mercredi 3 février 2016

Vers la paix en Syrie, sans l’opposition armée

Vers la paix en Syrie, sans l'opposition armée

Les négociations prévues par le Conseil de sécurité des Nations unies pour résoudre le conflit syrien devraient commencer à Genève aujourd'hui, 1er février 2016, avec une semaine de retard. Contrairement à ce qu'espéraient les néoconservateurs et les faucons libéraux au début de la guerre, il ne s'agira pas d'acter la capitulation de la République arabe syrienne et de la remplacer par un « Organe de transition » dominé par les Frères musulmans, mais de négocier un cessez-le-feu, puis d'organiser la rédaction d'une nouvelle constitution et d'élections ouvertes à tous.

Les Nations unies discréditées

Premièrement, le principe même des négociations sous patronage de l'Onu a été mis en cause dès la publication d'informations sur le rôle secret —depuis 2005— du secrétaire général adjoint, Jeffrey Feltman, et de son expert, l'universitaire allemand Volker Perthes [1]. Il apparaît en effet que les Nations unies ne sont pas une partie neutre, mais participent au conflit. Ce sont les Nations unies qui ont organisé la Commission Mehlis et le Tribunal spécial pour le Liban, chargés d'accuser, de juger et de condamner les présidents Émile Lahoud et Bachar el-Assad pour l'assassinat de l'ancien Premier ministre Rafic Hariri. Ce sont les Nations unies qui ont rémunéré de faux témoins, créé un Tribunal sans le faire approuver ni par le Gouvernement, ni par le Parlement libanais, puis refusé de rendre leur rapport sur la reconstitution de l'assassinat. Ce sont à nouveau les Nations unies qui ont rédigé, en juillet 2012, le plan Perthes-Feltman de capitulation totale et inconditionnelle de la République arabe syrienne, puis fait traîner les négociations dans l'espoir d'une indiscutable victoire des jihadistes.

Le fait que la Russie et les États-Unis aient choisi de ne pas divulguer le plan Perthes-Feltman, mais qu'ils n'aient pas réussi pour autant à contenir l'action belliqueuse du secrétariat général des Nations unies, a d'une part sauvé l'institution onusienne d'une crise existentielle, mais lui a aussi fait perdre toute crédibilité, au moins dans le dossier syrien.

De facto, les opposants à la République arabe syrienne savent que les organisateurs onusiens sont désormais pour eux des alliés inutiles car sous pression de la Russie et des États-Unis. À l'inverse, la délégation syrienne se garde toujours la possibilité de refuser un accord qui lui serait imposé au motif des actions secrètes préalables des organisateurs onusiens.

C'est pourquoi, Genève 3 apparait désormais non plus comme une initiative de l'Onu, mais comme un arrangement états-uno-russe.

Les nouveaux leaders de l'opposition se sont marginalisés

Deuxièmement, les États-Unis, qui souhaitaient jusqu'ici soit détruire la République arabe syrienne, soit au minimum lui imposer un compromis, n'y ont plus intérêt. Comme l'avait analysé la Rand Corporation, il y a un an déjà, tout autre gouvernement que l'actuel serait pire aussi bien pour Moscou que pour Washington.

En effet, au début de la guerre, l'opposition était représentée par des intellectuels que la CIA avait corrompus au cours des années précédentes et par les Frères musulmans qui travaillaient pour Langley depuis au moins 1953. Ce n'est plus le cas aujourd'hui. Les intellectuels, qui avaient la capacité de gouverner, ont dû laisser la place à des chefs de guerre recrutés et financés par l'Arabie saoudite. Or, le royaume saoudien est un régime tribal qui n'accepte que les liens de suzeraineté-vassalité tribaux. Il a donc choisi ces chefs de guerre en fonction de leur appartenance ou de leur origine tribale. Au bout de plusieurs années, même ceux qui proviennent de familles urbaines ont retrouvé des comportements tribaux. Ce faisant, ils ne peuvent plus représenter que les nomades du désert syro-saoudien. Quant aux Frères musulmans, ils ne sont pas parvenus à garder le pouvoir en Tunisie et en Égypte. Par conséquent, ils ne sont plus considérés par Washington comme aptes à gouverner un pays.

La nomination à Riyad d'un président et d'un porte-parole du Comité des négociations, choisis parmi les anciens ministres baasistes n'est pas parvenue à masquer la réalité des chefs de guerre.

C'est d'ailleurs une leçon de cette guerre : l'alliance contre-nature des Occidentaux avec les Séoud est arrivée dans une impasse. Ce qui était tolérable pour les Séoud chez eux, ne l'est pas à l'étranger. L'expansion du wahhabisme pose aujourd'hui problème aux Européens sur leur sol, celui du tribalisme au Proche-Orient serait une catastrophe pour tous, car il signifierait une « somalisation » de la région. C'était certes l'objectif des Straussiens, mais ce n'est plus celui du président Obama. On ne soulignera jamais assez l'incompatibilité des États modernes avec les sociétés tribales, ce qui a d'ailleurs conduit tous les États modernes à sédentariser leur population.

Damas peut-il parvenir à la réconciliation sans Genève 3 ?

Troisièmement, la République arabe syrienne qui était contrainte à négocier en 2012 pour survivre, ne l'est plus aujourd'hui. Partout sur le terrain, sauf au Nord-Est, l'Armée arabe syrienne reconquiert le territoire qu'elle avait perdu. Elle ne se rend à Genève que parce qu'elle est convaincue de la nécessité de se réconcilier avec les 10 % de sa population qui ont soutenu les Frères musulmans.

Considérant l'absence de délégation de l'opposition toute la semaine dernière, Damas s'est à nouveau interrogé sur ses autres options. Il n'a pas eu besoin des Grandes puissances pour conclure localement des accords de réconciliation et pourrait probablement y parvenir aussi au plan national si l'opposition admettait renoncer à « renverser le régime ».

En conclusion, les négociations de Genève ne peuvent qu'aboutir à l'intégration de factions de l'opposition au sein d'un gouvernement d'union nationale. Or, ceci reste impossible compte tenu des positions des sponsors de cette opposition (Arabie saoudite, Turquie et Qatar). Dans leur format actuel, rien ne peut donc sortir de ces soliloques.

À retenir :
- L'équipe des négociateurs des Nations unies (Jeffrey Feltman, Staffan De Mistura et Volker Perthes) a perdu son apparence de neutralité depuis la révélation de son engagement secret contre la République arabe syrienne.
- L'opposition sponsorisée par l'Arabie saoudite, malgré deux figures de façade, est désormais uniquement composée de chefs de guerre issus des tribus syro-saoudiennes, ce qui l'empêche de prétendre représenter l'ensemble des Syriens.
- La Syrie n'a plus besoin des Grandes puissances pour parvenir à la réconciliation nationale.



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A l’UNESCO le Qatar sponsorise un colloque sur la liberté de la presse.

A l'UNESCO le Qatar sponsorise un colloque sur la liberté de la presse.

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L’Occident en est réduit à se piller lui-même

L'Occident en est réduit à se piller lui-même

Michael Hudson, John Perkins et moi-même ainsi que quelques autres avons rapporté le pillage multi facettes des peuples par les institutions économiques occidentales, principalement les grandes banques de New York avec l'aide de FMI.

Les pays du tiers monde ont été et sont toujours pillés en étant incités et forcés à suivre des plans de développement pour l'électrification ou autres objectifs. Les gouvernements de ces pays, naïfs et confiants, sont endoctrinés à croire qu'ils peuvent faire de leurs pays des nations riches en prenant les prêts bancaires présentés pour mettre en place les plans de développement préparés par l'occident, ayant pour résultat de suffisants revenus fiscaux du développement économique pour rembourser les emprunts étrangers.

Cela bien sûr n'arrive jamais ou pratiquement jamais. Ce qu'il se passe est que le plan a pour résultat que le pays devient endetté bien au-delà de ses revenus en devises étrangères et lorsque le pays ne peut plus honorer le remboursement de sa dette pour développement. Les créditeurs envoient alors le FMI dire au gouvernement endetté que le FMI protégera son crédit en lui prêtant de l'argent pour rembourser ses banquiers créditeurs. Mais les conditions font que ce gouvernement prenne les mesures d'austérité nécessaires de façon à ce qu'il puisse aussi rembourser le FMI. Ces mesures d'austérité doivent museler les dépenses des services publics et du secteur gouvernemental, réduire les retraites publiques, et vendre les ressources nationales aux étrangers acheteurs. L'argent économisé en réduisant les fonds sociaux et récolté en vendant les biens nationaux à des étrangers sert à rembourser le FMI. (NdT: exemples typiques, l'Argentine et en Europe bien sûr la Grèce…).

Ceci est la manière dont l'occident a historiquement pillé les pays du tiers monde. Si un président de pays est hésitant à entrer dans une telle plateforme économico-financière, il est simplement acheté, comme le fut le gouvernement grec, afin qu'ils suivent le schéma du pillage du pays que ce président/gouvernement est censé et prétend représenter.

Lorsque cette méthode de pillage s'est épuisée, l'occident acheta les terres arables et poussa une politique sur les pays du tiers monde pour qu'ils abandonnent l'auto-suffisance alimentaire et produisent une ou deux récoltes pour gains à l'exportation. Ceci rend les populations du tiers monde dépendantes des importations de nourriture de l'occident. Typiquement les revenus d'exportation sont pompés par les gouvernements corrompus ou par des acheteurs étrangers qui paient peu alors que les étrangers vendant la nourriture chargent bien plus. Ainsi, l'auto-suffisance est transformée en dette.

Avec la totalité du tiers monde maintenant exploité jusqu'à la limite du possible, l'occident a retourné le pillage sur lui-même. L'Irlande a été pillée et le pillage de la Grèce et du Portugal est si sévère qu'il a forcé un grand nombre de jeunes femmes à la prostitution. Ceci ne dérange en rien la conscience occidentale.

Auparavant, lorsqu'un pays souverain se retrouvait plus endetté qu'il ne pouvait payer, ses créditeurs devaient rajuster le montant de la dette sur ce que le pays pouvait payer. Au XXIème siècle, comme je l'explique dans mon livre The Failure of Laissez Faire Capitalism, cette règle traditionnelle a été abandonnée.

La nouvelle règle est que le peuple d'un pays, même un pays dont les dirigeants ont accepté des pots-de-vin afin de permettre l'endettement de leur pays envers l'étranger, doit avoir ses retraites, l'emploi, et les services sociaux laminés ainsi que les ressources de valeur de la nation telles que les systèmes de distribution des eaux municipales, les ports, la loterie nationale et les parcs nationaux, comme les îles grecques protégées, vendues aux étrangers, qui ont ainsi toute la liberté d'augmenter les prix de l'eau et des services, refuser au gouvernement grec par exemple les revenus de sa loterie nationale, et vendre l'héritage national protégé de la Grèce à des requins du foncier.

Ce qu'il s'est produit en Grèce et au Portugal est en cours de réalisation en Espagne et en Italie.

Les peuples sont impuissants parce que leurs gouvernements ne les représentent aucunement. Non seulement ceux-ci sont corrompus et arrosés de pots-de-vin, mais les membres des gouvernements sont endoctrinés pour maintenir leurs pays au sein de l'Union Européenne. Autrement, ils sont dépassés par l'histoire. Les peuples opprimés et qui souffrent sont eux-mêmes endoctrinés de la même manière. Par exemple en Grèce, le gouvernement élu pour empêcher le pillage du pays a été impuissant, parce que le peuple grec a subi un lavage de cerveau leur disant que quoi qu'il arrive, il devait rester dans l'UE.

La combinaison de la propagande, du pouvoir financier, de la stupidité et des pots-de-vin veut dire qu'il n'y a aucun espoir pour les peuples européens.

La même chose vaut pour les Etats-Unis, le Canada, l'Australie et le Royaume-Uni. Aux Etats-Unis des dizaines de millions de citoyens ont tranquillement acceptés l'absence de quelque intérêt que ce soit sur les revenus de leurs économies pendant maintenant plus de sept ans. Au lieu de poser des questions et de protester, les Américains ont accepté sans restriction la propagande avancée que leur existence dépend du succès d'une poignée de méga-banques artificiellement crées qui sont "trop grosses pour échouer". Des millions d'Américains sont convaincus qu'il est mieux pour eux que leurs économies soient dévalorisées plutôt qu'une ou plusieurs banques corrompues passent à la trappe.

Pour maintenir les peuples occidentaux dans la confusion au sujet de la véritable menace à laquelle ils font face, les peuples sont convaincus à grand renfort de propagande qu'il y a un terroriste derrière chaque arbre, chaque passeport, sous chaque lit et que tout le monde sera tué à moins que le pouvoir excessif du gouvernement ne soit pas questionné. 

Jusqu'ici tout cela a fonctionné parfaitement, avec une attaque fausse-bannière après l'autre renforçant les fausses attaques terroristes qui servent à empêcher toute prise de conscience que tout cela n'est qu'une vaste escroquerie pour en fait accumuler toute la richesse dans le plus petit nombre de mains.

Non content de sa suprématie sur les "peuples démocratiques", le 1% avance d'autres pions avec ses "traités" Trans-Antlantique et Trans-Pacifique. Ceux-ci sont supposés être des "accords de libre-échange" qui bénéficieront à tout le monde. En vérité, ce sont des accords secrets, particulièrement bien gardés qui donnent le contrôle des lois des gouvernements souverains aux entreprises privées.

Il est par exemple venu au grand jour que sous le partenariat trans-atlantique, la sécurité sociale britannique serait gérée depuis des tribunaux privés mis en place sous le partenariat comme un obstacle à l'assurance médicale privée et attaqué en justice pour dommages et intérêts par des firmes privées et même, à terme, être forcée à disparaître.

Le gouvernement britannique totalement corrompu géré par le vassal de Washington David Cameron a bloqué tout accès aux documents légaux qui montrent l'impact qu'aura le traité trans-atlantique sur la sécurité sociale britannique.

Pour ceux des citoyens des pays occidentaux qui sont assez stupides ou endoctrinés pour ne pas avoir encore compris, la poussée actuelle de "leur" gouvernement et de sa politique est d'offrir chaque aspect de leur vie à des intérêts privés prédateurs.

Au Royaume-Uni, la poste a été vendue pour un prix des plus modiques à des intérêts privés connectés. Aux Etats-Unis, les républicains et peut-être les démocrates, ont l'intention de privatiser le Medicare (assurance maladie) et la sécurité sociale, tout comme ils ont privatisé bien des aspects des systèmes militaire et carcéral. Les fonctions publiques sont des cibles privilégiées pour faire des bénéfices.

Une des raisons pour l'escalade des prix sur le budget militaire US est sa privatisation. La privatisation du système carcéral américain a résulté en un énorme nombre de personnes innocentes qui ont été incarcérées où elles sont forcées de travailler pour Apple, IT services, des compagnies de textiles et d'habillement qui produisent pour l'armée américaine et un tas d'autres entreprises privées. Les ouvriers prisonniers sont payés 69 cents de l'heure, bien plus bas que le salaire d'un ouvrier chinois.

C'est çà l'Amérique aujourd'hui: une police corrompue, des procureurs corrompus, des juges corrompus, mais un maximum de bénéfices pour le capitalisme made in USA avec ce travail très bon marché carcéral. Les économistes têtes pensantes du libre-marché glorifient les prisons privées, affirmant qu'elles seraient plus efficaces et elles le sont de fait… à fournir un travail d'esclave aux capitalistes.

Voila l'info sur le premier ministre David Cameron niant l'information au sujet de l'effet du traité de partenariat trans-atlantique sur la santé nationale britannique.

Le quotidien du Guardian de Londres, qui doit souvent se prostituer pour essayer de maintenir un minimum d'indépendance, décrit la colère que ressentent les britanniques envers le secret gardé par le gouvernement au sujet d'un problème si fondamental au bien-être des Britanniques et pourtant ceux-ci continuent de voter pour les partis politiques qui les ont trahi et les trahissent.

Partout en Europe les gouvernements, corrompus contrôlés par Washington, ont distrait leur peuple, l'ont trahi en focalisant l'attention sur l'affaire des immigrants, dont la présence est une conséquence directe des gouvernements européens représentant les intérêts de Washington et non pas les intérêts de leurs peuples.

Quelque chose de grave s'est produit contre l'intelligence et l'attention des peuples occidentaux qui semblent ne plus être capables de comprendre les machinations de "leurs" gouvernements.

Une pratique de gouvernement responsable en occident est finie. Rien d'autre que l'échec et l'effondrement attend la civilisation occidentale.

Paul Craig Roberts

Article original:

The West Is Reduced To Looting Itself

Traduit de l'anglais par Résistance 71

Source: http://eurasie.ru/archives/8426




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