mardi 7 juin 2016

Les raisons pour ne pas enseigner l’arabe au CP

Les raisons pour ne pas enseigner l'arabe au CP




L'oubli du français, de la France, et de la République

D'abord, ne peut-on pas être ébahi par cette volonté de développer l'apprentissage des langues étrangères dès le CPalors même que le niveau en français baisse de manière continue depuis de longues années. Ne devrait-on pas donner la priorité absolue à l'enseignement de la langue de la République, celle qui nous lie tous à notre pays, notre terreau commun, avant de se préoccuper de l'enseignement d'autres langues ? Les priorités de ceux qui nous dirigent sont totalement déconnectées de la réalité, mais aussi probablement des évolutions de la technologie, dont on peut croire que dans un futur pas forcément si lointain, elle pourrait bien rendre beaucoup moins utile ces apprentissages par des outils de traduction instantanés qui pourraient être installés dans les téléphones portables par exemple.

Le deuxième problème que pose cette idée funeste, c'est l'encouragement des communautarismes, comme un héritage de ces enseignements des cultures d'origine. Car si cet enseignement représente une forme de soutien au maintien des traditions d'origine de migrants ou d'enfants de migrants, alors, cela représente un frein à l'intégration dans le creuset de notre pays, l'oubli de ce principe républicain qui faisait alors de tous les écoliers les descendants des Gaulois, marquant la primauté de ce qui nous unissait sur ce qui pouvait nous séparer. Bien sûr, cela pouvait être dur, comme l'a bien expliqué Malika Sorel dans « Le puzzle de l'intégration », mais c'est aussi un principe fondamental de notre pays, qui refuse le communautarisme des anglo-saxons pour une vision bien plus assimilatrice.

En cela, l'enseignement de l'arabe, comme du turc ou du serbe, est un frein considérable à l'intégration des immigrés, un facteur de morcellement de la République. Et ceci est d'autant plus dangereux, que, comme le note Jean-Paul Brighelli sur le FigaroVox, la France ne dispose pas de professeurs pour enseigner l'arabe, faisant dire à la ministre de l'éducation « si les professeurs ne sont pas en mesure de le faire, nous ferons appel à des professeurs étrangers », ce qui laisse songeur étant donnée la nature des régimes des pays dont pourraient être originaires ces professeurs. Comment pourraient-ils être hussards de la République sans avoir été formés et éduqués par cette République ? Un tel casting ne revient-il pas à « faire entrer le loup fondamentaliste dans notre bergerie laïque » ?


Merci donc à Jean-Paul Brighelli de nous alerter sur cette nouvelle idée effarante de la ministre, d'autant plus qu'il sait le faire sans verser dans l'islamophobie dans laquelle tombe une partie de ceux qui ont pu la dénoncer, prouvant qu'il n'est nul besoin d'être xénophobe pour s'y opposer.

Inondations : le douloureux retour à la normale

Inondations : le douloureux retour à la normale

Le dernier pic de crue était attendu mardi dans l'Essonne, au terme d'une semaine d'inondations exceptionnelles qui ont fait quatre morts et des dégâts dont le coût d'indemnisation pourrait dépasser le milliard d'euros.

Une rue de la commune d'Elbeuf inondée par la crue de la Seine, le 5 juin 2016 - J-F. MONIER AFP

Le dernier pic de crue était attendu mardi dans l'Essonne, au terme d'une semaine d'inondations exceptionnelles qui ont fait quatre morts et des dégâts dont le coût d'indemnisation pourrait dépasser le milliard d'euros.

Seuls l'aval de la Seine, à Elbeuf et Rouen, le Cher et l'Essonne devaient être mardi en vigilance orange, selon l'organisme de prévention Vigicrues.

La ville de Corbeil-Essonnes, où la rivière Essonne se jette dans la Seine, est particulièrement exposée. Deux quartiers pourraient se trouver inondés mardi, avant que la décrue commence, lentement, en fin de journée.

«On est prêt, les gymnases sont préparés, les voitures ont été déplacées, les populations sensibles repérées. On a eu trois jours pour se préparer activement», a assuré à l'AFP le maire Jean-Pierre Bechter (LR). «Mais jamais de mémoire d'homme on n'avait vu une telle crue en Essonne».

La situation ne devrait cependant pas affecter le niveau de la Seine, qui continue à baisser, doucement mais sûrement: la crue atteignait 4,93 m à 02H00 dans la nuit de lundi à mardi, soit plus d'un mètre de moins que son maximum trois jours plus tôt (6,10 m).

Plusieurs jours au moins seront nécessaires au retour du fleuve à la normale, mais les analystes restent prudents, l'oeil sur de possibles pluies significatives annoncées pour la semaine prochaine.

Depuis une semaine, des centaines de communes ont été touchées par ces inondations, des milliers d'entreprises, de commerces, d'agriculteurs affectés, sans oublier les particuliers.

'Réouverture envisagée'

Quelque 3.000 foyers étaient toujours privés d'électricité en Ile-de-France lundi soir.

Manuel Valls a annoncé lundi un «fonds d'extrême urgence» pour les sinistrés sans ressource ayant tout perdu, en attendant les indemnisations des assureurs.

De leur côté, les agriculteurs touchés ont demandé à l'Etat de déclarer l'état de calamité agricole pour bénéficier du Fonds national de gestion des risques en agriculture (FNGRA) chargé de compenser les pertes sur des cultures pour lesquelles ils ne sont souvent pas assurés.

Pour les commerces de proximité, le ministre de l'Economie Emmanuel Macron doit convoquer une «cellule de continuité économique» qui «va arrêter des mesures d'aide exceptionnelles» pour permettre le démarrage des activités «le plus vite possible».

Dans toutes ces zones, le retour à la normale s'annonce lent et difficile.

L'état de catastrophe naturelle devrait être reconnu mercredi pour une première liste de départements et communes sinistrés.

A Paris, la crue de la Seine risque de se traduire par une perte de 10 millions d'euros rien que pour le secteur touristique fluvial, ont affirmé lundi les armateurs, demandant eux aussi une aide «exceptionnelle».

Au nord d'Orléans, les derniers camions bloqués sur l'autoroute A10 ont été évacués lundi, Vinci Autoroutes jugeant toutefois prématuré d'annoncer une date pour la réouverture de ce tronçon très fréquenté.

De nombreux châteaux, monuments et musées à Paris et en région ont rouvert, mais pas le musée du Louvre, dont la réouverture est «envisagée» mercredi, sauf pour les salles des arts de l'Islam au sous-sol évacué. Le musée d'Orsay sera à nouveau accessible mercredi.

 

 

Source : 20Minutes.fr

Informations complémentaires :

Crashdebug.fr : Crue à Paris : la Seine a atteint le niveau de 6 mètres

L’affaire Iveton, un silence français, par Jean-Luc Einaudi

L'affaire Iveton, un silence français, par Jean-Luc Einaudi

Source : Libération, Jean-Luc Einaudi, 01-06-1998

Qui se souvient de Fernand Iveton, ouvrier, communiste, rallié au FLN, guillotiné à Alger, en 1957. Et qui se souvient du nom de celui qui était alors ministre de la Justice ?

Une vieille dame est morte, le dimanche 10 mai 1998, à Arcueil. Selon ses volontés, elle a emporté avec elle, dans la tombe, le portrait de l’homme qui fut l’amour de sa vie. Elle s’appelait Hélène Iveton.

Son mari, Fernand Iveton, fut guillotiné à Alger, dans la cour de la prison Barberousse, le 11 février 1957. Qui se souvient de Fernand Iveton? Le ministre de la Justice s’appelait alors François Mitterrand.

Ouvrier, communiste, se considérant comme algérien, Fernand Iveton avait rallié le FLN, alors que la guerre faisait rage en Algérie. En novembre 1956, il avait décidé de procéder au sabotage d’un tuyau dans l’usine à gaz où il travaillait, au moyen d’une bombe. Des précautions avaient été prises pour que l’explosion n’occasionne pas de victime mais uniquement des dégâts matériels. Arrêté le 14 novembre 1956, avant même qu’il ait pu installer la bombe, il fut d’abord torturé par des policiers, comme cela était alors la règle: décharges électriques sur le corps, supplice de l’eau.

En exécution des pouvoirs spéciaux votés par l’Assemblée nationale, en mars 1956, à la demande du président du Conseil, le socialiste Guy Mollet, et des décrets d’application qui suivirent, il comparut dix jours plus tard devant un tribunal militaire présidé par un magistrat volontaire. Il n’y eut aucune instruction préalable à l’affaire. Deux jours avant le procès, deux avocats furent commis d’office. La direction du Parti communiste français ayant d’abord interdit à l’avocat communiste Gaston Amblard de défendre Iveton, celui-ci fut abandonné à cette parodie de justice.

Condamné à mort par le tribunal militaire d’Alger, son recours en grâce, plaidé notamment par l’avocat communiste Joé Nordmann, fut rejeté par le président de la République d’alors, René Coty. Celui-ci se contenta de raconter aux avocats l’anecdote suivante: en 1917, alors qu’il était jeune officier, il avait vu fusiller deux jeunes soldats français. Alors que l’un d’eux était conduit au poteau d’exécution, le général lui avait dit: «Toi aussi, mon petit, tu meurs pour la France.»

Fernand Iveton devait être guillotiné pour l’exemple. Il mourut en criant «Vive l’Algérie!», en compagnie de Mohamed Ouenouri et de Mohamed Lakhnèche. Avant d’être exécutés, les trois hommes s’embrassèrent.

J’ai écrit un livre, paru en 1986, sur cette affaire. François Mitterrand, président de la République, n’avait pas donné suite à ma demande d’entrevue (1). Le dossier de recours en grâce, m’avait-on dit, avait disparu des archives du ministère de la Justice.

Le 24 mars 1994, trois journalistes furent reçus par le président de la République. En 1956, en tant que ministre de la Justice, il était vice-président du Conseil supérieur de la magistrature, qui examinait les recours en grâce et procédait à un vote. Comme ils lui demandaient: «Qu’avez-vous voté sur le dossier Iveton?», François Mitterrand leur avait répondu: «Je ne peux pas vous le dire (2).»

Or, comme beaucoup d’éléments me l’avaient déjà fortement laissé supposer, François Mitterrand avait voté la mort de Fernand Iveton. C’est ce que Jean-Claude Périer, secrétaire du CSM de 1956 à 1959, révéla aux trois journalistes.

En 1965, François Mitterrand devenait candidat unique de la gauche à l’élection présidentielle. Le silence s’étendait sur son action durant la guerre d’Algérie, comme ministre de l’Intérieur d’abord, puis comme ministre de la Justice.

Cette histoire-là reste à écrire.

(1) Pour l’exemple (l’affaire Fernand Iveton), préface de Pierre Vidal-Naquet, l’Harmattan, 1986.

(2) La Main droite de Dieu, Emmanuel Faux, Thomas Legrand, Gilles Perez, le Seuil, 1994.

 

Colloque Jean-Luc Einaudi a participé aux séminaires sur le «travail de mémoire» organisés dans le cadre de l’exposition «1914-1998, le travail de mémoire» au théâtre Paris-Villette. Tous les jeudis à 19 h 30 jusqu’au 18 juin. Entrée libre. Rens.: 01 40 03 76 98

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Source : Libération, Jean-Luc Einaudi, 01-06-1998

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Fernand Iveton: L’homme qui fit trembler de peur les tenants du colonialisme

Source : Al Huffington Post, Mohamed Rebat, 31/07/2014

Avec l’exécution de Fernand Iveton, le 11 février 1957, sur l’échafaud dressé, la nuit, dans la cour de la prison de Serkadji, le bourreau, Maurice Meyssonnier, descendant d’immigrés européens, patron de bar de son état, était à sa quatrième victime dans ce sinistre lieu.

Fernand Iveton était lui aussi descendant d’immigrés européens. “C’était un pied-noir typique: père français, mère espagnole”, écrit son avocat, membre du Parti communiste Français, Joë Nordmann, dans son livre “Aux vents de l’histoire”, paru, à Paris, aux éditions Actes sud, en 1996. Mais “celui-là n’est pas comme les autres”, dit, un jour, Didouche Mourad à son ami Ahmed Akkache. S’il y en avait beaucoup comme lui, cela aurait changé bien des choses”. C’était au quartier de “La redoute”, vers la fin des années 1940.

Au quartier populaire du Clos-salembier (actuelle Madania) où il grandit, Fernand Iveton, né à Alger le 12 juin 1926, était connu pour ses solides convictions communistes, et très estimé, pour sa droiture, par les militants du PPA-MTLD qu’il côtoyait au syndicat des gaziers-électriciens de la CGT. Il aimait l’ambiance sportive. Le samedi après-midi, on le trouvait sur un terrain de football avec ses camarades de travail, Algériens et Européens, portant les couleurs du club corporatif de son entreprise, l’EGA (Électricité et Gaz d’Algérie), affilié à la Fédération Gymnique et Sportive du Travail
(FGST), témoigne son camarade du Parti Communiste Algérien (PCA), Maurice Baglietto.

Le dimanche, on le voyait à la sortie du stade du Ruisseau (du 20 août aujourd’hui), avec ses camarades de la section du Clos-salembier, vendre, à la criée, l’hebdomadaire Liberté, organe du PCA auquel il adhéra l’été 1946. Chaque semaine, par la plume de son rédacteur en chef, Ahmed Akkache, Liberté développait l’idée de l’indépendance nationale. Fernand Iveton y croyait. Il avait foi en une Algérie indépendante, juste et solidaire. Il avait suivi le chemin choisi par son père, ouvrier à la société d’électricité “Lebon” devenue EGA à sa nationalisation en 1946. Au début de l’année 1950, il retrouva, à l’école élémentaire du PCA, son camarade Henri Maillot qu’il connut au Mouvement des jeunesses communistes et à l’Union de la Jeunesse Démocratique Algérienne (UJDA).

Par “les autres”, Didouche Mourad désignait ceux qui, contaminés par le racisme, formaient la communauté française. Cette société des “Français d’Algérie” dont parle Henri Alleg dans son livre “La guerre d’Algérie”: “Si diverse et si contradictoire”, écrit-il, “(elle) avait au moins une certitude commune qui faisait la force idéologique et politique de la grosse colonisation. Elle ne jouissait de ces privilèges, pour aussi misérables qu’ils fussent, que parce qu’elle était l’heureuse élite, celle à qui la providence avait confié la tâche de régner sur les indigènes. Cela chacun l’apprenait avant même de savoir lire”.

L’école française relaya la famille dans l’éducation du mépris de l’indigène. Elle contribua grandement à la construction et à la diffusion du racisme avec notamment l’institution de la section “A” pour les enfants européens et la section “B” pour les indigènes, ainsi qu’à travers les livres et les manuels scolaires. Le poète martiniquais anticolonialiste Aimé Césaire disait: “il n’y a pas de colonialisme sans racisme”.

Fernand Iveton acquit les principes d’indépendance nationale au cours des luttes ouvrières menées côte à côte avec les travailleurs musulmans, en grande majorité des militants du PPA-MTLD.

C’est sur le terrain des luttes ouvrières et politiques, qui connurent un essor formidable entre 1947 et 1954, qu’il faut chercher les racines de son intégration à la nation algérienne.

Le principe de l’indépendance nationale -plus précisément l’idée de séparation- était loin d’être partagé par tous les adhérents d’origine européenne du PCA, malgré les efforts d’éducation politique prodigués par leur parti qui, d’ailleurs, “se demande, dans un de ses écrits, si les efforts nécessaires faits en la direction des travailleurs européens, y compris les efforts de réflexion, d’élaboration, n’ont pas été effectués au détriment de ceux prioritaires en direction des masses algériennes”.

Seule une élite put se dégager de la mentalité colonialiste, souligne le PCA dans le document “Essai sur la nation algérienne”, écrit, en 1958, en pleine guerre d’indépendance.

Fernand Iveton, ouvrier tourneur, fut de cette élite. Il s’engagea dans la lutte armée avec les Combattants de la libération -la branche armée du PCA- créée en juin 1955. Après leur dissolution un an après, en juin 1956, suite à l’accord FLN-PCA, il rejoignit l’ALN avec ses camarades.

Il fit partie du groupe de fidas du Champ de manœuvres (actuel 1er Mai) dirigé par M’hamed Hachelef. Il proposa à ses camarades de placer des bombes sous les tuyaux de l’usine à gaz du Hamma, à un endroit choisi pour que les dégâts empêchent l’usine de fonctionner, privant ainsi Alger d’électricité, selon le témoignage de Jacqueline Guerroudj, ancienne condamnée à mort, dans son livre “Des douars et prisons”.

Jacqueline Guerroudj, membre des Combattants de la libération, avait été chargée de remettre à Fernand Iveton les deux bombes réglées par Abderrahmane Taleb pour exploser à 19 heures 30, heure à laquelle l’usine est vide de son personnel.

Mais son sac -un sac de sport- ne pouvant les contenir toutes les deux, Fernand Iveton n’en garda qu’une seule. En arrivant à son lieu de travail, il mit le sac dans son placard. Son contremaître, qui le surveillait de près, entendit le “tic-tac” et prévint la police. Celle-ci, venue aussitôt, l’arrêta. C’était par un après-midi du mercredi 14 novembre 1956. Durant trois jours, il fut soumis à d’atroces tortures au Commissariat central d’Alger, tortures qu’il relata dans un Mémoire remis à son avocat, Joë Nordmann.

Le 25 novembre 1956, le Tribunal militaire d’Alger le condamna à la peine capitale “au motif qu’il avait voulu faire sauter Alger”, dit Jacques Soustelle, ancien gouverneur d’Algérie, qui voulut, par ces mots, mobiliser l’opinion “pieds-noirs”.

80 jours à peine après le procès, la lame de la guillotine, symbole de la sauvagerie, trancha la tête de Fernand Iveton. C’est un des descendants de “ces oiseaux de proie qui se sont abattus sur nos rivages dès 1831”, comme l’écrit le PCA en 1958, “des trafiquants, aventuriers, spéculateurs, pègre des ports méditerranéens de France, d’Espagne, d’Italie, de Grèce, de Malte…”. Maurice Meyssonnier, qui actionna la lame assassine.

Le recours en grâce, présenté par les avocats de Fernand Iveton, avait été refusé la veille, le 10 février 1957, par le Président de la République, René Coty, en accord avec le Ministre de la Justice François Mitterrand, et le secrétaire général de la SFIO, Guy Mollet, Président du conseil. Pour ces dirigeants français, la mise à mort rapide du communiste Fernand Iveton devait absolument servir d’exemple.

C’était au moment où, à l’Assemblée générale de l’ONU, on allait discuter de “la question algérienne”. Guy Mollet avait adressé une lettre à cette institution (publiée par les quotidiens en Algérie) pour dire que la guerre d’indépendance était dirigée, selon lui, par les communistes. Il voulait ainsi créer un climat général de peur en exagérant la participation des communistes dans la guerre d’indépendance. Faire peur également au FLN qui misait sur des appuis occidentaux à l’ONU.

Dans le couloir qui le conduisait à l’échafaud, Fernand Iveton lança un vibrant “l’Algérie libre vivra”, comme pour défier la mort qui l’attendait dans la cour glaciale, au pied de la guillotine. Arrivé au greffe, calme et détendu, il prononça ces paroles recueillies par son avocat: “La vie d’un homme, la mienne, ne compte pas. Ce qui compte, c’est l’Algérie, son avenir…” Paroles laissées comme un message aux générations qui vivront dans l’Algérie indépendante.

Sa mort fut effectivement un exemple. Mais un exemple qui a “éclairé la route” de milliers d’autres patriotes dans la lutte pour briser les chaînes de la servitude.

Avant de mourir, il embrassa ses compagnons d’armes, Ahmed Lakhnèche et Mohamed Ouennouri, exécutés quelques secondes après lui.

De cet homme aux vues lointaines, Joë Nordman a gardé un souvenir fervent. “Sa droiture, sa clarté d’esprit, sa fidélité aux principes de liberté et d’indépendance m’impressionnèrent beaucoup lorsque, pour la première fois, je le rencontrai à la prison Barberousse d’Alger. Il avait trente ans”, écrit-il.

Un souvenir partagé par ses compagnons d’armes qui, le 11 février de chaque année, se recueillent sur sa tombe, au cimetière de Saint-Eugène (aujourd’hui Bologhine), évoquant son courage exceptionnel.

“Le personnage de Fernand Iveton, héros modeste et clairvoyant… imprégné d’un idéal communiste qui l’a conduit à la lutte anti-colonialiste et à l’adhésion au FLN… méritait une étude”, souligne Jacqueline Guerroudj dans son ouvrage déjà cité.

Cette étude, deux étudiantes de l’Institut des sciences de l’information de l’Université d’Alger, l’effectuèrent. Elle fit l’objet d’un grand chapitre dans leur Mémoire de licence portant sur l’engagement des Algériens communistes d’origine européenne, qu’elles présentèrent au mois de juillet 2011.

Source : Al Huffington Post, Mohamed Rebat, 31/07/2014

Lire aussi l’article du 31-05-2016 du Front de Gauche

Quand le FMI critique le néolibéralisme…, par Romaric Godin

Quand le FMI critique le néolibéralisme…, par Romaric Godin

Source : La Tribune, Romaric Godin, 27/05/2016

La fin du consensus de Washington ? (Crédits : © Kim Kyung Hoon / Reuters)

La fin du consensus de Washington ? (Crédits : © Kim Kyung Hoon / Reuters)

Dans un article signé de trois de ses économistes, le FMI estime que les politiques “néolibérales” ont été “survendues”, notamment l’ouverture des marchés de capitaux et les politiques d’austérité. Un tournant ?

Dans les années 1980, le FMI était le bras armé de la révolution libérale qui avait commencé sous l’influence des penseurs monétaristes lors de la décennie précédente. L’institution promouvait partout où elle allait les mêmes politiques : réduction de la taille de l’Etat, excédents budgétaires, déconstructions des politiques sociales, privatisations massives et ouvertures des marchés. Ces politiques ont même été connues sous le nom de « consensus de Washington » en référence au siège du FMI.

Un article qui remet en cause le fondement de la pensée du FMI

Cette tradition vacillerait-elle ? Le FMI serait-il sur le point de prendre conscience de ses erreurs passées ? Alors qu’il lutte actuellement avec l’Eurogroupe pour en finir avec le songe de la « soutenabilité de la dette grecque » grâce à des excédents budgétaires primaires gigantesques et infinis, le Fonds vient de publier ce jeudi 26 mai un article dans son magazine Finance & Development qui remet en cause la toute-puissance des recettes « néolibérales ».

Dans un article titré « Le néolibéralisme est-il survendu ? », les trois auteurs, Jonathan Ostry, Prakash Loungani et Davide Furceri, tous trois économistes à la section de recherche du FMI, soulignent les effets négatifs de deux types de politiques longtemps soutenues par le FMI : l’ouverture du marché des capitaux et les politiques d’austérité et de privatisations. Certes, le texte souligne qu’il existe « beaucoup de raisons de se réjouir à propos de l’agenda néolibéral », citant le développement des économies émergentes, la sortie de la pauvreté de millions de personnes et la meilleure efficacité des services fournis. Mais le texte cherche clairement à corriger l’idée d’une solution miracle et insiste sur les effets néfastes des politiques néolibérales.

Les effets néfastes de l’ouverture aux marchés de capitaux

Sur l’ouverture des marchés de capitaux, l’article souligne combien le lien entre ce phénomène et la croissance est un lien complexe. Si les investissements directs étrangers sont clairement favorables au développement économique, il n’en va pas de même d’autres flux financiers comme les flux bancaires, les flux spéculatifs à court terme (« hot money ») ou les flux purement de portefeuilles. Ces flux financiers alimentent des bulles qui débouchent sur de la volatilité et des crises. « Depuis 1980, indique l’article, il y a eu 150 épisodes de forte hausse des flux entrants de capitaux dans plus de 50 économies émergentes (…) et dans 20 % des cas, ceci s’achève par une crise financière qui, souvent, débouche sur un recul de la production », indique l’article.

Pour les économistes du Fonds, « l’ouverture accrue au marché des capitaux figure en permanence comme un facteur de risque ». Le FMI souligne aussi le biais distributif de ces flux de capitaux qui accroissent les inégalités et donc pèsent sur la croissance, notamment lorsqu’un krach survient. Au final, les économistes jugent même que le contrôle des capitaux, avec le taux de change et la réglementation financière, peut être une « option viable quand la source d’une hausse insoutenable du crédit vient directement de l’étranger ».

Baisser la dette à tout prix ?

Les économistes passent ensuite aux politiques d’austérité. Tout en défendant l’idée d’une nécessaire consolidation budgétaire lorsque le pays est menacé de perdre son accès au marché, ce qui semble justifier les politiques menées en Europe du sud depuis 2010, les auteurs soulignent qu’une dette élevée n’est pas toujours un problème pour la croissance, notamment lorsque le pays dispose d’une bonne réputation et n’est pas menacé de perdre cet accès, la réduction de la dette à tout prix « semble avoir un bénéfice remarquablement faible » en termes d’assurance contre les futures crises budgétaires. Passer d’une dette de 120 % du PIB à 100 % du PIB apporterait bien peu pour les économistes. L’élément le plus intéressant est que le FMI souligne ici que « la mise en garde contre une politique de recette qui vaut pour tous est justifiée ». Or, c’est cette politique qui a été menée en Europe entre 2010 et 2013.

Découverte des effets négatifs de l’austérité

Les auteurs remarquent ensuite que l’intérêt de l’austérité doit prendre en compte son coût. Or, ils insistent sur le fait que ce coût est très élevé. Le texte nie l’existence de la « consolidation budgétaire favorable à la croissance », chère à Jean-Claude Trichet, ancien président de la BCE et nouveau membre du Conseil européen du risque systémique. « En pratique, les épisodes de consolidations budgétaires ont été suivies par un recul plutôt que par une hausse de la production », explique le texte qui quantifie cet effet : toute consolidation de 1 % du PIB conduit à une hausse de 0,6 point du taux de chômage à long terme et à une hausse de 1,5 point du coefficient de Gini qui estime les inégalités. Bref, le FMI découvre les multiplicateurs budgétaires et le manque de sérieux de la théorie de l’équivalence ricardienne.

Malgré les appels à la prudence des auteurs, ce texte semble prouver que le FMI s’interroge sur ses fondements théoriques. Son attitude face à la crise grecque semble le confirmer. Le changement ne se fera sans doute pas en un jour, mais cet aggiornamento semblait in fine nécessaire.

Source : La Tribune, Romaric Godin, 27/05/2016

EDF Démantèlera Ses Centrales Nuléaires...Au XXIIe siècle !





EDF veut reporter le démantèlement de ses centrales

5 juin 2016 | Par martine orange
Les tours de passe-passe comptable pour masquer les coûts cachés du nucléaire continuent. EDF a annoncé à l’Autorité de sûreté nucléaire son intention de reporter de « plusieurs décennies » le démantèlement des centrales arrêtées, dans le but d'améliorer son bilan. Au mépris de la sécurité collective.
Après l’allongement de la durée de vie des centrales, le report du démantèlement. Les tours de passe-passe comptable pour masquer les coûts cachés du nucléaire se poursuivent. En effet, sans crier gare, EDF semble bien vouloir changer ses engagements en matière de démantèlement de centrales nucléaires. Revenant sur toutes les dispositions légales et de sécurité prises, EDF envisage désormais d’étaler la déconstruction de ses centrales fermées sur plusieurs décennies voire jusqu’au début du XXIIe siècle. Les arrière-pensées d’EDF sont à peine voilées : tout se met en place, avec ce décalage, pour qu’à terme le groupe transfère toutes les charges de la fin de la vie des centrales et du nucléaire à quelque structure de défaisance, et en fasse assumer le coût par la collectivité.

C’est l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), manifestement surprise et furieuse, qui a dévoilé le pot aux roses dans un communiqué le 2 juin (lire ici). Lors d’une audition des responsables d’EDF le 29 mars, elle a découvert que l’électricien, selon ses termes, avait changé de « stratégie » en matière de démantèlement de centrales nucléaires de première génération. « Cette nouvelle stratégie conduit à décaler de plusieurs décennies le démantèlement de certains réacteurs au regard de la stratégie affichée par EDF en 2001 et mise à jour en 2013 », indique l’ASN dans son communiqué. L’autorité précise qu’elle attend des explications de la part du groupe et qu’elle analysera avec précision si ses intentions sont conformes avec ses obligations de sécurité et législatives.



La loi stipule qu’EDF doit s’engager, sans période d’attente, à déconstruire les centrales arrêtées « dans les meilleurs délais ». Ces dispositions concernent pour l’instant les centrales de première génération, construites toutes à partir de la technologie uranium naturel graphite-gaz (UNGC), une technique abandonnée à la fin des années 1960 au profit de la technologie à eau pressurisée. Six centrales sont concernées. Trois sont implantées sur le site de Chinon (Indre-et-Loire), deux à Saint-Laurent-des-Eaux (Loir-et-Cher), une au Bugey (Ain).

Selon le calendrier fourni par EDF, le démantèlement de toutes ces centrales devait être achevé en 2045. Désormais, le groupe public se refuse à fournir la moindre date, estimant qu’il a besoin de plus de temps et de« retour d’expérience », à la suite d’un changement d’approche sur la méthode de démantèlement de ces centrales.

Jusqu’alors, les ingénieurs d’EDF envisageaient de recourir à un démantèlement sous l’eau des différents éléments des centrales, afin de limiter les risques de radioactivité. « Après examen, nous avons estimé que les technologies envisagées présentaient des risques beaucoup trop importants, et qu’il fallait abandonner le démantèlement sous eau », a expliqué au Monde Sylvain Granger, chargé des questions de démantèlement à EDF, mettant en avant les risques de corrosion et de fuites liquides.

Désormais, EDF envisage de recourir à une technique « sous air », ce qui lui permettrait d’utiliser plus commodément des robots. Mais elle estime qu’il lui faudra des années, peut-être vingt ans, afin de bien mettre au point cette nouvelle technique. Et pour ne rien laisser au hasard, EDF milite pour commencer par une seule centrale – celle de Chinon –, afin de tester les méthodes et les techniques idoines, avant de s’attaquer aux autres. Compte tenu des délais annoncés par EDF, la déconstruction de la première centrale ne devrait pas être achevée avant 2060. Quant aux autres, cela pourrait courir jusqu’au début de l’autre siècle. Peut-on encore parler de démantèlement « dans un délai aussi court que possible », s’interroge l’ASN ?

Depuis le lancement des premiers réacteurs nucléaires, il est prévu qu’EDF en assume la fin de vie et le démantèlement. Ces centrales graphite-gaz sont toutes arrêtées depuis plus de vingt ans. Comment expliquer qu’EDF réalise seulement maintenant qu’elle a fait fausse route dans le choix des techniques de démantèlement ? Comment a-t-elle analysé les expériences entreprises à l’étranger ?
L’étonnement de l’ASN en découvrant ce changement de technique est compréhensible. Avant cette réunion de mars, les responsables d’EDF ne lui en avaient jamais parlé. Aucune référence n’est faite à ce sujet dans le rapport annuel de 2015, alors que, selon les responsables d’EDF, cette stratégie est actée depuis l’an dernier. Sans aucune concertation, le groupe décide ainsi de s’affranchir de ses engagements passés, et même des dispositions législatives prises, bien que tous les textes aient été écrits quasiment sous sa dictée.

On en comprend la finalité. En repoussant sur des décennies le démantèlement de ses centrales, EDF allège mécaniquement la pression financière induite. Depuis longtemps, des experts – pas seulement des détracteurs du nucléaire – disent qu’EDF sous-estime le coût de démantèlement. Le groupe a toujours assuré que les charges de fin de vie du nucléaire étaient incluses dans la vente des prix de l’électricité.

Il a provisionné 23,4 milliards d’euros pour les coûts futurs de démantèlement dans ses comptes de 2015. Mais ce montant est appelé à diminuer si le réseau de distribution (RTE), qui figure parmi les actifs dédiés pour financer le démantèlement des centrales, est privatisé, comme le souhaite le gouvernement. Un rapport de la Commission européenne, publié début 2016, chiffre le coût de fin de vie des centrales françaises (déconstruction et gestion des déchets) à 74 milliards d’euros.

Au moment où EDF, pris en étau par la baisse des prix de l’électricité et la montée de ses obligations – notamment le grand carénage estimé à 100 milliards d’euros d’ici 2030 par la Cour des comptes –, affiche un bilan dégradé, tout report sur les dépenses de vie des centrales serait le bienvenu. L’habillage de bilan pourrait continuer pour masquer le coût réel du nucléaire. Le seul rempart à cette dérive est l’ASN, dernier gardien du respect des engagements pris et de la sécurité nucléaire.

Car le gouvernement, lui, affiche un soutien sans faille à EDF, dans son souci de maintenir « la filière nucléaire française » et lui souffle même sa conduite. L’État s’apprête à souscrire pour les trois quarts de l’augmentation de capital de 4 milliards d’euros, qui doit être lancée le 29 juillet, afin de permettre la réalisation des projets les plus aventureux, comme celui d’Hinkley Point. Pendant ce temps, la sécurité des populations, la gestion de fin de vie du nucléaire peut attendre. Au risque d’accroître les dangers, les problèmes et les coûts. Ce sera aux générations futures d’en assumer la charge. L’important pour les responsables d’EDF comme pour le gouvernement, c’est le résultat à trois mois.