’appel taxes foncières en % de la valeur locative Commune Inter communes Taxes spéciales TEOM GEMAPI Taux Total 40,85 2,82 0,18 13,49 0,4454 57,79 Propriétés non bâties Taux d’appel taxes foncières en % de la valeur locative Commune Inter communes Taxes spéciales Chambre Agriculture GEMAPI Taux Total 24,55 6,76 0,463 12,3 1,07 45,14 Depuis 2021, la part départementale de la taxe foncière sur les propriétés bâties a été affectée aux communes. En actualisant de manière brutale la définition légale de l’administration des impôts, on obtient (chiffres issus de la comptabilité fiscale) : Logement 1 chiffres 2021 Taux en % Taxe foncière Valeur locative actuelle 949 57,79 548 Revenu locatif annuel net 5603 57,79 3238 Mais comme la taxe foncière est déductible des revenus locatifs, le revenu deviendrait : (5603 + 548) -3238 = 2910 ce qui ramènerait la taxe foncière à 2910 x 57,79 % = 1682 euros Revenu locatif net Taxe foncière Prélèvements sociaux 17,2 % Impôt sur le revenu 8 % Fiscalité totale Actuel 5603 548 964 448 1960   Futur ? 2910 1682 501 233 2416   Ce qui représenterait une augmentation de la charge fiscale de 23,27 %.   Détermination des taux : de très grandes disparités Comme on peut le constater, les taux étant votés par les municipalités, les valeurs locatives étant très variables selon leur localisation, on assite à un éventail invraisemblable de valeurs (Source DGFiP) : Taxes foncières 2021 en France Propriétés bâties Propriétés non bâties Taux de prélèvement  Montant 2021 Montant 2020 Taux de prélèvement  Montant 2021 Montant 2020 Maxi 83,20 % 3260,00 3281,00 501,80 % 2423,00 2690,00 Moyenne 53,97 % 1509,63 1543,32 90,26 % 146,17 149,01 Mini 21,40 % 880,00 899,00 11,40 % 45,00 44,00   Au vu de ce qui précède, les propriétaires devront être très vigilants lors de toute modification des critères de calcul des taxes foncières. On voit dans l’exemple ci-dessus que la charge fiscale passerait de 34,98 % à 83,02 % du revenu net immobilier. Ce serait confiscatoire, une pseudo nationalisation déguisée, qui ravirait tous les partisans de la répartition généreuse de l’argent des autres.   Un risque de crise du logement Alors que la loi Alur impose des critères de mise aux normes énergétiques des logements qui obligent les propriétaires à des investissements conséquents dans un contexte où les loyers sont de plus en plus encadrés, toute augmentation des taxes foncières aura un effet catastrophique sur la disponibilité des logements. Afin d’éviter la saisie, les propriétaires devront privilégier le paiement des taxes foncières au détriment des disponibilités de financement pour des travaux visant à économiser l’énergie. La vacance des logements locatifs augmentera, les logements hors normes étant progressivement interdits selon leur niveau de diagnostic de performance énergétique obligatoire (DPE).   Le partage du foncier et du bâti Pour lutter contre l’inflation du prix des terrains et permettre aux accédants d’acheter ou de construire à meilleur prix, il est envisagé de créer le principe d’un bail libre de longue durée. Les terrains seraient achetés ou confiés à des organismes publics : Office Foncier Libres ou Offices Fonciers Solidaires consacrés par la loi du 20 juillet 2016. Les acheteurs du bâti sur ces terrains devraient payer un loyer pour ces terrains et accéder à la propriété du bâti sans avoir à financer initialement le prix du sol. Une manière astucieuse de transformer les propriétaires en locataires. Sans savoir si l’expulsion pourra être prévue en cas de non-paiement du bail. Il n’est pas certain que la taxe foncière du bâti serait minorée dans ce cas de figure. À moins que la création de ces offices fonciers précités soit une première étape dans l’accaparement par l’État des valeurs immobilières pour rééquilibrer son bilan budgétaire ?   Une inquiétude grandissante Au vu de l’augmentation de la pression fiscale qui résultera de la réactualisation des valeurs locatives, les investisseurs se tourneront rapidement vers des horizons moins contraints et plus rémunérateurs. On entend souvent certains courants politiques et syndicaux prétendre que les revenus du capital sont moins taxés que les revenus du travail. Force est de constater que les prélèvements sociaux sont de 9,2 % pour les revenus du travail, mais de 17,2 % pour les revenus du capital, dont les revenus fonciers.   L’héritage et les droits de succession Un courant de pensée de plus en plus insistant entend faire de la suppression de l’héritage un instrument de remise à égalité des citoyens. D’après Le Monde, si on prenait l’ensemble des héritages transmis par an, estimé à 250 milliards d’euros, et qu’il était redistribué à parts égales à tous les Français à leur majorité, chacun recevrait environ 310 000 euros. Formidable idée qui complète la notion de revenu universel, selon laquelle on a un droit par le simple fait d’exister. Sauf que la vie collective, qu’elle soit familiale, nationale ou internationale ne peut se concevoir paisiblement que dans l’harmonie, l’équilibre et l’équité des échanges et des relations. Supprimer l’héritage, c’est renier la volonté et le courage de créer, aux prix d’efforts et de sacrifices, pour léguer à ceux qu’on aime et qui nous aiment le fruit de notre court passage sur Terre. D’autant que ceux qui jalousent cet héritage en profitent indirectement par le jeu des droits de succession qui sont répartis par les subventions et les aides financées par l’impôt. Le montant de ces aides n’est pas anodin, car au-dessus des abattements légaux, le taux des droits de succession varie de 20 % à 45 % en ligne directe (père, mère, enfants et petits-enfants) et va jusqu’à 60 % pour les héritiers extra familiaux. Il faut que l’instinct créatif des propriétaires soit chevillé au corps et à l’esprit pour accepter de se priver de loisirs ou de choses plus essentielles, pour créer un patrimoine pérenne, en payant tout au long de leur vie une taxe foncière censée leur garantir de la part de l’État la sécurité de leur propriété. Il leur faut encore plus d’abnégation pour accepter de payer des droits de succession qui permettront à ceux qui les détestent de profiter d’une part de leur patrimoine et de leurs efforts. Que l’État réfléchisse bien avant d’aliéner le droit de propriété. Sans la récompense de l’effort accompli, point de création de richesses, et pour maintenir la paix sociale, on ne peut redistribuer davantage de richesses qu’on en crée. Si on dilapide les richesses anciennes, on court à la ruine et à la guerre civile.   Un article publié initialement le 25 octobre 2022.
http://dlvr.it/Sd43VW

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