Jean-Marc Ayrault dans ses oeuvres…
Je ne surligne pas toutes les bêtises et la propagande larmoyante, pour que ça reste lisible…
24 heures en questions, Yves Calvi, LCI, 5 octobre 2016
Présentation : Jean-Marc Ayrault, Ministre des Affaires Etrangères, le chef de la diplomatie française face au chaos syrien. Un conflit qui a fait plus de 300 000 morts en 5 ans. Les efforts se poursuivent pour tenter de faire taire les armes à Alep, ville martyr où 250 000 civils vivent sous les bombes. Alliée du régime de Damas, la Russie s'est félicitée de la grande efficacité de ses raids aériens tout en affirmant œuvrer pour la paix : « Malheureusement depuis le début beaucoup ont cherché à saboter les efforts des Accords, y compris à l'intérieur de l'Administration américaine mais nous n'abandonnerons pas. Nous ferons en sorte de mettre en œuvre les décisions du Conseil de Sécurité de l'ONU (Sergueï Lavrov, Ministre russe des Affaires Etrangères.).
Les Occidentaux ont entamé un bras de fer avec la Russie sur le dossier syrien. Jean-Marc Ayrault critique le cynisme de Moscou : « Je dis aux Russes : le sort de cette ville est entre vos mains. Si vous vous obstinez, le drame d'Alep restera dans les mémoires comme une infamie. Vous en porterez la responsabilité ».
Le Ministre des Affaires Étrangères doit se rendre à Moscou demain et à Washington vendredi pour tenter d'adopter une résolution sur un cessez-le-feu à Alep. Mais la France a-t-elle les moyens d'infléchir la position russe ?
Y.Calvi : Bonsoir Monsieur Jean-Marc Ayrault, merci beaucoup Monsieur le Ministre des Affaires Etrangères d'être avec nous en direct sur LCI. Vous partez demain pour Moscou, vous serez vendredi à Washington. On vient une fois de plus de comprendre à quel point la situation était difficile. La France peut-elle changer la donne à Alep ?
J-M. Ayrault : Je vais à Moscou pour dire aux Russes : ces images que le monde entier voit aujourd'hui de bombardements, de morts, d'enfants, de femmes, de vieillards mais aussi d'humanitaires qui font leur travail – je pense aussi à ces casques blancs – des hôpitaux visés, des écoles détruites – ce n'est pas possible, cela ne peut pas continuer, c'est une catastrophe humanitaire. Le Secrétaire Général des Nations Unies Ban Ki Moon dit que ce sont des faits constitutifs de crimes de guerre. Donc je vais à Moscou, non, pas négocier…
Y.C. : Il parle même « d'abattoir ».
J-M.A. : Oui, les mots sont forts parce que la réalité est terrible. La réalité est tragique, donc la France est pleinement engagée, elle n'est pas seule mais elle est en première ligne. Elle est membre permanent du Conseil de Sécurité, elle agit en toute indépendance. Donc je vais à Moscou, non pas pour négocier le texte d'une résolution. Je vais à Moscou pour dire le point de vue de la France : cette situation est inacceptable, profondément honteuse et la France ne veut pas participer en fermant les yeux et en ne faisant rien. Donc je vais dire à Moscou et à mon homologue Lavrov la position de la France.
Y.C : On détruit notamment les hôpitaux, ce sont les dernières monstruosités qu'on a découvertes ces dernières vingt-quatre heures. On a des images absolument épouvantables et les Russes avec qui vous allez parler, vous l'avez entendu, se félicitent de « l'efficacité de leurs frappes ».
J-M. A : C'est du cynisme, c'est du cynisme, cela ne trompe personne. Vous savez la France a pris une initiative, lorsque j'ai quitté l'Assemblée des Nations Unies nous n'avions pas réussi à trouver un accord. J'ai participé à je ne sais combien de réunions, y compris au sein du Conseil de Sécurité. On ne va pas laisser tomber, on va continuer à se battre. Et on se bat. Là, il y a sur la table un projet de Résolution. Quel est l'objectif de ce projet de Résolution, si elle est adoptée et on travaille pour cela, avec les 15 membres du Conseil de Sécurité, les 5 permanents et les autres ? C'est un, l'arrêt des frappes sur Alep et sur la Syrie, l'arrêt des bombardements, l'acceptation de l'aide humanitaire parce qu'il y a des mois qu'elle n'arrive plus. Il y a des gens qui meurent de faim, qui n'ont pas de soins. Et aujourd'hui les convois ne peuvent pas passer parce qu'ils sont bombardés.
Et ensuite il faut reprendre le processus de paix. Il faut arrêter la voie de la guerre. Il y a deux objectifs dans notre démarche. Le premier objectif, c'est effectivement l'action humanitaire, humaine de solidarité, il faut arrêter ce massacre. Et de deux, le deuxième objectif. Il n'y a pas de solution à la crise syrienne qui dure depuis 5 ans qui a fait 300 000 morts avec 10 millions de personnes déplacées ou réfugiées, d'un point de vue militaire. Même si Bachar el Assad, gagnait, regagnait Alep, cela ne changerait rien. Vous savez quelles sont les conséquences ? Le renforcement des djihadistes, des terroristes, c'est eux qui gagnent des points et nous, nous sommes menacés. Les Syriens qui aujourd'hui sont sous les bombes sont menacés par cette tragédie mais nous, les Français, les Européens et même au-delà, nous sommes menacés par le terrorisme et donc il faut qu'on mène cette bataille aussi.
OB : Donc quand Assad bat les terroristes, ça renforce les terroristes, et c’est mauvais pour nous #CQFD…
Y.C : Jean-Marc Ayrault, tout ce que vous venez de nous dire est parfaitement clair et sur les buts de votre visite et sur le constat que vous faites de la situation. Le problème est : que pouvez-vous avoir bien à dire à ces gens-là ? Quelle est la fiabilité ou quelle confiance peut-on avoir en Sergueï Lavrov. On se demande. Ils sont d'un cynisme absolu, c'est vous qui avez employé le terme.
OB : attention au chien de garde
JM. A : Oui, je l'ai employé. En même temps vous savez, il y a un débat partout, en France aussi, sur quelle attitude avoir vis-à-vis de la Russie. Il y a ceux qui disent « il faut couper les ponts avec la Russie » ; il y a ceux qui disent « il faut suivre Moscou ». Eh bien, notre option, c'est ni l'un ni l'autre. Par contre, je discute avec les Russes au nom de la France. Nous ne fermons pas la porte, le canal n'est pas fermé.
Est-ce-que vous pensez – parce que l'opinion publique internationale, la communauté internationale (depuis quelques jours les images passent en boucle) il y a toujours le risque d'une indifférence quand il se passe quelque chose de cette nature et là aujourd'hui, partout dans le monde, on voit les images, c'est une tragédie – est-ce que vous croyez que la Russie, qui est un grand pays , qui est une vieille civilisation, vous croyez qu'eux aussi peuvent être indifférents à ce message : « arrêtez ce massacre » ? Donc je vais à Moscou pour dire ça.
Y.C : C'est une forme de témoignage ou c'est une façon de prendre date avec les Russes pour leur dire « un jour vous aurez des comptes à rendre » ?
OB : Et Fabius et Hollande, c’est prévu qu’ils rendent des comptes ?
J.M. A : Tous ceux qui sont complices ont des comptes à rendre.
OB : oh, ben parfait alors, merci !
Vous avez employé les mots du Secrétaire Général de l'ONU, qui sont encore plus forts que ceux que j'avais cités. Et donc c'est sûr que, si on est complices de crimes de guerre, il y a un jour où il faudra en rendre compte et, y compris, sur le plan juridique. Ce n'est pas rien comme prise de responsabilité. Encore une fois, je pense qu'avec les Russes, il faut parler un langage de vérité, je ne cherche pas à leur plaire. Je leur dirai la position de la France. Et la position de la France je considère qu'elle est juste. Elle est peut-être difficile mais en tout cas nous nous battons et la bataille elle se mène au Conseil de Sécurité.
Y.C. : J'ai bien compris Jean-Marc Ayrault que vous comptez dire au Ministre des Affaires Étrangères russe « vous aurez des comptes à rendre un jour, peut-être même devant des tribunaux internationaux » ?
OB : Oh oui, ça va être drôle…
J-M. A. : Est-ce que vous pouvez prendre le risque de cette responsabilité morale ; d'abord morale, morale à l'égard de l'opinion publique internationale et à l'égard de votre peuple, de votre propre Histoire ?
OB : Ben oui, oser attaquez des djihadistes qu’on a nous même armés !!!
Je ne peux pas imaginer que la logique de la guerre totale soit la logique, comme de toute façon nous discutons ensemble, nous savons qu'il y a une menace terroriste, nous savons que cette menace terroriste c'est Daesh, nous savons que c'est AL Qaïda et qu'il y a des groupes terroristes aussi en Syrie, comme il y a en Irak, comme il y en a en Libye,
OB : Euh, pourquoi ils prospèrent en Irak et en Libye déjà ?
comme il y en a en Afrique. Donc tout ça c'est un combat commun que nous menons mais nous devons le mener jusqu'au bout. Et se demander si la logique de guerre, qui est aujourd'hui utilisée par le régime de Bachar el Assad, d'aller jusqu'au bout, c'est-à-dire de contrôler toute cette Syrie comme on dit « utile », en allant de Damas à Alep en passant par Homs et de l'attaquer là où il y a un port, serait facteur de paix ?
OB : eh oui, chasser tous les djihadistes, ce serait facteur de paix ?
Non ce n'est pas facteur de paix parce que cela encourage la radicalisation, cela encourage la haine, cela encourage encore plus le terrorisme alors que le terrorisme c'est notre premier ennemi.
OB : je préfère ne rient dire pour garder à ce blog sa tenue
Y.C. : Jean-Marc Ayrault, est-ce que vous faites le constat suivant qui est que, officiellement, nous étions engagés dans une bataille commune avec les Russes, et vous venez de le rappeler, contre le terrorisme et contre le djihadisme qui porte parfois le terrain guerrier sur le sol français…
J.M. : Oui, malheureusement…
Y.C. : On sait maintenant que les Russes, en fait, ont fait semblant de mener cette bataille pour conforter leur allié dans la région – et le monde entier peut le voir – qui s'appelle Bachar El Assad. On sait donc qu'on s'est fait flouer ?
OB : QUI a détruit presque tous les camions citernes de Daech déjà, coupant ses revenus pétroliers ?
J-M.A. : C'est sans issue. Pour Bachar el Assad, ce serait une victoire à courte vue.
OB : Laisse Jean-Marc, je pense qu’il va la prendre quand même, nous laissant la défaite à longue vue…
Certes il est appuyé par les Russes et les Iraniens et le Hezbollah. Il faut rappeler que les Russes sont des belligérants. Nous nous ne sommes pas des belligérants, nous sommes engagés dans une coalition internationale contre Daesh, notamment avec les Etats-Unis.
OB : c’est à ça quand qu’on voit le triste niveau de nos dirigeants, et des crétins de journalistes qui ne relèvent même pas le fait que bombarder, c’est être un belligérant…
J'ai parlé de l'Irak et de Libye ici aussi. Nous ne sommes pas des belligérants, les Russes ont des troupes sur le terrain. Donc, c'est aussi une question de responsabilités. Les 10 millions de personnes déplacées, qui sont venues en France, en Allemagne surtout, ces personnes-là ne sont pas seules. Il y en a plusieurs millions en Turquie, en Jordanie, au Liban, donc juste à côté de la frontière syrienne, savez-vous à quoi ils aspirent ? Retourner dans leur pays. Et pour cela, il faut une reconstruction de la Syrie, et donc il faut un processus de paix. Et les Russes ont voté la Résolution pour un processus de paix mais ils ne respectent pas ce vote. Donc je rappellerai tout ça, c'est indispensable. Si les Russes sont sincères, alors il faut que ces massacres s'arrêtent et surtout que le processus de négociation politique reprenne à Genève, alors qu'aujourd'hui il est bloqué depuis des mois.
Y.C. : Le jour d'après votre rencontre avec Sergueï Lavrov, vous serez donc aux Etats-Unis. Et à Washington, aux Américains, qu'avez-vous à dire ?
J.M.A. : Les Américains sont nos alliés,
OB : meuh oui, c’est bien Jean-Marc…
dans la coalition contre Daesh, je l'ai rappelé mais ils sont aussi sur notre position. Maintenant, je pense qu'il y a aussi des questions à poser. Comment faire ? Que vont-ils faire ? On sait qu'on est en fin de présidence Obama, que c'est un mandat qui se termine. Donc ils peuvent être plus efficaces, plus engagés qu'ils ne le sont pour trouver la solution. La solution, c'est l'arrêt des bombardements, l'aide humanitaire et puis reprendre le processus de paix. Vous savez, si rien n'est fait tout le monde portera la responsabilité d'avoir laissé faire et ça n'est pas possible. La France continuera d'aller jusqu'au bout et prendra ses responsabilités.
Y.C. : La France parle avec les Grands. Est-elle capable de se faire entendre, Jean-Marc Ayrault ?
J-M. A. : Mais la France est respectée et entendue partout !
OB : meuuuuuuuuuuuuuuuh oui ! C’est pour ça que les Russes et les Américains ne nous ont pas invité le week-end dernier…
Vous savez, il y a 5 membres permanents aux Nations Unies. Il y a La France, la Grande Bretagne, les Etats-Unis, la Chine et la Russie. Je peux vous dire que notre voix pèse. Moi qui voyage beaucoup maintenant que je suis Ministre des Affaires Etrangères (je le faisais un peu quand j'étais Premier Ministre mais vous savez, on est plus sur les affaires intérieures), je vois que partout la France est respectée, attendue écoutée que ce soit dans les instances internationales, au Conseil de Sécurité mais aussi dans beaucoup d'autres endroits. Je suis allé aussi au Conseil des Droits de l'Homme.
ET puis regardez, lorsque la menace djihadiste arrivait sur Bamako, la capitale du Mali, c'était en 2013, j'étais présent au Conseil de Sécurité auprès du Président de la République François Hollande, il y a eu une décision de prise, c'est-à-dire d'arrêter, à la demande des autorités maliennes, d'arrêter cette avancée djihadiste qui allait contrôler tout le pays.
OB : avec les armes piquées en Libye vu qu’on l’a détruite…
Et aujourd'hui, si nous n'étions pas intervenus ce pays – un grand pays d'Afrique de l'ouest – serait sous la coupe djihadiste et c'est toute la région qui serait islamisée. Qui a fait ça ? Qui a pris cette responsabilité, à la demande du gouvernement malien ? C'est la France, parce que nous en avions les moyens militaires et nous en avions les moyens politiques. Et nous l'avons fait, et je peux vous dire que c'est, et c'était une décision extrêmement courageuse. Mais là notre engagement était clair et c'est ça qui fait que la France est aussi respectée et écoutée, y compris en Europe.
Je vous rappelle que maintenant la Grande Bretagne, qui s'est engagée il y a quelques années aux côtés de Américains dans la guerre en l'Irak avec les conséquences que l'on sait, a moins de capacités militaires et puis surtout ils ont décidé du Brexit. Quel est le seul membre permanent de l'Europe au Conseil de Sécurité aujourd'hui ? C'est la France.
OB : eh oui, depuis le Brexit, le Royaume-Uni est en Asie !
Pourtant nous ne sommes pas seuls, nous parlons avec nos partenaires, nous essayons de les convaincre, et de travailler avec eux.
Y.C. : Comment vous sentez-vous dans cet univers diplomatique – j'ai envie de vous dire – vous, à titre personnel ?
J-M.A. : Très bien, très à l'aise.
OB : purée, le niveau… Mais c’est vrai, je pense que ce sont les autres qui sont mal à l’aise quand il est là…
Y.C. : Est-ce que vous êtes à l'aise dans cet univers qui est très codé, très particulier et qui est aussi un monde de rapport de force où on dit des choses brutales avec des mots courtois normalement ?
J-M.A. : Oui, cela arrive, je le fais. Je le fais avec les Russes, avec les Américains – mais là, nous sommes alliés, nous ne sommes pas des ennemis, nous sommes des partenaires. Je le ferai avec les Chinois. Moi, je me sens à l'aise mais pour être à l'aise, il faut avoir les idées claires et il faut que la politique de la France soit claire. Et elle l'est, nous avons une vision, une stratégie, une conception du monde et nous partons dans cette démarche internationale avec nos valeurs, avec ce que nous sommes.
Vous voyez, par exemple, la lutte contre le terrorisme il faut la mener, cette lutte, sur le plan militaire mais aussi sur le plan intérieur avec la police, le renseignement mais aussi lutter contre la déradicalisation . Tout cela nous le faisons. Mais en même temps nous ne voulons pas céder sur ce que nous sommes. Nous ne devons pas céder sur notre mode de vie, sur notre conception de la société et nos valeurs de la France républicaine. Eh bien, cela c'est une vision claire. Elle est respectée partout dans le monde. Tout le monde sait que la France c'est la France et pas n'importe quel pays.
OB : Toute l’arrogance de l’Occident décadent est là..
Y.C. : Imaginez que Sergueï Lavrov dise : « C'est très bien mais est-ce qu'on ne pourrait pas trouver au bout du compte, parce qu'il faut bien qu'on avance sur ce dossier syrien et notamment sur la situation d'Alep, un compromis et pourquoi pas conforter Bachar El Assad pour écraser Daesh ?
Y.C. : Attendez, si le choix c'est entre Daesh et Bachar el Assad, il n'y a pas de choix.
OB : aussi incompétent que Fabius le gars, donc… Ben moi je choisis assez facilement – vu que Daech veut me tuer…
Le choix, il est à la fois de combattre Daesh et les groupes qui en sont proches et en Syrie il y a le groupe Al Nosrah qui a changé de nom qui s'appelle Fatah Al Cham mais qui fait partie de la famille d'Al Qaïda que nous combattons aussi
OB : bon, ok, un tout petit peu moins incompétent que Fabius donc…
et puis Bachar El Assad qui est le responsable de la destruction de son propre peuple
OB : t’as raison, ce ne sont pas les coupeurs de tête qui financent les djihadistes…
et cela fait 5 ans que cela dure. Vous croyez que le choix est entre les deux ? Le choix est contre les deux. Et le choix est aussi de trouver une solution et qui passe par la voix de la négociation après l'arrêt des bombardements, après l'arrêt du conflit, après l'accès humanitaire.
Et ensuite, à Genève, on discute. Mais de quoi discuter : de la future Syrie, c'est-à-dire d'une Syrie qui doit garder son unité qui ne doit pas être déstabilisée dans ses structures étatiques comme ça a été le cas en Irak, parce que c'est très important de conserver un Etat unitaire qui marche, qui doit marcher, qui puisse marcher.
OB : trop facile !
Et en même temps, il faut que cette future Syrie soit protectrice de ses minorités que ce soient les Kurdes, les Chrétiens et qu'elle intègre dans sa gouvernance pas seulement les Alaouites Chiites mais aussi les sunnites qui sont majoritaires dans ce pays et puis en même temps mettre en place des institutions : contrôle de l'armée, contrôle des services et des élections. C'est ça le processus de paix. Et qu'est-ce qui permettra aux réfugiés de revenir, ceux qui sont aux frontières en Turquie, en Jordanie, au Liban, des millions d'entre eux ? J'en ai rencontré, notamment au Liban, qui m'ont dit qu'ils n'aspirent qu'à une chose, c'est rentrer chez eux. Pour qu'ils rentrent chez eux, sinon ils viendront chez nous, il faut que la Syrie puisse se reconstruire.
Et elle se reconstruira, notamment avec l'aide de l'Union Européenne, si tous les préalables politiques que j'ai mentionnés sont mis en œuvre. C'est ça notre politique. Elle est très claire. Ce n'est pas de nous mettre dans un dilemme pour choisir entre Bachar El Assad et Daesh ! Nous sommes les ennemis de Daesh mais nous ne voyons pas l'avenir de la Syrie avec à sa tête un dictateur qui est rejeté. Je rappelle que 10 millions de réfugiés c'est quasiment la moitié des Syriens qui sont à l'extérieur de leur pays.
Y.C. : Vous êtes le Ministre d'un Président qui est en guerre sur plusieurs fronts. Est-ce que c'est une fierté ou est-ce que c'est un poids, Jean-Marc Ayrault ?
OB : violent ce “journaliste” quand même…
J-M.A. : C'est une épreuve d'être en guerre, ce n'est pas se faire plaisir parce que nous sommes contents d'être en guerre. Nous allons là où c'est nécessaire et avec les moyens qui sont les nôtres. Et toujours dans le respect du Droit international. Et avec un objectif qui n'est pas que militaire, qui est un objectif politique. Vous voyez, on a arrêté les djihadistes au Mali mais il est évident que ce qui s'est passé ensuite, c'est les négociations d'un accord de paix à Alger, les Accords d'Alger, qui vise à réformer, notamment au Nord Mali les structures administratives pour permettre une inclusion de tous. Et c'est un accord politique.
Y.C. : Nous avons certainement sauvé le pays des djihadistes à l'époque. Le pays va mal aujourd'hui ; il est en grande difficulté. On les a évoquées dans l'émission à l'instant.
J-M.A. : Je sais. J'ai rencontré le président Keïta l'autre jour à Paris. Cette semaine, je l'ai vu à New-York dans une réunion spécifique au Mali.
J-M.A. : La situation n'est pas réglée.
J-M.A. : Non, il ne faut pas regarder seulement ce qui s'est passé avant. Il faut regarder ce qui est à faire maintenant. Et ce qui est à faire maintenant, c'est aider le Mali, mais pas seulement le Mali, tous les pays de cette région, à la fois à se protéger, parce qu'ils sont menacés par le djihadisme de plusieurs origines, qui s'appelle aussi Boko Aram qui menace le Niger, le Nord Nigéria, toute la région du lac Tchad. Donc il faut à la fois aider ces pays à conquérir l'autonomie en matière de sécurité et de défense donc : moyens, formation. Mais en même temps, il faut les aider à se développer parce que ce sont des pays pauvres et tous ces pays pauvres génèrent aussi de la frustration et sont des terreaux à djihadisme et à propagande. C'est cela qu'il faut faire. Il faut faire les deux.
Y.C. : Un dernier commentaire, qui concerne le Ministre des Affaires Etrangères. J'avais envie de vous dire : nous ne sommes vraiment pas aidés par les autres pays européens sur tous ces combats ? Notamment en Afrique ?
J-M.A. : Non, cela n'est pas vrai. Non, je ne suis pas d'accord avec vous. Moi, je participe régulièrement aux réunions des Ministres des Affaires Etrangères depuis maintenant plusieurs mois et il est rare qu'il y ait une réunion où on ne parle pas de l'Afrique.
Y.C. : Qui se bat au Sahel ? Qui s'est battu au Mali ?
J-M. A. : Mais il n'y a pas que la guerre ! Il y a maintenant une opération de maintien de la paix des Nations Unies, la FISNUA au Mali, la MINUSCA en RCA, République Centrafricaine. Donc, il y a des troupes des Nations Unies qui ont remplacé la France, qui participent. Par exemple moi, j'ai fait un déplacement avec mon homologue allemand au Mali et au Niger. Et puis il y a l'aide au développement et je peux vous dire que l'Europe, la France prend sa part. On va même augmenter l'aide au développement dans le budget 2017. Mais l'Europe a un très gros budget pour l'aide au développement et pour agir aussi sur le plan humanitaire. Lundi je me suis entretenu avec Mme Mogherini, la Haute Représentante, nous avons parlé de l'aide humanitaire pour Alep. Vous voyez, il ne faut pas dire l'Europe… C'est un peu une espèce d'automatisme maintenant : tout va mal en Europe, l'Europe ne fait rien, Non ! On peut faire encore mieux, c'est vrai.
Y.C : On a besoin d'être aidé aussi ? Mais ça peut être d'autres façons ?
J-M.A. : Je vois. Vous avez raison sur un point. C'est vrai que la France a une défense. La Grande Bretagne aussi, même si elle s'est affaiblie, mais il faut faire plus ensemble au niveau de l'Europe. C'est l'une des priorités. Le post Brexit, c'est aussi que l'Europe se projette dans l'avenir pour se protéger. L'Europe doit se protéger à l'intérieur de ses frontières mais aussi être plus ambitieuse en matière de défense et c'est vrai que la France parfois pourrait se dire : « Si on avait un peu plus de soutien et de solidarité, ça pourrait aller mieux ».
[Y.C : Merci, Monsieur Jean-Marc Ayrault. J'ai bien compris que demain vous avez rendez-vous avec votre homologue russe (résumé des propos du Ministre)OB : et je dirais même plus : “Ca va tellement mieux qui si c’était pire…”
(Derniers mots)
J-M.A. : Je lui parlerai franchement et sincèrement.]
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