Ni Clinton, ni Trump !
J’aime bien le titre, et c’est en tous cas ma position : un très mauvais président sera élu demain…
Source : République sociale, Le Grand Soir, 13-10-2016
République sociale – Au fur et à mesure que s'approche la date des élections aux États-Unis, la crainte de l'élection de Donald Trump est de plus en plus palpable. Une peur justifiée par les propos du candidat républicain qui propose entre autres d'expulser et de ne plus accueillir de musulmans sur le sol américain ou encore d'ériger un mur le long de la frontière mexicaine afin d'empêcher l'arrivée de latinos-américains clandestins. Un mur qui serait construit aux frais du Mexique selon les dires de Trump. Ces seuls propos peuvent laisser imaginer le pire pour un pays qui nous a déjà habitué au pire.
Or, si tout le monde sera d'accord – pour une fois – à ce sujet, les avis concernant l'autre prétendante à la Maison blanche, divergent. Ainsi pour beaucoup Clinton est le rempart au populisme de Trump, tandis que pour d'autres elle n'est ni plus ni moins qu'une candidate pro-système. De mon point de vue Clinton n'est pas pire que Trump, mais elle est presque aussi dangereuse.
Ceux qui pensent que l'arrivée au pouvoir d'Hillary Clinton serait bénéfique pour les Etats-Unis et pour le reste du monde, se trompent de toute évidence, tout comme ceux qui pensent que celle de Trump en serait une bonne. Mais faut-il rappeler les dévastes et les ravages de la politique extérieure de Clinton en Libye ou en Syrie ? Cette politique qui a consisté, et qui consiste toujours, à armer et à financer des groupes terroristes prétendus « démocratiques et modérés ». Peut-être d'ailleurs que sur ce sujet, Donald Trump a choisi la voix de la raison, puisqu'il a clairement exprimé son refus d'intervenir et sa volonté de mener une politique plus isolationniste. Pour le reste, ces propos racistes anti-musulmans, anti-noirs, et plus généralement contre tous les immigrés font froid dans le dos.
Malgré tout il est assez amusant de remarquer que, comme d'ordinaire, les principaux médias nous montrent ce qu'ils veulent qu'on écoute. Ainsi, si l'accent est mis sur ses propos nauséabonds- ce qui certes suffit amplement à détester le personnage – les médias oublient de nous évoquer les autres points du programme de Trump, à croire qu'il n'aurait pour seul programme le mur à la frontière américano-mexicaine. Ainsi rien n'est dit sur son refus de baisser les allocations, ou bien son projet de réindustrialisation des Etats-Unis et notamment dans les régions où les travailleurs ont été le plus durement touchés. Ces aspects du programme du candidat républicain peuvent ainsi expliquer pourquoi, malgré son racisme avéré, Trump est autant populaire parmi les classes moyennes qui sont fortement touchées par la crise. A ce propos il convient de lire l'article paru dans le Monde diplomatique d'Octobre 2016 : « les Etats-Unis tentés par le risque » .
A l'inverse Hillary Clinton est, dans la plupart des cas, présentée sous un aspect positif, érigée en défenseur des minorités et des droits de l'Hommes, alors même que son programme économique et social est profondément dangereux pour le peuple étasunien. Outre sa politique étrangère d'ingérence, sa vision de l'économie a ainsi déjà fait ses preuves d'incompétences et d'inefficacité. Ainsi, alors que des millions d'américains vivent sous le seuil de pauvreté, Clinton propose une baisse toujours plus accrue des dépenses publiques ce qui n'aura pour conséquences que d'amplifier cette situation au lieu de la résoudre comme c'est aujourd'hui le cas en Europe.
C'est pour cette raison qu'à mon sens la candidature de Bernie Sanders (voir : La surprise Bernie Sanders) aurait été une réelle chance pour le peuple étasunien et un réel espoir. D'une part d'un point de vue démocratique, cela aurait évité une nouvelle fois un affrontement entre deux candidats pro-système. Et même si Trump réfute ce terme et s'érige en candidat anti-système, sa fortune personnelle parle pour lui. D'autre part pour ses idées révolutionnaires, en tout cas révolutionnaires pour les Etats-Unis. Mais qu'importe puisque le système, finalement si peu démocratique, en a décidé autrement.
Le peuple des EU a ainsi un choix à faire, celui d'une rupture raciste incarnée par Trump ou celui de la continuité d'une politique ultralibérale et impérialiste caractérisée par Clinton. Dans les deux cas cette situation pourrait conduire au pire, pour le reste du monde et pour les Etats-Unis eux mêmes, puisqu'il n'est pratiquement pas envisageable d'avoir recours à un « vote utile » afin de désigner le candidat qui, à défaut d'être le meilleur, serait le moins pire.
Ce qui est certains en revanche, c'est que la politique d'Obama pendant ses deux mandats consécutifs aura grandement contribué à l'arrivée de cette situation. L'action d'Obama aura ainsi été globalement mauvaise, voire néfaste, en dépit des discours et des bonnes paroles. Outre un appauvrissement de la société américaine, un chômage accru, ou encore la non tenue d'un grand nombre de promesses, il se sera caractérisé par une politique extérieure agressive, fondée sur le non respect d'Etats souverains, d'ingérence et de déstabilisation, tout comme l'avait fait son prédécesseur Bush. Il y a eu la Syrie, la Libye, mais également le Soudan, l'Iran, le Venezuela, la Bolivie, l'Equateur, et plus récemment le Brésil. C'est à dire toutes les Nations s'opposant de près ou de loin à l'unilatéralisme et au leadership américain.
La question cubaine
Par rapport à Cuba,et malgré ses appels à une normalisations des relations, la situation n'a guère changé pour le peuple cubain. Certes il y a eu la réouverture d'ambassades, certes en apparence les relations sont rétablies, certes Obama s'est rendu à Cuba. Et puis ? La réalité, elle, est bien différente. Washington continue toujours de financer des groupes d'oppositions cubains et n'a pas renoncé à voir le socialisme cubain s'effondrer. De fait, le blocus économique, mis en place en 1962, est toujours en vigueur et continue d'asphyxier l'économie cubaine. De même que la prison de Guantànamo, lieu où se pratiquent régulièrement la torture et les violations des droits de l'Homme n'a toujours pas été fermée. Ainsi, non seulement les Etats-Unis violent les lois internationales en pratiquant la torture mais de plus la présence américaine sur le sol cubain constitue une violation d'un territoire appartenant à un Etat souverain. Que dirait-on si un autre pays possédait une prison, où sont régulièrement commises des exactions contre les prisonniers, en France ?
A propos de Cuba, et pour en revenir au sujet initial, Trump s'est là encore distingué en affirmant vouloir libérer le pays de l'oppression communiste. Une preuve de plus de son ignorance, de sa naïveté et de sa dangerosité. Comme Clinton il semble que Trump soit partisan d'une vision du monde héritée de la guerre froide, celle qui constituerait à ériger les Etats-Unis en modèle de justice, de démocratie et de droits de l'Homme contre le communisme. Fidel Castro, le leader historique de la Révolution cubaine, en a d'ailleurs profité pour signaler que Trump s'était « disqualifié » lors du premier débat.
Ni Clinton, ni Trump
De notre canapé, loin de la réalité politique étasunienne, il est ainsi facile de juger et d'émettre des commentaires à propos de ces élections. Et il est certain, en tant que non étasunien, qu'il est beaucoup plus aisé – même si c'est effectivement le cas – d'affirmer que ni Clinton ni Trump ne seront une bonne solution puisque de fait nous n'aurons pas ce difficile choix à faire. Pourtant, les grands électeurs américains, chargés du vote, auront une lourde responsabilité, et en raison du poids des Etats-Unis dans la géopolitique mondiale, ce vote ne concernera pas seulement le peuple américain, mais tout le reste du monde.
Source : République sociale, Le Grand Soir, 13-10-2016
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