Par Francis Richard.
«La santé nâ™a pas de prix. Le gouvernement mobilisera tous les moyens financiers nécessaires pour porter assistance, pour prendre en charge les malades, pour sauver des vies. Quoi quâ™il en coûte. »
Câ™est ce que déclare le Président de la République, Emmanuel Macron, dans un discours solennel le 12 mars 2020. Ce « quoi quâ™il en coûte » restera dans les mémoires, parce quâ™aujourdâ™hui est venu le moment de payer lâ™addition. La décroissance
En décidant le confinement, mesure moyenâgeuse, les hommes de lâ™Ã‰tat et le Président de la République à leur tête étaient donc bien conscients quâ™ils allaient provoquer une crise économique et sociale sans précédent.
Lâ™arrêt de lâ™activité ne peut jamais être sans conséquences. Si les prévisions sont toujours sujettes à caution, les résultats, fussent-ils estimés, sont moins contestables. à cet égard, le PIB peut être un indicateur, certes imparfait.
Que dit lâ™INSEE dans sa note de conjoncture du 8 septembre 2020 ? Il estime le recul du PIB à 5,9 % au premier trimestre et à 13,8 % au deuxième trimestre, soit un recul de 19 % par rapport au quatrième trimestre de 2019. Diminution de lâ™emploi une réalité masquée
Selon lâ™INSEE, au cours du premier semestre le nombre dâ™emplois salariés a diminué de 715 000. Lâ™organisme étatique concède que cela aurait pu être pire si le dispositif dâ™activité partielle nâ™avait pas été mis en place, masquant la réalité.
Si, dans un premier temps, il est possible que ce dispositif ait permis de différer la diminution de lâ™emploi provoquée par le confinement, il ne lâ™Ã©vitera pas indéfiniment et, pour survivre, aides salariales ou pas, les entreprises licencieront.
Elles commencent déjà à licencier, parce que les aides salariales sont une chose, le carnet de commandes des clients en est une autre et que ce qui a été perdu reste perdu : quand lâ™activité sâ™arrête, dâ™autres coûts continuent de peser. Les entreprises nâ™ont pas besoin dâ™aides mais de liberté
Pour fonctionner, les entreprises nâ™ont pas besoin dâ™aides, via un dispositif dâ™activité partielle ou un plan de relance (qui se fait toujours en privilégiant les uns au détriment des autres) ; elles doivent être libres et non pas empêchées dâ™agir.
Après avoir réduit les entreprises à quia avec le confinement, les hommes de lâ™Ã‰tat prétendent maintenant savoir mieux quâ™elles ce quâ™il faut faire : à coup dâ™une centaine de milliards ils vont les aider à être écologiques, compétitives et solidaires.
Il aurait mieux valu ne pas confiner, comme dâ™autres pays en ont donné lâ™exemple, et, depuis longtemps, réduire à rien ou peu de choses les dépenses publiques et les impôts et taxes. Mais ce serait reconnaître leur inutilité et leur nuisance. Le mot de la fin
Les hommes politiques ne connaissent rien au monde des entreprises. Ils ignorent quâ™elles naissent, vivent et meurent. Ils voudraient même que tous leurs sites soient immortels grâce à leurs aides généreuses, avec lâ™argent des autres, bien entendu.
Lâ™un dâ™entre eux, le ministre des Transports, Jean-Baptiste Djebbari, a tenu verbatim sur RTL, le jeudi 17 septembre 2020, au sujet du fabricant de pneumatiques de Béthune qui fermera son usine en 2021, ce propos révélateur :
« Bridgestone a bénéficié un peu du chômage partiel, lâ™entreprise nâ™a sollicité aucune autre aide de lâ™Ã‰tat [quelle horreur !], ce qui prouve quâ™elle nâ™avait pas de projet alternatif pour ce site. «
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dimanche 20 septembre 2020
Le bilan (surtout) désastreux de Donald Trump
Par Pierre-Guy Veer.
L’élection présidentielle approche à grands pas aux États-Unis. Et comme toujours, la partisannerie aveugle les deux principaux camps. Pendant que les Démocrates affirment qu’on guérira le cancer avec l’élection de Biden, les Républicains n’ont d’yeux que pour les «grandes réalisations » de Donald Trump depuis son élection.
Quâ™en est-il vraiment ? Une économie précaire encore plus fragilisée avec Donald Trump
à son entrée au pouvoir, Trump faisait face à une économie qui semblait en bonne santé. Nonobstant que la « reprise dâ™Obama » fut la plus lente depuis la Seconde Guerre mondiale, cette santé était précaire pour quiconque regarde les chiffres en profondeur.
* Le taux de participation des Blancs nâ™a cessé de décliner depuis 2009, où il était à son plus bas depuis 1988 ; celui des Noirs avait formellement dépassé le taux de 2009 en février dernier tout en restant à son plus bas depuis 1986 ; et celui des Hispaniques nâ™a cessé de diminuer depuis avril 2009.
* Pour la population générale, le taux de participation nâ™a cessé de décliner depuis février 2009, où il était déjà à un creux historique depuis juin 1988 â“ il est maintenant à un creux historique jamais vu depuis février 1978 (en date de mars 2020).
* La banque centrale a plus que quadruplé la masse monétaire depuis 2008, générant une bulle boursière et immobilière encore plus volumineuse que celle du début des années 2000.
* La dette publique par rapport au PIB nâ™a cessé dâ™augmenter depuis 2009, bien que « stabilisée » à plus de 100 % du PIB.
Et quâ™a fait Trump pour que lâ™Oncle Sam puisse retrouver une croissance économique plus durable ? Tout ce quâ™il ne fallait pas faire :
* Il a augmenté les dépenses nominales de plus de 600 milliards de dollars tout en baissant les impôts (ce qui était pourtant une bonne chose), maintenant un déficit dépassant les 200 milliards durant la plupart des mois suivant janvier 2017. à la prochaine augmentation des taux dâ™intérêts, les frais vont dramatiquement augmenter.
* Dans la même veine, depuis la campagne de 2016, il se vante que les États-Unis nâ™ont quâ™Ã imprimer davantage dâ™argent afin dâ™Ã©viter des défauts de paiements de la dette.
La guerre commerciale insensée de Donald Trump
Mais surtout, il a tenu lâ™une des promesses quâ™il aurait définitivement dû renier : se lancer dans une guerre tarifaire. Ne lui en déplaise, il nâ™est pas facile de gagner de telles guerresâ“ en fait, il nâ™y a que des perdants. Et leur prolongation ne fera quâ™annuler les effets positifs de ses baisses dâ™impôts et de ses politiques de déréglementation.
En effet, une guerre tarifaire repose sur cette idée saugrenue délicieusement parodiée par Frédéric Bastiat : quelquâ™un, quelque part, peu importe la raison, produit plus efficacement et le gouvernement doit empêcher cette concurrence qualifiée de déloyale.
Aux États-Unis, de telles restrictions ont eu pour effet lâ™effondrement des exportations de soja, principalement vers la Chine. De plus, il a même imposé des tarifs injustifiés sur les produits issus de pays industrialisés â“ et donc aux pratiques monétaires et réglementaires plus « acceptables » que la Chine. Ces derniers ont évidemment réagi, pénalisant tous les consommateurs. Une politique migratoire à la xénophobie à peine voilée
Finalement, la xénophobie patente de Trump et son administration a vite fait surface.
Au début, il affirmait quâ™il ne sâ™agissait que de contrôler le flot dâ™immigration illégale venant principalement du Mexique â“ ce qui fut un échec. Il affirmait quâ™il voulait contrôler la criminalité supposément apportée par ces immigrés, alors que les statistiques des villes frontalières avec le Mexique contredisent ses affirmations.
Pour quelquâ™un qui affirme avoir voulu minimiser lâ™impact du coronavirus, il ne sâ™est pas gêné pour y aller des pires hyperboles au sujet de « violeurs mexicains ».
Parlant du virus et de ses pertes massives dâ™emplois, Trump a étendu sa haine des étrangers en suspendant toute immigration afin de « protéger » les emplois.
Cette protection des emplois a fait perdre soit un temps fou à tenter dâ™obtenir un visa de travail, soit carrément fait perdre lâ™emploi à ceux qui ne pouvaient pas obtenir un visa.
Jâ™ai beau avoir une résidence permanente, jâ™ai tout de même peur de postuler pour la citoyenneté et dâ™Ãªtre ainsi expulsé. Exposer le biais des médias
Mais sâ™il y a un point positif indéniable de la présidence de Trump, câ™est dâ™exposer le biais à peine voilé des médias pour tout ce qui nâ™est pas liberal (pro-démocrate).
Prenons lâ™immigration par exemple. Les actions de Trump nâ™ont fait quâ™empirer une situation déjà catastrophique. En effet, Obama avait fait expulser des quantités record dâ™immigrants illégaux, et placer dans des centres de rétention.
Les médias ont même montré des images datant de⦠2014. CNN y va même dâ™acrobaties intellectuelles dignes du Cirque du Soleil pour affirmer que les expulsions de Trump sont pires.
Et que dire de la propagation du coronavirus. Le 28 août, le bulletin du soir de NBC a commencé avec la marche commémorative sur Washington, où il nâ™a pas été fait grand cas des 50 000 personnes tassées comme des sardines, mais où 1500 personnes assises pour assister à un discours de Trump représentaient un danger de propagation.
Néanmoins, quatre années supplémentaires avec Donald Trump à la tête des États-Unis nâ™augurent rien de bien. Ses politiques commerciales mercantilistes ne peuvent que nuire à la reprise post-coronavirus, ses politiques migratoires vont bloquer à la fois des travailleurs agricoles et des employés dans les hautes technologies.
Et considérant quâ™un président en second mandat fait face à plus dâ™hostilité du Congrès (lame duck), il risque dâ™utiliser ses décrets encore plus agressivement pour outrepasser davantage le processus législatif.
Il ne serait pas le premier, mais les Républicains vont regretter dâ™avoir soutenu les décrets pour « situation dâ™urgence » quand les Démocrates utiliseront la même raison pour faire passer sournoisement leur agenda, tel le désastreux Green New Deal.
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Weibo, le twitter chinois qui a failli révolutionner le pays
Par Frédéric Mas.
En 2009, une révolte éclate à Urumqi, la capitale du Xinjiang en Chine. Des membres de la minorité ouïghoure attaquent des membres de l’ethnie chinoise majoritaire, les Hans, en réaction aux opérations de «sinisation » de la région opérées par la dictature de Pékin.
Celle-ci réagit brutalement par la déportation de la minorité. Plusieurs réseaux sociaux accusés de fake news, dont Twitter, Plurk, Fanfou et Facebook sont interdits la même année. Câ™est de lâ™Ã©tranger, par le véhicule dâ™internet, que la subversion anticommuniste a pénétré, câ™est donc ce quâ™il faut combattre aux yeux des autorités.
Câ™est à ce moment que naît Sina Weibo, la plateforme de microblogging qui va vite devenir le réseau le plus populaire du pays. Pendant 4 ans, Weibo va servir de lieu dâ™Ã©changes, dâ™informations, dâ™images, de vidéos et de prises de parole des citoyens chinois. Lâ™espace de quelques années, Weibo va desserrer lâ™Ã©tau de la censure politique et de la propagande du Parti, donnant la parole aux dissidents et aux critiques du régime en place. Pendant quelques années, les médias vont échapper aux mains des bureaucrates du Parti. Contre la censure et la corruption
Certains intellectuels dissidents, comme Murong Xuecun, se sont servis de Weibo comme dâ™un média alternatif dénonçant la censure et la corruption. Comme lâ™Ã©crit Kai Strittmatter, le phénomène inquiète le Parti. Des milliers de personnes vont se coordonner sur le réseau pour récolter de lâ™information et enquêter sur les « crimes » supposés avoir été commis par les ennemis du régime.
Le phénomène génère à la fois des « chasses aux sorcières » comparables à ce quâ™on peut voir sur les réseaux sociaux en Occident, mais aussi à la traque des fonctionnaires et des cadres du parti corrompu.
« Pour la première fois depuis la fondation de la République populaire, en 1949, on disposait dâ™un espace public qui appartenait aux citoyens et dans lequel on parlait leur langue », ajoute Strittmatter1
Et cet embryon de société civile a un poids non négligeable. Sur le marché, lâ™entreprise est évaluée en 2018 à 30 milliards de dollars. à son lancement, Sina Weibo comptait plus de 440 millions dâ™utilisateurs par mois. Pour avoir un point de comparaison, Twitter attire quant à lui 330 millions dâ™utilisateurs dans le monde. Dâ™internet est née une sorte de société civile virtuelle qui ne soit pas placée directement sous la tutelle de lâ™Ã‰tat et du Parti, avec ses accès de libertés mais aussi ses excès.
Câ™Ã©tait trop beau pour durer, et ça nâ™a pas duré. Weibo tué par Xi
La censure chinoise sur internet a repris les choses en main. Depuis sa création, les comptes des militants, des journalistes et des intellectuels survivaient tant bien que mal, mais ce nâ™Ã©tait pas suffisant aux yeux du Parti. Comme le note Strittmatter, Pékin conduit la reconquête dâ™internet au cours de 2013, clôturant et arrêtant les influenceurs les plus importants du réseau.
Ainsi Charles Xue, investisseur en capital risque qui comptait 12 millions dâ™abonnés, est arrêté pour « incitation à la prostitution » et « proxénétisme ». Son crime réel est dâ™avoir mis en cause la mollesse du gouvernement face à la pollution de lâ™air, la bonne santé alimentaire et les enlèvements dâ™enfants.
La même année, la cour suprême change les règles : quiconque répand une « rumeur » transmise plus de 500 fois ou sur laquelle on clique plus de 5000 fois encourt une peine allant jusquâ™Ã 3 ans de prison. On condamne ainsi par avance la circulation de toute information libre. « Depuis, Weibo est mort en tant que média jouant un rôle politique. Là où se déchaînait un peu plus tôt un débat sauvage, souvent polémique, intelligent dans le meilleur des cas, mais de toute façon vivant, règne aujourdâ™hui un calme sépulcral. », conclut, amer, Strittmatter2.
La Chine a fait lâ™expérience pendant quelques années dâ™une société civile relativement libre grâce à internet et aux nouvelles technologies, avant que le pouvoir ne retourne ces dernières contre les libertés civiles. Câ™est une leçon étonnante, y compris pour lâ™Occident.
à droite comme à gauche, la « tentation chinoise » est grande de vouloir encadrer les réseaux sociaux, modérer ses excès réels ou supposés, ses fake news et sa cancel culture. Lâ™aventure de Weibo nous rappelle toutefois que la liberté sur les réseaux participe aussi de la vie de la société civile. Il faut la protéger des populismes comme des moralismes.
* K. Strittmatter, Dictature 2.0. Quand la Chine surveille son peuple, Tallandier, 2020, p. 92. ↩
* op. cit., p. 96. ↩
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