samedi 3 septembre 2016

Outre-Manche : le grand virage populaire du monde politique

Outre-Manche : le grand virage populaire du monde politique




Un point commun : la redécouverte du peuple

Avec Blair, Clinton, Schroeder, les ultralibéraux espéraient une fin de l'histoire politique, où les alternances démocratiques ne changeraient rien au cap, toujours triomphant, et de plus en plus radical, du laisser-faire et du laisser-passer. Mais les choses se compliquent là même où la grande vague libérale a commencé. Ceux qui ont lancé le débat renient une part grandissante de ce vieil héritage. C'est logique à gauche, mais avec Sanders et Corbyn, c'est une vraie gauche qui semble renaître, préoccupée de justice sociale, qui dénonce tous les excès du libre-échange, pourtant longtemps sanctifié dans leur propre parti. Sanders n'a pas réussi à battre Clinton, mais il est allé au bout des primaires. Et Corbyn semble solidement installé à la tête du parti travailliste, malgré la rébellion d'une majorité des parlementaires.

Point commun à Sanders et Corbyn : l'élite du parti les rejettent très majoritairement, mais ils ont conquis la base par leurs propositions qui rompent avec l'ultralibéralisme, que ce soit sur le salaire minimum, le service public ou le libre-échange. Bref, ce sont par des propositions qui vont dans le sens des intérêts des classes populaires qu'ils se sont imposés. Mais ce qui est intéressant, c'est que dans les pays anglo-saxons, cette évolution touche aussi la droite. Donald Trump peut tenir un discours que Paul Krugman soutient, même s'il faut reconnaître qu'il varie parfois beaucoup sur les sujets économiques, ce qui amène à douter de ce qu'il ferait s'il était élu. Mais plus récemment, c'est Theresa May, premier ministre britannique, qui a apporté une forte inflexion au discours habituel du parti conservateur.

Bien sûr, il faudra voir sur pièce, dans un pays où les Tories ont très fortement augmenté le coût de la fac, rendant les études supérieures difficilement accessibles aux classes populaires. Mais Theresa May tient un discours vraiment différent sur des questions fondamentales. D'abord, elle remet en cause le laisser-faire sur le rachat d'entreprises britanniques par des étrangers. Ensuite, elle a fait de la politique industrielle une de ses premières priorités, tournant le dos à l'héritage de Margaret Thatcher, comme l'a noté Jacques Sapir. Mais elle se démarque également sur l'éducation, en promouvant l'éducation publique d'excellence, les « grammar school », dont est issue une grande partie de son gouvernement, en lieu et place des écoles privées dont venaient une majeure partie des équipes passées.


Ce faisant, on constate une certaine reconnexion populaire des classes politiques anglo-saxonnes, gauche et droite confondus. Le mouvement est récent, mais il est frappant de voir le contraste avec notre pays, où rien ne semble avoir changé depuis trop longtemps. Certes, pour l'instant, ce ne sont que des mots, et beaucoup reste à démontrer, mais au moins, le débat politique change.

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