vendredi 4 avril 2014

La finance aujourd'hui comme à la veille de l’éclatement de la crise de 2008



"Non, non, rien n´a changé Tout, tout, a continué Hé! Hé! Hé! Hé!"


Les gouvernements n’ont pas fait leurs devoirs!


Le pouvoir qu'un gouvernement seul possède est de contourner la bourse pour ne pas se livrer pied et poings lié aux spéculateurs. Le Japon le fait en vendant principalement ses obligations directement à ses citoyens. Agir ainsi permettrait de limiter les dégâts et mettrait à l’abri du chantage pour un gouvernement qui voudrait réglementer au moins minimalement son système financier national. Ceci tant que les grandes organisations internationales n'auront pas réussit à s'entendre vers un retour à une réglementation adéquate.

Il y a effectivement de quoi paniquer. Le bon peuple qui se lève chaque matin pour aller gagner honnêtement sa vie, a dû en 2008, avec la complicité des gouvernements, verser des centaines de milliards d’aide sociale à la bande de truands qui ont spéculé sur des valeurs sans garanties suffisantes.

La planète financière tourne aujourd’hui comme elle tournait à la veille de l’éclatement de la crise de 2008,
soit autour d’une masse de plaies laissant présager des lendemains chaotiques. Et ce, parce qu’en matière de réglementation, les gouvernements se sont montrés paresseux. C’est le moins que l’on puisse dire.

Le retour des plaies, par Serge Truffat


Il y a peu a été publié un rapport sur les produits dérivés qui donne froid, le plus sibérien des froids, dans le dos. C’est bien simple, selon les calculs de la firme AlphaValue, la somme des produits en question totalisait 693 000 milliards de dollars au terme du premier semestre 2013, contre 684 000 milliards lors de la période correspondante en 2008. Le montant actuel a ceci d’effrayant qu’il égale dix fois le PIB mondial. Quand on songe, ainsi que ne cesse de la marteler Warren Buffett, qu’on ne peut accuser de dérive gauchiste, que « les produits dérivés sont une arme de destruction massive »…

Pour bien mesurer la profondeur comme l’ampleur de l’épreuve économique à l’horizon du moyen terme, AlphaValue estime que l’inventaire des produits, dont les toxiques, que détient Crédit Suisse sont de 86 fois le PIB de la Suisse, suivi d’UBS avec 65 fois, Barclays avec 26 fois le PIB britannique et BNP Paribas avec 24 fois le PIB français. La première banque américaine, il s’agit de JP Morgan, est à la 13e position avec 4 fois le PIB américain. Il va sans dire que le risque systémique suinte toujours dans les murs des établissements financiers.

L’énormité des vices socio-économiques que cela suppose est à mettre sur le compte de bien des gouvernements. On s’explique. Dans la foulée de l’implosion constatée en 2008, une liste des 25 établissements qualifiés de too big to fail (trop gros pour faire faillite) a été établie. Des années plus tard, cette liste reste plus ou moins ce qu’elle était. Qu’on y pense : on compose la liste des banques que les États ne peuvent pas laisser tomber et trois ans plus tard, on observe qu’à part des changements dans le classement, on compte toujours autant de sociétés. On voudrait illustrer l’insouciance criminelle des États en matière de gestion du risque qu’il suffirait de brandir cette liste. Ce n’est pas tout.

On se souviendra que les banques refusant de se prêter entre elles au lendemain de la faillite de Lehman Brothers en 2008, les banques centrales ont pris le relais, la Réserve fédérale américaine (FED) au premier chef. De fait, des milliards et des milliards ont été injectés dans le circuit afin de maintenir les bas taux d’intérêt. Cette politique a eu pour effet pervers de favoriser un essor du prix des actions ainsi que des valeurs immobilières à un rythme qu’il faut bien qualifier d’alarmant. Ce faisant, bien des compagnies américaines œuvrant dans les secteurs concernés sont plus endettées qu’à la veille du fiasco financier de 2008.

Il se pourrait fort bien que le contexte qui prévaut aujourd’hui soit attribuable à un mauvais diagnostic macroéconomique. En effet, ici et là, des chercheurs avancent que les banquiers centraux ont donné préséance à un certain laisser-aller en faisant le pari qu’une fois le retour à la normale, il faudrait combattre en priorité les poussées inflationnistes qui en découleraient. Qu’il faudrait s’attaquer à l’assurance-chômage, sabrer les budgets des États… Bref, on a employé les vieilles recettes avec comme résultat que l’ombre de la… déflation est à notre porte. Bravo !

On a tellement décloisonné, tellement déréglementé que nous voici gouvernés par des gens habités par l’impuissance et par l’ignorance face à des véhicules financiers d’une complexité extrême. En fait, nos élus ont tellement accordé de pouvoirs à des non-élus que ces derniers mettent à profit la logique des droits, les leurs, aux dépens de celle des devoirs à notre égard.

Economie : Le retour des plaies, par Serge Truffat

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