Délit de presse : l'Assemblée supprime les sanctions votées au Sénat
Qualifiés d'"attaques en règle contre la loi de 1881" relative à la liberté de la presse, les amendements votés par le Sénat ont été supprimés.
Les députés réunis en commission ont supprimé les sanctions applicables aux délits de presse introduites par le Sénat, mardi 8 novembre. Ces sanctions avaient entraîné les protestations des organisations de journalistes y voyant une remise en cause de l'équilibre de la loi de 1881 sur la presse. En effet, dans le cadre du projet de loi égalité et citoyenneté, les sénateurs avaient voté des amendements ayant pour ambition de s'attaquer aux injures et aux diffamations sur Internet, notamment en durcissant les sanctions et en élargissant le champ des poursuites.
À en croire les syndicats et les organisations de journalistes, ces amendements porteraient atteinte à « l'équilibre » de la loi de 1881 sur trois points : la modification du délai de prescription, la possibilité de requalifier l'infraction et la porte ouverte à des demandes de réparation civile. En nouvelle lecture, les députés ont donc supprimé ces dispositions.
« Une attaque en règle contre la loi de 1881 »
« Le Sénat est allé bien trop loin. On ne touche pas sans un profond et long débat à la loi de 1881 », a jugé le rapporteur PS Razzy Hammadi, approuvé par le ministre de la Ville Patrick Kanner : « La loi de 1881 est un totem. La mettre en péril en touchant aux délais de prescription nous paraissait extrêmement dangereux. » Pour la socialiste Marie-Anne Chapdelaine, le vote du Sénat était « une attaque en règle contre la loi de 1881 » d'autant plus « malencontreuse que le Parlement vient d'adopter la loi sur la protection des sources des journalistes ».
Dans un premier temps, la commission sénatoriale avait adopté des amendements prévoyant que l'action civile en matière de délit de presse pouvait être exercée devant une juridiction civile, séparément de l'action publique, alors qu'actuellement elle est jointe. Devant la levée de boucliers contre cette décision, la rapporteur Françoise Gatel avait décidé d'exonérer de ce dispositif par un amendement « les journalistes, les pigistes et les correspondants de presse ». « Nous ne visons que les corbeaux numériques », s'est-elle justifiée.
Mais, pour Patrick Kanner, cette décision n'était pas non plus la solution adéquate : « Avec cet amendement, vous éteignez un incendie allumé chez les journalistes, mais vous en allumez un autre, celui des internautes qui s'expriment librement sur le Net », avait-il estimé. Quant aux juridictions civiles, il pensait qu'elles pouvaient « potentiellement porter les plus graves atteintes à la liberté de la presse en imposant notamment des interdictions ou des retraits ». Le Sénat avait aussi allongé, toujours contre l'avis du gouvernement, la prescription des délits de presse de trois mois à un an lorsque les faits sont commis sur Internet, sans modifier le point de départ du délai de prescription qui resterait fixé au jour de l'infraction.
Source : Le Point.fr
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