lundi 30 juillet 2012
Pacte budgétaire : François Hollande met le cap à droite
En honorant le Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance de l'Union économique et monétaire (TSCG), François Hollande s'engage dans une réforme budgétaire bien plus stricte que celle qui était proposée par Nicolas Sarkozy en juillet 2011 qui a été vivement rejetée par le Parti Socialiste.
La rose des vents n'aura jamais si bien porté son nom...
Saisi par le Président de la République le 13 juillet dernier, le Conseil Constitutionnel rendra vraisemblablement sa décision à la mi-aout.
Si le Traité n'oblige pas l'inscription de la règle d'or dans une disposition constitutionnelle spécifique, il est cependant fort probable qu'une réforme de la Constitution soit cependant requise.
Pour comprendre cela, il faut analyser séparément:
- si le Traité touche à l'exercice de la souveraineté nationale
- dans quel texte la règle d'or peut être valablement inscrite.
La règle d'or fera vraisemblablement l'objet d'une loi organique
François Hollande l'a indiqué à plusieurs reprises: il ne souhaite pas l'inscription de la règle d'or dans le corps de la Constitution et lui préfère une « simple » loi organique.
C'est là sans doute que se situe le dernier rempart contre une déconvenue publique.
Explication:
La réforme proposée en 2011 par Nicolas Sarkozy visait à remplacer les actuelles lois de programmation (créées en 2008) par des lois-cadres et à inscrire dans ces dernières la règle d'or budgétaire.
Les lois de programmation étant inscrites dans la Constitution (à l'article 34, et ce afin de contraindre les lois de finances), la modification proposée par l'ancien Président nécessitait une réforme constitutionnelle et ainsi, la réunion du Congrès.
A l'époque, la presse et les partis d'opposition critiquaient ce qu'ils présentaient comme une « règle d'or constitutionnelle » alors que l'équilibre budgétaire devait uniquement être inscrit dans une simple loi pluriannuelle (la loi-cadre).
En s'opposant aujourd'hui à une inscription de la règle d'or dans le marbre de la Constitution, François Hollande sauve un simulacre de cohérence du Parti socialiste.
En réalité, il propose une réforme bien plus stricte que celle pronée l'an dernier par l'UMP. Les lois organiques sont en effet juridiquement plus contraignantes que les lois de programmation.
Aussi, le Président s'est engagé lors de sa campagne à faire voter dès l'été une nouvelle loi de programmation des finances publiques, alors même qu'il s'était opposé à la création de ces dernières lors de la réforme de 2008.
Ainsi, comme en 2011, la bataille des mots continue. L'UMP fait semblant de s'attacher à un niveau constitutionnel qu'ils n'ont jamais proposé. Le PS fait semblant de s'y opposer vertement.
Une bataille des mots dont le seul objectif est de masquer un consens des deux partis majoritaires en matière d'assainissement des finances publiques.
Continuons donc à nous achopper sur le niveau juridique pertinent, personne ne pensera à indiquer que nous sommes d'accord sur le fond...
Un élément pourrait cependant venir rapidement contrarier cette fausse discorde entre la majorité et son opposition.
Une réforme constitutionnelle nécessaire ?
En matière budgétaire, il n'existe actuellement qu'une seule loi organique: la loi organique relative aux lois de finances (LOLF).
Il reste donc à connaître le souhait du gouvernement qui devra choisir entre inscrire la règle d'or dans l'actuelle LOLF ou dans une loi organique d'un nouveau cru.
Dans les deux cas, le Conseil constitutionnel sera saisi pour vérifier la conformité de la rédaction avec la Constitution.
Il est fort probable que le gouvernement se dirige vers la première option car la création d'une nouvelle loi organique nécessiterait une réforme de la Constitution (pour l'y inscrire) et donc la réunion du Parlement en Congrès. Or le Parti socialiste ne détient pas à lui seul la majorité des 3/5ème des sièges requise et serait donc contrait de compter sur les voix des parlementaires UMP.
Par conséquent, seule la modification de la loi organique existante (la LOLF) permettrait de se passer des voix de l'UMP.
Cependant, et c'est sur ce point que la décision du Conseil Constitutionnel est particulièrement attendue, il reste à savoir si la ratification même du Pacte budgétaire nécessitera une réforme de la Constitution.
En effet, si nous sommes relativement libres de choisir le support sur lequel inscrire la règle d'or (le TSCG prescrit seulement un texte « contraignant » et « permanent »), le Pacte est en revanche bien plus précis sur les dispositions qui devront composer cette dernière:
- déficit structurel limité à 0,5% du PIB
- mécanisme de correction automatique en cas de déséquilibre.
Le Conseil Constitutionnel pourrait fort bien considérer que le Pacte budgétaire « porte atteinte aux conditions essentielles de la souveraineté nationale ». C'est en tout cas l'opinion de Jean-Jacques Urvoas, député et président de la Commission des lois, qui pense qu'une réforme préalable de la Constitution sera nécessaire à la ratification du Traité – et ce, au même titre que le Traité de Lisbonne.
Il est urgent de connaître l'avis du Conseil Constitutionnel sur les dispositions du pacte budgétaire car la plupart de ses dispositions sont déjà ou vont être bientôt inscrites dans le droit européen (via règlement ou directive).
La décision du Conseil Constitutionnel offrira aux français un éclairage particulier sur les réformes actuellement entreprises à Bruxelles, loin des Parlements nationaux.
En effet, si les Sages considèrent que réduire le déficit structurel à 0,5% du PIB « porte atteinte aux conditions essentielles de la souveraineté nationale », que dire alors du Semestre européen, de la surveillance des déséquilibre macroéconomique, de la mise en place de la majorité inversée, de la transmission des projet de loi de finances à la Commission, etc. ?
contrelacour.fr
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