dimanche 8 janvier 2017

Sur France Info, Alice Serrano sert la soupe à François Fillon

Sur France Info, Alice Serrano sert la soupe à François Fillon

On l'observe au quotidien, les grands journalistes ainsi que les commentateurs/éditorialistes se passionnent aisément pour les étoiles montantes du pouvoir. Ils ont alors beaucoup à dire, à prédire, et à sonder d'une personnalité ou de son programme. C'est parfois l'occasion pour certains d'entre eux de côtoyer, de pénétrer les hautes sphères du pays, et de se livrer en interne à une lutte pour la reconnaissance, le prestige ou le pouvoir, parfaitement humaine, ainsi que l'a bien montré Axel Honneth. 

Ajoutez à cela le poids structurel du capital actionnarial dans les médias privés, celui de l'homogénéité sociale et culturelle des journalistes/cadres/politiciens pour le public... Vous obtenez grosso modo, suffisamment d’éléments pour expliquer que les médias, majoritairement, auront tendance à suivre les puissants, et à mépriser les outsiders autant que les anciennes gloires déchues. Ce n'est pas toujours vrai.

Mais ça l'est presque toujours.

Un exemple nous en a encore été donné très récemment, après l'élection de François Fillon comme candidat de la droite pour les futures présidentielles de 2017.

En quelques jours, le temps d'une victoire, la tonalité médiatique générale a changé.

Pour faire simple : l'ancien « larbin » de Nicolas Sarkozy est subitement devenu consistant  ; et son caractère distant et froid s'est alors mué en légendaire honnêteté sarthoise... 

Juppé, quant à lui, a disparu des radars médiatiques aussi rapidement que ceux-ci, majoritairement, l'avaient soutenu...

Ainsi, quelques jours après la victoire de Fillon, France Info diffusait un « reportage » à Sablé-sur-Sarthe (son fief, comme on dit), réalisé par Alice Serrano et intitulé  François Fillon vu par ses proches.

 

Et si des guillemets encadrent le mot de reportage, c'est qu'en réalité, le terme d'hagiographie eut mieux convenu au portrait qu'elle en proposa.  


Enchaînant témoignages d'amis, d'anciens collègues, tous plus comblés les uns que les autres, l' « objet médiatique » prenait le parti de laisser de côté les questions politiques de fond pour mieux s'intéresser à

 

l'avis de l'entourage de Monsieur Fillon, qui le cœur sur la main, allaient pouvoir nous jurer que non, François n'était pas froid, n'était pas le dernier à blaguer ; que oui, il est un grand homme d'Etat, qu'il est un papa poule..

 

 


 

A peine croyable...

Quand un mec veut lourder 500 000 fonctionnaires, privatiser la Sécurité sociale, limiter le temps de travail à 48h hebdomadaires, on a peut-être autre chose à faire qu'à demander à ses proches ce qu'ils pensent de lui... car la réponse est évidente : c'est ce qu'on appelle de la communication politique !

 

Celle là même qu'un journaliste se doit de déconstruire, parce que c'est justement là l'essence de son métier...

Le lendemain de sa diffusion, donc, je m'en indignai 

 

auprès de Madame Serrano, (qui n'a pas souhaité répondre, mais à qui un droit de réponse est à nouveau offert), lui faisant remarquer que Margaret Thatcher était certainement très drôle en famille, et Fidel Castro sans aucun doute facétieux et généreux avec ses amis...

Pour ne prendre que ces deux exemples.

Que transformer l'image d'un homme politique, chercher à le rendre plus « humain », « comme tout le monde », tout en faisant fi des idées qu'il professe, qu'il appliqua, ou appliquera, est une définition assez correcte du terme de propagande.

 

 


Et puis, tout même, l'intérêt d'aller faire un son à Sablé-sur-Sarthe sous prétexte que Fillon est du coin... on en parle ? Non que ses habitants soient méprisables, ni indigne d'intérêt (ni plus ni mois que les autres). Peut-être pourrait-on les interroger sur la vie qu'ils mènent, sur ce qui les préoccupent et non les faire vivre à la radio, une fois l'an, lorsque Fillon gagne une élection... Ce n'était pas l'objet du reportage me direz-vous : certes, mais quel était il vraiment ?

En mars 2011, la chaîne Canal Plus diffusait, dans ce même registre complaisant, un portrait de Dominique Strauss Kahn, Un an avec DSK, tourné dans son chez lui, son petit cocon..

On l'y voyait se faire cuire de la viande, jouer au foot, et vivre comme tout le monde...

Visiblement, à l'époque, les journalistes, bien au delà des idées du bonhomme, étaient passés à côté de l'essentiel !


 

Une information de qualité m'aide à mieux comprendre le monde, m'est utile, ou m'aide à faire des choix. C'est regrettable, ce portrait de François Fillon « vu par ses proches » ne cochait aucune de ces cases.

 

 

Antoine Lamnège

Aucun commentaire: