SYRIE. "Crimes de guerre" à Alep : Hollande menace de ne pas recevoir Poutine
Source : Le Nouvel Obs, 10-10-2016
Samedi à l’ONU, la Russie a, comme elle l’avait annoncé, mis son veto à un texte présenté par la France qui appelait à une cessation immédiate des bombardements à Alep.
Alors que la ville d’Alep en Syrie croule sous les bombes du régime et de l’armée russe, François Hollande montre les muscles. Dans une interview rendue publique dimanche, qui doit être diffusée ce lundi 10 octobre sur la chaîne TMC, le chef de l’Etat a indiqué qu’il hésitait à recevoir le président russe lors de sa venue à Paris le 19 octobre, vu “les crimes de guerre” à Alep dont les auteurs devront répondre “y compris devant la Cour pénale internationale”.
“Je me suis posé la question […] Est-ce que c’est utile ? Est-ce que c’est nécessaire ? Est-ce que ça peut être une pression ? Est-ce que nous pouvons encore faire en sorte qu’il puisse lui aussi arrêter ce qu’il commet avec le régime syrien, c’est-à-dire l’appui aux forces aériennes du régime, qui envoient des bombes sur la population d’Alep. Donc, j’aurai à recevoir, je me pose encore la question, Vladimir Poutine”, a dit François Hollande dans cette interview réalisée samedi lors d’un déplacement à Tulle en Corrèze.
Et le président de la République d’ajouter au sujet du président russe :
“Si je le reçois, je lui dirai que c’est inacceptable. Que c’est grave même pour l’image de la Russie.”
A la question de savoir ce qu’il avait envie de dire aux civils d’Alep-Est, la partie de la grande ville du nord contrôlée par les rebelles et soumise à d’intenses bombardements du régime et de son allié russe, François Hollande a répondu : “Ce que je leur dis, c’est que ces populations sont des populations qui aujourd’hui sont victimes de crimes de guerre. Et que ceux qui commettent ces actes auront à en payer la responsabilité, y compris devant la Cour pénale internationale”.
Vladimir Poutine doit participer à l’inauguration d’un nouveau “Centre spirituel et culturel orthodoxe russe” construit en plein centre de la capitale française. Pour Moscou, pas question d’annuler la visite du président russe. Les préparatifs pour la visite de Vladimir Poutine à Paris le 19 octobre “continuent”, a déclaré ce lundi le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov.
Veto russe à l’ONU
Toutes les initiatives diplomatiques pour tenter de faire cesser les combats dans la métropole meurtrie ont à ce jour échoué. Samedi à l’ONU, la Russie a, comme elle l’avait annoncé, mis son veto à un texte présenté par la France qui appelait à une cessation immédiate des bombardements à Alep. La proposition française a recueilli l’adhésion de 11 des 15 pays membres du Conseil de Sécurité : la Russie et le Venezuela ont voté contre, la Chine et l’Angola se sont abstenus. C’est la cinquième fois que la Russie utilise son droit de veto à l’ONU au sujet du conflit syrien.
François Hollande avait estimé avant le vote qu’un pays qui opposerait son veto “serait discrédité aux yeux du monde”.
Heureusement qu’il est là pour protéger notre crédit, entre ses déclarations, ses livres et les tweets de son ex…
La Russie a elle aussi soumis au vote un texte concurrent, appelant plus généralement à “une cessation des hostilités, notamment à Alep”, mais pas à un arrêt des bombardements. Neuf pays, dont la France, le Royaume-Uni et les États-Unis l’ont rejeté.
Ben oui, on ne va quand mêle laisser bombarder les zones tenues par les djihadistes…
Plus de deux semaines après le début d’une offensive d’envergure dans la deuxième ville de Syrie, les forces prorégime – appuyées par les frappes de son allié russe – ont continué dimanche de progresser rue après rue pour reprendre les quartiers est d’Alep, contrôlés par les rebelles depuis 2012.
“Des affrontements au sol, accompagnés de violentes frappes aériennes, ont eu lieu toute la nuit et se poursuivaient dimanche, notamment dans le quartier Cheikh Saïd” dans le sud d’Alep, a indiqué à l’AFP Rami Abdel Rahmane, directeur de l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH).
Selon l’OSDH, 290 personnes – des civils pour la plupart -, dont 57 enfants, ont été tuées à Alep par des tirs d’artillerie et surtout des raids aériens du régime et de Moscou depuis le lancement de l’offensive le 22 septembre.
Les Russes frappent moins Daech
Selon une analyse de la firme américaine IHS publiée dimanche, les bombardements russes visent de moins en moins le groupe djihadiste Etat islamique (EI). Si au premier trimestre 2016, 26% d’entre eux ciblaient l’EI, ce chiffre est passé à 22% au 2e et à 17% au 3e.
Oui dans le reste il y a surtout Al-Qaïda et ses alliés, penser à le rappeler…
Le président Vladimir Poutine avait pourtant “déclaré que c’était la mission de la Russie de lutter contre le terrorisme international et spécifiquement contre l’EI”, rappelle Alex Kokcharov, analyste de l’IHS spécialiste de la Russie.
IHS indique que le territoire contrôlé par l’EI en Irak et en Syrie s’est réduit de 16% depuis le début de l’année, passant de 78.000 km2 à 68.300 km2, soit environ la taille de la Belgique et les Pays-bas réunis.
L’EI a notamment reculé en Irak sous la poussée de l’armée qui se prépare à lancer une offensive sur son bastion de Mossoul, avec le soutien des frappes de la coalition anti-djihadistes menée par les Américains.
Mais attention, là, les frappes ne tuent jamais de civils…
G.S. avec AFP
Source : Le Nouvel Obs, 10-10-2016
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OB : Il serait grand temps que ce genre de propos puisse être poursuivis au niveau “déontologie des journalistes” (et non pas judiciaire, bien entendu)
Poutine, tsar du contre-pied
Source : Le Nouvel Obs, Vincent Jauvert, 11-10-2016
Pas question pour le boucher d’Alep de se laisser imposer les états d’âme et le timing de François Hollande.
C’est vrai, quel monstre, on l’humilie, et il réagit !!! Ce n’est pas Hollande qui ferait ça…
Une fois encore, Poutine prend tout le monde à contre-pied. Pas question pour le maître du Kremlin de se laisser imposer les états d'âme et le timing de François Hollande. Le chef de l'Etat s'interrogeait lundi sur l'opportunité d'accueillir son homologue russe, le 19 octobre, à Paris, alors que son aviation martyrise Alep. Le tsar a – logiquement – décidé de ne pas attendre la décision définitive de Hollande. Selon l'Elysée, il souhaite “reporter” sa visite en France.
Somme toute modérée, cette réaction ménage l'avenir. Face à la déclaration du président français et aux attaques – tout à fait justifiées – de la France contre la Russie au Conseil de sécurité, le président russe aurait pu claquer la porte, annuler sa venue avec fracas.
Mais une telle attitude radicale aurait probablement déplu à une partie de la population russe qui s'inquiète de l'isolement croissant de son pays sur la scène internationale.
Rappel : Scène internationale = Occident
Elle aurait sans doute déçu une partie de la communauté russe de Paris qui souhaite une inauguration majestueuse de la cathédrale orthodoxe qui vient d'être érigée sur les quais de Seine, à l'emplacement de l'ancien siège de Météo France. Enfin, une rupture aurait, sans doute, donné de nouveaux arguments à ceux qui souhaitent maintenir, voire durcir, les sanctions économiques contre la Russie.
Evidemment, ce “report” arrange François Hollande. Alors qu'il entre en campagne pour un second mandat, la perspective d'inaugurer un lieu de culte avec le boucher d'Alep ne l'enchantait guère.
Source : Le Nouvel Obs, Vincent Jauvert, 11-10-2016
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