Allons-nous vers une Europe fédérale resserrée autour de l’Allemagne ? Dans un article pour le Frankfurter Allgemeine Zeitung, le chancelier social-démocrate allemand Olaf Scholz vient de décrire sa vision de l’Europe. Il y défend une approche centralisatrice de l’Union européenne et appelle à la fin des veto nationaux afin d’assurer un plus grand poids sur la scène internationale. Mais les politiques écologiques et de défense allemandes passées et présentes montrent que la méfiance doit être de mise.
Fin des veto nationaux et critique de l’égoïsme national
Dans cet article Scholz déclare :
L’unité. Nous devons absolument la maintenir et l’approfondir. Pour moi, cela signifie qu’il faut en finir avec les blocages égoïstes des décisions européennes par certains États membres. Fini les initiatives nationales isolées qui nuisent à l’Europe dans son ensemble. Nous ne pouvons tout simplement plus nous permettre des vetos nationaux, par exemple en matière de politique étrangère, si nous voulons continuer à être entendus dans un monde de grandes puissances concurrentes.
Mais l’Allemagne est-elle la mieux placée pour critiquer le manque d’unité et l’égoïsme national des pays européens ?
C’est sa politique antinucléaire persistante au niveau national et européen ainsi que son fort partenariat russe qui ont conduit à une dépendance au gaz russe dont on ressent actuellement les effets géopolitiques. L’introduction du nucléaire dans la taxonomie européenne s’est faite contre l’Allemagne par une coalition entre la France et divers pays, comme ceux d’Europe centrale.
L’Allemagne parle beaucoup d’une défense européenne, mais continue d’acheter de l’équipement militaire américain au détriment de la France et des autres partenaires européens. Le dernier exemple étant l’achat d’avions de chasse F-35 américains en 2022. En tant que membre fortement atlantiste, il est probable qu’une Europe unie sera fortement alignée sur la politique étrangère américaine.
Plus facile à dire qu’à faire
L’autre problème est aussi l’applicabilité de cette vision. Pour mettre fin aux vetos nationaux, il faudrait réviser les traités européens. Un point déjà avancé sous la présidence européenne de la France.
Néanmoins, il est loin de faire l’unanimité. Le 9 mai 2022, 13 États membres de l’UE s’opposaient à cette idée de révision de traité : Pologne, Roumanie, Finlande, Suède, République tchèque, Malte, Croatie, Slovénie, Estonie, Lettonie, Lituanie, Danemark et Bulgarie.
De plus, les différents gouvernements européens sont de plus en plus contestés par des forces antisystèmes, voire eurosceptiques (comme en France ou en Italie). Dans un tel contexte, il apparait que les vœux de Scholz vont rester lettre morte. Ils risquent même d’attiser les divisions.
Une position médiane à travers la confédération serait plus judicieuse : en respectant la diversité des États membres et en s’en servant pour faire de l’Europe un centre de puissance. La devise de l’Union européenne est « Unis dans la diversité ». Il ne faudrait pas oublier cette diversité qui a été la force de l’Occident et de l’Europe.
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