Obama, bonimenteur superficiel, snob et conservateur
Ce mois-ci, The Economist a ouvert ses colonnes de manière enthousiaste au président sortant des Etats-Unis, Barack Obama. Même si sa réforme de l'assurance maladie restera un progrès important pour le pays, cette tribune verbeuse, aussi partielle que partiale, révèle encore une fois un homme politique plus soucieux de sa communication que du fond des sujets, survolé pendant 8 ans.
Plus commentateur communiquant qu'acteur réfléchi
Obama est sans doute l'incarnation parfaite des travers de notre époque où l'accélération du temps et la complexification des vies : un beau parleur qui présente aussi bien qu'il parle, qui sait bien raconter des histoires, au point où on finit par se demander s'il ne s'est pas trompé de carrière et n'aurait pas mieux fait de faire du stand up ou du journalisme, pour peu qu'il ne soit pas d'investigation. Dans ce long papier insipide, le président sortant surfe sur l'écume de l'actualité de manière extraordinairement convenue : il dénonce le populisme qui sévirait à gauche et à droite tout en faisant mine de se demander pourquoi nous en serions arrivés là. Mais de suite, il soutient que « l'essentiel de ce mécontentement est généré par des peurs qui ne sont pas fondamentalement économiques ».
Mais s'il admet que « ce mécontentement est enraciné dans des préoccupations légitimes sur les forces économiques de long terme », en parlant de « peurs », ce snob disqualifie les motivations de ce peuple qui ne raisonnerait pas, mais qui ne serait mu que par des sentiments pas forcément rationnels. Ensuite, il soutient que « l'année dernière, les ménages étasuniens ont profité de la plus importante progression de leurs revenus et le taux de pauvreté a baissé plus rapidement qu'à aucun moment depuis les années 60 », s'appuyant sur des statistiques portant sur la seule année 2015, qui indiquent une réduction des inégalités. Sur cette seule année, il se donne le crédit d'avoir montré que « le progrès est possible » alors que les PDG gagnent 250 fois plus que la moyenne, contre 25 dans le passé.
Sur ce point, Barack Obama démontre un sacré culot. D'abord, on se demande où est passé le 10èmedécile dans le graphique. Supprimé parce qu'il n'allait pas dans le sens de sa démonstration ? Ensuite, quel peut être le sérieux d'un président qui présente des statistiques sur une seule année, après huit ans de mandat ? La ficelle est bien grosse et révèle l'arnaque grossière de son discours. Comment ose-t-il se vanter de la sorte alors que dans les premières années de l'après crise, sous son mandat, plus de 90% de la croissance était allée au 1% le plus riche ! Pendant ces huit années, il a été le président de ce 1%, donnant quelques miettes aux 99%, pas toujours de manière volontaire.
Mais outre le caractère éhonteusement superficiel de son argumentation sur les inégalités, et le snobisme de sa manière d'évoquer l'évolution actuelle du débat politique, Barack Obama révèle un vrai conservatisme. Car s'il dit que « nous devons être encore plus agressifs pour prendre des mesures pour renverser la hausse des inégalités des dernières décennies », il peine à citer des mesures qui iraient dans ce sens. Il ne faut pas être plus agressif, il faut commencer à agir, de manière forte et déterminée. Mais en fait, en défendant le libre-échange ou la quête de compétitivité, il présente d'une manière politiquement correcte l'agenda des dirigeants et des actionnaires des multinationales de la planète.
L'agenda pseudo centriste d'Obama, c'est celui d'un aristocrate qui donne quelques pièces aux miséreux, tout en veillant bien à le faire savoir. Mais parce qu'il ne remet rien en cause structurellement, il est en fait le meilleur porte-parole d'élites qui, au mieux, n'ont pas compris qu'il fallait un vrai changement. Obama, c'est une assurance morale dérisoire qui permet de continuer dans la même direction.
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