Par Xavier Fontanet.
Les kiosquiers viennent de percevoir du gouvernement une aide exceptionnelle de 1500 à 3000 euros pour continuer à distribuer les journaux. L’idée n’est pas ici de juger, d’approuver ou de critiquer, la situation est difficile et l’urgence a ses raisons.
Le seul point sur lequel il faut être intransigeant c’est le respect de la pluralité de l’offre éditoriale.
Il n’empêche que ce coup de main ne va faire que panser les plaies et ne dispense pas de réfléchir aux causes profondes qui vident les kiosques. Pourquoi les kiosques se vident ?
Ceux-ci sont soumis à au moins trois dynamiques puissantes contre leur activité. D’abord les journaux papier se distribuent de plus en plus par la poste.
Ensuite, le papier est de plus en plus substitué par le numérique.
Enfin, la montée de Google Amazon et Facebook siphonne aujourd’hui plus de 50 % de la publicité qui traditionnellement financait les médias (télévision, radio, journaux).
Or tous les chiffres semblent indiquer que ce sont les journaux qui ont le plus souffert de cette montée en puissance des acteurs du net.
Face à trois tendances aussi lourdes, il est clair que la profession de kiosquier doit trouver de nouveaux produits à distribuer ; covid ou pas, le problème est là. Il faut qu’elle trouve des produits de substitution pour continuer à vivre : livres ? nourriture ? cosmétiques de base ? boissons ? timbres ? fleurs ? confiserie ? papeterie ? souvenirs ? lunettes de soleil ? photocopies ? pourquoi pas mini galerie d’art…
Avec tous les bouleversements à l’œuvre en ce moment ce serait bien le diable si il n’y avait pas une ou deux pistes prometteuses à explorer et permettant de reconvertir le kiosque.
Les professions adjacentes protesteront, il n’empêche que d’une concurrence saine et accrue entre canaux de distribution ne peut émerger que du bien pour la société dans son ensemble. Le positionnement de la presse écrite
Derrière le problème des kiosques se profile une autre problématique, celle du positionnement futur de la presse écrite. Un rapide retour sur le passé peut être éclairant.
La publicité a été incontestablement une innovation mais elle a eu des conséquences peut-être sous estimées au départ. À partir du moment où elle représente plus de 50 % des recettes, une direction peut, sans que ce soit toujours le cas, être tentée de vendre ses lecteurs à ses annonceurs. Elle peut alors pousser la rédaction à faire du spectaculaire pour grossir les ventes.
La nature humaine étant ce qu’elle est, la tentation est grande pour certains annonceurs de tenter d’influencer le contenu éditorial en échange de leurs commandes.
Autre changement profond dans le système : l’État et le pouvoir politique sont entrés dans le jeu en distribuant des subventions non négligeables, ce qui n’est pas très sain ni pour les journaux ni pour la puissance publique elle même.
La publicité captée par les géants du net alimente en ce moment une prolifération complètement incontrôlée des fake news et on ne voit pas ce qui va les freiner. Au même moment les recettes publicitaires perdues empêchent les médias de rémunérer correctement les journalistes alors qu’on n’a jamais eu autant besoin d’eux.
Tous ces problèmes sont durs à porter par les médias mais génèrent une ouverture stratégique évidente pour eux : viser la qualité de l’information et devenir un lieu où se forme le jugement.
Comment le pays accueillerait-il une proposition de loi décapante autorisant chaque citoyen à déduire de ses revenus ses dépenses d’abonnement aux médias papier, la réduction des recettes fiscales étant compensée par l’arrêt de toute aide à la presse ? Ces articles pourraient vous intéresser: Attention, Macron voudrait « réguler » les médias et l’information ! Belgique : polémique sur l’éviction d’une chroniqueuse après ses propos anti-écolo Médias : quelles sont les nouvelles références ? Et si on aidait vraiment la presse ?
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