Pourquoi perdons-nous la deuxième bataille de l'euro ?
En 1992, il ne s'en était pas fallu de beaucoup pour que la France refuse le traité de Maastricht et que l'euro ne voit jamais le jour. Depuis 7 ans, la zone euro traverse une crise dont elle tarde à pleinement sortir, ce qui devrait donner de l'eau au moulin de ceux qui, comme moi, souhaitent à son démontage. Malheureusement, dans l'opinion l'idée reste largement minoritaire. Mais pourquoi ?
Conformisme, propagande, peur et mauvais avocat
La situation est très paradoxale. D'une part, l'avis des experts est de plus en plus majoritairement critique et hostile à la monnaie unique. En effet, un 10ème « prix Nobel d'économie » vient de prendre positions contre la créature monétaire européenne, et dans ses rangs, de plus en plus plaident pour son démontage, comme l'a fait Joseph Stiglitz, dans un livre entièrement consacré à la question. Et beaucoup d'économistes, comme Jacques Sapir, Jean-Luc Gréau, Alain Cotta, Jean-Jacques Rosa ou Gérard Lafayplaident dans ce sens. Et ce mouvement finit par gagner quelques journalistes, comme Franck Dedieu et Benjamin Masse-Stamberger avec leur livre « Casser l'euro pour sauver l'Europe ». Bref, une majorité de ceux qui réfléchissent vraiment à la question plaident pour le démontage de l'euro.
Mais les dernières semaines ont vu un déluge de propagande contre la remise en question de la monnaie unique européenne, omettant, la plupart du temps, les avis des « prix Nobel d'économie ». Même s'il a publié un papier de Cédric Durand affirmant « Abandonner l'euro peut contribuer à sauver l'Europe », le Monde a servi deux pensums superficiels affirmant que « quitter l'euro n'était pas la solution » ou que « le retour au franc ne serait pas synonyme d'une souveraineté monétaire retrouvée ». Le Figaro, lui, relaie la propagande de l'institut Montaigne dans un dossier lourdingue, évoquant « un scénario noir pour la France »et que « cela mettrait le franc à la merci des marchés », rapportant les propos aussi ridicules que totalitaires de Mario Draghi, qui affirme que « l'euro est irrévocable ».
Et malheureusement, il faut bien reconnaître qu'aujourd'hui, malgré les efforts de nombreux intellectuels, Jacques Sapir (en vidéo dans l'Opinion, ou sur son blog), Gérard Lafay ou Christian Gomez dans les Echos, la propagande emporte largement l'opinion des Français, comme l'indique un récent sondage des Echos, selon lequel seulement 28% des Français souhaitent revenir au franc, contre 72%. Ce n'est pas parce que les intellectuels nous rejoignent qu'il faut ignorer notre lourde défaite, à date, dans la bataille de l'opinion sur cette question. Et il est à craindre que la pollution de cette campagne présidentielle par les affaires ne facilite pas le débat nécessaire sur cette question, qui pourrait permettre à nos idées d'avancer, même s'il faut noter que bien des candidats seront critiques sur l'euro.
Et outre le traitement très subjectif des média, l'angle d'attaque des adorateurs du veau d'or européen, à savoir la peur (angle qu'il dénonce quand il vient du camp d'en face) est assez habile. Dans une époque dure, la peur générée par un changement de monnaie est un argument fort pour en déconsidérer la seule idée. Et cela est d'autant plus vrai que ceux qui défendent cette idée ne sont pas toujours de bons avocats, au premier rang desquels ce FN qui change de scénario comme de chemise, passant d'un retour à l'or à un référendum qui créerait une période d'incertitude délicate. Pire, leur proposition actuelle ressemble à ce que la Grèce a vécu avec Tsipras, et le choix des Grecs de préférer une tutelle brutale et anti-sociale plutôt que de sortir de l'euro en a sans doute déconsidérer l'idée.
Mais si nous perdons cette deuxième bataille sur la monnaie unique, la guerre n'est pas pour autant finie. Contrairement à ce que dit Mario Draghi, et comme le montre le Brexit, on peut s'en échapper, et ce serait simplement de revenir à la situation d'il y a 20 ans, ce qui serait bien moins aléatoire que le malheureux choix fait en 1992. A nous de redoubler d'explications et de pédagogie.
URL: http://feedproxy.google.com/~r/gaullistelibre/~3/LwmV1BR0RBM/pourquoi-perdons-nous-la-deuxieme.html
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Dites ce qui vous chante...
Mais dites-le !