C’est une révolte, sire ?
Non, c'est une contre-révolution …
À force de démoraliser sa base et de s'aliéner ses opposants, le pouvoir vacille et la rue se charge d'un flot tumultueux de mécontentements polymorphes. Tout est désormais prétexte à tirer sur un gouvernement qui cristallise toute l'impuissance à modifier le réel. Faute de pouvoir agir sur une économie en capilotade, notre pauvre président agite des réformettes sociales qui non seulement, sont fort mal amenées mais qui ont, de plus, le don d'ulcérer la frange la plus réactionnaire du pays.
Voilà ce qu'il en coûte de proclamer pour maintenant un changement qu'on renvoie indéfiniment aux calendes grecques. Se faire élire par des voix de gauche pour se proclamer ensuite social-démocrate et appliquer une politique de droite sans conviction, c'est se mettre à dos toutes les composantes de la population. Ce n'était d'ailleurs pas suffisant et l'homme a réussi le tour de force de réveiller la vieille calotte tout en ouvrant les portes aux forces du mal.
Le capitaine du pédalo à trois roues symbolise toute l'impuissance d'un pouvoir qui a cessé de nous amuser. Les pirouettes du cirque ne peuvent sauver la faillite colossale de cette présidence qui ne devait son existence qu'au seul rejet d'un prédécesseur odieux qui va bientôt finir par espérer être rappelé comme un sauveur incontournable. C'est le premier miracle de ce triste sire que d'avoir ressuscité le véritable chanoine de Latran.
Le second miracle est d'avoir définitivement démontré l'inanité du pouvoir et l'iniquité structurelle de cette société. C'est maintenant clair pour tous les citoyens : il n'y a plus rien à faire pour échapper à la décadence et à la récession. La France va faire une entrée fracassante dans les nations en faillite ; merci le Parti socialiste et l'UMP. ! Tandis que les citoyens sont assommés d'impôts et de taxes, chacun sait que les grandes entreprises échappent à la fiscalité et que les paradis fiscaux ne se sont jamais portés aussi bien.
Pour souffler sur les braises, la gauche bourgeoise a sorti de son chapeau des réformes qui n'avaient d'autre objet que de déplacer le problème. Puisqu'il était impuissant à changer l'économie, ce brave gouvernement voulut transformer la surface des choses à l'aide de quelques réformettes d'opérette sans réelles conséquences.
Et c'est là que les déçus du camp d'en face se sont soulevés, ulcérés qu'ils étaient de constater que non seulement le pays continuait d'aller dans le mur où nous avaient guidés leurs favoris, mais que de surcroît, le nouveau pouvoir remettait en cause les valeurs ancestrales qui avaient structuré cette société patriarcale.
Ils ont porté le bonnet rouge, la calotte et la croix, le drapeau et la famille pour déplacer un désespoir qui n'est pas que de leur seul fait. La rue n'en peut plus, tout est prétexte à mouvements irrationnels, à rumeurs folles, à phantasmes délirants. Ce n'est plus la raison qui agite ces foules revanchardes et sincères, c'est la passion la plus exacerbée, la colère la plus exaspérée.
Ces manifestants sont issus de toutes les chapelles et de tous clans. Ils défendent la famille, Dieudonné, leur emploi, leurs entreprises, leurs valeurs, sans logique ni mouvement fédérateur car ils sont divers et sans doute impossibles à fédérer. Ils ont pourtant bien des points communs : le rejet d'une République qui n'est plus qu'une enveloppe vide, la colère face à un système qui ne donne pas la primauté au travail et à l'individu, le besoin de retrouver un vivre ensemble dans ce pays.
Alors, oui, ce n'est pas une simple révolte, c'est une contre-révolution parce qu'elle conduira inévitablement cette nation dans les bras de la frange la plus extrémiste de ces soubresauts irréfrénables, faute de trouver en dehors des partis, condamnés définitivement par leurs échecs passés, un nouveau dessein national.
La raison voudrait qu'il y ait immédiatement la dissolution de l'UMP et du PS, la convocation de nouveaux états généraux, issus vraiment du pays réel, pour échapper à la tentation de plus en plus légitime hélas, et parfaitement inévitable désormais de l'aventure « FN ». Comment obtenir un tel sacrifice de la part de ceux qui ne sont en place que pour leur seul confort, leurs petits intérêts mesquins ? Nos élites préfèrent risquer le pire plutôt que de cesser d'en croquer. Nous allons payer douloureusement cet incroyable aveuglement d'une classe aux abois dans un pays qu'on étrangle.
Révolutionnairement vôtre.
source : C’est une révolte, sire ?
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