lundi 11 juillet 2016

Non aux nouveaux kiosques parisiens !

Non aux nouveaux kiosques parisiens !




La modernité comme plus petit dénominateur commun

Qu'a-t-il donc pu passer par la tête des édiles parisiens, dépositaires de toutes les merveilles de notre ville lumière, reconnue dans le monde entier, pour faire un tel choix ? Il y a quarante ans, quand le précédent remplacement des kiosques à journaux avait eu lieu, il avait été décidé de reprendre le dessin original des kiosquespour perpétuer cet élément de l'identité de Paris. L'équipe actuellement en charge de Paris a fait un tout autre choix en présentant un premier projet, certes plus moderne, mais qui rompt avec la plupart des éléments du dessin haussmannien de l'architecte de Gabriel Davioud, sans la petite frise ou le dôme sur le toit. Devant les protestations, Anne Hidalgo a souligné qu'elle ne connait pas le nouveau look des kiosques et que « ce qui a été présenté n'est qu'une esquisse ».

Mais, devant la demande d'avoir un modèle haussmannien au catalogue, la maire de Paris n'a pas semblée très enthousiaste : « le plagiat haussmannien, moi, je n'aime pas ». Passons sur le fait qu'elle place son goût personnel comme le juge étalon en la matière, comme si elle était la souveraine capricieuse de notre capitale. Et il est absolument ridicule de parler de « plagiat », la continuité et le respect des codes faisant tout de même partie du travail de base des élus locaux qui doivent faire respecter le territoire dont ils ont la charge. Décidémment, une certaine gauche (comme une partie de la droite) n'a vraiment aucun sens des traditions et du respect des identités, semblant complètement soumise à un culte de la modernité, même quand il est aussi fade et sans personnalité que dans ce cas.


Voilà pourquoi il est capital de se mobiliser pour faire reculer la mairie de Paris et défendre ce petit morceau de notre patrimoine qu'on veut nous arracher pour des boîtes de conserve que l'on pourrait trouver partout dans le monde. Une pétition a déjà recueillie plus de quarante mille signatures, dont la mienne. N'hésitez pas à faire part de votre opposition à la première esquisse proposée et votre attachement aux kiosques de l'époque haussmannienne. Bien sûr, ce n'est qu'une petite bataille, mais par tout ce qu'elle représente, elle vaut le coup d'être menée. Si les nouvelles technologies peuvent parfois être le véhicule de barbares, elles peuvent également le moyen de nous rassembler et faire pression sur les décisions ubuesques de nos dirigeants, comme dans le cas des nouveaux kiosques de Paris.

Après le nouveau 49.3 la résistance continue pendant l’été et s’accentuera à la rentrée #loitravail

Après le nouveau 49.3 la résistance continue pendant l'été et s'accentuera à la rentrée #loitravail

Certes, c’est les vacances, mais je pense qu’il faut garder certains faits bien présents à notre esprit. La dictature s’impose petit à petit dans notre pays (non, non le mot n'est pas trop fort). En fait, cela fait plusieurs années (voir dizaines d’années ?), qu’elle est larvée en notre sein. Plus précisément depuis les débuts de la construction européenne. Mais avant, tel un cheval de Troie, elle ne montrait pas réellement son visage ou n’appliquait pas les textes qui étaient votés, histoire de ne pas se faire démasquer (eh oui, au risque de vous décevoir tout ceci est prémédité et finement calculé...). Maintenant elle est là, et montre son vrai visage, et nous avons la bête immonde en face de nous. Aussi, profitez bien de ces vacances pour en discuter entre vous, définir ce que vous voulez, et ce que vous ne voulez pas, et élaborer un plan d’action pour la rentrée. Comme on vous l’a rappelé récemment, ce n’est pas parce qu’une chose est « légale » qu’elle est légitime

Amicalement,

f.


Nicolas Doze - Les Experts - Charles Gave... par folamour_dailymotion

Après le nouveau 49.3 de Valls-MEDEF, contre la régression sociale, la fascisation et l’euro-dissolution de la Nation, la résistance continue pendant l’été et s’accentuera encore à la rentrée !

UNE DÉCLARATION DU PRCF – 6 juillet 2016

En fliquant et en encageant à nouveau la manifestation parisienne (Philippe Martinez fouillé au corps par la police !), en utilisant le 49.3 au moment même où des milliers de gens clamaient leur colère contre la loi scélérate, Valls et Hollande veulent de nouveau humilier et provoquer le mouvement populaire. Par leur attitude de plus en plus social-fascisante, par leur mépris total des députés PS qui suppliaient le pouvoir de sauver les apparences en acceptant quelques ultimes amendements cosmétiques, les apprentis-dictateurs de l’exécutif montrent qu’ils sont prêts à tout pour faire passer en force la déréglementation du travail commanditée par le MEDEF et l’UE.

Plus que jamais, l’euro-désintégration de la France et des acquis sociaux du CNR dans l’acide de la « construction » euro-atlantique (euro, UE, « TAFTA », OTAN…) s’accompagne d’une fascisation de la démocratie bourgeoise. Cette marche à la fascisation, à la dictature sans frein de l’exécutif et à l’Etat policier est applaudie par la droite – qui ne déposera pas de motion de censure (les LR préfèrent faire cause commune avec Valls qu’avec la CGT que certains d’entre eux rêvent d’interdire ! La réaction LR prend appui sur l’offensive liberticide et antisociale du PS pour préparer un gouvernement anti-ouvrier de choc qui gouvernerait par ordonnances, le FN jouant dès aujourd’hui le rôle d’aiguillon pour cette fuite en avant ultraréactionnaire dont l’arrière-plan est la chasse aux sorcières en Europe de l’Est et la banalisation des nostalgiques du fascisme dans nombre d’Etats de l’UE.

Mais l’autre aspect des choses est bien plus réjouissant pour l’avenir des idéaux progressistes. En effet, à l’occasion de l’affrontement de classes en cours, des millions d’ouvriers, de jeunes, de progressistes réapprennent, la rage au cœur, les fondamentaux du combat de classe anticapitaliste, antifasciste et anti-impérialiste. Malgré les tentatives de certains éléments réformistes de l’UGICT-CGT pour la torpiller du dedans, la CGT mène un dur combat qui peut refaire d’elle la grande confédération des travailleurs qu’elle était avant d’adopter la stratégie réformiste perdante du « syndicalisme rassemblé » avec la CFDT. Pour redevenir pleinement ce qu’elle n’aurait jamais dû cesser d’être, la CGT doit aller avec confiance, et jusqu’au bout de sa fière démarche combative actuelle, en rompant à 100% avec la CFDT jaune, avec la CES à la botte de Bruxelles, et en renouant avec le combat de classe prôné notamment par la Fédération Syndicale Mondiale.

Les apprentis-dictateurs affaiblis et méprisés de Matignon et de l’Elysée se leurrent s’ils s’imaginent faire taire la classe ouvrière et la jeunesse populaire. La classe ouvrière (transports, énergie, raffinerie…) a repris sa place naturelle de chef de file de la contestation anticapitaliste. Dans des centaines d’entreprises la classe ouvrière et le monde du travail ont fièrement relevé la tête, et à la rentrée, voire pendant l’été, la lutte reprendra de plus belle pour l’emploi, les salaires, la protection sociale, les services publics, les libertés syndicales et démocratiques, la libération des camarades injustement réprimés.

Quant aux militants du PRCF et des JRCF, ils continueront à faire leur travail politique d’avant-garde en montrant les liens entre la casse sociale, la « construction » européenne et la fascisation de la vie politique. En outre, dans la foulée du « Brexit », les militants du PRCF appelleront durant tout l’été à sortir la France de l’OTAN, fauteur de guerre contre la Russie, de l’euro, qui strangule le pouvoir d’achat populaire, et de l’UE supranationale du capital. Plus que jamais, l’heure est à construire un large Front de Résistance Antifasciste, Patriotique, Populaire et Ecologique (FRAPPE) pour le progrès social, l’indépendance nationale, la coopération internationale, la paix et une véritable démocratie centrée sur le monde du travail : une démocratie populaire et socialiste.

Plus que jamais, articulons nos luttes à une stratégie nouvelle, non pas d’« union de la gauche » en vue d’on ne sait quelle impossible « Europe sociale » au sein de l’UE dictatoriale, mais pour sortir la France de l’euro, de l’UE, de l’OTAN et du capitalisme, tout en tendant la main à l’Europe des luttes ouvrières en marche.

 

PRCF - @PRCF_ - www.initiative-communiste.fr

http://www.initiative-communiste.fr/articles/prcf/apres-nouveau-493-de-valls-medef-contre-regression-sociale-fascisation-leuro-dissolution-de-nation-resistance-continue-pendant-lete-saccentuera-enco/&nbsp ;

 

Source(s) : Initiative-communiste.fr via Agoravox.fr

Informations complémentaires :

 

 

Fouille sous-marine des ruines des anciennes bases navales du Pirée

Fouille sous-marine des ruines des anciennes bases navales du Pirée

En 2010, un pêcheur local a guidé un groupe d'archéologues vers son lieu de pêche préféré qu'il fréquentait lorsqu'il était enfant.

Il avait l'habitude de s'asseoir sur d'antiques colonnes dépassant furtivement de la mer dans la partie nord de Mounichia dans le Pirée. Ces colonnes faisaient partie des ruines d'une ancienne base navale remontant à 480 avant JC. 

Plongeur fouillant les restes d'un hangar à navire dans le port de Mounichia (Université de Copenhague)

Les anciennes bases navales grecques ont joué un rôle essentiel dans la défaite de l'Empire Perse au cours de la bataille historique de Salamine. Et, depuis 2010, de nombreuses découvertes autour de ces ruines ont été faites.

L'exploration du port en partie submergé a permis la mise au jour de hangars à navires. Le projet Zea Harbor se déroule à la fois sur les sites terrestres et sous-marins des anciens ports de Zea et Mounichia, juste au sud d'Athènes.

Dessin de l'un des hangars à bateaux athéniens construit dans les ports du Pirée (Université de Copenhague)

Au cours d'une interview, Bjørn Lovén, directeur du projet Zea Harbor, a rapporté que les découvertes des bases navales et des fortifications du Pirée sont si significatives historiquement qu'on peut comparer leur importance archéologique à celle de l'Acropole, du Parthénon ou de l'Agora d'Athènes.

"Nous avons identifié, pour la première fois, des bases navales au Pirée du 5ème siècle avant JC, comprenant des hangars à bateaux, des cales et les fortifications du port" rapporte Lovén.

Le projet n'est cependant pas sans difficultés car les eaux du port du Pirée sont très actives avec la circulation des navires qui entrent et sortent du port en permanence, ce qui rend les eaux fortement polluées.

Des points d'entrée et de sortie appropriés sont importants pour minimiser la quantité de temps passé à la surface par des plongeurs entièrement équipés. (Photo: Zea Harbour Project)

Les archéologues doivent ainsi porter des combinaisons étanches résistantes aux produits chimiques et des masques complets avec des valves à pression positive pour éviter les contacts avec l'eau.

Sources:

  • Vidéos:
Archéologues sous-marins explorant les anciens ports d'Athènes:




La Bataille de Salamine (45mn - National Geographic):

 



Derniers articles sur la Grèce:

Oubliez le Brexit, le vrai risque pour l’UE pourrait venir d’Italie… Par Romaric Godin

Oubliez le Brexit, le vrai risque pour l'UE pourrait venir d'Italie… Par Romaric Godin

Oubliez le Brexit, le vrai risque pour l’UE pourrait venir d’Italie…

Source : La Tribune, Romaric Godin,  

Matteo Renzi a fait un tel vide autour de lui au sein de son propre parti, le Parti démocratique, qu'il sera impossible de le remplacer par un autre homme à la présidence du Conseil. (Crédits : Reuters)

Matteo Renzi a fait un tel vide autour de lui au sein de son propre parti, le Parti démocratique, qu’il sera impossible de le remplacer par un autre homme à la présidence du Conseil. (Crédits : Reuters)

Matteo Renzi doit faire face à deux crises : le besoin de capitaux des banques et un référendum à haut risque en octobre sur ses réformes constitutionnelles. Sa position est très fragile sur les deux fronts qui sont un défi pour l’UE.

Le Brexit n’est peut-être pas le seul défi de grande ampleur auquel l’Union européenne va devoir faire face cette année. En octobre – la date exacte n’est pas encore fixée – les Italiens seront appelés aux urnes pour se prononcer par référendum sur la réforme constitutionnelle proposée par Matteo Renzi. Un vote crucial, car le président du Conseil en a fait un véritable vote de confiance de la population envers son action. C’est un point important, car il convient de rappeler que l’ancien maire de Florence est arrivé au pouvoir en décembre 2013 à la suite d’un « putsch » interne contre le chef de gouvernement d’alors, Enrico Letta. Matteo Renzi n’a jamais été « choisi » par les Italiens. En cas de défaite, il sera difficile pour l’hôte actuel du Palais Chigi, le Matignon italien de faire comme si de rien n’était.

Vers de nouvelles élections ?

Or, Matteo Renzi a fait un tel vide autour de lui au sein de son propre parti, le Parti démocratique, qu’il sera impossible de le remplacer par un autre homme à la présidence du Conseil. Dans ce cas, la dissolution du parlement devrait apparaître comme la seule issue possible. C’est d’ailleurs ce qu’il a indiqué : en cas de « non », il y aura de nouvelles élections législatives qui seront à très haut risque. Les derniers sondages révèlent ainsi que la formation eurosceptique du Mouvement 5 Etoiles (M5S), créée par Beppe Grillo, a pleinement profité de ses deux victoires fracassantes aux municipales de Rome et Turin. Pour la première fois, elle est ainsi donnée en tête des enquêtes avec plus de 30 %. Le sondage réalisé par EMG Acqua pour La7 lui donne 30,7 % des intentions de vote contre 30,2 % au Parti démocratique (PD) de Matteo Renzi. En cas de victoire aux législatives, le M5S risque de secouer l’Union européenne, notamment avec sa promesse de référendum sur le maintien du pays dans l’euro.

Le « non » en tête dans les sondages

Ce scénario est loin d’être impossible. Euromedia a réalisé un sondage sur le référendum constitutionnel. Il indique une forte proportion d’indécis (19,4 % ignorent ce qu’ils voteront ; 17,7 % ignorent s’ils iront voter), mais, pour le moment, le « non » au projet Renzi est en tête avec 54,1 % de ceux qui savent ce qu’ils voteront. Le « non » est en tête depuis la mi-avril et son avance semble se creuser à mesure que les indécis reculent. Bref, Matteo Renzi a de quoi trembler avant ce vote. Lui qui avait voulu faire de ce référendum un plébiscite sur son nom et sur son « action réformatrice » a sans doute, comme David Cameron au Royaume-Uni, un peu préjugé de ses forces. Les municipales de juin ont été un coup de semonce, le référendum pourrait être un coup de grâce.

Le projet de réforme constitutionnelle

Quel est le contenu de cette réforme constitutionnelle ? Elle est fort riche, mais elle tient en une ligne forte. Il s’agit de mettre fin au « bicamérisme parfait », autrement dit à l’égalité des deux chambres, la chambre des députés et le Sénat. Désormais, seule la première assemblée pourra renverser le gouvernement. Comme elle sera élue selon un  système électoral défini par une loi accordant la majorité soit au parti ayant plus de 40 % des voix au second tour, soit ayant gagné un second tour de ballottage, le gouvernement italien devrait être plus stable. Le Sénat sera réduit à une chambre composé de 100 membres (contre 351 aujourd’hui), principalement nommés par les conseils régionaux, et ne sera compétent que pour les réformes constitutionnelles et les lois territoriales.

Ce projet, qui consacre une certaine recentralisation du pouvoir (les compétences des régions sont réduites) a des raisons de mécontenter bien des Italiens, mais l’implication de Matteo Renzi dans la campagne a clairement fait basculer le projet lui-même au second rang. Or, le président du Conseil italien peine de plus en plus à rassembler en dehors de son propre camp qui, par ailleurs, se réduit comme peau de chagrin. C’est la leçon principale des élections municipales de juin : le PD a souffert de cette incapacité de réunir au deuxième tour des majorités. Du coup, dans le cadre d’un plébiscite sur le nom de Matteo Renzi, cette incapacité peut coûter fort cher.

Révolte interne au PD

L’atmosphère commence donc à devenir irrespirable au sein du PD où l’opposition interne à Matteo Renzi relève la tête. Son chef de file, Gianni Cuperlo, a estimé que « l’expérience du premier ministre a échoué ». Et de haranguer le président du conseil : « aujourd’hui, tu es vu comme un ennemi par une partie de la droite, et c’est bien ainsi, mais aussi par une partie de la gauche et, là c’est un drame. Sans changement de stratégie, la gauche va à la défaite ». Ceci est préoccupant pour Matteo Renzi à plus d’un titre. D’abord, parce que le parti, qu’il avait voulu discipliner commence à se diviser et ceci n’augure rien de bon pour la campagne référendaire. Ensuite, parce que, en cas de « non », un renversement de Matteo Renzi n’est pas à exclure. Déjà, ses adversaires évoquent le nom de Dario Franceschini, ministre de la Culture, et un des artisans du « putsch » de Matteo Renzi en 2013, comme éventuel successeur de ce dernier…

L’échec des « réformes »

L’hôte du palais Chigi, coqueluche d’une partie des « réformateurs » européens, est donc dans une position très difficile avec peu de marge de manœuvre. Car, malgré une activité législative intense et un sens inné de la communication, les Italiens ne voient pas d’amélioration notable de leur sort. L’économie italienne est fragile, sa croissance, déjà faible, semble encore s’affaiblir ces derniers mois. Le « Job Acts » tant vanté, jusqu’en France, par Matteo Renzi, a certes permis de réduire le taux de chômage, mais ce dernier demeure supérieur à 11,5 % de la population active, loin des niveaux d’avant-crise et alors même que la précarisation a encore progressé. Globalement, l’Italie reste en queue de peloton de la reprise et n’a pas vraiment profité de son entrée dans l’UE. Les Italiens semblent lassés du discours sur l’avenir radieux grâce aux « réformes », alors qu’ils font des « efforts » depuis cinq ans et que les résultats sont faibles. Le discours triomphant de Matteo Renzi se heurte à une réalité contraire et devient donc inopérant. A l’inverse, le discours de critique de l’Union européenne et de l’euro prend naturellement de l’ampleur.

Le nœud de la crise bancaire

L’ultime étape du drame italien pourrait évidemment être la crise bancaire dont est menacé le pays. Les banques italiennes sont grevées par 360 milliards d’euros de créances douteuses, fruits de la dure récession de 2011-2013 et de la faible reprise qui a suivi. Ceci conduit à un besoin de capitaux de l’ordre de 40 milliards d’euros. Or, nul ne veut prêter aux banques italiennes dans la mesure où ces besoins de capitaux pourraient augmenter en cas de nouveau ralentissement conjoncturel. La plupart des établissements de la Péninsule se dirigent donc vers une inévitable faillite (avec 20 % de pertes, une seule Unicredit serait encore solvable) et, selon les règles de résolution de l’union bancaire, créanciers, actionnaires et déposants seront mis à contribution. Mais en Italie, les créanciers des banques sont souvent des particuliers. En novembre, la restructuration de quatre petites banques avaient produit une levée de boucliers après le suicide d’un épargnant retraité. Matteo Renzi ne peut à aucun prix se lancer dans une telle opération, cela scellerait la fin de sa carrière politique.

La faible marge de manœuvre de Matteo Renzi

Aussi négocie-t-il le droit d’aider directement les banques par un soutien étatique, ce qui est désormais absolument prohibé en zone euro. Au niveau européen, et particulièrement en Allemagne, on refuse cette option qui réduirait à néant toute crédibilité d’une union bancaire déjà bien fragile. Surtout, une telle aide conduirait à une augmentation de la dette italienne, déjà à 132,7 % du PIB et conduirait à réclamer de nouvelles coupes budgétaires à l’Italie. Bref, Matteo Renzi ne dispose non seulement pas de réelles solutions, mais toutes les solutions qui se présentent semblent mauvaises et destinées à l’affaiblir. Car, sans assainissement du système bancaire italien, la croissance ne repartira pas, car la distribution de crédit restera toujours trop faible.

Dans ce labyrinthe, l’avenir politique de Matteo Renzi s’annonce très sombre. Pour reprendre la main, osera-t-il défier l’UE et l’Allemagne en imposant une recapitalisation étatique des banques en dépit des règles européennes ? Osera-t-il aussi, lors du conseil européen de septembre à Bratislava défendre contre Berlin une réforme de la zone euro allant vers davantage de solidarité ? Et cela suffira-t-il ? Rien n’est moins sûr.

Les deux crises à venir

En tout cas, dix jours après le Brexit, l’Italie est en passe de devenir un problème majeur pour l’Union européenne qui va devoir faire face à deux crises majeures qu’elle a contribué à former. La première a déjà commencé avec l’effondrement des titres bancaires en Bourse après le Brexit, c’est celle de l’union bancaire qui n’est depuis le début qu’une construction bancale, fruit d’un compromis laborieux avec l’Allemagne qui n’a jamais pris en compte la réalité italienne.

La deuxième crise à venir est celle de l’émergence d’un gouvernement eurosceptique en Italie, désormais clairement possible. Là encore, la violence du traitement de ce pays par l’Union européenne n’est pas étrangère à ce risque. Depuis le renversement du gouvernement Berlusconi en 2011 sous la pression de la BCE jusqu’aux politiques toujours renouvelées de « réformes » source d’une récession sévère et peu concluantes sous les applaudissements européens, l’UE a souvent joué le mauvais rôle pour les Italiens. Que l’on se souvienne de l’écart entre les louanges de Mario Monti avant les élections de février 2013 et le résultat du parti de ce président du conseil (8,30 %). Cette incompréhension devait déboucher sur une révolte à moins d’un changement de cap. Matteo Renzi a tenté une voie moyenne, mais il a échoué. Les Italiens sont donc désormais tentés par d’autres alternatives. Le Brexit pourrait donc n’être qu’un amuse-gueule, car l’Italie, troisième économie de la zone euro, est un gros morceau avec sa dette de 2.300 milliards d’euros…

Source : La Tribune, Romaric Godin,  

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Italie, la crise qui vient, par Jacques Sapir

Source : Russeurope, Jacques Sapir, 08-07-2016

La situation des banques italiennes est aujourd'hui critique. Le dossier de leur recapitalisation occupera une bonne partie de cet été. Il met en cause directement les règles de l'Union bancaire, qui est entrée en vigueur au 1er janvier 2016. L'impossibilité pour le gouvernement italien de respecter les règles de l'Union bancaire met en lumière les dysfonctionnements toujours plus importants de la zone Euro.

La part des prêts dits « non-performants » dans le bilan des banques atteint désormais près de 18%, d'après une étude du FMI[1]. En dehors de la Grèce, où ce taux atteint plus de 34%, c'est le taux le plus élevé de la zone Euro. Le Portugal suit d'ailleurs ce mouvement, mais à un niveau bien moindre, puisque le pourcentage des mauvaises dettes n'est « que » de 12%. En montant, on estime le volume total des encours à 360-400 milliards d'euros, dont 70 à 100 milliards devront être couverts, soit par l'Etat, soit par d'autres mécanismes.

Tableau 1

Part des prêts « non-performants » dans les bilans bancaires

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Il faut ici noter que le mouvement de la part des « mauvaises dettes » peut être lié à des causes très diverses. En Irlande et en Espagne, c'était une spéculation immobilière qui avait provoqué ce mouvement. Rien de tel dans le cas de l'Italie, et c'est ce qui rend la progression des mauvaises dettes bien plus inquiétantes. Ces dernières sont issues des prêts qui ont été consentis par les banques régionales italiennes aux PME de la péninsule. En réalité, c'est bien la stagnation économique de ces dernières années qui est la cause de cette crise bancaire qui arrive aujourd'hui en Italie.

L'évolution des données macroéconomiques de l'économie italienne montre l'ampleur de cette crise, et surtout montre que sa cause est clairement l'introduction de l'Euro. Si on calcule les évolutions de l'économie italienne depuis 1990, soit en prenant en compte la décennie ayant précédée l'introduction de l'Euro, les évolutions sont très marquées et très importantes.

Tableau 2

Evolution du PIB, de l'investissement et de l'épargne en Italie depuis 1990

 

Source : données du FMI, World Economic Report Database, avril 2016

Source : données du FMI, World Economic Report Database, avril 2016

La croissance du Produit Intérieur Brut, qui était relativement forte dans la décennie 1990-2000 est désastreuse dans les années qui suivent l'introduction de l'euro. L'Italie n'a d'ailleurs toujours pas retrouvé son niveau de PIB d'avant la crise de 2007. En fait, le PIB de 2015 se situe à un indice 116% par rapport à 1990 alors qu'il avait atteint l'indice 127% en 2007. Si l'Italie avait pu poursuivre sa croissance au rythme des années 1993-1999, elle serait, en 2015, à un indice 2015. Autrement dit, l'euro a coûté 34% en niveau de PIB en 2015. En PIB par habitant, ce qui constitue une grandeur plus conforme à l'évolution de la richesse de la population, et en supposant la répartition interne de cette même richesse inchangée, l'indice n'est que de 108% par rapport à 1990. Autrement dit, en 25 ans la croissance par tête n'a été que de 8%.

Mais, l'évolution de l'investissement (tant public que privé) est encore plus inquiétante. La chute brutale de l'investissement du début des années 1990, chute qui était nécessaire pour réduire l'ampleur du déficit budgétaire a été corrigée par la suite, et l'investissement est monté à un indice 125 en 2007. Mais, depuis, il n'a cessé de baisser et il est à un indice 87. Autrement dit, l'Italie investit 13% de moins en 2015 que ce qu'elle investissait en 1990. On ne doit alors pas s'étonner si la productivité du travail régresse dans ce pays et si la qualité des infrastructures publiques, qu'elles soient nationales ou municipales, se dégrade très rapidement à l'heure actuelle.

 

Cette situation de crise économique générale se traduit donc, dans les bilans bancaires, par la montée des « mauvaises dettes ». Mais, ici, se pose le problème des règles imposées par l'union bancaire. Cette dernière impose que les banques soient recapitalisées par leurs actionnaires et par les déposants. Mais, sont considérés comme actionnaires les ménages ayant acheté des titres de dettes de ces banques. Or, ces ménages ont acheté ces titres dans une situation ou le risque de faillite des banques était largement compensé par la possibilité d'un « bail-out » par l'Etat italien. Ces ménages sont, dans une large mesure des retraités et des personnes modestes. Ils sont maintenant pris au piège par les nouvelles règles de l'union bancaire qui imposent un « bail-in » autrement dit qui font porter l'essentiel du risque bancaire sur les actionnaires et les clients. Une première recapitalisation des banques, qui a eu lieu en novembre 2015, c'est traduite par une spoliation d'une partie de ces épargnant.

Le gouvernement italien, fragilisé par le résultat des dernières élections municipales du mois de juin 2016 – élections qui ont vu le succès du M5S à Rome et à Turin – n'a nullement envi de provoquer une crise sociale gravissime dans l'année qui vient. C'est pourquoi, il cherche à imposer aux autorités européennes un « bail-out », c'est-à-dire une socialisation des pertes. Mais, sur ce point, il se heurte au refus de l'Allemagne. Ce refus n'est pas seulement dicté par des considérations financières, mais surtout parce qu'il signifierait l'échec de l'union bancaire, et ce moins d'un an après son entrée en vigueur. Dans le bras de fer qui oppose le gouvernement italien et le gouvernement allemand, il n'y aura que des perdants.

Si l'Allemagne impose sa vision, le choc social de la crise bancaire mettra l'Italie à feu et à sang, et provoquera un effondrement des partis traditionnels (PD de centre gauche et Forza Italia de centre droit) qui sont de plus rattrapé par de nombreux cas de collusion et de corruption avec les dirigeants des banques. Si le gouvernement italien passe outre à l'opposition allemande et se décide à opter pour un « bail-out », l'ampleur des sommes à engager (au minimum 70 milliards d'euros, soit 4,4% du PIB) entraînera une hausse brutale du déficit budgétaire et réduira à zéro la crédibilité des institutions de la zone Euro.

Tableau 3

Etat des finances publiques en Italie

Souce : Idem, tableau 2.

Souce : Idem, tableau 2.

La crise bancaire italienne occupera certainement une bonne partie de l'été et de l'automne. Or, il faut savoir que cette crise va se dérouler alors que la situation de la Deutsch Bank en Allemagne est des plus préoccupante, et que les recettes budgétaires de la Grèce sont en voie d'effondrement, avec en particulier une chute moyenne de 20% des recettes de la TVA, en raison de la « grève de l'impôt » qui se développe désormais dans ce pays.

Tout se paye, un jour ou l'autre. Ayant refusé le principe de solidarité dans la zone Euro l'Allemagne a imposé sa vision des règles ; mais, elle se rend compte aujourd'hui que cette vision est intenable pour les pays de l'Europe du Sud. Elle est donc coincée entre la poursuite suicidaire d'une politique qui ne marche pas et la reconnaissance de ses erreurs passées. Ce qui rend le problème d'autant plus grave est que le poids de l'Italie est bien plus considérable que celui de la Grèce. Tout le monde comprend qu'une sortie de l'Italie de l'Euro sera l'acte de décès de la monnaie unique. La crise grec de l'été 2015 n'a été que le hors d'œuvre ; la crise italienne sera LA crise de la zone Euro.

[1] IMF Financial Soundness Indicators Database

Source : Russeurope, Jacques Sapir, 08-07-2016

Hillary Clinton, un faucon ? Par Michael Brenner

Hillary Clinton, un faucon ? Par Michael Brenner

Source : Consortiumnews.com, le 17/06/2016

Le 17 juin 2016

Les faucons du département d’État et les néoconservateurs en poste à Washington ont très envie qu’Hillary soit présidente. Ils espèrent ainsi pouvoir déployer plus librement les forces américaines autour du monde, mais, selon Michael Brenner, l’avenir n’est peut-être pas si simple.

Par Michael Brenner

Hillary est-elle une va-t-en-guerre ? Eh bien, ses antécédents nous montrent que c’est certainement un faucon, quelqu’un qui croit fortement à l’utilité des forces armées et qui est prête à les utiliser.

De nombreux éléments pourraient donc nous faire pencher pour une réponse affirmative. Son action en tant que secrétaire d’État tout comme ses discours et ses déclarations de candidate donnent l’image d’une présidente présomptive qui voit dans le monde une menace inquiétante, qui est persuadée que, sur le globe tout entier, on s’en prend aux intérêts américains fondamentaux, qui préconise, avec conviction, l’intervention préventive comme en Syrie et en Libye aussi bien que l’intervention préemptive et défensive, qui tient énormément à garder des rivaux présumés comme la Chine ou la Russie dans une position de subordonné.

La candidate démocrate à la présidence, Hillary Clinton.

La candidate démocrate à la présidence, Hillary Clinton.

Toutes ces attitudes la distinguent très nettement de Barack Obama. Et en effet, au début de sa campagne, elle s’obstinait à critiquer la Maison-Blanche pour sa politique ouvertement modérée vis à vis de Bachar el-Assad, Vladimir Poutine et Xi Jinping. Et elle n’a changé de discours que lorsqu’en face des succès inattendus de Sanders, il est devenu évident qu’elle devait avaliser le bilan du président.

Les critiques spécifiques qu’adressent à Hillary Rodham Clinton (HRC) ceux qui la trouvent trop va-t-en-guerre sont bien connues. Ainsi elle a voté en faveur de la guerre en Irak, elle a soutenu avec enthousiasme la Guerre mondiale contre le Terrorisme sous toutes ses facettes, elle a collaboré avec le groupe mené par Robert Gates pour pousser le président à intensifier l’escalade en Afghanistan, elle a préconisé une action directe en Libye pour renverser Mouammar Kadhafi et en Syrie pour détrôner Assad, elle s’est montrée acharnée dans sa volonté de confiner l’Iran, même après l’accord nucléaire, elle a traité Poutine de « Hitler » après la prise de la Crimée par la Russie.

Dans son important discours sur la politique étrangère prononcé devant le Conseil des relations étrangères, elle donne encore l’impression d’être une jusqu’au-boutiste radicale surtout en ce qui concerne l’équilibre des forces. En outre, son soutien sans nuances au Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou ne laisse aucune place aux réalistes, qui eux s’inquiètent de voir les États-Unis s’infliger un préjudice inutile en appuyant sans réserve tout ce que fait Israël.

Louée par les néoconservateurs

Ce n’est pas un hasard si Robert Kagan et d’autres sommités néoconservatrices la couvrent de louanges, eux qui la voient comme une présidente acquise à leur conception audacieuse et virile de la politique étrangère américaine. Un certain nombre de personnes qui ont travaillé avec Hillary Clinton au secrétariat d’État et/ou sont maintenant ses principaux conseillers font partie de ce regroupement de néoconservateurs et d’interventionnistes libéraux très zélés, qui ont très fortement incité à l’intervention en Libye, comme Samantha Power, Ann-Marie Slaughter et Susan Rice, et qui maintenant poussent à aider les Saoudiens et le Conseil de coopération du Golfe au Yémen et à attaquer la Syrie.

L'intellectuel conservateur Robert Kagan. (Photo credit: Mariusz Kubik, http://www.mariuszkubik.pl)

L’intellectuel conservateur Robert Kagan. (Photo credit: Mariusz Kubik, http://www.mariuszkubik.pl)

L’exemple le plus frappant, c’est Victoria Nuland, la porte-parole d’Hillary Clinton au secrétariat d’État, maintenant secrétaire adjointe d’État pour l’Europe, qui a mené avec beaucoup d’enthousiasme la croisade anti russe. Elle avait été auparavant la vice-conseillère en politique étrangère du vice-président Dick Cheney.

Victoria Nuland a été introduite dans l’administration Obama par Strobe Talbot qui l’avait sous ses ordres à l’Institut Brookings et dont elle était la protégée. Talbot lui-même, qui avait été vice-secrétaire d’État pendant le second mandat de Bill Clinton, avait, peu à peu, rejoint la ligne la plus belliqueuse de l’establishment de la politique étrangère. L’affiliation à Brookings d’un important néoconservateur comme Robert Kagan, le mari de Victoria Nuland, peut avoir aidé à ratifier l’accord.

Certains des défenseurs d’Hillary Clinton soutiennent qu’il faut considérer ses vues va-t-en-guerre dans un contexte politique. Ses ambitions présidentielles, expliquent-ils, l’ont forcée à trouver une façon de surmonter ses handicaps au sujet de la sécurité nationale en tant que présumée libérale. En effet, d’abord elle est censée faire partie de la dynastie Clinton qui encourageait à bâtir des ponts de coopération en politique étrangère, c’est, du moins, la façon dont cela était perçu par ses critiques républicains, et ensuite c’est une femme.

Ella a été obligée d’agir ainsi après le 11-Septembre. Ainsi l’a-t-on vue se démener en choisissant son camp lors des votes ou en prononçant des discours pour avoir l’air d’un faucon. C’est là aussi la raison de son amitié très médiatisée avec John McCain, qui s’est affichée lors des voyages tous frais payés des sénateurs dans des endroits exotiques aux noms étranges où, comme le rapportent les journalistes, elle s’est montrée l’égale de son mâle collègue en sifflant de nombreuses vodkas.

On doit garder à l’esprit que la politique étrangère n’a jamais beaucoup intéressé Hillary Clinton. Et très certainement pas la sécurité nationale. Ce qui l’intéressait, c’étaient les problèmes intérieurs qu’elle connaissait bien. Elle ne s’est penchée sur les questions de politique étrangère qu’en 2008 lorsqu’elle a décidé de se présenter à la primaire démocrate.

Conviction ou pragmatisme ?

On peut raisonnablement inférer que ce qui a commencé comme un exercice de pragmatisme politique s’est transformé en vraie conviction. Aucun élément ne vient attester qu’HRC ait élaboré une stratégie exhaustive sur le rôle des États-Unis dans le monde, encore moins une théorie sur ce que doivent être les affaires internationales.

La secrétaire d'État adjointe pour les affaires européennes et eurasiennes, Victoria Nuland, pendant une conférence de presse à l'ambassade de Kiev en Ukraine, le 7 février 2014. (U.S. State Department photo)

La secrétaire d’État adjointe pour les affaires européennes et eurasiennes, Victoria Nuland, pendant une conférence de presse à l’ambassade de Kiev en Ukraine, le 7 février 2014. (U.S. State Department photo)

En même temps, cependant, il y a de fortes raisons de croire que la dureté de ses discours et de ses propositions politiques expriment, effectivement, ses opinions, aussi nébuleuses soient elles. Ses quelques propositions concrètes sont mal conçues et irréalistes, comme, par exemple, l’idée de mettre en œuvre « une zone de sécurité » dans le nord de la Syrie. Tout ce à quoi cette mesure aboutirait serait de créer une base protégée pour al-Qaïda et al-Nosra et leurs associés salafistes, tout en comportant le risque élevé d’un clash avec les forces russes qui opèrent dans cette zone.

Est-ce que cela signifie qu’après son élection, Hillary Clinton aurait l’intention de déployer des troupes en Syrie ? Qu’on intensifierait les efforts contre l’EI ? Qu’on enverrait en Libye des forces conduites par les Américains ? Qu’on provoquerait toujours plus la Russie en Europe de l’est, en invitant, par exemple, l’Ukraine à rejoindre l’OTAN comme le lui avait déjà proposé George W. Bush ?

Il est un peu tôt pour répondre à ces questions par l’affirmative. Les discours chauvinistes, ce n’est pas difficile de les tenir quand on n’est pas au pouvoir. Quand on est celui qui doit prendre les décisions à propos des déploiements de l’armée et s’attendre à en gérer les conséquences imprévisibles, alors là on agit toujours avec une certaine prudence.

Il est plus probable qu’Hillary Clinton ait à faire face à une guerre qu’elle n’avait pas prévue plutôt qu’elle ne se mette à en engager une de façon calculée, et ce pour un certain nombre de raisons. D’abord, il n’y a pas d’endroits où intervenir massivement avec des troupes au sol, pas d’Irak bien tentant, comme en 2003. L’Iran est en haut de la liste des priorités des néoconservateurs, mais avec l’accord nucléaire, il n’y a plus de justification. L’Irak, de nouveau, et la Syrie sont aussi des candidats théoriques. Qui, cependant, est l’ennemi et quel serait la cible d’une telle intervention ?

L’EI, évidemment, mais maintenant il est confiné et perd de plus en plus d’influence. Des troupes américaines au sol amèneraient simplement une guérilla dont on ne verrait pas la fin. Quant à al-Qaïda et al-Nosra en Syrie, on ne les considère pas comme des ennemis, mais bien plutôt comme des alliés tacites à l’intérieur du camp « modéré ».

Il y a Assad. Avec des troupes russes au sol, cependant, et sans consensus occidental ou sans perspective de permettre la mise en œuvre d’une résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies, une invasion pour remplacer le parti Baas par des salafistes de l’EI ou/et al-Qaïda n’aurait pas de sens, même avec l’agitation des Kagan et de Samantha Power. En outre, c’est une tâche dont, contrairement à la CIA, ne veulent pas les pontes du Pentagone. Après tout, beaucoup de sang a été versé et beaucoup d’argent a été dépensé pour immuniser l’Afghanistan contre une présence terroriste beaucoup moins importante que celle qui règne maintenant en Syrie — et pour rien du tout !

La Libye est le seul endroit où l’on pourrait envoyer des troupes en nombre important. L’argumentation pour agir ainsi nous ramènerait à un Afghanistan bis. Pourtant, en l’absence d’un événement comme le 11-Septembre, il serait difficile de faire accepter une telle décision au peuple américain.

Les risques de guerre par erreur de calcul sont plus élevés. Barack Obama lègue à son successeur un pays bloqué dans un champ de mines au Moyen-Orient, sans ami ni GPS diplomatiques. Hillary, bien sûr, porte une grande part de responsabilité dans la création de cette topographie incertaine et pour la prédominance d’habitudes hyperactives dans la politique américaine, une combinaison qui peut s’avérer fatale.

D’abord, maintenir un état de tension élevée avec l’Iran peut favoriser des incidents dans le Golfe persique. En outre, les troupes américaines et iraniennes se mêlent en Irak comme l’eau et l’huile. Il n’est donc pas tout à fait exclu qu’on voie des incidents relativement mineurs dégénérer en des combats sérieux, attisés par les fanatiques des deux côtés.

Jouer avec les allumettes en Ukraine

C’est en Ukraine que se situe l’autre foyer de conflit. Là, la belle histoire de la Russie méchant agresseur qui veut à tout prix récupérer son empire d’Europe de l’est a conduit, de la part de Washington, via l’OTAN, à une série de décisions militaires provocatrices, qui sont en train de susciter une nouvelle Guerre froide. La force des ultra-nationalistes de Kiev, encouragés par leurs soutiens dans l’administration Obama et la farouche rhétorique des commandants militaires américains, ont empêché une résolution du conflit en Ukraine de l’est grâce à l’accord Minsk II.

Le président russe Vladimir Poutine s'adresse à la foule le 9 mai 2014, lors de la célébration du 69ème anniversaire de la victoire sur l'Allemagne nazie et le 70ème anniversaire de la libération du port criméen de Sébastopol tenu par les nazis. (Photo du gouvernement russe)

Le président russe Vladimir Poutine s’adresse à la foule le 9 mai 2014, lors de la célébration du 69ème anniversaire de la victoire sur l’Allemagne nazie et le 70ème anniversaire de la libération du port criméen de Sébastopol tenu par les nazis. (Photo du gouvernement russe)

La paranoïa déferle sur les États baltes et la Pologne, de nouveau avec la connivence active du « parti de la guerre » de Washington dont Hillary Clinton est un membre fondateur. Même si l’on peut être certain qu’elle n’a pas réfléchi aux implications de cette décision et, en passant, qu’on peut être rassuré par la retenue de Poutine, le manque de prudence qui se manifeste là rend cette situation infiniment dangereuse.

Puis, il y a le facteur Bill. C’est le joker du jeu de cartes. On sait qu’Hillary a l’habitude de le consulter sur toutes les questions d’importance. Il est son confident polyvalent. Il va de soi qu’il sera une sorte d’éminence grise à la Maison-Blanche. Alors la question principale est de savoir quel rôle il va jouer et quels conseils il va donner. Il y a de bonnes raisons pour croire qu’il va tempérer les tendances va-t-en-guerre de sa femme.

Après tout, ce dont Bill Clinton a plus envie que tout à ce moment de sa vie, c’est de retourner à la Maison-Blanche où il pourra déambuler à loisir et murmurer à l’oreille de sa femme. Il savoure cette position unique dans l’histoire, il savoure le fait d’être l’objet de l’attention. C’est le statut qui compte, pas ce que l’on fait.

En tout cas, il a quelques convictions au sujet des problèmes de politique étrangère les plus importants. Ainsi son instinct lui dira d’éviter les coups de téléphone à 3 heures du matin, les crises graves et les risques qu’elles comportent. Les actes aventureux qui exigent du courage et de la force d’âme n’ont jamais été son point fort. Comme Barack Obama, ce n’est pas un héros.

Nous devrions en être reconnaissants.

Source : Consortiumnews.com, le 17/06/2016

Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.