dimanche 8 mai 2016
Revue de presse du 08/05/2016
Revue de presse du 08/05/2016
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Les Ukrainiens bientôt exemptés de visa malgré le référendum néerlandais
Les Ukrainiens bientôt exemptés de visa malgré le référendum néerlandais
Source : Euractiv, Georgi Gotev, 22-04-2016 Traduit par: Marion Candau La Commission européenne a proposé d'exempter de visa les citoyens ukrainiens, malgré le rejet de l'accord d'association entre l'UE et l'Ukraine par les Néerlandais. Le référendum néerlandais sur l'accord d'association entre l'UE et l'Ukraine ne semble pas perturber les plan de Bruxelles. Dimitris Avramopoulos, commissaire à la migration a déclaré le 20 avril que l'exécutif tiendrait sa promesse d'exemption de visa pour les séjours de courte durée dans l'UE pour les Ukrainiens détenteurs d'un passeport biométrique. Une décision ayant pour objectif de faciliter le contact entre les peuples et de renforcer les liens économiques, sociaux et culturels entre l'UE et l'Ukraine. Pourtant, les électeurs néerlandais avaient rejeté massivement le 6 avril l'accord d'association entre l'Ukraine et l'UE, lors d'un référendum consultatif. « C'est le résultat des réformes difficiles et profondes entreprises par le gouvernement ukrainien dans le domaine de la justice et des affaires intérieures […]. Je suis très satisfait des progrès réalisés, c'est une avancée importante pour les citoyens ukrainiens, et j'espère que le Parlement européen et le Conseil adopteront notre proposition très bientôt », a déclaré Dimitris Avramopoulos. Une fois que la proposition sera adoptée par le Parlement européen et le Conseil, les Ukrainiens détenteurs d'un passeport biométrique n'auront plus besoin de visa pour voyager durant de courtes périodes dans l'espace Schengen. L'exemption de visa s'appliquera dans tous les États membres, sauf l'Irlande et le Royaume-Uni, et les quatre pays associés à l'espace Schengen (Islande, Liechtenstein, Norvège et Suisse). L'exemption de visa n'est valable que pour une période de 90 jours, renouvelable après un période de trois mois de carence. L'exemption ne donne pas le droit de travailler dans l'UE. Les autres conditions d'entrée à l'espace Schengen continueront de s'appliquer, notamment la preuve de moyens financiers suffisants et le motif du voyage. Exemption pour les Turcs Dimitris Avramopoulos a profité de l'occasion pour annoncer que si les choses évoluaient dans le bon sens, la Commission proposerait une exemption de visa pour les citoyens turcs le 4 mai. La crise des réfugiés met l'UE sous pression pour accélérer la libéralisation du régime des visas avec la Turquie. L'Ukraine a indirectement bénéficié de cette situation, puisque nombreux sont les eurodéputés et les États membres qui considèrent qu'il serait politiquement incorrect d'ouvrir les frontières aux Turcs et non aux Ukrainiens. Au Conseil, où siègent les États membres, la proposition de la Commission sera dans les deux cas votée à la majorité qualifiée. Les dirigeants européens se sont engagés à délivrer une exemption de visa aux Turcs d'ici à juin. Source : Euractiv, Georgi Gotev, 22-04-2016 La lutte anti-corruption en Ukraine !!!!! |
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La Commission européenne accepte sous conditions d’exempter les Turcs de visa
La Commission européenne accepte sous conditions d'exempter les Turcs de visa
Source : France 24, 04-05-2016 La Commission européenne a donné son feu vert mercredi pour exempter de visa, sous conditions, les Turcs voyageant dans l’espace Schengen. Cette disposition s’inscrit dans le cadre de l’accord entre l’UE et la Turquie sur la crise migratoire. La Commission européenne a donné mercredi 4 mai son feu vert à une exemption de visa, sous conditions, pour les Turcs voyageant dans l’espace Schengen pour une courte durée. Cette disposition était l'une des conditionssine qua non qu’Ankara avait demandée pour que le pays continue d’appliquer l’accord migratoire signé le 18 mars avec l’Union européenne (UE). En contrepartie, Ankara s’est engagé à lutter contre l’afflux de réfugiés en Europe Ces derniers temps, la Turquie se montrait impatiente face à cette “promesse” européenne – et menacait de remettre en cause le pacte migratoire. “[Nous sommes] un pays qui tient sa parole, il faut bien entendu que l’Union européenne tienne aussi la sienne”, a averti mercredi le ministre turc des Affaires étrangères Mevlüt Cavusoglu à Ankara. Le vert définitif de l'UE à l'exemption de visa dépend également de 72 critères que la Turquie doit remplir – qui vont de garanties sur la sécurité des documents d’identité au respect des droits fondamentaux. Ankara a presque rempli la totalité de ces conditions : il ne lui en reste plus que cinq. Lundi soir, le gouvernement turc a approuvé la suppression des visas pour les ressortissants de l’ensemble des 28 États membres de l’UE, une mesure de réciprocité qui constituait l’une des principales exigences de l'Europe (les ressortissants de quelques pays d’Europe de l’Est devaient jusqu’à présent demander un visa pour se rendre en Turquie). L’adoption du passeport biométrique est l’une des dernières conditions à satisfaire. Mevlüt Cavusoglu a indiqué mercredi sur la chaîne télévisée NTV que la modification de la législation en la matière serait prochainement effectuée. En 2015, l'Europe a été ébranlée par un nombre sans précédent de 1,25 million de demandes d’asile, déposées principalement par des Syriens, Irakiens et Afghans fuyant la guerre et l’insécurité. Combiné à la fermeture de la route migratoire des Balkans, l’accord avec Ankara a fait baisser la pression sur l’UE, même si la situation reste inquiétante en Grèce, où sont bloqués des dizaines de milliers de réfugiés. De nombreuses ONG et associations craignent que Bruxelles ne ferme les yeux sur les restrictions de libertés en Turquie. “Ce n'est pas en tournant le dos à la Turquie, que nous verrons des progrès en ce qui concerne le respect des droits de l’Homme, de la liberté de la presse et de l’État de droit”, s'est défendu le vice-président de la Commission européenne, Frans Timmermans, dans une interview au quotidien italien La Repubblica. Source : France 24, 04-05-2016 |
La Commission européenne propose d’exempter de visas les citoyens du Kosovo
La Commission européenne propose d'exempter de visas les citoyens du Kosovo
Source : RFI, 05-05-2016 C’est une proposition de la Commission européenne : les ressortissants du Kosovo devraient bientôt pouvoir voyager dans l’espace Schengen sans visa. Cette proposition sera soumise au vote du Parlement européen. Avec notre correspondant à Rahovec, Laurent Geslin C'est dans une ambiance de fête que la population du Kosovo a appris que la Commission européenne avait recommandé la levée des visas pour l'espace Schengen, au terme de négociations entamées depuis des années. A Pristina, le Premier ministre Isa Mustafa parle d'un « grand jour ». De son côté, Samuel Žbogar, le représentant spécial de l'Union européenne au Kosovo, a salué cette mesure en déclarant que ceci démontrait que l'UE était à l'écoute des citoyens du Kosovo et de leurs problèmes. Pour la grande majorité des citoyens du petit pays, y compris ceux de la minorité serbe, la levée des visas signifie la fin de l'isolement. Youssouf, Barbier, dans la petite ville de Rahovec, à l'est du pays, reste cependant prudent : « C'est ce qu'on dit à la télé peut-être, mais je n'y croirais pas tant que je n'aurais pas passé moi-même la frontière et vu ce qu'ils demandent ». La commissaire européenne Federica Mogherini est à Pristina ce jeudi pour participer dans l'après-midi à la séance solennelle du Parlement kosovar qui doit approuver l'accord de délimitation de la frontière avec le Monténégro, ultime condition posée par l'Union européenne. Source : RFI, 05-05-2016 |
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Trafic d’organes au Kosovo : un rapport accablant
Trafic d'organes au Kosovo : un rapport accablant
Source : Le Monde diplomatique, Jean-Arnault Dérens, 04-01-2011 Le rapport présenté le 16 décembre devant le Conseil de l'Europe par le député suisse Dick Marty sur le trafic d'organes dont auraient été victimes des prisonniers de l'Armée de libération du Kosovo (UCK) a fait l'effet d'une bombe (1). Pourtant, les allégations contenues dans ce rapport ne sont pas nouvelles : ce trafic est déjà évoqué dans les mémoires publiées en 2008 par l'ancienne Procureure générale du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY), Carla Del Ponte (2) et, au Kosovo, l'hypothèse d'un tel trafic est une « rumeur » qui circule depuis longtemps. De même, l'enquête publiée en 2009 par les journalistes Altin Raxhimi, Michael Montgomery et Vladimir Karaj avait confirmé l'existence d'un véritable « archipel » de centres secrets de détention de l'UCK en Albanie (3). Le rapport de M. Marty apporte cependant nombre d'informations nouvelles, permettant de mieux comprendre les mécanismes de ce trafic. Plusieurs centaines de prisonniers capturés par l'UCK — principalement des Serbes du Kosovo, mais aussi probablement des Roms et des Albanais accusés de « collaboration » — auraient été déportés en Albanie, en 1998 et 1999. Emprisonnés dans plusieurs petits centres de détention — dont la fameuse « maison jaune » du village de Rripë, près de Burrel, visitée par les inspecteurs du TPIY —, certains d'entre eux auraient alimenté un trafic d'organes. Les prisonniers étaient conduits vers une petite clinique située à Fushë Kruja, à une quinzaine de kilomètres de l'aéroport international de Tirana lorsque des clients se manifestaient pour recevoir des organes. Ils étaient alors abattus d'une balle dans la tête avant que les organes, principalement des reins, soient prélevés. Ce trafic était conduit par le « groupe de la Drenica », un petit noyau de combattants de l'UCK regroupés autour de deux figures clés : M. Hashim Thaçi, actuel Premier ministre du Kosovo, et M. Shaip Muja, alors responsable de la brigade médicale de l'UCK et aujourd'hui conseiller pour la santé de ce même Hashim Thaçi.
Le rapport de M. Marty laisse beaucoup de questions sans réponses, notamment le nombre exact de prisonniers victimes de ce trafic. La justice serbe, pour sa part, parle de 500 personnes déportées en Albanie. On ignore également quels étaient les partenaires étrangers de ce trafic, et surtout quels en étaient les bénéficiaires. Le rapport relève cependant que 60 patients de l'hôpital universitaire de Jérusalem auraient bénéficié d'une transplantation rénale en 2001, un chiffre exceptionnellement élevé. Il importe de placer le crime supposé à sa juste valeur. Si le trafic est avéré, il s'agit d'un crime contre l'humanité massif, qui se situe, dans l'ordre de l'horreur, au « même niveau » que le massacre génocidaire de Srebrenica. Autre point essentiel, ce trafic se serait poursuivi au moins jusqu'en 2001, c'est-à-dire deux ans après l'entrée des troupes de l'OTAN au Kosovo et l'instauration du protectorat des Nations Unies sur le territoire. Le rapport note d'ailleurs qu'à partir de juin 1999, la frontière entre l'Albanie et le Kosovo n'était soumise à aucun contrôle réel. Le rapport a suscité un tollé de protestations et de démentis. Certains ont voulu disqualifier le rapport de M. Marty, en jetant le doute sur son auteur, présenté comme un « adversaire de l'indépendance du Kosovo », voire comme un « ennemi du peuple albanais ». Le Premier ministre d'Albanie, M. Sali Berisha, l'a ouvertement qualifié de « raciste ». À l'appui de ces assertions, est souvent citée une interview accordée par M. Marty en mars 2008 au site du Réseau Voltaire, dans laquelle celui-ci critique, du point de vue de la légalité internationale, la proclamation d'indépendance du Kosovo (4). Cette prise de position ne traduit nullement une « aversion » à l'égard du peuple albanais ni du Kosovo, et le rapport de M. Marty ne serait ni plus ni moins étayé si son auteur avait approuvé, de ce même point de vue juridique, la proclamation d'indépendance. Notons enfin que la presse d'Albanie reproche explicitement à M. Marty son « anti-américanisme », puisque celui-ci a déjà révélé en 2006 le scandale des prisons secrètes de la CIA en Europe. Certaines déclarations officielles de Tirana, ces derniers jours, associent « l'anti-américanisme » supposé du rapporteur et son préjugé « anti-albanais ». M. Marty appartient pourtant au Parti radical, une formation politique qui se classe sur la droite de l'échiquier politique suisse et qui n'a jamais été réputée pour son anti-impérialisme forcené. Certains accusent également M. Marty de « préjugés politiques », car il a publié son rapport quelques jours après les élections parlementaires organisées au Kosovo le 12 décembre, qui ont été entachées de fraudes massives, principalement commises, semble-t-il, par le Parti démocratique du Kosovo (PDK) de M. Thaçi. Cet argument est facile à rejeter, car la concomitance des dates ne tient, à l'évidence, que de hasards du calendrier. Les élections du 12 décembre étaient un scrutin anticipé, dont la date n'a été fixée que début novembre. Que n'aurait-on dit si M. Marty avait publié ce rapport à la veille de ces élections ! Pour sa part, directement mis en cause, M. Thaçi a sorti l'artillerie lourde pour répondre à M. Marty. Dans une interview publiée le 30 décembre dans le Tages Anzeiger de Zürich, il reprend les accusations de racisme et va même jusqu'à comparer le rapport à la « propagande de Goebbels » (5). À l'inverse, l'affaire est également surexploitée dans le contexte politique suisse, quelques semaines après l'adoption par référendum d'une loi prévoyant l'expulsion des « étrangers délinquants ». La Présidente de la Confédération, Mme Micheline Calmy-Rey, a ainsi préféré « différer » la réception du « prix de la diaspora » qui devait lui être attribué fin décembre par l'ambassade du Kosovo à Berne. Les Albanais, en plus d'alimenter les chiffres de la délinquance en Suisse seraient des « trafiquants d'organes ». On comprend que certains veuillent opposer un déni d'ensemble à cette criminalisation collective. De nombreux commentateurs estiment enfin qu'il serait « impossible » d'attribuer un tel crime à des Albanais, et tentent de « relativiser » la portée du rapport en rappelant l'ampleur des crimes commis par des Serbes, au Kosovo et ailleurs dans les Balkans. On ne peut que s'étonner du revirement de beaucoup, qui présentaient Mme Del Ponte comme une héroïne de la justice internationale quand elle traquait les criminels de guerre serbes, et sont sur le point de mettre en doute sa santé mentale depuis qu'elle a évoqué ce trafic. Mme Florence Hartman, ancienne porte-parole de Mme Del Ponte, a ainsi fustigé dans de nombreuses interviews « l'irresponsabilité » de l'ancienne Procureur, qui présenterait « comme des faits avérés de simples hypothèses », soulignant que les enquêtes menées par le TPIY n'avaient pas apporté de preuves concluantes. Or, ces enquêtes, notamment dans la fameuse « maison jaune » de Rripë, n'ont jamais pu être menées à bien, en partie à cause du refus de collaboration opposé par les autorités albanaises (6). En attendant qu'une enquête sérieuse et systématique soit menée et puisse établir ou non la réalité du trafic d'organes, en attendant que des inculpations soient éventuellement prononcées par un tribunal compétent, on peut retenir comme acquis plusieurs faits. Tout d'abord, les corps de plusieurs centaines de Serbes et d'autres prisonniers de l'UCK n'ont jamais été retrouvés et il est très peu probable qu'ils le soient sur le petit territoire du Kosovo, où tous les sites éventuels de charniers et de fosses communes ont été identifiés et fouillés. Il est également certain qu'un nombre important de ces prisonniers ont été déportés en Albanie, où l'UCK disposait d'un réseau de centres de détention. On doit également admettre, plus de dix ans après les faits, qu'il est très probable que ces prisonniers sont aujourd'hui pour la plupart morts. Leurs corps n'ont pas non plus été découverts en Albanie (7). Par ailleurs, l'existence d'un trafic d'organes au Kosovo, alimenté par des « volontaires » venant vendre leurs reins est également attestée. Des patients, principalement israéliens, se rendaient dans la clinique Medicus de Pristina pour recevoir des organes sains. Ce trafic implique un personnage très inquiétant, un chirurgien turc nommé Yusuf Erçin Sönmez, alias « Docteur Vautour », actuellement en fuite. L'affaire de la clinique Medicus, dont le procès vient de s'ouvrir à Pristina, n'est pas forcément liée à l'éventuel trafic d'organes pratiqué, dix ans plus tôt, sur des prisonniers de l'UCK, mais les coïncidences sont troublantes (8). Les réactions dans les médias albanais, dans la classe politique et plus largement dans la société albanaise, notamment dans la diaspora (9), rappellent immanquablement l'attitude de déni longtemps opposée par de larges secteurs de l'opinion serbe face aux crimes commis par les forces serbes. Les deux arguments centraux sont les mêmes : « notre peuple ne peut pas avoir commis de telles atrocités », et « notre peuple a été victime de crimes encore pires que ceux qu'on lui impute ». La réalité des crimes commis par les forces serbes au Kosovo n'invalide pourtant pas l'hypothèse que certains Albanais aient pu commettre un autre crime, particulièrement abject. Tout le problème est que « le peuple albanais » n'est aucunement coupable de cet éventuel trafic, tout comme « le peuple serbe » n'a pas à porter la responsabilité du massacre génocidaire de Srebrenica : ces crimes ont des coupables, dont il appartient à la justice d'établir la responsabilité personnelle. Ce travail de justice est la seule manière d'éviter à des peuples entiers, et aux générations futures, de porter le fardeau accablant d'une responsabilité collective. Au Kosovo, seul M. Albin Kurti, le dirigeant du mouvement Vetëvendosja (« Autodétermination ») semble avoir compris la véritable signification de ce qui est en train de se jouer. Il a officiellement demandé que la justice se saisisse du dossier de M. Thaçi, estimant que c'était la seule manière de laver l'ensemble des combattants et des sympathisants de l'UCK du soupçon d'une responsabilité collective (10). En Albanie, une des rares voix critiques à s'être élevée est celle de l'essayiste Fatos Lubonja, ancien prisonnier politique du régime stalinien et grande figure de la gauche. Dans un article publié par le quotidien Panorama, M. Lubonja ose établir un parallèle entre ce crime, supposé, et celui, établi, de Srebrenica, en soulignant que les Albanais risquent désormais d'en subir le poids accablant sur leur conscience collective. Dénonçant le « front patriotique », qui se forme, de Tirana à Pristina, pour refuser une enquête, il écrit : « l'accusation est certes lourde, mais refuser l'enquête qui la confirmerait ou l'infirmerait est encore pire. Ce refus nous rend tous coupables et je crois que la plupart des Albanais ne veulent pas se sentir mêlés à ce genre de crimes » (11). Les critiques de M. Marty pointent l'absence de preuves fournies par son rapport. La résolution adoptée à l'unanimité par la Commission de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe demande justement que des enquêtes soient diligentées pour établir ces preuves. Par la voix de sa représentante pour les Affaires étrangères, Mme Catherine Ashton, l'Union européenne a estimé que cette enquête devait être menée par la mission européenne Eulex, précisément chargée d'assister les institutions du Kosovo dans la construction de l'Etat de droit. Tout en répétant ses critiques, le gouvernement albanais a fait savoir qu'il ne s'opposerait pas à ce que cette enquête se poursuive sur son territoire. Pour sa part, Mme Del Ponte a soulevé le problème de la juridiction compétente pour se saisir d'une telle affaire : le TPIY ne pouvant plus ouvrir de nouveaux dossiers, il faudrait créer un tribunal ad hoc, ou bien transmettre le dossier à la Cour pénale internationale (CPI) (12). Enfin, les responsabilités que pointent le rapport ne concerne pas seulement M. Thaçi et les anciens dirigeants de la guérilla albanaise. Dans son livre, Mme Del Ponte explique le mur auquel elle s'est heurtée lorsqu'elle a essayé, à partir de 2000, de mener des enquêtes sur les crimes supposés de l'UCK, citant nommément le chef de la mission de l'ONU, M. Bernard Kouchner, ainsi que le général français Valentin, alors commandant en chef de la KFOR. Pour tenter d'expliquer ce blocage, elle écrit : « Je suis certaine que les responsables de la MINUK et même de la KFOR craignaient pour leur vie et pour la vie des membres de leurs missions ». Plus loin, elle ajoute : « dans l'esprit de la MINUK et de la KFOR, [M. Hashim] Thaçi et [l'ancien chef militaire de l'UCK, M. Agim] Ceku ne représentaient pas uniquement un danger pour la sécurité de leur personnel et l'accomplissement de leurs missions : ils mettaient en péril tout l'édifice du processus de paix dans les Balkans » (13). Dans une interview publiée le 21 décembre par le quotidien serbe Politika, le capitaine canadien Stu Kellock, ancien chef du département de police de la Minuk, déclare : « Je ne peux pas affirmer que Kouchner connaissait le trafic d'organe, mais il est impossible qu'il n'ait pas eu d'informations sur le crime organisé au Kosovo. » De fait, la lutte contre la criminalité organisée représentait l'une des priorités des missions internationales au Kosovo. Le capitaine Kellock explique également que « toute critique à l'encontre de Hashim Thaçi et de son entourage » était immédiatement rejetée dans les « cercles où [il] travaillait » (14). Par « réalisme politique », plusieurs pays occidentaux ont fait le choix de jouer la « carte » politique que représentait M. Thaçi. On sait que ce dernier était conseillé, déjà durant la guerre, par des agents de certains services de renseignements, notamment de la DGSE française. L'implication directe de M. Thaçi dans de nombreuses activités illégales (racket, blanchiment d'argent, etc.) est également avérée. Par souci de ne pas « griller » un précieux allié politique, les « protecteurs » occidentaux de M. Thaçi ont fait le choix de passer l'éponge sur ces « péchés véniels ». Si une enquête confirme l'implication de M. Thaçi dans un abject trafic d'organes, la responsabilité de ses « protecteurs » occidentaux risque d'être accablante. Interrogé par un journaliste serbe sur le trafic d'organes le 27 février dernier, alors qu'il se trouvait en voyage officiel au Kosovo, M. Kouchner, alors ministre des Affaires étrangères, avait éclaté de rire, avant de s'exclamer : « J'ai une tête à vendre des organes, moi ? », et de suggérer au journaliste « d'aller se faire soigner » (15). Le rire de M. Kouchner résonne aujourd'hui de manière sinistre. Jean-Arnault Dérens Rédacteur en chef du site Le Courrier des Balkans. Dernier ouvrage paru (avec Laurent Geslin) : Voyage au pays des Gorani (Balkans, début du XXIe siècle), Cartouche, Paris, 2010. (1) Le rapport est disponible sur le site du Conseil de l'Europe. (2) Traduction française : Carla Del Ponte, La chasse. Les criminels de guerre et moi, Paris, Héloïse d'Ormesson, 2009. (3) Lire Altin Raxhimi, Michael Montgomery et Vladimir Karaj, « Albanie et Kosovo : les camps de la mort de l'UÇK », Le Courrier des Balkans, 10 avril 2009. (4) « Dick Marty : "L'indépendance du Kosovo n'a pas été décidée à Pristina" », voltairenet.org, 12 mars 2008. (5) « Martys Vorgehen erinnert mich an Goebbels », Tages Anzeiger, 30 décembre 2010. (6) Lire Ben Andoni, « Trafic d'organes en Albanie : dans la "clinique fantôme" de Carla Del Ponte », Le Courrier des Balkans, 19 mai 2008. (7) Rappelons que les autorités albanaises avaient refusé d'accéder en 2003 aux demandes des enquêteurs du TPIY, qui souhaitaient procéder à des exhumations dans le cimetière de Rripë. Ce refus a été officiellement justifié par des « raisons culturelles ». (8) Lire « Trafic d'organes : le vaste réseau de "Docteur Vautour", chirurgien turc », Le Courrier des Balkans, 21 décembre 2010. (9) Lire Blerim Shabani & Sevdail Tahiri, « Le rapport de Dick Marty secoue la diaspora albanophone en Suisse », albinfo.ch, 20 décembre 2010. (10) Lire « Kosovo : Vetëvendosje demande que Thaçi soit déféré devant la justice », Le Courrier des Balkans, 18 décembre 2010. (11) Fatos Lubonja, « Pse refusohet raporti i Dick Martit ? », Panorama, 22 décembre 2010. (12) Lire « Trafic d'organes de l'UÇK : Carla Del Ponte pour la saisine de la CPI », Le Courrier des Balkans, 23 décembre 2010. (13) Carla Del Ponte, La chasse, op.cit., pp.460-461. (14) Lire Rade Maroević, « Kušner je morao da zna », Politika, 21 décembre 2010, et R.S.V., « Trafic d'organces : Kouchner savait », Le Courrier des Balkans, 29 décembre 2010. (15) La vidéo de cet échange circule beaucoup sur Internet. On peut la consulter sur Dailymotion. Source : Le Monde diplomatique, Jean-Arnault Dérens, 04-01-2011 ==================================================
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L’UE envisage de suspendre la réciprocité des visas avec les États-Unis et le Canada
L'UE envisage de suspendre la réciprocité des visas avec les États-Unis et le Canada
Source : Europe 1, 13-04-2016 L’Union européenne reproche depuis 2014 à ces deux pays de ne pas respecter la réciprocité des visas. L’Union européenne s’est donné mardi jusqu’à la mi-juillet pour évaluer l’éventualité d’une suspension de la réciprocité des visas avec les Etats-Unis, le Canada et le sultanat de Brunei, faute d’une exemption appliquée par ces trois pays aux ressortissants de tous les Etats membres de l’UE. Le Parlement doit trancher. “La Commission a évalué les conséquences juridiques, politiques et économiques d’une éventuelle suspension temporaire de l’exemption de visa accordée aux Etats-Unis, au Canada et à Brunei et elle a demandé au Parlement et au Conseil européens de prendre position sur la voie à suivre”, a indiqué le commissaire européen aux Migrations, Dimitris Avramopoulos, dans un communiqué. Ces deux instances devront rendre leur avis au plus tard le 12 juillet prochain. Solidarité entre les pays de l’UE. Au nom du principe de solidarité qui lie les 28 Etats membres, l’UE cherche à obtenir que les pays tiers figurant sur sa liste d’exemption de visas (dans l’optique d’un séjour de moins de 90 jours) accordent la même exemption à tous les ressortissants de l’Union. Or, dès avril 2014, la Commission européenne avait notifié cette absence de réciprocité par plusieurs pays, un contentieux résolu en 2015 avec l’Australie et le Japon mais qui continue de se poser avec le Canada et les Etats-Unis. Moins de touristes canadiens ? Le Canada a imposé des visas pour les Bulgares et les Roumains, tandis que Washington en exige pour les ressortissants bulgares, croates, chypriotes, polonais et roumains voyageant sur son territoire. Le petit Etat de Brunei, en Asie du Sud-Est, demande un visa pour les Croates, mais le problème devrait être levé “dans les semaines à venir”, selon la Commission. Le ministère canadien de l’Immigration s’est dit “heureux que la Commission ait choisi pour l’heure de ne pas adopter une loi qui aurait imposé une obligation de visa aux Canadiens qui se rendent en Europe”. Toutefois, ajoute le ministère dans un communiqué, “nous demandons instamment que le Conseil de l’Union européenne et le Parlement européen mesurent soigneusement les conséquences négatives que l’imposition d’une obligation de visa au Canada aurait sur nos intérêts communs”. Source : Europe 1, 13-04-2016 |