dimanche 11 septembre 2016

Generali : non à l’assurance Big Brother qui déconstruit la mutualisation

Generali : non à l'assurance Big Brother qui déconstruit la mutualisation

En 2017, Generali proposera, dans le cadre de ses contrats d'assurances complémentaires, un système de « récompense des bons comportements ». Les modalités sont encore un peu floues et l'entreprise présente cette initiative comme une avancée en matière de prévention. Mais en réalité, il s'agit bien d'une initiative détestable, à plusieurs titres.




Orwellisation et individualisme au carré

Ce flicage des consommateurs n'est malheureusement pas nouveau, certaines assurances automobiles le pratiquant déjà à travers des mouchards posés dans la voiture. Le reportage de France 2 sur le sujet évoquait la possibilité, demain, d'utiliser les compteurs de pas des téléphones ou montres connectées comme preuves pour les assureurs ! Il faut dire que la véracité des données déclaratives des assurés est questionable, par-delà la lourdeur administrative et le temps imposé aux assurés pour remplir des bases de données de plus en plus gigantesques et intrusives. Demain, pourquoi pas des puces implantées dans notre corps, comme les mouchards placés dans les voitures, qui pourraient mesurer directement le niveau de sucre, de gras ou d'alcool de ce que nous mangeons et buvons ? Les assureurs pourront alors vendre le côté pratique de ce système, par opposition aux formulaires…

La communication de Generali fait sourire, quand elle ne fait pas froid dans le dos. Bien sûr, l'entreprise communique sur l'aspect quasiment citoyen de sa démarche, par l'incitation à la prévention que cela représenterait. Passons sur l'aspect volontiers insupportable d'un monde où ce sont les entreprises qui dicteraient plus encore nos comportements. Mais quand Generali veut faire passer son initiative comme une simple récompense aux comportements vertueux, la ficelle est un peu grosse. Il est bien évident que si les clients qui s'enrôlent gagnent des avantages financiers, alors, Generali pourra augmenter petit à petit ses cotisations en arguant du fait que ceux qui suivent le programme paieront moins cher. Difficile de ne pas y voir la porte ouverte à une tarification selon l'état de santé, d'autant plus que, comme le rappelle la Tribune, les assureurs cherchent à récupérer les données médicales.

Bien sûr, certains verront dans ces récompenses un juste retour des choses. Après tout, pourquoi ceux qui conduisent de manière prudente devraient-ils payer autant que ceux qui ont une conduite dangereuse ? Les prudents et les vertueux ne paient-ils pas pour ceux qui prennent des risques, qui vivraient un peu au crédit des premiers ? Dans une époque qui valorise un individualisme extrême et où l'égoïsme serait une vertu, cela semble logique. Sauf que, cela suppose une négation de la vie privée, déjà menacée de toute part dans ce monde numérique mal régulé et mal compris. Mais plus encore, cela menace le fondement même de la Sécurité Sociale, où les risques sont mutualisés et où tout le monde cotise de manière relativement indifférenciée, et parfois même en fonction de ses moyens.

Ici, c'est l'inverse même qui semble en marche : les bien portants paieront moins cher et les malades plus cher. Malheur aux malades chroniques ! Ce faisant, cette innovation révèle une forme de négation de la société. Les individus pris séparément priment sur ce qui nous rassemble. Une évolution idéale pour les grandes multinationales qui peuvent alors imposer leurs conditions, et viser la rentabilité pour chaque consommateur, fût-il coûteux comme un individu en mauvaise santé. Tant pis, il sera contraint de payer. Derrière cette sinistre innovation, il y a bien une forme de déconstruction de nos sociétés, chaque citoyen devenant un consommateur isolé et bien faible face à ces intérêts que trop souvent nos politiques laissent avancer sans même sembler comprendre les enjeux de ce qu'ils font.


Pour des questions de liberté individuelle, constamment menacée par ces intérêts trop heureux de nous fliquer en permanence pour leur plus grand profit marchand, mais aussi pour des questions de protection des mécanismes de solidarité de nos sociétés, où les bien portant aident les malades, et les actifs aident les retraites et les chômeurs, ces mécanismes ne sont pas acceptables.

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