dimanche 20 septembre 2020

Les entreprises licencieront : quelle surprise !

Par Francis Richard. «�La santé n’a pas de prix. Le gouvernement mobilisera tous les moyens financiers nécessaires pour porter assistance, pour prendre en charge les malades, pour sauver des vies. Quoi qu’il en coûte. Â» C’est ce que déclare le Président de la République, Emmanuel Macron, dans un discours solennel le 12 mars 2020. Ce « quoi qu’il en coûte Â» restera dans les mémoires, parce qu’aujourd’hui est venu le moment de payer l’addition. La décroissance En décidant le confinement, mesure moyenâgeuse, les hommes de l’État et le Président de la République à leur tête étaient donc bien conscients qu’ils allaient provoquer une crise économique et sociale sans précédent. L’arrêt de l’activité ne peut jamais être sans conséquences. Si les prévisions sont toujours sujettes à caution, les résultats, fussent-ils estimés, sont moins contestables. À cet égard, le PIB peut être un indicateur, certes imparfait. Que dit l’INSEE dans sa note de conjoncture du 8 septembre 2020 ? Il estime le recul du PIB à 5,9 % au premier trimestre et à 13,8 % au deuxième trimestre, soit un recul de 19 % par rapport au quatrième trimestre de 2019. Diminution de l’emploi une réalité masquée Selon l’INSEE, au cours du premier semestre le nombre d’emplois salariés a diminué de 715 000. L’organisme étatique concède que cela aurait pu être pire si le dispositif d’activité partielle n’avait pas été mis en place, masquant la réalité. Si, dans un premier temps, il est possible que ce dispositif ait permis de différer la diminution de l’emploi provoquée par le confinement, il ne l’évitera pas indéfiniment et, pour survivre, aides salariales ou pas, les entreprises licencieront. Elles commencent déjà à licencier, parce que les aides salariales sont une chose, le carnet de commandes des clients en est une autre et que ce qui a été perdu reste perdu : quand l’activité s’arrête, d’autres coûts continuent de peser. Les entreprises n’ont pas besoin d’aides mais de liberté Pour fonctionner, les entreprises n’ont pas besoin d’aides, via un dispositif d’activité partielle ou un plan de relance (qui se fait toujours en privilégiant les uns au détriment des autres) ; elles doivent être libres et non pas empêchées d’agir. Après avoir réduit les entreprises à quia avec le confinement, les hommes de l’État prétendent maintenant savoir mieux qu’elles ce qu’il faut faire : à coup d’une centaine de milliards ils vont les aider à être écologiques, compétitives et solidaires. Il aurait mieux valu ne pas confiner, comme d’autres pays en ont donné l’exemple, et, depuis longtemps, réduire à rien ou peu de choses les dépenses publiques et les impôts et taxes. Mais ce serait reconnaître leur inutilité et leur nuisance. Le mot de la fin Les hommes politiques ne connaissent rien au monde des entreprises. Ils ignorent qu’elles naissent, vivent et meurent. Ils voudraient même que tous leurs sites soient immortels grâce à leurs aides généreuses, avec l’argent des autres, bien entendu. L’un d’entre eux, le ministre des Transports, Jean-Baptiste Djebbari, a tenu verbatim sur RTL, le jeudi 17 septembre 2020, au sujet du fabricant de pneumatiques de Béthune qui fermera son usine en 2021, ce propos révélateur : « Bridgestone a bénéficié un peu du chômage partiel, l’entreprise n’a sollicité aucune autre aide de l’État [quelle horreur !], ce qui prouve qu’elle n’avait pas de projet alternatif pour ce site. «  — Sur le web Ces articles pourraient vous intéresser: Aucun article similaire.
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Le bilan (surtout) désastreux de Donald Trump

Par Pierre-Guy Veer. L’élection présidentielle approche à grands pas aux États-Unis. Et comme toujours, la partisannerie aveugle les deux principaux camps. Pendant que les Démocrates affirment qu’on guérira le cancer avec l’élection de Biden, les Républicains n’ont d’yeux que pour les «�grandes réalisations Â» de Donald Trump depuis son élection. Qu’en est-il vraiment ? Une économie précaire encore plus fragilisée avec Donald Trump À son entrée au pouvoir, Trump faisait face à une économie qui semblait en bonne santé. Nonobstant que la « reprise d’Obama » fut la plus lente depuis la Seconde Guerre mondiale, cette santé était précaire pour quiconque regarde les chiffres en profondeur. * Le taux de participation des Blancs n’a cessé de décliner depuis 2009, où il était à son plus bas depuis 1988 ; celui des Noirs avait formellement dépassé le taux de 2009 en février dernier tout en restant à son plus bas depuis 1986 ; et celui des Hispaniques n’a cessé de diminuer depuis avril 2009. * Pour la population générale, le taux de participation n’a cessé de décliner depuis février 2009, où il était déjà à un creux historique depuis juin 1988 – il est maintenant à un creux historique jamais vu depuis février 1978 (en date de mars 2020). * La banque centrale a plus que quadruplé la masse monétaire depuis 2008, générant une bulle boursière et immobilière encore plus volumineuse que celle du début des années 2000. * La dette publique par rapport au PIB n’a cessé d’augmenter depuis 2009, bien que « stabilisée » à plus de 100 % du PIB. Et qu’a fait Trump pour que l’Oncle Sam puisse retrouver une croissance économique plus durable ? Tout ce qu’il ne fallait pas faire : * Il a augmenté les dépenses nominales de plus de 600 milliards de dollars tout en baissant les impôts (ce qui était pourtant une bonne chose), maintenant un déficit dépassant les 200 milliards durant la plupart des mois suivant janvier 2017. À la prochaine augmentation des taux d’intérêts, les frais vont dramatiquement augmenter. * Dans la même veine, depuis la campagne de 2016, il se vante que les États-Unis n’ont qu’à imprimer davantage d’argent afin d’éviter des défauts de paiements de la dette. La guerre commerciale insensée de Donald Trump Mais surtout, il a tenu l’une des promesses qu’il aurait définitivement dû renier : se lancer dans une guerre tarifaire. Ne lui en déplaise, il n’est pas facile de gagner de telles guerres– en fait, il n’y a que des perdants. Et leur prolongation ne fera qu’annuler les effets positifs de ses baisses d’impôts et de ses politiques de déréglementation. En effet, une guerre tarifaire repose sur cette idée saugrenue délicieusement parodiée par Frédéric Bastiat : quelqu’un, quelque part, peu importe la raison, produit plus efficacement et le gouvernement doit empêcher cette concurrence qualifiée de déloyale. Aux États-Unis, de telles restrictions ont eu pour effet l’effondrement des exportations de soja, principalement vers la Chine. De plus, il a même imposé des tarifs injustifiés sur les produits issus de pays industrialisés – et donc aux pratiques monétaires et réglementaires plus « acceptables » que la Chine. Ces derniers ont  évidemment réagi, pénalisant tous les consommateurs. Une politique migratoire à la xénophobie à peine voilée Finalement, la xénophobie patente de Trump et son administration a vite fait surface. Au début, il affirmait qu’il ne s’agissait que de contrôler le flot d’immigration illégale venant principalement du Mexique – ce qui fut un échec. Il affirmait qu’il voulait contrôler la criminalité supposément apportée par ces immigrés, alors que les statistiques des villes frontalières avec le Mexique contredisent ses affirmations. Pour quelqu’un qui affirme avoir voulu minimiser l’impact du coronavirus, il ne s’est pas gêné pour y aller des pires hyperboles au sujet de « violeurs mexicains ». Parlant du virus et de ses pertes massives d’emplois, Trump a étendu sa haine des étrangers en suspendant toute immigration afin de « protéger » les emplois. Cette protection des emplois a fait perdre soit un temps fou à tenter d’obtenir un visa de travail, soit carrément fait perdre l’emploi à ceux qui ne pouvaient pas obtenir un visa. J’ai beau avoir une résidence permanente, j’ai tout de même peur de postuler pour la citoyenneté et d’être ainsi expulsé. Exposer le biais des médias Mais s’il y a un point positif indéniable de la présidence de Trump, c’est d’exposer le biais à peine voilé des médias pour tout ce qui n’est pas liberal (pro-démocrate). Prenons l’immigration par exemple. Les actions de Trump n’ont fait qu’empirer une situation déjà catastrophique. En effet, Obama avait fait expulser des quantités record d’immigrants illégaux, et placer dans des centres de rétention. Les médias ont même montré des images datant de… 2014. CNN y va même d’acrobaties intellectuelles dignes du Cirque du Soleil pour affirmer que les expulsions de Trump sont pires. Et que dire de la propagation du coronavirus. Le 28 août, le bulletin du soir de NBC a commencé avec la marche commémorative sur Washington, où il n’a pas été fait grand cas des 50 000 personnes tassées comme des sardines, mais où 1500 personnes assises pour assister à un discours de Trump représentaient un danger de propagation. Néanmoins, quatre années supplémentaires avec Donald Trump à la tête des États-Unis n’augurent rien de bien. Ses politiques commerciales mercantilistes ne peuvent que nuire à la reprise post-coronavirus, ses politiques migratoires vont bloquer à la fois des travailleurs agricoles et des employés dans les hautes technologies. Et considérant qu’un président en second mandat fait face à plus d’hostilité du Congrès (lame duck), il risque d’utiliser ses décrets encore plus agressivement pour outrepasser davantage le processus législatif. Il ne serait pas le premier, mais les Républicains vont regretter d’avoir soutenu les décrets pour « situation d’urgence » quand les Démocrates utiliseront la même raison pour faire passer sournoisement leur agenda, tel le désastreux Green New Deal. — À lire aussi : États-Unis : Joe Biden, un désastre potentiel Ces articles pourraient vous intéresser: États-Unis : une campagne présidentielle bizarre et imprévisible États-Unis : Joe Biden, un désastre potentiel Républicains et Démocrates : les convergences dont on ne parle jamais Démocratie américaine en danger : la polarisation politique remplace le consensus
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Weibo, le twitter chinois qui a failli révolutionner le pays

Par Frédéric Mas. En 2009, une révolte éclate à Urumqi, la capitale du Xinjiang en Chine. Des membres de la minorité ouïghoure attaquent des membres de l’ethnie chinoise majoritaire, les Hans, en réaction aux opérations de «�sinisation Â» de la région opérées par la dictature de Pékin. Celle-ci réagit brutalement par la déportation de la minorité. Plusieurs réseaux sociaux accusés de fake news, dont Twitter, Plurk, Fanfou et Facebook sont interdits la même année. C’est de l’étranger, par le véhicule d’internet, que la subversion anticommuniste a pénétré, c’est donc ce qu’il faut combattre aux yeux des autorités. C’est à ce moment que naît Sina Weibo, la plateforme de microblogging qui va vite devenir le réseau le plus populaire du pays. Pendant 4 ans, Weibo va servir de lieu d’échanges, d’informations, d’images, de vidéos et de prises de parole des citoyens chinois. L’espace de quelques années, Weibo va desserrer l’étau de la censure politique et de la propagande du Parti, donnant la parole aux dissidents et aux critiques du régime en place. Pendant quelques années, les médias vont échapper aux mains des bureaucrates du Parti. Contre la censure et la corruption Certains intellectuels dissidents, comme Murong Xuecun, se sont servis de Weibo comme d’un média alternatif dénonçant la censure et la corruption. Comme l’écrit Kai Strittmatter, le phénomène inquiète le Parti. Des milliers de personnes vont se coordonner sur le réseau pour récolter de l’information et enquêter sur les « crimes Â» supposés avoir été commis par les ennemis du régime. Le phénomène génère à la fois des « chasses aux sorcières Â» comparables à ce qu’on peut voir sur les réseaux sociaux en Occident, mais aussi à la traque des fonctionnaires et des cadres du parti corrompu. « Pour la première fois depuis la fondation de la République populaire, en 1949, on disposait d’un espace public qui appartenait aux citoyens et dans lequel on parlait leur langue Â», ajoute Strittmatter1 Et cet embryon de société civile a un poids non négligeable. Sur le marché, l’entreprise est évaluée en 2018 à 30 milliards de dollars. À son lancement, Sina Weibo comptait plus de 440 millions d’utilisateurs par mois. Pour avoir un point de comparaison, Twitter attire quant à lui 330 millions d’utilisateurs dans le monde. D’internet est née une sorte de société civile virtuelle qui ne soit pas placée directement sous la tutelle de l’État et du Parti, avec ses accès de libertés mais aussi ses excès. C’était trop beau pour durer, et ça n’a pas duré. Weibo tué par Xi La censure chinoise sur internet a repris les choses en main. Depuis sa création, les comptes des militants, des journalistes et des intellectuels survivaient tant bien que mal, mais ce n’était pas suffisant aux yeux du Parti. Comme le note Strittmatter, Pékin conduit la reconquête d’internet au cours de 2013, clôturant et arrêtant les influenceurs les plus importants du réseau. Ainsi Charles Xue, investisseur en capital risque qui comptait 12 millions d’abonnés, est arrêté pour « incitation à la prostitution Â» et « proxénétisme Â». Son crime réel est d’avoir mis en cause la mollesse du gouvernement face à la pollution de l’air, la bonne santé alimentaire et les enlèvements d’enfants. La même année, la cour suprême change les règles : quiconque répand une « rumeur Â» transmise plus de 500 fois ou sur laquelle on clique plus de 5000 fois encourt une peine allant jusqu’à 3 ans de prison. On condamne ainsi par avance la circulation de toute information libre. « Depuis, Weibo est mort en tant que média jouant un rôle politique. Là où se déchaînait un peu plus tôt un débat sauvage, souvent polémique, intelligent dans le meilleur des cas, mais de toute façon vivant, règne aujourd’hui un calme sépulcral. Â», conclut, amer, Strittmatter2. La Chine a fait l’expérience pendant quelques années d’une société civile relativement libre grâce à internet et aux nouvelles technologies, avant que le pouvoir ne retourne ces dernières contre les libertés civiles. C’est une leçon étonnante, y compris pour l’Occident. À droite comme à gauche, la « tentation chinoise Â» est grande de vouloir encadrer les réseaux sociaux, modérer ses excès réels ou supposés, ses fake news et sa cancel culture. L’aventure de Weibo nous rappelle toutefois que la liberté sur les réseaux participe aussi de la vie de la société civile. Il faut la protéger des populismes comme des moralismes. * K. Strittmatter, Dictature 2.0. Quand la Chine surveille son peuple, Tallandier, 2020, p. 92. ↩ * op. cit., p. 96. ↩ Ces articles pourraient vous intéresser: TFBoys, le boys band du Parti communiste chinois Chine : avec le Coronavirus, Pékin sur le banc des accusés Intelligence artificielle : faut-il avoir peur du plan de domination chinois ? Hong Kong face à la Chine : la leçon de liberté donnée au monde
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