Porochenko veut assimiler le "Secteur droit" aux terroristes |
Attention BHL, troisième “Maidan” en formation accélérée...
Comme on dit, “tous les clignotants sont au rouge”. Après des mois et des mois de rapports chaotiques, d'annonces de tensions, de dilution de ces mêmes tensions, il semblerait qu’il s’agisse cette fois de la marche décisive vers un affrontement entre Pravy Sektor (ou disons la nébuleuse Pravy Sektor, avec divers groupements activistes, armés, etc., de l’extrême-droite ukrainienne) et le pouvoir plus ou moins oligarchique constitué de Porochenko et de l’alentour de Porochenko. Bien entendu, ce développement en cours n’a lieu, – sans savoir encore s’il se concrétisera décisivement, – que parce que la situation générale en Ukraine est une sorte de modèle en voie de constitution vers la perfection de la catastrophe qu’engendrent régulièrement depuis déjà quelques années les interventions du bloc BAO, celles de la “deuxième vague” d’après la période catastrophique Irak-Afghanistan, à partir de 2009-2010 ; peut-être irait-on, si Pravy Sektor de son côté va jusqu’au bout et réussit son coup, vers une situation qui combinerait tous les traits catastrophiques de la Libye et de la Syrie, faisant alors de l’Ukraine un cas unique, et alors l’Ukraine deviendrait sans aucun doute l’étalon universel, la référence incontournable, le standard magnifique, – toujours, bien sûr, de la susdite catastrophe répétitive engendrée par le bloc BAO.
Les agitations de Pravy Sektor repoussé dans l’Ouest du pays, où il prospère semble-t-il, font ainsi réaliser que la situation à l’Ouest de l’Ukraine, vaut bien en bordel infâme et peut-être supérieure en perspectives, celle de l’Est qui a eu toute notre attention pendant plus d’un an. Voici une interview par RT, le 21 juillet 2015, du journaliste Neil Clark, qui donne une description succincte mais qui semble restituer la vérité de la situation en Ukraine, à l’heure de ces agitations de Pravy Sektor. On y retrouve tout l’arsenal du désordre type-BAO, une sorte de recette exclusive, comme un trésor précieux que détiendrait notre étrange contre-civilisation, jusqu’aux perspectives de formation d’une sorte de clone européen du Daeshoriginel dans le chef de Pravy Sektor (“Secteur Droite”), – autres motifs apparents, autres circonstances, autres pseudo-doctrines et pseudo-idéologies, mais même mouvement crisique tourbillonnant (“tourbillon crisique”), mêmes effets déstructurants, mêmes enchaînements catastrophique, mêmes responsabilités croisées des manipulateurs divers, mêmes effets dissolvants, etc.
RT : «Que pouvez-vous dire des manifestations du Secteur Droite que nous constatons en ce moment ?»
Neil Clark : «C’était assez prévisible. Au cours des dernières semaines nous avons beaucoup parlé des manifestations grecques, mais la situation en Ukraine est bien pire qu’en Grèce, le niveau de dette, l’économie et le chômage. Les choses ont empiré depuis la chute du régime du président Viktor Ianoukovitch. Ainsi, ce n’est pas surprenant que les gens soient mécontents.
RT : «Croyez-vous que cela peut représenter un problème potentiel pour le président Petro Porochenko?»
Neil Clark : «Oui, c’est sûr. Parce que les gens vont commencer à réfléchir sur ceux qui sont responsables du coup d’Etat précédent, il s’agit des Etats-Unis et de l’UE, et l’objectif initial était de renverser le gouvernement [Ianoukovitch] afin d’installer un pouvoir pro-occidental. Mais en fait la situation sur le terrain en Ukraine, et je parle en particulier de l’Ouest de l’Ukraine est un désastre. Nous avons beaucoup entendu à propos de ce qui se passe dans l’Est, mais dans l’Ouest [ce n’est pas mieux,] le niveau de vie a chuté dramatiquement, les salaires ne sont pas toujours versés. Et cela peut bien sur empirer puisque les ukrainiens ordinaires se posent la question de savoir “ce qui se passe, nous sommes dans une situation pire que la précédente”.
»Et quant à Secteur Droite, ce sont les troupes de choc qui ont contribué au changement de régime, sans ce groupe ultra-nationaliste le coup d’Etat ne se serait pas produit. Et maintenant Petro Porochenko se retrouve à lutter contre les gens qui l’ont en fait amené au pouvoir. Alors je crois que tout cela va apporter plus de chaos encore.
RT : «Les activistes de ce groupe sont considérés comme extrémistes, pensez-vous, qu’ils puissent recevoir le soutien du public à travers le pays ?»
Neil Clark : «Oui, c’est absolument possible, puisque comme je l’ai dit, la situation économique est extrêmement grave, on peut alors comprendre pourquoi les gens se tournent vers les extrêmes. Je pense que Secteur Droite est effroyable, mais qui a amené le pays dans ce chaos ? Il y a des gens qui tirent les ficelles derrière, des Américains comme Victoria Nuland, et les grands décideurs de l’UE, ceux qui ont décidé d’être prêts à utiliser l’extrême droite comme d’un mécanisme pour renverser le gouvernement précédent. Et cela ressemble à ce qui se passe au Moyen-Orient bien sûr. Nous pouvons voir des pouvoirs occidentaux qui facilitent au moins la croissance de groupes comme Daesh, afin d’obtenir un changement de régime en Syrie. Et maintenant on fait face au grave problème que constitue l’Etat islamique. Et la même chose a lieu en Ukraine en quelque sorte. Des groupes extrémistes, dans ce cas-là, des néonazis soutenus par l’Occident, qui posent maintenant un problème au gouvernement de Porochenko.»
RT : «Petro Porochenko a promis de débarrasser l’Ukraine des éléments radicaux, pourquoi pensez-vous qu’il a échoué dans cette mission pour le moment ?»
Neil Clark : «Je crois que c’est parce qu’ils sont trop puissants. S’il fallait utiliser la violence et les emprisonner, cela provoquerait encore plus de mécontentement en Ukraine. Ils expriment fortement leurs opinions et mobilisent l’opinion dans leur sens. Ainsi Porochenko se trouve dans une situation difficile pour l’instant. La situation a terriblement empiré dans le pays et personne ne soutient plus vraiment le gouvernement, qui se trouve dans une position de faiblesse d’où il lui est fort difficile de se dégager. Seule une amélioration de l’économie pourrait le sauver, mais c’est tout le contraire qui se produit en ce moment.»
Au lendemain du coup d’État de février 2014 patronné glorieusement par les USA et réalisé notamment mais pour une part essentielle par Pravy Sektor, on constatait la puissance dudit Pravy Sektor mais pour aussitôt suggérer que cela ne durerait pas, que le sale boulot accompli, on se débarrasserait des hommes de main à la réputation douteuse. C’était dans tous les cas l’analyse-Système de tous les experts qui vont bien, y compris des stars de l’expertise impérative comme un Friedman de Stratfor, – sur lequel on reviendra. Aujourd’hui, les “idiots utiles” sont toujours là, et dans des dispositions d’esprit notablement revendicatrices, avec les moyens qui faut et une bonne implantation semble-t-il, réclamant “la révolution” qui n’a pas été faite après le “coup du Maidan” de février 2014, un peu comme Lénine face à Kerenski, – et alors, Porochenko serait-il le Kerenski postmoderne de l’Ukraine postcommuniste ?
«Pour nous, la vérité ultime est que la révolution à Maidan n'a pas été terminée et que les évènements de Moukatchevo[du 11 juillet] révèlent l'inachèvement des processus révolutionnaires, écrivait hier matin, sur la page Facebook de Pravy Sektor, Dimitri Iaroch, leader du groupe. Nous rassemblons un Vétché pour donner des repères aux gens afin de continuer à entreprendre des changements révolutionnaires cohérents dans le pays. Cela concerne la souveraineté du peuple, la légitimation de l'activité des volontaires, le soutien aux mouvements bénévoles, la réforme dans tous les domaines. L'ancienne-nouvelle équipe, actuellement au pouvoir, est incapable de mener des réformes sociales, y compris sur l'activité du président, du gouvernement et du parlement»
Finalement le Vétché (Assemblée Populaire) n’a pas eu lieu et a été remplacé hier soir par un “congrès à huis-clos” de la direction de Pravy Sektor, d’où il est ressorti que l’organisation refusait de participer aux élections locales légales, mais qu’elle proposait, fort démocratiquement hein, l’organisation d’un référendum «concernant les questions du moment, telles que la méfiance vis-à-vis de toutes les branches du pouvoir – le peuple doit exprimer son opinion à l'égard de ce qui se passe dans le pays...» (en fait, référendum sur la destitution du président Porochenko) ; référendum que Pravy Sektor organisera de son côté en créant sa propre commission électorale si le gouvernement n’obtempère pas. Cela est assorti de la part de Iaroch d’assurance que Pravy Sektor n’a nullement l’intention «de déstabiliser la situation ni de prendre des mesures destructrices», ce qui montre que Pravy Sektor a le sens des nuances démocratiques... Quoi qu’il en soit, le processus ressemble bien à un déplacement important, ou dans tous les cas une tentative d’un déplacement important du centre effectif du pouvoir vers Pravy Sektor, ce qui a conduit Alexei Pouchkov, important député russe proche de Poutine et président de la commission des affaires étrangères de la Douma à “tweeter” (voir ce 22 juillet 2015) qu’“un nouveau Maidan est en train de se dérouler sous nos yeux...” («There is a new Maidan “revolution” now in the making in Ukraine, the head of the State Duma’s foreign affairs committee warned on Tuesday. “They are plotting a new ‘revolution’ in Kiev and Dmytro Yarosh is ready to give his fellow Ukrainians a set of new guidelines for revolutionary changes in the country,” Alexei Pushkov wrote on his Twitter account.»)
Ce “nouveau Maidan“ serait finalement le troisième du nom... Il y a un très intéressant article de Nicolai N. Petro, surRussia Direct, repris par Russia Insider le 22 juillet 2015, qui annonce effectivement que “la situation n’a jamais été aussi propice pour qui veut réaliser un coup de force en Ukraine”, alors que le statut et la popularité du gouvernement “n’ont jamais été aussi bas”, et que “les services de sécurité sont en complet état de désorganisation”. L’article, assez détaillé, revient sur les circonstances de la séquence novembre 2013-février 2014, pour mettre en évidence qu’il y a bien eu “deux Maidan” (deux poussées déstabilisatrices et soi-disant “révolutionnaires”), la première en décembre 2013, de la part des milieux citadins, assez démocrates et pro-européen, et la seconde en février 2014, de la part des ultranationalistes venus de l’Ouest, – tout cela, avec soutien assuré du bloc BAO. Cette interprétation plus sociologique et plus analytique, se référant à des travaux effectivement sociologiques, tend d’une façon très intéressante à minorer l’effet du rôle extérieur (essentiellement celui des USA dans ce cas) dans la réalisation effective du second Maidan, et ainsi les USA auraient agi d’une façon très visible, grossière et impétueuse mais finalement aveugle comme couramment ces derniers temps, et plutôt étant manipulés que manipulateurs, – cela renvoyant au fameux paradoxe de notre temps où les “marionnettes” manipulées deviennent finalement les manipulatrices de leurs manipulateurs ... Voir par exemple le 24 mai 2014 et cette remarque de Immanuel Wallerstein :
«Most analysts of the current strife tend to assume that the strings are still being pulled by Establishment elites... [...]This seems to me a fantastic misreading of the realities of our current situation, which is one of extended chaos as a result of the structural crisis of our modern world-system. I do not think that the elites are any longer succeeding in manipulating their low-level followers... [...] I think however that step one is to cease attributing what is happening to the evil machinations of some Establishment elites. They are no longer in control...»
Ainsi toute l’analyse d’un Friedman par exemple, lorsqu’il expose le rôle majeur des USA dans le “coup” de février 2014 (voir le 21 janvier 2015 : «La Russie définit l’événement qui a eu lieu au début de cette année [en février 2014] comme un coup d’Etat organisé par les USA. Et en vérité, ce fut le coup [d’État] le plus flagrant dans l’histoire.»), toute cette analyse est juste avec le soutien massif des USA, financier, logistique, de communication, voir paramilitaire, et avec les groupes de Pravy Sektor agissant d’une façon décisive ; Friedman-le-stratège a raison dans la description tactique sauf que, sur le fond, sur le résultat stratégique, il n’a rien compris du tout parce que c’est exactement l’inverse qui se dessine ... A la lumière des évènements actuels, on peut commence à admettre qu’objectivement, c’est Pravy Sektor qui s’est servi de la puissance des USA pour assurer et verrouiller le coup d’État de février 2014 et peu à peu maîtriser les évènements qui ont suivi, et nullement le contraire...
Par conséquent, si Pravy Sektor continue son avance à la fois très ferme et subreptice, enserrant peu à peu le gouvernement, mettant en place des structures parallèles, etc., on assiste pour la signification fondamentale, – les circonstances étant très différentes, on l’a déjà vu, mais ce n’est que tactique, – au développement de la dynamique de création d’une sorte de second Daesh, notamment selon l’enchaînement de la création originelle du fait de l’action lourde et aveugle des USA avec l’UE à ses côtés, et le verrouillage progressif, à l’avantage de Pravy Sektor, des prérogatives qui ont été données à cette organisation sur le terrain, jusqu’à la perspective de la création d’une sorte d’entité type-Daesh... Le déroulement, tel qu’on le voit se dessiner dans sa possibilité la plus remarquable, s’avère simplement époustouflant pour donner la mesure de la politique du bloc BAO et des USA et sa formidable tendance à sans cesse répéter les mêmes catastrophiques erreurs, sans y rien comprendre, en ne cessant jamais de s’en féliciter pompeusement et bruyamment.
Un tel enchaînement dans l’aveuglement constitue une sorte de joyau de l'esprit, et la reconnaissance que, sans aucun doute, la puissance générale qui nous domine et dont tant d’experts reconnaissent en la louant ou en la dénonçant l’hégémonie, est véritablement capable d’accoucher d’une façon régulière de montagnes de stupidité qui tiennent quasiment du miracle. On ignore si Pravy Sektor va réussir son coup mais on sait déjà que le bloc BAO a réussi à développer une nouvelle fois une débâcle quasiment parfaite de sa propre politique. Il est vrai qu’il lui sera beaucoup pardonné, au bloc, parce qu’il n’est après tout que l’outil opérationnalisant la politique-Système qui lui est imposée, évidemment, par le Système ; le manipulateur finalement manipulé de tous les côtés possibles, et content de lui au bout du compte...
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